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Titre : La Tension artérielle en clinique, sa mesure, sa valeur séméiologique, par le Dr L. Gallavardin,... 2e édition...
Auteur : Gallavardin, Louis (1875-1957). Auteur du texte
Date d'édition : 1920
Sujet : Maladies vasculaires
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32140953q
Type : monographie imprimée
Langue : français
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Description : Contient une table des matières
Description : Avec mode texte
Droits : Consultable en ligne
Droits : Public domain
Identifiant : ark:/12148/bpt6k5499774z
Source : Bibliothèque nationale de France, département Sciences et techniques, 8-TD102-266 (A)
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 28/09/2009
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DR L. GALLAVARD1N
LA TENSlON ARTÉRIELLE
EN CLINIQUE
S A MESURE SA VALEUR SEMÉIOLOGIQUE
DEUXIÈME É D ITI ON 200 FIGURES
MAS SON & Cie
:: :::' :: ÉDITEURS :: :: ::
LA
TENSION ARTÉRIELLE
EN CLINIQUE
SA MESURE, SA VALEUR SÉMÉIOLOGIQUE
Lyon. - Imprimerie A. REY, 4, rue Gentil. - 78080
LA
TENSION ARTERIELLE
EN CLINIQUE
SA MESURE, SA VALEUR SÉMÉIOLOGIQUE
PAR LE
DR L. GALLAVARDIN
MÉDECIN CES HÔPITAUX DE LYON
DEUXIÈME ÉDITION 200 FIGURES
PARIS
MASSON & Cie, ÉDITEURS
120, BOULEVARD SAINT-GERMAIN, 120 1920
PREFACE DE LA PREMIÈRE ÉDITION
Les auteurs qui, dans ces trente dernières années, se sont occupés de la mesure ou de la valeur séméiologique de la tension artérielle ont obéi — consciemment ou inconsciemment — à la même tendance qui se manifestait simultanément dans toutes les branches de la pathologie, et. qui consiste à substituer à la recherche de l'état anatomique de Forgane considéré l'appréciation de son état fonctionnel. Il est bien de connaître l'état du coeur, d'être fixé sur son volume, sur l'état de ses orifices ; mais il est mieux encore d'être à même d'apprécier son rendement. Car le coeur fait de la tension artérielle, comme le foie fabrique du sucre, commme le rein se plie ail dur travail de l'élimination. Etudier la tension artérielle, c'est donc étudier la fonction du coeur.
Mais, ce qui fait la difficulté et aussi l'intérêt du sujet, c'est que celte fonction du coeur se règle à chaque instant sur les besoins de l'organisme. Par suite des liens intimes qui unissent les divers organes et assurent l'harmonie de leurs réactions pathologiques, ceux dont le rôle—comme le coeur; — est d'être le serviteur des autres, se modèlent, se modifient
x PRÉFACE -
sans cesse de façon à se hausser au niveau de leur tâche nouvelle. Le coeur s'efforce toujours de fournir ce qui lui est demandé, quelquefois moins, jamais plus ; et, à chaque moment, son .effort est le reflet des exigences de la circulation périphérique ou viscérale. Etudier la tension artérielle, c'est donc étudier encore le milieu de tension liquidienne nécessaire à l'organisme — milieu exigé par certains organes, toléré par d'autres.
Ainsi, la valeur séméiologique de la tension artérielle se trouve déplacée, ou plutôt élargie, puisqu'elle n'est plus indicatrice du seul état fonctionnel du coeur, mais de l'état du système artériel, des différents viscères, et en premier lieu de celui dont le fonctionnement est lié de façon si intimé à l'appareil circulatoire, le rein.
Il nous a semblé que l'importance de cette question et surtout son grand intérêt pratique justifiaient l'étude d'ensemble que nous présentons aujourd'hui ; et. nous serions heureux si nous pouvions, par elle, concourir dans quelque mesure à la vulgarisation d'une méthode d'exploration dans l'avenir de laquelle nous avons foi.
Louis GALLAVARDIN. Lyon, le 1er février 1910.
PREFACE DE LA SECONDE ÉDITION
Cet ouvrage est moins une seconde édition, qu'un nouveau livre où la partie clinique a reçu les développements qu'il convenait de lui donner. Il n'a pas cependant la.prétention de présenter un tableau définitif de la science sphygmomanométrique. En dégageant les linéaments principaux de l'édifice tensionnel, notre but a moins été de faire montre des résultats acquis," que d'offrir au lecteur une mise au point, et de faciliter la voie aux chercheurs en leur épargnant un labeur superflu ; en un mot, d'être utile.
En médecine, le sillon ouvert, par toute nouvelle méthode d'exploration prépare une riche moisson. Les travaux de ces, dix dernières années ont manifesté que la mesure de la tension artérielle n'avait pas menti à ses promesses; et c'est exagérer à peine que de dire que la sphygmomariométrie est aux affections chroniques ce que la thermométrie est aux maladies aiguës.
En mettant au point cet ouvrage,.en grande partie préparé avant la guerre, on comprendra que nous; ayons eu la tentation violente de rayer tous les noms allemands. Nous ne
XII PRÉFACE
l'avons pas fait. Dans le domaine scientifique, il nous a parti aussi puéril de démarquer, que dangereux d'ignorer ; une seule chose importe, qui est de faire mieux. Nous n'avons pas eu d'autre ambition.
Louis GALLAVARDIN.
Lyon, le 1er juillet 1919.
LA
TENSION
EN CLINIQUE
SA MESURE, SA. VALEUR SEMEIOLOGIQUE
Il suffît d'examiner le jet de sang qui suit la section accidentelle d'une artère, même peu volumineuse, pour se rendre compte que le sang est enfermé « sous tension » dans le système vasculaire.
La source de cette tension se trouve dans le réservoir aortique, sorte dé bassin d'alimentation d'où s'échappe l'immense chevelu
- artériel et artériolaire ; son origine première, dans la force développée par la contraction du ventricule gauche. — C'est le jeu de la pompe cardiaque qui entretient dans ce réservoir aux innombrables fuites une tension sans cesse renouvelée, en même temps qu'un courant ininterrompu, de sang artérialisé. Il n'y a pas de système d'insufflation ou de refoulement, construit par la main des hommes, qui ne se soit inspiré de ce modèle : la première soupape a sans conteste- été réalisée par ces trois nids valvulaires sigmoïdiens, situés à "la frontière du coeur et de l'aorte, qui se soulèvent et s'effacent dès que la pression ventriculaire devient supérieure à la
-pression aortique, qui s'abaissent et se ferment lorsque cette dernière devient prédominante'. Ainsi, comme le manifeste le tracé encontre emprunté à l'oeuvre de MAREY, la crosse aortiqùe cueille,
à chaque systole, cette partie de l'ondée ventriculaire dont la tension est supérieure a, la sienne ; par ce moyen, se trouve entretenue et régénérée sa propre tension sans cesse défaillante. — Une partie du Cylindre sanguin qui vient de pénétrer dans la crosse aortique fait Sortir du système artériel une quantité équivalente de sang; l'autre
L. GALLAYARDIN. 1
2 LA TENSION ARTÉRIELLE EN CLINIQUE :
partie, ne pouvant trouver issue au dehors, se borne à distendre péniblement la paroi élastique du vaisseau, en attendant qu arrive son moment de pénétration à la périphérie. La paroi artérielle ainsi distendue tend, en vertu de son élasticité; à revenir sûr elle-même et développe une force de compression égale à celle qui a causé sa distension ; en d'autres termes, soumet le sang à une pression égale à sa propre tension. D'où, au niveau de chaque tranche vasculaire
idéale, un état d'équilibre dans lequel trois phénomènes — la tension du liquide circulant, la distension à laquelle se trouve soumise la paroi artérielle, la pression que cette paroi exerce en retour sur le sang — sont justiciables d'une commune mesure, n'étant que la manifestation d'une même cause; d'où, encore, l'équivalence des expressions, indifféremment employées dans le langage médical» dé pression sanguine et de tension artérielle. La partie de l'ondée ventriculaire qui distend les gros vaisseaux en donnant lieu au phénomène de la tension artérielle, est d'autant plus considérable que la pénétration à la périphérie est plus difficile, si bien que LAUDER BRUNTON a pu écrire que la « tension artérielle résulte de la différence entre la quantité de sang envoyée par le coeur dans le système artériel et celle qui passe des artérioles dans les veines. » —
FIG. 1. — Tracés de la pression dans le ventricule gauche et dans Vaorte. — Le tracé supérieur représente les variations de la pression enregistrées par une sonde qui se trouve dans le ventricule gauche ; après deux révolutions cardiaques, en a, la sonde est retirée du ventricule dans l'aorte. Le tracé inférieur est fourni par une sonde manométrique maintenue en permanence dans l'aorte. (D'après MAREY, Circulation du sang.)
NOTIONS PRÉLIMINAIRES 3
Si donc l'on envisage son origine et son mécanisme d'établisse-- ment, on peut dire que la tension artérielle est une force créée par la contraction ventriculaire, entretenue par la réaction de la paroi vasculaire à la distension, réglée par la résistance des, vaisseaux périphériques à l'écoulement du sang. Celte définition, en montrant les conditions multiples qui concourent à la production de la tension artérielle, fait du même coup prévoir les trois facteurs principaux de ses variations : état du coeur, élasticité artérielle-, résistances périphériques.
Il est facile de figurer d'une façon objective le phénomène de la tension artérielle et d'en prendre une idée plus exacte en rappelant les mémorables expériences de DANIEL BERNOUILLI (1738) sur l'écoulement du liquide dans les tubes. L'appareil, très simple, se com-
com- d'un récipient-dans lequel on maintient le liquide à une certaine hauteur ; à la partie inférieure de ce récipient est adapté un tubehorizontal sur lequel, de distance on distance, se trouvent branchés Verticalement d'autres tubes appelés piézomètres. Ce sont ces tubes qui vont servir à mesurer la tension du liquide, c'est-àdire là pression exercée par lui sur les parois du tube horizontal et la hauteur delà colonne liquidienne nécessaire pour lui faire équilibré. Supposons que .la hauteur du liquide au-dessus de l'embouchure du tube horizontal soit de 20 centimètres, et considérons ce qui va se passer quand le. liquide s'écoulera par ce tube. La première tranche.liquide qui va y pénétrer.progressera avec une vitesse
FIG. 2.—'Appareil de BÉRNOUILLI. — La hauteur d'ascension du liquide dans les tubes pi ézo m étriqués mesure la pression latérale exercée par ce liquide sur. les parois du tube horizontal.
4 LA TENSION ARTÉRIELLE EN -, CLINIQUE,
tout d'abord assez considérable, à cause de la pression de 20 centimètres qu'elle supporte ; mais, au fur et à mesure de sa progression, cette vitesse va diminuer par suite des résistances présentées par les frottements pariétaux, si bien qu'elle ne sortira du tube qu'avec une vitesse bien moindre, égale si l'on veut au tiers de sa vitesse initiale. Or, cette tranche liquide, arrivée à l'extrémité du tube horizontal avec une vitesse égale seulement à celle que lui donnerait une colonne d'eau dé 7 centimètres, va imposer d'emblée ce régime circulatoire à la nouvelle tranche de liquide qui pénètre dans le tube au moment où elle en sort. Cette dernière tranche, qui possède une force vive égale à 20 centimètres de pression hydraulique, n'en utilise donc que 7 sous forme de vitesse et va mettre en réserve, sous forme de tension, les 13 autres unités qui lui serviront à vaincre les résistances ultérieures. Cette tension se manifeste par une pression du liquide contre les parois latérales du tube et se mesure exactement par l'ascension du liquide dans les tubes verticaux, ascension qui sera d'autant moindre qu'on se rapprochera davantage de l'extrémité.du tube. Ces données sont applicables au système circulatoire, malgré les différences qui le séparent de l'appareil de BERNOUILLI (charge intermittente, système tabulaire élastique, coudé, divisé, ramifié, et surtout avec aires de section variables) ; et, en envisageant non plus son mécanisme de production, mais son utilisation ultérieure, on peut dire encore que la tension artérielle est cette partie de la force vive communiquée au sang par la contraction cardiaque qui, ne se manifestant pas sous forme de vitesse, se met en réserve pour vaincre les résistances ultérieures et se traduit en exerçant une certaine pression latérale sur les parois vasculaires.
La mesure de la tension artérielle fut créée le jour où le révérend anglais STEPHEN HALES (1744) eut l'idée d'adapter chez l'animal un piézomètre au bout central d'une artère sectionnée. Ayant introduit, dans l'artère crurale d'une jument couchée sur le dos, une canule' en communication avec un long tube de verre placé verticalement, il vit le sang s'élever à une hauteur de 8 pieds 3 pouces au-dessus du ventricule gauche, soit environ 2 m. 50. On connaît les perfectionnements que subit plus tard cette méthode, sous l'impulsion des travaux de POISEUILLE, LUDWIG, VOLKMAN, CHAIJVEAU et MAREY et de tant d'autres physiologistes. Ces perfectionnements consis-
NOTIONS PRÉLIMINAIRES 5
tèrent : 1° dans la substitution de manomètres au tube piézométrique primitif : soit de manomètres à Hg (modèles de POISEUILLE, MAREY, CHALVEAC, ROY, FR. FRANCK, HURTHLE), aptes surtout à indiquer la pression sanguine moyenne et les variations lentes de cette pression ; soit de manomètres métalliques ou élastiques (FICK, MAREY, HÙRTHLE, ROY, GAD, CHAUVEAU) qui, seuls, sont capablesde donner une idée exacte des variations rapides de la tension 1.
1 L'nfériorité du manomètre à Hg dans la mesure précise de la pression artérielle avait bièn été mise en évidence, par MAREY. « Je crois avoir démontré, écrit ce physilogite, que le manomètre à Hg n'est bon que pour : donner la valeur d'un-p.ression qui reste, constante ou du moins qui ne variequ'avec une certain lenteur, mais .que, pour la plupart des.usages physiolologiques et particulièrement pour mesurer la pression du sang dans les artères, le manomètre à Hg ne vaut rien, car il déforme, par les oscillations propres :dé sa colonne, les indications qu'il devrait fournir. »
Dans des expériences récentes, PÀGHON et PONS (191.2) ontinsisté à nouveau sur les défauts du manomètre à Hg en fonctionnement dynamique. Les erreurs dépendent dé trois facteurs- principaux 1° De la fréquence des variations : l'expérience démontre que l'erreur croît d'abord avec cette fréquence, passe par un maximum, pour redevenir nulle pour une fréquence donnée. Voici, à titré d'exemple, les chiffres obtenus par la lecture du manomètre dans Une expérience où l'ampoule Communiquant avec ce manomètre subissait des variations de pression uniformes oscillant entre 190ET 135 millimètres Hg
Fréquence des variations - Chiffres du manomètre
par minute pour chaque fréquence
. 0 190/135 mm. Hg
40 210/112 —
; .60 226/96 —
82 232/92 -
104 212/122 —
116 I90/l34
128 184/142 — ' '
i36 180/144 - —
On voit que l'écart qui, à 82 pulsations par minute (moyenne habituelle des pulsations artérielles), était considérable et atteignait plus de 40 millimètres Hg, tant;comme- surestimation de la pression, systolique que comme sous-estimation de là pression diastolique, disparaît complètement lorsque le chiffre -des pulsations s'élève à 116 par minute.
2° De. la pression variable : l'erreur croît et décroît comme la grandeur de cette..pression variable.
3" De la masse mise en mouvement : plus le manomètre est de gros calibre, plus grande est Terreur, 11 est à remarquer aussi que celle-ci est plus élevée pour le manomètre en U que pour le manomètre à O fixe; mais les résultats dé ce dernier sont parfois entachés d'une erreur de capillarité.
6 LA TENSION ARTÉRIELLE EN CLINIQUE
2° dans Y enregistrement graphique despressions, qui devait permettre de se rendre compte de la marche ou des variations des oscillations de la,tension.
Par ces moyens, on a pu voir que la courbe de la pression sanguine, enregistrée pendant un certain temps chez un animal, pré-' sentait trois sortes d'oscillations. — 1° Des oscillations cardiaques, en rapport avec les diverses phases de l'activité du coeur. La partie la plus élevée de ces oscillations, ou pression maxima, correspond et la systole ventriculaire ; la partie la plus, inférieure, ^pression minima, à la fin de la diastole ventriculaire.'Ces oscillations, qui' sont enregistrées assez fidèlement.par les manomètres métalliques ou élastiques, le sont .très imparfaitement, nous le répétons,, par les manomètres à Hg, à cause de l'inertie et des mouvements propres de la colonne mercurielle. Le niveau de la colonne de mercure, dans le manomètre compensateur de MAREY, tend à rester dansr une . position plus fixe, à distance égale du sommet et de la base des oscillations, et indique ainsi la pression moyenne. — a0 Des oscillations respiratoires résultant de l'influence mécanique des mouvements de la cage thoracique ou de la simple association nerveuse entre les centres respiratoires et les centres circulatoires, vasomoteurs ou cardiaques (oscillations-de TRAUBE-HERING). La résultante de ces effets est d'ordinaire une dépression inspiratoire ; mais on peut aussi noter une courbe inverse. — 3° Des- oscillations vasomotrices, visibles seulement sur de très longues courbes manométriques,
manométriques, de la'respiration pu de toute modification des battements cardiaques, et relevant sans; doute de la contraction rythmique des fines artérioles sous l'influence d'incitations, vasomotrices alternantes (TRAUBE et S. MAYER).
Le niveau de- la tension artérielle — tension systolique pu maxima — varie assez peu dans les différentes espèces animales. Il
FIG. 3. — Grandes oscillations de la pression artérielle, observées chez un chien curarisé maintenu en vie par l'insufflation pulmonaire. (D'après MORAT.)
NOTIONS PRÉLIMINAIRES 7
est à remarquer que cène sont nullement les conditions de taille de, l'animal (VOLKMANK, MAREY) qui déterminent la hauteur de la pression sanguine; ce qui prouve bien que cette hauteur est surtout la conséquence de la présence du réseau capillaire, dont la disposition et la résistance diffèrent sans doute assez peu d'une espèce à l'autre. Si l'on consulte les tableaux dressés par VOLKMANN, JOLYET, on voit que ces chiffres de tension maxima oscillent presque tous entre 90 et 170 millimètres Hg, rarement au-dessus ou au-dessous : 90 àg5 chez le rat, le cobaye, le lapin, 110 chez le cheval, 120 chez le. chien, 140 chez le canard et quelques oiseaux, 160 à 170 chez le veau. JANEWAY fait remarquer avec' raison que ces chiffres extrêmes (100 à 200) ne sont pas très éloignés de ceux que l'on rencontre chez l'homme dans diverses circonstances pathologiques. — Dans une même espèce, on peut noter des variations très étendues. Ces variations, elles aussi, ne dépendent nullement do la taille de ranimai, mais bien plutôt de conditions physiologiques et surtout patholo- , giques différentes. CHAUVEAU, en prenant la pression directement dans le ventricule gauche chez trois chevaux., a trouvé 95, 128, i4o millimètres Hg, ce dernier chiffre chez un cheval âgé ; VOLKMANN a vu, dans la carotide du cheval, la tension s'élever à 214 et même 321 millimètres Hg. Ce même auteur, chez quatre veaux, a constaté des variations de 130 à 180 millimètres Hg. Enfin CRILE (1903), chez 100 chiens, trouva dans la carotide des pressions variant entre 80 et 170 millimètres Hg; et il note expressément qu'il n'y avait aucune relation entre le chiffre de pression et les dimensions du corps de l'animal. Nul doute qu'il ne s'agisse la de variations pathologiques de la tension artérielle.
Chez l'homme, plusieurs mensurations directes ont pu être exécutées au cours d'amputations du bras ou de la cuisse, à l'aide de manomètres à Hg reliés, par une canule, au bout central de l'artère . sectionnée. FAIVRE (1806) a noté 120 millimètres Hg dans la fémorale, et 155 à 120 dans l'humérale. ALBERT (I883) a trouvé des valeurs oscillant entre 100 et 160 millimètres dans la. tibiale antérieure, et KUHE WIEGANDT (1896) 100 millimètres dans la radiale, chez une urémique. Plus récemment, O MÜLLER et BLAUEL (1907), dans une séries de mensurations effectuées chez trois sujets au cours d'amputations du bras ou de l'avant-bras, à l'aide de manomètres métallique et à Hg, ont pu noter non seulement le chiffre de la
8 LA TENSION ARTÉRIELLE EN CLINIQUE
pression maxima, mais celui de la pression minima ainsi que l' amplitude des oscillations respiratoires. Dans, deux cas, la pression systolique oscillait dans la radiale entre 110 et 115 millimètres JHg, et se trouvait dans un troisième cas autour de ioo millimètres Hg dans l'humérale. La pression minima était comprise entre 60 et 80 millimètres Hg dans tous ces cas. Quant aux oscillations respiratoires
respiratoires des malades anesthésiés il est vrai), elles étaient considérables et atteignaient jusqu'à 16 millimètres pour la pression systolique et 12 millimètres pour la pression diastolique.
Les nombreuses mensurations sanglantes pratiquées chez l'animal nous ont montré que, dans une même espèce (et, nous le répétons, indépendamment de toute question de taille), la pression artérielle pouvait varier du simple au double, et même au delà! Il en est cerFIG.
cerFIG. — Oscillations de la pression artérielle. — Tracé obtenu, chez un homme'de quarante-cinq ans, en mettant directement en communication l'artère radiale avec un manomètre à Hg, au cours d'une amputation de l'avant-bras. On voit très nettement sur ce tracé les oscillations cardiaques, respiratoires, et même des oscillations plus larges dues aux variations de l'action du coeur ou au jeu des vaso-moteurs. La grandeur des oscillations respiratoires (écart compris entre 102 et 118 millimètres Hg pour la pression systolique, entre 60, et 78 pour la pression diastolique) tient à l'amplitude insolite des mouvements respiratoires chez le sujet profondément anesthésié. (D'après 0. MÜLLER et BLAUEL.)
NOTIONS MÉLMNAIRES .9
tainement de même chez l'homme, et si l'écart des chiffres relatés plus haut n'est pas aussi extrême, c'est qu'il s'agissait presque toujours de malades opérés pour des affections chirurgicales et dont les différents viscères, les reins surtout, étaient sans doute relativement sains. Il est clair que ces variations de la tension sanguine né sont pas le fait du hasard et se trouvent sous la dépendance étroite de lésions ou tout au moins de troubles fonctionnels importants de l'appareil cardio-vasculaire. Si l'on songe, d'autre part, que le coeur n'a pas d'autre rôle que d'établir. rythmiquement, à.l'origine du système artériel, les variations de tension qu'exigent les besoins de la circulation périphérique et viscérale, comment ne pas être frappé des indications précieuses que peuvent donner les variations de cette tension artérielle sur le fonctionnement du coeur, sur l'état des vaisseaux et aussi sur celui de certains viscères, notamment de ceux qui, comme le rein, sont dans un rapport si intime avec la circulation? Comment ne pas être tenté de lire, dans lés variations delà tension sanguine, les modifications apportées au fonctionnement de tous ces appareils? Lecture singulièrement compliquée, il est vrai, car il faut bien avouer que la multiplicité des méthodes employées et la complexité des causes qui se donnent rendez vous pour influencer les chiffres de tension artérielle, ont ajouté parfois davantage à la confusion qu'à la richesse de la science1sphygmomanométrique. Nous souhaitons que le lecteur trouve dans cet ouvrage, à la suite des développements indispensables concernant la technique sphygmomanométrique, l'exposé des données importantes dont s'est enrichie la clinique sphygmomanométrique dans ces dernières années.
BIBLIOGRAPHIE
ALBERT, Mensurations kymographiques chez l'homme (Med. Iarbüch., Vienne, 1883, p. 254).
CHAUVEAU, Journal de Physiologie, 1860.
CRULE, la Pression sanguine en chirurgie, Philadelphie, 1903.
FAIVRE, Eludes expérimentales sur les lésions organiques du coeur (Gazette Médicale de Paris. 1856, p. 727).
HALES (Slephen), Essais statiques, Londres, 1738. — Hémostatiqne ou expériences hydrauliques sur le sang et les vaisseaux sanguins, Genève. 1744
10 LA TENSION ARTÉRIELLE ENCLINIQUE
JOLYET, Société de Biologie, 1872, p. 131 et, 254.
LAUDER-BRUNTON, Sur la pression sanguine ,de l'homme (The Lancet,- octobre
MAREY, la Circulation du sang à l'état physiologique et dans les maladies, Paris, 1881.
MULLER et BLAUEL, Critique des sphygmomanomètres de RIVA-ROCCI et de GAERTNER (Deutsch. Arch. f. Min. Med., 1907).
POISEULLLE, Recherches sur la force du coeur -aortiqùe (thèse -de Paris, 1828 ; Comptes rendus de l'Académie des Sciences, 1835; Mémoires de l'Académie des Sciences, 1861).
PONS, Contribution à l'étude de la sphygmomanométrie directe. Documents' expérimentaux sur le fonctionnement dynamique du manomètre à mer-cure (travail du laboratoire du professeur PACHON). (thèse de Bordeaux, 1912).
VOLKMANN, Hérnodynart),ique, i850.
WIEGANDT, Influence de la fièvre sur la pression artérielle (Arch. f. exp. Path. und Pharmak., 1896).
LIVRE PREMIER MESURE DE LA TENSION ARTÉRIELLE
(TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE)
Plus de cent ans s'étaient écoulés, comme le remarque JANEWAY, entre la découverte de la circulation du sang par HARVEY (1628) et la première mensuration de la tension artérielle chez l'animal (1744); un autre.siècle devait passer encore, avant qu'on eût l'idée de faire l'application clinique de ces données à l'homme. Dès 1855, VIÉROBDT, suivi par quelques autres chercheurs, avait essayé « de mesurer indirectement la pression sanguine au moyen de la contrepression nécessaire pour faire disparaître les pulsations d'une artère». Mais ce n'est que dans le dernier quart du dix-neuvième siècle, à la suite des travaux de v. BASCH, à Vienne, et sous le parrainage illustre de POTAIN, qui Je premier en France eut la vision claire de l'importance clinique de la sphygmomanométrie, que la question devait entrer dans une phase vraiment active.
Est-il donc nécessaire de mesurer la tension artérielle à l'aide d'instruments spéciaux? L'objection la plus courante est celle-ci: on sent très bien avec le doigt. On n'a pas fait d'autre objection à l'introduction du thermomètre. A ce moment aussi, on sentait très bien et même mieux avec la main, disait-on; l'usage du thermomètre ne s'en est pas moins généralisé. Nous ne voulons pas dire que la palpation simple des artères, pratiquée sur la radiale ou, comme on l'a conseillé, sur des artères plus volumineuses (numérale, caro-
12 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
tide, fémorale), ne soit capable de fournir des renseignements précieux sur le degré de la' tension sanguine ; ■ à condition toutefois que l'on prenne, comme base d'appréciation, non la force ou l'amplitude du pouls, mais sa dureté et la difficulté qu on a à l'écraser., Mais-; ces renseignements, toujours imprécis, souvent infidèles, seront d'au-; tant meilleurs que le médecin aura appris à éduquer et à contrôler, ses sensations par des mensurations précises antérieures. IL ne s'agit pas en effet de classer les malades, sur la simple palpation radiale, en hypotendus, normalement tendus ou hypertendus, mais de savoir si cette classification est légitime. On parlé bien de'fa difficulté que l'on a à écraser l'artère, mais on oublie que la forcé qu'il faut déployer pour cela est proportionnelle au calibre du vaisseau. Cela tient, comme on l'a fait remarquer, à ce que notre sens musculaire .nous trompe et n'apprécie que la force, totale exercée sur ; l'artère pour l'écraser et non la force par unité de surface. Un vaisseau de petit calibre, comme la radiale, donnera toujours Fimpression d'une tension infiniment moindre que la carotide ou que l'aorte abdominale explorées chez le même sujet, alors qu'en réalité les différences de tension y sont assez minimes. S'il est assez facile d'éviter l'erreur qui consiste à considérer comme hypertendus des sujets, ayant des artères larges, un pouls ample et vibrant, il est en revanche assez commun de méconnaître, sous des pouls d'apparence normale et avec des radiales étroites, comme le cas est fréquent chez la femme, des hypertensions modérées ou .même considérables. Et puis comment, sans sphygmomanomètre, déceler le début d'une hypertension, comment apprécier son degré exact, sur , quelle échelle noter ses sensations, de quelle façon rappeler ses souvenirs quand on reverra le malade deux ou trois ans après ? Cela pour la tension systolique; mais que dire de l'appréciation de la tension diastolique, qui a bien cependant son importance, et comment le doigt pourrait-il mesurer le taux de cette pression constante sous la vague de pression variable qui vient la couvrir à chaque systole? L'essor de la sphygmomanométrie durant ces dernièresannées a du reste jugé le procès. Il faut prendre la pression artérielle; et ceux qui seront le plus capables de se passer de sphygmomanomètre sont ceux qui s'en seront le plus servis.
Il est à peine- besoin d'insister sur ce fait que le sphygmographe est absolument impuissant à fournir des données de quelque préci-
TECHNIQUE SPHYCOMONAOMETRIQUE 13
sion sur le niveau de la tension artérielle. L'amplitude d'un tracé dépend de conditions aussi multiples que contingentés: mode d'application de l'instrument, degré variable de l'écrasement de l'artère, dureté du ressort, élasticité de la paroi artérielle, épaisseur des tissus interposés, etc. Il n'est pas rare, comme cela a été signalé à maintes reprises et comme en témoignent les deux tracés ci-dessous,
de recueillir chez certains malades dés tracés sphygmographiques dont l'amplitude contraste étrangement non seulement avec le taux général d'élévation de la pression, ce qui serait assez compréhensible, mais encore avec le taux de la pression variable dont dépend directement l'expansion des parois artérielles.
Les appareils proposés pour la mesure de la tension "artérielle sont à l'heure actuelle presque innombrables, et l'on n'attend pas que nous donnions ici de chacun d'eux une description détaillée à laquelle un gros volume ne suffirait certainement pas. Bien souvent, du reste, ces divers appareils ne diffèrent lés uns. des autres que par des adjonctions secondaires ou des modifications dé détail, quand ce n'est pas seulement par le nom de l'auteur. Aussi nous attacherons-nous surtout à mettre en lumière les principes différents sur lesquels ils reposent, en nous efforçant dans chaque cas de les comparer les uns aux autres, afin de mettre en évidence leurs avantages ou leurs inconvénients respectifs. Une telle étude critiqué sera sans doute plus utile qu'un'catalogue détaillé, même très complet.
La grande division, qui nous paraît s'imposer entre toutes les méthodes sphygmomanométriques, est la .suivante. Ces méthodes
FIG.5. - Discordance possible entre l'amplitude du tracé sphymographique
sphymographique le taux de la tension artérielle. — Le; tracé de gauche, de
-faible, amplitude, a été recueilli chez un brightique hypertendu dont
.... la pression systolique atteignait 210 millimètres Hg, la pression
diastolique 110 millimètres, et dont la pression variable mesurait
100 millimètres. Le tracé de droite, de grande amplitude, a trait à
un bacillaire hypotendu dont la pression étart de 110/60 millimètres
Hg et chez lequel la pression variable était moitié moindre que chez
le malade précédent.
14 . TECHNIQUE SPHYGMOMANOÉTRIQUE
réposent toutes sans exception, comme point de départj sur la compression d'une artère et l'arrêt de la circulation dans cette artère. Mais, de là, elles bifurquent nettement; et il faut établir une distinction radicale entre celles basées sur l'examen de la circulation au-dessous de la compression et celles qui reposent sur l'examen des mouvements ou oscillations des parois artérielles au niveau de la compression.
PREMIERE PARTIE
METHODES BASEES SUR L'EXAMEN DE LA CIRCULATION AU-DESSOUS DE LA COMPRESSION
Ces Méthodes premières employées, eurent primitivement
pour but dé fixer la valeur dé la pression systolique, Plus tard, on tenta de les faire servir également à la détermination, de la pression diastolique.
CHAPITRE PREMIER DETERMINATION DE LA PRESSION SYSTOLIQUE
Lé principe est identique dans tous les appareils proposés. Les, divers moyens mis en oeuvre n'ont pas d'autre but que d'arriver à fixer la pression nécessaire pour écraser une.artère et arrêter toute Circulation au dessous. Seuls varient le vaisseau comprimé, le moyen employé pour se rendre compte de l'arrêt de la circulation, et Surtout le procédé de compression : bloc solide, peloté élastique) manchette pneumatique,
1° Ecrasement de l'artère par lin bloc solide. — La
sphygmomanométrie semble être née de la sphygmographie, car les premières tentatives consistèrent uniquement à charger de poids lé ressort d'un sphygmographe jusqu'à'écrasement complet de l'artère.
16 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
Tels sont les procédés de VIERORDT (1855), FORSTER (1867), BÉntER (1868), LANDOIS, PHILADELPHIEN (1897). D'autres auteurs utilisèrent; la pression, sur l'artère, d'une tige métallique terminée par une petite pelote ou par un renflement plus ou moins allongé : appareil de WALDENBURG. (1877), BLOCH-VERDIN -CHÉRON (1888), HOORVEG (1889), etc. ,
Dans toutes ces méthodes, l'exploration porte sur la radiale. L'écrasement complet de l'artère est annoncé, lorsqu'il s'agit du
ressort du sphygmographe, par la suppression de tout tracé sphygmographique ; dans les autres cas, par la disparition du pouls perçu, à la palpation de l'artère, au-dessous de la compression (ou même au niveau de la compression lorsqu'il y a interposition du pouce entre le compresseur et le vaisseau, comme dans le procédé de BLOCH). La pression nécessaire pour effectuer cet écrasement est calculée, directement ou indirectement, à l'aide d'un ressort dont les variations de tension sont graduées en grammes ■ et peuvent être converties en centimètres de Hg.
Tous ces appareils ne sont plus guère employés actuellement. Ils reposent sur un principe dont la défectuosité a été bien mise en évidence par MAREY, dès 1875, puis par POTAIN. « L'effort qu'exerce une artère contre le poids ou le ressort qui la presse, écrit ce dernier auteur, dépend en effet, non seulement de la pression du sang dans cette artère, mais aussi de son calibre et de l'étendue de
FIG. 6. — Sphygmomanomètre de BLOCH-VERDIK CHÉRON. — Le pouce de l'opérateur, interposé entre l'instrument et la radiale, transmet la pression et apprécie le moment de la disparition du pouls.
SPHYGMOMANOMETRE DE POTAIN 17
la portion du vaisseau qui porte l'appui du poids ou du ressort. Et non seulement le calibre de la radiale diffère considérablement suivant les sujets et même d'un poignet à l'autre, mais il se modifie, d'un instant à l'autre en raison même de l'action des artères qui sont des tubes contractiles et élastiques. Quelque ingénieux donc que puisse être le mécanisme à l'aide duquel on cherchera à apprécier le poids variable que peut soulever une artère, on n'obtiendra jamais d'autres données que la résultante dé conditions complexes, parmi lesquelles la pression artérielle est un facteur qu'on n'a aucun moyen de déterminer. C'est dire qu'il, faut y -renoncer absolument. »
a0 Ecrasement de l'artère par une .pelote élastique (procédé de v. Basch-Potain). — Le principe delà méthode est simple. Lorsque l'on comprime une artère contre un plan résistant à l'aide d'une -pelote à contenu fluide (gazeux ou liquide), il arrive un moment où la pression à l'intérieur de la pelote dépasse légèrement la tension intra-vasculaire et provoque l'écrasement des parois artérielles l'une contre l'autre, empêchant ainsi le passage du sang. Le chiffre de la pression atteint à l'intérieur de la pelote, au moment limite de la disparition ou de la réapparition du pouls, marque la tension artérielle maxima.
V. BASCH imagina, en 1876, le premier appareil basé sur ce principe. La pelote était formée d'une petite calotte de caoutchouc adaptée au bord d'un cylindre de verre ou d'une cupule de laiton; le contenu fluide était représenté par de l'eau introduite dans le système à l'aide d'un entonnoir; l'instrument de mesure, enfin, par un manomètre à Hg communiquant avec la pelote à l'aide d'un tube de caoutchouc. C'est ce modèle primitif qui fut modifié parallèlement par v. BASCH. qui substitua assez rapidement le manomètre métallique au manomètre à Hg; puis par POTAIN (1889), qui perfectionna l'ampoule de caoutchouc et remplaça.l'eau par l'air, rendant ainsi l'appareil plus pratique et plus maniable,
Tel qu'il est sorti de ces modifications, le sphygmomahomètre de POTAIN est connu de tous;, et les règles de son- emploi (application de l'ampoule, arrêt de la. récurrence par le médius, exploration du pouls par l'index) sont familières à chacun. D'un prix minime, d'une application facile etJ rapide, aisément transportable, capable '
L. GALLAVAUDIN. 2
18 TECHNIQUE SPHYGMOMAKOMËTRlQUE
d'être appliqué indifféremment/sur la radiale, la temporale, la pédieuse, susceptible dé donner entre des mains un peu exercées des renseignements vraiment précieux, cet appareil-fut employé à peu près exclusivement en France pendant près dé quinze à vingt
ans. C'est à lui qu'on est redevable des premiers progrès^ et surtout de la vulgarisation de la science sphymomanométrique, comme à son inventeur d'avoir, le premier en France, eu la vision claire et
lumineuse de l'importance clinique des résultats fournis par l'exploration de la tension artérielle.
Le principe sur lequel repose l'appareil de v. BASCII et de POTAIN est certainement exact. V. BASCH, en 1880, prenant chez l'animal, à l'aide de son appareil, la pression d'une carotide et d'une fémorale préalablement dénudées et au-dessous desquelles avait été glissée
FIG. 7. — Sphygm.omanom.etre de POTAIN.
FIG. 8. — Mode d'application du sphygmomanomèlre de POTAIN.
SPHYGMOMANOMÈTRE DE POTAIN 19
une petite planchette, trouva cette pression à peu près égale à celle obtenue par mensuration directe sanglante. Même vérification fût faite l'année, suivante, et avec le.même résultat, par DANTHAUNY, puis par POTAIN, à 1 aide d'une circulation artificielle dans de minces tubes de caoutchouc ou de baudruche. Il est donc prouvé que, la paroi postérieure d'une artère étant absolument fixée et une ampoule élastique appliquée sur la paroi antérieure, l'affaissement de l'artère se produit à peu près au moment où la pression dé l'ampoule égale où dépasse légèrement la tension intra-artérille. '
Et cependant, si passant de l'expérimentation à la pratiqué, on considère les chiffres fournis par l'appareil de POTAIN chez des sujets normaux (17 centimètres Hg chez l'homme, 16 chez la femme), on se rend compte de suite que ces chiffrés sont nettement trop élevés 1. En effet, d'après toutes les mensurations directes 'faites chez l'homme, soit dans l'humérale, soit dans la radiale, il ne semble pas que la pression normale-réelle dépasse 11 à 12 centimètres de mercure. Il faut donc admettre que le sphygmonianomètre de POTAIN donne dans son emploi clinique, une surestimation très notable, et non pas seulement de i centimètre Hg, comme le croyait son inventeur.
Cette discordance entre les résultats expérimentaux et cliniques fournis par l'appareil de POTAIN est facilement explicable. Chez l'homme, cet instrument n'est pas appliqué sur une artère dénudée et fixée sur une planchette, mais sur une radiale enfouie sous les téguments et reposant sur un lit musculo osseux. D'où la possibilité de deux causes d'erreur, tenant : 1° aux parties interposées entré l'ampoule et le vaisseau; 2° à la fixité insuffisante de l'artère. —■ Les causes d'erreur tenant aux parties interposées entre l'ampoule et l'artère ou, plus exactement, à tout ce qui sépare le milieu sanguin de l'artère du milieu aérien de l'ampoule (paroi artérielle,
1 La moyenne des chiffres trouvés par POTAIN chez no soldats est exactement 17,74. Les chiffres oscillaient entre 14,5 et 20,5. « On pourra, je pense, écrit Potain, se considérer comme ayant affaire à une pression se rapportant à l'état physiologique quand, chez un sujet de vingt à vingt-cinq ans, on trou- ' vera les chiffres de 15 à 19 chez un homme, et de 14 à 18 chez une femme. » (POTAIN, la Pression artérielle de l'homme à l'état normal et pathologique, 1502.) Chez l'enfant, d'après GAUJODX (1908), la tension moyenne au POTAIN serait de 6 à 7 dans la première enfance, de 8 à 9 dans la deuxième enfance, de 13 à 15 entreseize et dix-huit ans.
20 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
parties molles superficielles, membranes de caoutchouc) ne sont certainement pas négligeables, mais sans doute assez faibles: V. BASCH admettait une erreur de 2 à 5 millimètres pour la paroi artérielle, de 6 à 8 millimètres pour les parties molles, et POTAIN arrive à peu près aux mêmes conclusions. RILLIET .estime, plus récemment, que l'erreur doit être de 10 millimètres Hg par 10 millimétrés de tissu interposé.. Ces causes d'erreur étant du reste communes à la compression par la pelote et à la compression par manchette, nous reviendrons sur ces différents points avec plus de détails lorsque nous ferons la critique de la méthode de RIVA-ROCCI. —Les causes d'erreurs tenant au peu de fixité de l'artère nous paraissent beaucoup plus importantes et, de plus, propres à la compression par pelote élastique. Il nous semble que c'est à elles, surtout, que "se trouve due la surestimation considérable fournie par le sphygmomanomètre de POTAIN. La pression de l'ampoulé ne se transmet intégralement, en effet, au liquide sanguin, que si l'artère se trouvé absolument fixée au-devant d'un plan résistant. Or, le lit radial sur lequel repose l'artère est toujours revêtu de parties molles (muscles, tissu conjonctif et fibreux) et, de ce fait, toujours assez inégalement rembourré suivant la musculature et l'embonpoint'du sujet. Avant d'être écrasée, la radiale se laissera d'abord simplement refouler par l'ampoule, ce qui explique une déperdition assez notable dans l'utilisation de la force développée par le doigt compresseur. V. BASCH l'avait bien compris et une radiale qui se laissait affaisser par une pression de 90 millimètres sur un plan résistant^ nécessitait une pression de'14.0 millimètres pour être écrasée sur un lit musculaire! Chose plus grave encore, par suite de l'obliquité de la face antérieure de certains radius ou de la situation un peu interne de quelques radiales, il arrive souvent que l'artère se laisse non seulement refouler par l'ampoule, mais encore dévier latéralement, et fuit au-dessous du tendon du grand palmaire, dans la direction de l'espace interosseux. Dès lors, la pression de l'ampoule s'exercera, non plus perpendiculairement, sur l'artère exactement pincée entre le lit radial et l'ampoule, mais obliquement, sur une artère déviée latéralement. Nous sommes persuadé que c'est en grande partie à cette cause que sont dues les surestimations si considérables et surtout si variables fournies par l'appareil de POTAIN.
SPHYGMOMANOMÈTRE DE POTAIN 21
La preuve qu'il en est bien ainsi, c'est que lès chiffrés donnés par l'appareil de POTAIN montrent souvent des écarts très appréciables (de 1 à 3 centimètres) d'un côté à l'autre, et indiquent au niveau d' artères différentes (radiale, pédieuse, temporale) des différences de tension vraiment trop accusées et trop variables pour être en relation seulement avec le calibre des artères. Ce qui:le prouve encore, c'est que le chiffre du POTATN, apprécié comparativement avec celui-du GAERTNKR et du RIVA-ROCCI, s'abaisse singulièrement, comme nous avons pu le constater maintes fois, lorsque les conditions topographiques se prêtent à une compression très facile de l'artère (parties molles peu épaisses, lit radial large et résistant, et surtout artère en bonne situation, ne fuyant pas sous le tendon du grand palmaire) et s'élève, au contraire, lorsque ces conditions ne sont pas remplies et surtout lorsque l'artère, trop interne, se laisse facilement dévier latéralement par la compression de l'ampoule. Etudiant chez plus de soixante malades les variations du « rapport de tension GAERTNER-POTAIN », qui serait normalement des deux tiers d'après BOULOUMIÉ 1, j'ai.VU, par suite de l'abaissement des chiffres du POTAIN, ce rapport s'approcher de l'unité et même la dépasser dans plus de 20 pour 100 des cas. Et, presque toujours, la parité croissante des deux chiffres était pleinement expliquée et pouvait même être prévue d'avance d'après la configuration de la partie inférieure de l'avant-bras et la facilité de compression de la radiale. C'est là un fait intéressant, tant au point de vue de la valeur du sphygmômanomètre de POTAIN qu'à celui de la question si controversée des « rapports de tension », et sur lequel nous aurons l'occasion de revenir plus loin.
On peut donc conclure.: ,
i° Le sphymomanomètre de POTAIN donne toujours, dans l'appréciation de la tension artérielle maxima, une surestimation notable, pouvant atteindre à la radiale jusqu'à 5 ou 6 centimètres Hg ;
2° Cette surestimation n'est pas fixe et peut varier :
a) Suivant l'artère explorée (radiale,' temporale, pédieuse), du fait de la compression plus bu moins facile sur les plans profonds ;
b) Suivant les individus (pour une même artère), par suite de la configuration différente de la région (poignet, cou-de-pied) ;
1 Douze centimètres Hg au GAERTNER, pour dix-huit au POTAIN.
22 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMETRIQUE
c) Suivant l'opérateur enfin (pour une même artère et un même individu), à cause de la délicatesse du mode - d'application de Tins? trument et d'un coefficient personnel assez élevé;
C'est dire qu'on ne peut accorder au chiffre du sphygmomanomètre de POTAIN une valeur absolue,- que sa valeur relative elle-' même diffère sensiblement, dans chaque cas particulier 1, qu'il'estnécessaire d'apporter une très grande prudence dans.la comparaison des chiffres obtenus par cet instrument avec ceux recueillis avec d'autres appareils ou sur d'autres artères ; et qu'enfin, même -chez un individu donné, on ne saurait vraiment accorder d'importance à des variations minimes du chiffre de la tension que si les mensurations ont été faites par le même observateur, ou si leur écart dépasse celui des erreurs possibles.
Malgré ses défauts, nous le répétons, il n'est pas niable que cet instrument n'ait rendu et ne puisse rendre encore de grands services au clinicien, mais ces services seront d'autant plus réels, que celui-ci sera davantage prémuni contre les causes d'erreur que nous avons signalées 2.
3° Compression- par une manchette pneumatique (méthode de Riva-Rocci). — Nous venons de voir que l'infé1
l'infé1 prendre un exemple, un chiffre de 18 centimètres Hg relevé avec l'appareil de POTAIN peut indiquer une tension normale si l'artère est difficile à comprimer, ou signifier une hypertension déjà notable si la radiale est d'une compression très facile. Or, si cette incertitude dans laquelle on se trouve sur la valeur absolue de la tension sanguine n'empêche pas d'en suivre les variations d'un jour à l'autre, on ne peut contester qu'elle ne soit très gênante, à un premier examen et lorsqu'il s'agit d'établir un diagnostic.
2 À côté des plaidoyers déjà un peu anciens de FEDERN, LAUDER BRPNTON (1909), sur la réhabilitation de l'appareil de POTAIN, il faut citer tout spécialement un important article de MARFAN (1916).
. D'après cet auteur, en réglant, rigoureusemenl la technique d'application de cet appareil, et notamment en niellant la main du sujet en pronation complète et en flexion assez prononcée, position la plus propre à obtenir le relâchement complet des tissus de la région, en prenant soin de placer très exactement le grand axe de l'ampoule sur le trajet de l'artère, en palpant de façon à éviter toute récurrence et enfin en considérant le plus faible des chiffres trouvé comme le plus approché de la vérité, on éliminerait la plupart des causes d'erreur. Ce qui rend celte opinion vraisemblable, c'est qu'en procédant de cette façon les chiffres normaux de pression s'abaisseraient à 12 5 chez l'homme et à 12 chez la femme (au lieu des chiffres de 17 et 16 donnés par POTAIN) et deviendraient presque exactement superposables à ceux fournis
METHODE DE RIVA-ROCCI 23
riorité de la méthode de v. BASCH-POTAIN tenait surtout à ce que l'artère, comprimée seulement d'un côté, pouvait fuir au devant de la pelote et nécessiter ainsi, pour l'écraser, une pression de l'ampoule bien supérieure à sa propre tension. Un tel inconvénient doit forcément être évité par l'application, non d'une pelote, mais d'une manchette circulaire entourant complètement le membre et établissant des pressions égales dans tous les sens. C'est à RIVA-ROCCI, professeur de pathologie médicale à l'Université
l'Université Pavie, que l'on doit d'avoir introduit cette modification vraiment importante. Au Congrès italien de Médecine interne de
parla méthode de RIVA-ROCCI que nous serons amenés à considérer comme la plus exacte Nous n'avons pas eu l'occasion de .vérifier ces données. Exactes, elles seraient de nature a justifier rattachement qu'a voué à ce petit appareil toute la phalange des élèves de POTAIN, et à épargner toute contestation aux chiffres obtenus a l'aide de cet instrument manié par des mains expertes.. Elles ne nous paraissent pas suffisantes pour souhaiter que son emploi se répande a nouveau dans la génération' médicale d'aujourd'hui. Capable peut- • être, dans la mesure de la tension systolique, d'égaler en précision d'autres appareils, il ne saurait prétendre leur être supérieur; et la tare qui suffit à. l'exclure est son impuissance à donner aucune indication sur le taux de la tension diastolique
Signalons toutefois ici, sous réserve d'y revenir plus loin, les modifications pioposees plus récemment par Fr. FRANCK, afin d'adapter cet instrument à la détermination de la pression diastolique par la méthode oscillatoire.
FIG. 9. -Sphygmomanomètre de RIVA-ROCCI et mode d'application.
24 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMETRIQUE
1890, cet auteur présenta un appareil nouveau qui se composait essentiellement d'un brassard formé d'un tube pneumatique revêtu au dehors d'une étoffe inextensible, d'une soufflerie Richardson pour y injecter de l'air sous tension, et enfin d'un manomètre à Hg destiné à mesurer la pression régnant à l'intérieur du brassard-. La manoeuvre était des plus simples : l'opérateur, explorant soigneusement le pouls radial d'une main, gonflant de l'autre, à l'aide de la poire, le brassard appliqué sur lé bras, n'avait qu'à noter sur le manomètre à Hg le chiffre" de pression au moment précis de, la disparition ou de la réapparition du pouls radial et obtenait ainsi la pression maxima ou systolique. Même mode de compression était imaginé, à peu près simultanément, par HILL et BARNARD en Angleterre (1897-1898). Cet appareil eut une fortune prodigieuse et fut rapidement adopté, de préférence à l'appareil, de v.- BASCH, en Italie, en Allemagne, en Russie, en Amérique, tandis qu'en France on devait persister très longtemps encore à se servir du sphygmomanomètre de POTAIN.
Au cours de ses pérégrinations, cet appareil subit d'assez nombreuses modifications, dont une seule importante (augmentation de la hauteur de la manchette), les autres étant accessoires ou inutiles. On trouverait aisément dans le commerce une cinquantaine de. modèles de sphygmomanomètres basés sur le principe de RIVARocci et différant seulement par le manomètre employé, le mode de soufflerie, les dimensions exactes du brassard ou l'agencement de ces différentes parties. En cours de route, la méthode de RLVAROCCI subit encore quelques additions plus importantes, ayant surtout pour but de substituer à l'appréciation subjective de la disparition du pouls une représentation objective de ce phénomène. Au lieu de nous attarder à la description détaillée des divers modèles proposés, nous signalerons seulement, à propos de l'instrumentation et de la technique de la méthode de RIVA-ROCCI, les principes généraux sur lesquels reposent toutes ces modifications ou additions.
A. INSTRUMENTATION ET TECHNIQUE. — La mesure de la tension systolique par la méthode de RIVA-ROCCI comprend les deux termes suivants : compression artérielle par Un lien pneumatique circulaire, appréciation de la disparition du pouls au-dessous de la compression.
METHODE DE RIVA-ROCCI 25
a. Compression artérielle par un lien pneumatique circulaire. -— C'est presque toujours sur l'humérale, au niveau du bras, que l'on fait porter la compression ; la conformation cylindrique de ce Segment de membre se prêtant admirablement à l'application dû brassard. Mais on peut encore appliquer la manchette à Tavant-bras, ou même à la cuisse et à la jambe, au cours de certaines recherches comparatives.
a. La manchette a fait le sujet de nombreuses discussions, au sujet de la hauteur qu'il convenait de lui donner.
RIVA-ROCCI se servait d'une chambre à air ordinaire de bicyclette, c'est-à-dire d'un tube élastique qui. étalé, mesurait 4.'à 5 centimètres de largeur. Ce tube était revêtu, sur sa face externe, d'une enveloppe de tissu inextensible.
H. v. RECKLIAGHAUSEN montra que cette hauteur n'était pas suffisante. En effet, les parties molles du bras interposées entre le brassard et la paroi artérielle opposant une certaine résistance à la transmission de la pression de la manchette jusqu'à l'artère, il va s'ensuivre que la partie centrale du cylindre artériel enfermé sous le brassard supportera une charge bien plus lourde que les parties périphériques situées sous ses bords. Il arrivera donc un moment où, la tension à l'intérieur de la manchette brachiale devenant égale ou un peu supérieure à la tension intra artérielle, la partie
centrale du cylindre artificiel s'affaissera, alors que les parties'périphériques resteront encore béantes. Ces parties périphériques non affaissées seront d'autant plus étendues que l'épaisseur des parties molles sera plus considérable. On comprend, dès lors, que si la manehette n'est pas assez large, les deux portions périphériques arriveront à gagner jusqu'au centre, à communiquer l'une avec
FIG. 10.- Figure schématique montrant l'affaissement inégal, à cause de. la présence des parties molles (PM), de la paroi de l'artère (A), . suivant que cette paroi correspond à la partie-centrale ou aux bords de là manchette brachiale (M).' Avec une manchette large, l'écrasement
-ne se manifeste tout d'abord que dans une portion centrale et assez limitée..du cylindre.artériel.
26 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMËTRIQUE
•l'autre, et ainsi l'artère ne se trouvera oblitérée en aucun point, même avec une pression du manchon égale ou légèrement supérieure à la pression intra artérielle. Ce-n'est qu'à une pression
beaucoup plus élevée (d'autant plus élevée que la manchette, sera plus étroite et les parties molles plus épaisses) que l'oblitération se produira.
Expérimentalement, il est aisé de démontrer que, pour arrêter la circulation dans un tube de caoutchouc recouvert de tissus élastiques, il faut établir dans le manchon qui l'entoure une pression d'autant plus élevée que ce manchon est plus étroit. Chez l'homme, la démonstration n'est pas moins facile à faire si l'on applique à un bras une manchette de 5 à 6, centimètres de hauteur, et à l'autre bras une manchette de 15 centimètres. Il faut, pour éteindre les pulsations radiales, établir une pression de 140 à 150 millimètres Hg dans le premier cas, et de 100 à 120 millimètres seulement dans le second, soit une différence de 30 millimètres environ.
Comment, dès lors, fixer la hauteur que devra affecter la manchette? Très facilement. Si l'on augmente, en effet, dans le premier bras, la hauteur du brassard de centimètre en centimètre, on voit l'écart entre les deux pressions diminuer progressivement et rapi- - dément jusqu'à un point où elles deviennent égales, Qr, la bonne manchette, dit v. RECKLINGHAUSEN, est celle qui, adaptée à un bras, ne donne pas de tension plus élevée qu'une autre plus large.appliquée sur l'autre bras. Il arriva ainsi à fixer un chiffre oscillant autour de 12 centimètres.
Ces idées de RECKLIGAUSEN, après avoir été adoptées assez généralement, furent cependant combattues par quelques auteurs et notamment par SAHLI (1904), qui entraîna à sa suite de nombreux partisans. Cet auteur, ne se rendant pas aux arguments précédents,
FIG. 11. — La pression qui existe dans la manchette est la même que dans la figure précédente; mais, par suite de l'étroitesse delà manchette, la paroi artérielle se trouve seulement déprimée et l'oblitération de l'artère n'est réalisée nulle part.
MÉTHODE DÉ RIVA-ROCCI 27
accuse une manchette aussi large de fournir des chiffres inférieurs à la pression réelle, du fait de l'obstacle qu'elle oppose à la progression de l'onde pulsatile. Le pouls radial, d'après lui, disparaîtrait avant que la pression systolique ait été atteinte, l'ondée sanguine se trouvant bloquée parla résistance qu'elle rencontre au cours du long tunnel qu'elle doit parcourir. Aussi: conseilla-t-il tout d'abord de s'en tenir à la manchette de 6 centimètres, plus commode, plus facile a appliquer et, au surplus, donnant des chiffres' de pression vraisemblablement plus exacts
La question ne pouvait être tranchée que par l'expérimentation, directe et, après des tentatives peu satisfaisantes de GUMPRECHT à l'aide de circulation artificielle chez le cadavre, de FELLNER et RUDINGER chez le chien, de SHILLING chez le veau, elle le fut sur l'homme de façon décisive par MULLER et BLAUEL en-1907. Chez trois malades devant subir l'amputation du bras ou de Pavantbras, la tension artérielle fut prise directement dans la radiale.ou l' humérale, tandis qu'on mesurait successivement, à l'aide d'une manchette large de 15 centimètres et d'une manchette étroite de 6 centimètres, la pression nécessaire pour produire l'écrasement Gomplet de l'humérale et l'arrêt de la circulation au-dessous. La pression accusée par les deux manchettes fut trouvée supérieure à la pression sanguine réelle ; mais, tandis que l'écart moyen n'était que de 7,5 pour 100 avec la manchette large, il était de 41 pour 100 avec la manchette étroite La question semble donc jugée et, bien que SAHLI reste encore partisan d'une manchette de 8 centimètres, on est généralement d' accord pour adopter un type de manchetterelativement large, pour laquelle on peut accepter le chiffre de 12 à 13 centimètres comme convenant à la majorité des cas.
Ce chiffre, au reste, n'a rien d'absolu D'après ce que nous venons de dire, la meilleure manchette est celle qui, appliquée sur un membre donné, présente une largeur suffisants pour que la pression développée a son intérieur se transmette intégralement à la partie centrale de l'artère explorée Théoriquement, les dimensions de la manchette devraient donc varier suivant.le diamètre du bras à explorer Une épaisseur plus grande des parties molles exigerait une hauteur plus considérable Chez des sujets maigres, au contraire, cette hauteur pourrait être moindre et, dans un cas de ce genre, les expérimentateurs cités plus haut ont montré que l'excès
28 . TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE ,
dent de pression avec la manchette large n'était que de 6 pour 100 et n'atteignait que 19 pour 100 avec la manchette étroite. Pratiquement, on comprend qu'on ne puisse disposer d'une manchette pour chaque sujet et qu'il faille adopter un modèle capable de satisfaire à tous les cas. Chez l'adulte, la manchette de 12 centimètres peut s'appliquer indifféremment sur le bras, l'avant-bras, la jambe. Dans les explorations portant sur la cuisse, la manchette devra être plus large. MURRAY propose les dimensions de 17 centimètres, car, d'après ses expériences, chez des individus normaux, cette manchette de 17 centimètres, appliquée à la cuisse, et le brassard de 12 centimètres au niveau du bras fournissent des chiffres ' égaux. Chez l'enfant,, c'est le brassard de 8 centimètres qui est généralement employé.
La longueur totale de la manchette est d'ordinaire de 48 à 5o centimètres, dont 3o pour la surface caoutchoutée. De cette façon, sans doute, elle arrivera à faire près de deux fois le tour d'un bras_ décharné, eh parvenant à grand'peine à contenir les bras opulents de certaines femmes grasses (j'ai noté, comme chiffre extrême, une circonférence de 47 centimètres — la taille d'une- élégante de jadis); elle se trouvera, du moins, proportionnée à la majorité des cas.
Les manchettes diffèrent entre elles par la qualité du caoutchouc, la résistance du tissu extérieur, le mode de fermeture. La meilleure est évidemment celle qui possède le caoutchouc le plus souple et le plus résistant, l'enveloppe extérieure la plus inextensible, la fermeture permettant une adaptation rapide et exacte de la manchette sur le bras. Ce dernier point a quelque importance. Un mode d'application trop lâche peut conduire à une surestimation appréciable du chiffre de pression systolique (1 à 2 centimètres Hgd'après WEISS) et risquerait d'occasionner des hernies ou un éclatement de la membrane caoutchoutée soumise à de trop fortes pressions intérieures. Il faut donc procéder à l'application du brassard avec attention et méthode. Le bras gauche se prête d'ordinaire mieux à cette application, au moins avec le modèle courant de brassard. Après avoir été aussi complètement que possible vidée de l'air qu'elle contenait, la manchette est passée sous la face interne du bras et appliquée de telle façon que la partie moyenne de la" poche caoutchoutée corresponde à la région humérale et que le
MÉTHODE DE RIVA-ROCCI 29
tube de communication avec la soufflerie se trouve à la.partie inférieure. Exactement maintenue dans cette situation, les doigts ramènent autour d'elle l'extrémité libre en veillant à ce que l'application ne cesse jamais d'être très immédiate et assez serrée; puis, .la. bride est passée tout autour et solidement fixée. En essayant d'introduire le doigt entre la manchette et le bras, on s'assure, du reste, "que l'adaptation est suffisante. ■ Certains brassards," pour éviter le contact froid et-désagréable du caoutchouc avec la peau sont revêtus à l'intérieur d'une étoffe très souple. D'autres (SAHLI, VAQUEZ, OLIVER), au lieu d'avoir un manchon
manchon complet, n'ont qu'une, pelotte assez large que l'on superpose à la face interne du bras ; cette disposition, défendable comme nous le verrons plus loin, lorsqu'il s'agit de la méthode oscillatoire de détermination; de la pression systolique, ne semble pas présenter d'avantage appréciable avec la méthode de RIVA-ROCCI.
B. La soufflerie^ destinée à envoyer l'air sous pression dans la manchette et le manomètre, affecte de grandes variétés dans les divers appareils, C'est tantôt une simple poire a valve (MARTIN, GROS), dont l'inconvénient est d'envoyer de l'air par à-coups nuisibles dans le cas où l'on se sert d'un manomètre métallique ; tantôt une pompe métallique, qu'il s'agisse d'une simple pompe de bicyclette avec réservoir d'air (VAQUEZ) ou d'un modèle plus compliqué et plus imposant (pompe de RECKLINGHÀUSEN) ; tantôt un compresseur plus ou moins volumineux agissant sur un ballon de caoutchouc à parois résistantes (.TAQUET, PAL, OLIVER). Quelques autres auteurs
FIG.i2. —Sphygmomanomètre du type RIVA-ROCCI; avec manomètre ., à Hg en U et poire à valve (modèle de MAHTIN).
30 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMETRIQUE
se sont résignés à conserver la simple soufflerie de Richardson-qui avait déjà été conseillée et employée par RIVA-ROCCI et qui, de tous les appareils, est certainement le moins coûteux, le moins encombrant et de beaucoup le plus commode.
Cette question de la soufflerie est d'une grande importance car, dans la pratique courante, c'est souvent elle qui rend une mensuration de tension difficile ou vraiment très simple. J'ai tout essayé. et il ne me paraît pas douteux que rien ne vaut une bonne soufflerie de Richardson, à la double condition que la poire-réservoir soit suffisamment- résistante et suffisamment spacieuse. Quelle que soit
l'excellence du caoutchouc, cette résistance doit être assurée par une enveloppe dé tissu solide, bien ajustée aux extrémités, analogue aux couvertures de cuir qui entourent les ballons d'enfants. On trouve dans le commerce des souffleries de Richardson dont les parois sont parfaitement élastiques et résistantes, mais dont la capacité de la poire réservoir, à une pression de 10 centimètres Hg, est presque nulle ; rien n'est plus incommode. La poire-réservoir doit être assez grande pour que, l'ayant injectée d'air à une pression de 10 centimètres Hg par exemple, l'opérateur puisse, en prenant cette poire à pleine main et en s'aidant de l'appui du lit ou de la table, faire paseer assez d'air dans la manchette pour y élever la tension jusqu'à environ 25 centimètres Hg. Si la tension systolique du sujet dépasse ce chiffre, il suffit de quelques coups de pompe pour hausser la pression dans le réservoir à 12 ou 15 centimètres Hg ; ainsi, la main disposera d'une pression pouvant atteindre 3o centiFIG.
centiFIG. — Sphygmotensiomètre de VAQUEZ.
MÉTHODE DE RIVA-ROCCI
31
mètres Hg. S'agit-il au contraire de vérifier ou de préciser un chiffre de tension dans une échelle relativement basse, autour de 80 millimètres Hg par exemple, il suffira d'établir dans la poire une pression de 50 millimètres environ et une légère pression des doigts fera osciller cette pression entre 5o et 100 millimètres Hg. La pression de la main sur la poire réservoir, voilà, en réalité, le moyen d'insufflation le plus commode et le plus souple ; la soufflerie n'est là que pour alimenter cette poire et fournir à la main une prise et une quantité d'air suffisantes. De cette façon, l'opérateur disposé non seulement d'une échelle de pression assez étendue, mais pendant que l'une des mains explore la radiale ou l'humérale, il lui est facile par une série de compressions ou de décompressions successives
successives faire osciller, lentement et à plusieurs reprises, la pression delà manchette autour d'un certain chiffre, afin de fixer avec plus d'exactitude le moment précis' de la. disparition et de la réapparition des pulsations artérielles ou de tout autre phénomène pulsatile (vibrance numérale).
y. Le manomètre est soit un manomètre Hg avec ses diverses variétés (à cuvette, avec dénivellation de un millimètre seulement, pour 350 millimétrés Hg de pression (RIVA-ROCCI), à cuvette et à Jubé vertical démontable pour le transport (SAHLI), en U). ; soit un manomètre métallique, comme c'est le cas dans lé plus grand nombre des appareils; soit encore un manomètre à air comprimé, avec index de mercure (MAX HERZ, OLIVER, BENDIK) et gradué par comparaison avec un manomètre à Hg 1.
1 Comme les choses ne sauraient être trop.simples, un médecin américain, FAUGÈRES BISHOP, n'a-t-il pas imaginé un appareil fonctionnant avec un
FIG. 14. —Sphygmomanomèlre du type RIVA-ROCCI.
32 ' TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
On connaît les avantages respectifs de ces divers appareils, - En principe,, rien ne vaut, comme exactitude (et, j'ajoute, comme prix de revient), le simple manomètre à Hg, en U. Comme dit;le proverbe, qui peut boire à la source, ne boira pas. à la coupé. Il faut avoir éprouvé les mécomptes de nombre de manomètres métalliques' pour goûter la sécurité que donnent les oscillations de la simple^ colonne, mercurielle. Dans une installation de cabinet, cet appareil doit être nettement conseillé ; fixé à l'angle "d'une table, de telle façon que seule la partie située au-dessus des deux ménisques dépasse le plan de la table, il sera à la fois peu encombrant et suffisamment stable. A l'avantage d'une parfaite exactitude; il joint celui d'offrir la possibilité de fréquentes vérifications d'autres manomètres métalliques plus portatifs, vérifications que l'on risquerait fort de différer indéfiniment sans cela. — Ce sont ses qualités portatives, en même temps que son volume réduit, qui dans la pratique ont généralement fait préférer le petit manomètre métallique (type Potain) et qui en font un bon appareil, à condition que l'on prenne soin d'en faire vérifier de temps à autre la graduation à l'aide d'un manomètre à Hg.
manomètre à eau! La compression dans la manchette est réalisée, non plus par l'air, mais par l'eau, au moyen d'un réservoir en caoutchouc rempli d'eau, que l'on peut porter à une hauteur déterminée, et se reliant au brassard par un tube de caoutchouc gradué en centimètres; la pression exercée dans le brassard correspond exactement à la hauteur à laquelle a été porté ce réservoir. Ceci donne la note de nombre de « perfectionnements » apportés à la méthode primitive de RIVA-ROCCI.
Dans le petit appareil simplifié de MAX HERZ, utilisant un manomètre à air comprimé, il n'existe pas de pompe ou de soufflerie. La petite manchette
destinée à être appliquée sur l'avant-bras est un petit sac plein d'air et c'est la main qui, en l'appliquant, fait office de compresseur.
FIG-. I5. — Sphygmomanomètre de HERZ. — Le petit manomètre à air comprimé est tenu par la main du sujet.
METHODE DE RIYA-ROCCI 33
C'est là une précaution, non de luxe, mais de nécessité ; tout au moins, jusqu'à ce que nos constructeurs se soient'décidés à nous donner des instruments doués d'une certaine stabilité, Nombre des petits manomètres métalliques que j'ai pris là peine de vérifier (et dont la graduation avait pu être exacte au moment de la vente) donnaient après quelque temps d'usage une surestimation notoire, oscillant en général autour de 1 centimètre et pouvant atteindre jusqu'à 2 centimètres et demi Hg 1. Ce qu'il y a de. plus'grave, c'est que cette surestimation n'est d'ordinaire pas fixe, mais varie pour un même manomètre suivant le chiffre de pression (passant par un maximum dans la zone inférieure ou moyenne, pour s'atténuer plus haut); ce qui dénote, non plus un simple décalage, mais un régime irrégulier de l'appareil.
Tous ces écarts sont d'autant plus regrettables que le praticien n'a guère le loisir ou le moyen de faire procéder à des vérifications comparatives renouvelées ; même connus, ils donnent lors de chaque mensuration le souci d'effectuer une réduction, dont la marge exacte variera par surcroît avec le chiffre de tension. Ces erreurs, ces nécessités de corrections à chaque mensuration finissent par devenir tellement obsédantes que l'on comprend lés médeVeut-on
médeVeut-on une des principales causes de déréglage (dans le sens de la surestimation) de certains de ces appareils? Il suffit, comme j'ai pu m'en ; rendre compte avec mon ami le Dr C. JULIEN, d'enlever le petit butoir contre - lequel vient s'arrêter l'aiguille au zéro.
L'aiguille de la plupart de ces petits manomètres métalliques est montée à ; friction sur un axe rond, non sur'un axe carré. Cette disposition facilite^ pour le constructeur ou le vendeur, le réglage de l'appareil par comparaison avec un manomètre à Hg. Que se produit-il à la suite d'un peu d'usage de l'appareil? Soit; que -le zéro véritable se trouve un peu au-dessous du butoir, soit que l'élan de l'aiguille lors.d'une décompression rapide, tende à l'entraîner passagèrement au-dessous de ce point, cette.aiguille vient heurter brusquement le cran d'arrêt et tend à se déplacer sur son axe vertical d'une quantité qui doit atteindre théoriquement la valeur du dépassement virtuel- du zéro et qui n'est limitée que par la friction plus ou moins serrée de son montage sur l'axe. On assiste dès lors fatalement à un décalage progressif de l'aiguille sur le cadran, toujours dans le sens, de la surestimation comme il est facile de le comprendre;, décalage qui vient bien inutilement s'ajouter aux variations qui peuvent résulter des déformations de l'âme métallique de l'appareil. Avec un butoir, axe: carré ; avec un axe rond, pas de butoir. La. précaution est vraiment élémentaire et l'on peut s'étonner que certains, constructeurs ne l'aient pas Compris.
L. GALLAVARDIN. . 3
34 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE . -
cins qui, au moins u cabinet, adoptent un modèle de manoniètrè à Hg 1.
' §. il reste, enfin, à rélier ces trois, pièces (manchette, Soufflerie manomètre) par une Sérié dé tubes de caoutchouc et dé pièces métalligues de raccord. Les tubes de caoutchouc' seront à paroi résistante, à faible lumière, et assujettis soigneusement afin d'éviter, toute fuite d'air. Deux pièces' métalliques seront nécessaire: l'une, simple raccord en T Sur lequel sera branché le manometre; l'autre, : qui conduira de la soufflerie au tube dé la manchette-Cette dernière pièce portera sur une troisième branche, un robinet permettant dévider d'air, complètement et rapidement, tout le système, afin de Soulager le bras au cours d'une exploration un peu longue ou entré deux explorations 2, comme aussi d'abaisser de quelques centimètres de Hg là pression de l'air contenu dans la poire-réservoir. Elle pourra présenter sur une quatrième branche une vis à molette, pour permettre d'abaisser la tension lentement et progressivement;
1 J'attire aussi l'attention sur ce fait que ces erreurs de graduation, lorsr qu'elles ne sont pas corrigées, ont pour conséquence non seulement un. decar lage, mais une altération de.la formule sphygmbmànbmétriqué. Comme nous._ le verrons.plus loin, la tension systolique et la tension diastolique, au cours . des variations pathologiques de la pression, ne s'élèvent, ni ne s'abaissent parallèlement; la première présentant des excursions qui sont environ le double de celles de. la i seconde. On comprend donc qu'une surcharge uniforme, imposée à ces deux valeurs, corresponde eu réalité à une surestimation injustifiée de la tension minima. Voici Un malade qui présente, par exemple, une tension réelle de 160/90 millimétrée Hg, ce qui constitué une hypertension modérée et de type noriiial. Le Manomètre, qui donne une surestimation de
2 centimètres Hg, indiquera 180/iio; ce qui devient une hypertension non seulement sensiblement plus forte, mais de type déjà nettement anormal. A une pression minima de 110 millimètres Hg, devrait correspondre en effet une pression maxima de 200 millimètres Hg environ, au moins lorsque le type tensionnel est normal, ce qui est le bas dans l'exemple que nous avons choisi. Un manomètre mal gradué ne se borné pas à exhausser artificiellement les chiffrés de tension ; il fait croire à une altération de leur rapport et. tend à ébaucher cette modification du type tensionnel que nous apprendrons plus loin à connaître sous le nom d' « hypertension diastolique. »
2 La compression un peu prolongée de là manchette peut donner lieu à une sensation pénible de turgescence de l'avant-bras el de la main ou à un engourdissement passager. Dans une Observation que je crois unique, MOHR (1912.) à rapporté un fait de " thrombose des veines superficielles du bras à la suite dé mensurations répétées de la tension artérielle. » Sans doute était-ce là une simple coïncidence, car il s'agissait d'un tuberculeux cachectique qui fit presque en même temps des thromboses des veines des membres inférieurs.
METHODE DE RIYA-ROCC) . 35mais,
35mais, le mode de compression et de décompression à l'aidé dé la main agissant sur la poire-réservoir, sa présence devient presque superflue.
Que, maintenant, l'on combine entre eux ces divers élements, que l'on varie tantôt la soufflerie ou le choix du manomètre, tantôt la disposition des raccords ou même simplement le mode de fixation de la manchette, et l'on aura réalisé un dés innombrables sphygmomanomètres « type RIVA-ROCCI » actuellement dans le commerce et dont la nouveauté se borne bien souvent au nom de l'auteur ou du constructeur 1.
h. Appréciation delà disparition du pouls au-dessous de la compression. — Cette disparition peut être notée par la simple palpation digitale ou par d'autres moyens plus compliqués réalisant une sorte de palpalion instrumentale.
?.. Palpation digitale. — C'est le procédé le plus commode et le plus généralement adopté. L'opérateur, debout ou assis près du malade, palpe attentivement et avec recueillement la radiale pendant que l'air pénètre dans la manchette. Cette palpation ne doit pas être faite négligemment avec un doigt, mais avec trois doigts méthodiquement et étroitement appliques sut l'artère, formant une sorte de tunnel que devra traverser l'ondée sanguine pu sur le bord supérieur duquel elle viendra simplement buter ; il est bon d'éduquer spécialement les doigts d'une main, de la droite par exemple, afin, d'aiguiser leur sensibilité. Bientôt; lés plusations diminuent de force et d'amplitude, deviennent presque imperceptibles, puis disparaissent complètement. Ou laissé alors retomber lentement là pression, en se tenant prêt à noter le niveau de la réapparition de la première pulsation, qui, pour des raison que nous exposerons plus loin, est en général un peu inférieur à celui de sa disparition. Pour fixer ce chiffre avec plus de précision, 04 fait monter et descendre plusieurs fois la pression autour dti peint a déterminer, ce qui est particulièrement facile en saisissant à pleine main la poire-réservoir de l'appareil, comme nous l'avons dit plus haut: Lorsque la determi1
determi1 eux les spygmomanomètres dé MARTIN, COOK, STANTON, JANEWAY, MUMMERY, OLIVER, AFRED MARTIN, GROS, ERCIVAL,
NICHOLOSON, LEPINE, etc., Dans le sphygmotensiomètre de VAQUEZ, le manomètre se trouve fixe à la manchette brachiale.
36 TECHNIQUE SPHYGMOMANQMETRIQUE
nation du chiffre de pression se, prolonge au delà de quelques secondes, et, à plus forte raison, si l'on se propose de faire de nombreuses mensurations, il est indispensable de vider d'air l'appareil, afin de soulager le bras engourdi par une constriction un peu prolongée et d'éviter la stase veineuse, qui pourrait venir vicier les résultats. Il est même indiqué, sans enlever la manchette brachiale, de laisser reposer le malade pendant quelques secondes et de mettre
un certain temps entre des mensurations successives. La pression a toujours.de la tendance à s'abaisser et, comme nous le verrons plus loin, c'est toujours le chiffre le plus inférieur qu'il conviendra de retenir.
La disparition des pulsations peut être appréciée, soit au niveau de la radiale, comme on le fait d'ordinaire, soit encore sur le trajet de Fhumérale; immédiatement au-dessous du bord inférieur de la manchette. Si l'humérale est superficielle et se laisse facilement, pincer contre le plan osseux sous-jacent, l'exploration des pulsations est particulièrement facile et donne parfois un chiffre supérieur de quelques millimètres, à celui fourni par l'exploration.de la radiale 1.
1 D'après un élève de SAHLI, BAUMANN, qui a étudié ce point spécial en 1917, la palpation numérale donnerait un chiffre supérieur à la palpation radiale, d'ordinaire de 2 à 8 millimètres, très exceptionnellement de 15 à 20 millimètres Hg, et devrait être systématiquement pratiquée.
FIG. 16.— Mensuration de la pression systolique par la méthode de RIVA-ROCCI.
MÉTHODE DE RIVA-ROCCI 37
Au contraire, si l'artère est située profondément et se trouve difficilement accessible du fait de l'adiposité du sujet, le chiffre perçu à son niveau reste égal et devient même inférieur, comme nous l'avons souvent constaté, à celui de la radiale. Dans les cas difficiles, on se trouvera bien d'explorer successivement les deux artères et d'adopter le chiffre le plus élevé ; nous verrons, du reste, plus loin, que l'exploration de, l'humérale sera capable de fournir des renseignements précieux dans la détermination de la pression diastolique. Si la manchette est appliquée sur la cuisse ou la jambe, c'est au niveau de la pédieuse ou de la tibiale postérieure que portera l'exploration ; les renseignements fournis par l'artère qui donnera les chiffres les plus élevés seront, là encore, adoptés de préférence.
En procédant avec attention, et avec un peu d'habitude, on obtient dans une série de mensurations successives, des chiffres'se rapprochant beaucoup les uns des autres et dont l'écart maximum ne dépasse guère 2 à 3 millimètres Hg. Les chiffres obtenus par dés expérimentateurs différents, à condition qu'ils soient un peu exercés, arrivent à coïncider presque exactement; KILGOBE rapporte qu'ayant fait plus de 500 mensurations comparatives avec un aide exercé, l'écart moyen des chiffres obtenus ne dépassait pas 1 millimètre et quart. SCHCLTZE, en expérimentant avec des médecins habitués à la manoeuvre, conclut que pour atteindre la meilleure moyenne il faut au moins six mensurations successives ; mais il s'agit là d'approximations au millimètre Hg qui ne sont guère, nécessaires en pratique. L'auteur met encore en évidence ce fait que l'écart des chiffres, trouvés au cours de mensurations successives, augmente beaucoup dans les recherches faites sans regarder le manomètre, alors qu'il diminue notablement si l'expérimentateur suit des yeux l'instrument. Dans le premier cas, en effet, la tension d'esprit, au lieu d'être guidée et ménagée par l'approche du chiffre trouvé précédemment, est pour ainsi dire constante; d'où, une fatigue rapide qui . émousse les sensations, en même temps qu'elle favorise l'apparition du pouls subjectif dans l'index explorateur.
Ce pouls subjectif, dû à la perception de pulsations dans les artères; propres du doigt explorateur, peut être une cause d'erreur assez gênante. Il varie beaucoup comme moment d'apparition : en àpphyant lé doigt sur une table de bois, il apparaîtrait chez les uns, d'après-SCHULTZÈ, au bout de 10 secondes,chez d'autres au boyl de
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20 secondes, et chez d;autres enfin ne se:manifeste pas encore après une minute, Il diffère aussi comme intensité, la sensation perçue pàf certains sujets pouvant être assez nette, assez troublante, paour qu'il soit vraiment impossible à l'observateur de dire s'il s'agit d'un poufs subjectif ou objectif.
Il résulte de toutes ces. circonstances qu'il y: a pour chaque observateur, à édupation égale, une sorts de coefficient personnel tenant à la force d'attention dont il est capable, à la finesse du tact, à.la:' présence ou non du pouls subjectif ; mais les écarts constatés, . nous le répétons,.sont'toujours minimes et ne dépassent guère ; quelques, millimètres,.
(3. Palpation instrumentale. — La substitution au palper digital d'une notation instrumentale excluant tout coefficient personnel a tenté de nombreux observateurs. Là encore, la multiplicité des appareils ne doit pas faire illusion sur les méthodes employées qui se retrouvent à peu près partout identiques.
Dans une première série d'appareils, c'est le tracé du pouls radial qui est le témoin des modifications de la circulation au-dessous delà, manchette brachiale.— Le plus souvent, suivant une méthode inaugurée par MASING, SAHLI, JANGWAY, le tracé du pouls est recueilli directement par un sphygmographe. Il en est ainsi dans, les appareils, de BINGEL (1906), de JAQUET (1908), de STURSBERG (1909), de DAVENPORT WINDLE (1911), de KOLLS (1917), avec inscription automatique et continue. Une première difficulté de cette disposition tient, comme l'a fait remarquer avec raison SAHLI, à ce que, lors de l'insufflation de la manchette, brachiale, la turgescence veineuse de l'avant-bras, resserre les liens du sphygmographe, abaisse le ressort sur l'artère et fait monter la ligne générale du tracé en rnême temps que diminue l'amplitude des oscillations. Aussi, cet auteur a-t-il fait réaliser une modification du sphygmographe de JAQUET consistant en un petit support placé au-devant du ressort du sphygmographe, afin d'éviter que ce dernier n'arrive à écraser Fartère, La seconde difficulté est d'inscrire, au-dessus de la ligne du pouls, la courbe de la pression régnant dans la manchette brachiale, afin qu'il soit possible d'apprécier exactement à quelle valeur manométrique va correspondre telle ou telle modification du sphygmograninie et surtout la disparition complète des puisations. Dans les appareils de BINGEL et de STÜRSBERG, l'ascension ou la descente de, la colonne
MÉTHODE DE RIVA-ROCCI 39
de mercure du manomètre détermine, de 5 millimètres en 5 millimètres, à l'aide d'un mécanisme spécial, des interruptions électriques qui s'inscrivent par une série d'encoches au-dessus du tracé du
pouls; il devient donc facile, connaissant le point de départ dp la graduation, d'inscrire au-dessus de chacune de ces encoches le chiffre de la pression correspondante. Dans le sphygmotonographe
de JAQUET, l'inscription s'effectue, de façon beaucoup plus simple, par une courbe inclinée, tracée par le stylet d'un petit manomètre métallique communiquant avec la manchette brachiale et placé, directement sur le cardio-sphygmographe. Le point de départ de
FIG. 17.- Sypnotonographe de JAQUET.
— L'appareil consiste dans l'addition au
spygnio cardiographe de JAQUET d'un
tonômêtre insçrivantlalignë dépression
de la manchette,brachiale sur le papier
enfumé, au-dessus du tracé sphygmpgraphique.
sphygmpgraphique.
FIG. 18.— Détail du tonomèire du sphygmotonographe de
JAQUET.— Le jeu des leviers compensateurs assure un mouvement d'ascension régulier du stylet inscripteur de 1 mm. 8, pour chaque élévation de pression de 1 centimètre Hg.
Fig. 19. - .S'ehéma du mode d'application du sphygmotonographe de JAQUET, avec compresseur, manchette brachiale et appareil fixé sur l'avant-bras
40 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
cette courbe de pression est fixé à 5o millimètres Hg et. chaqueascension
chaqueascension 1 mm. 8 correspond (grâce à un mécanisme régulateur placé dans le tonomètre) à une élévation de tension de 1 centimètre
de Hg ; ce qui rend le calcul de la pression facile à faire pour chaque point du tracé. Nous nous (sommes servi dans nos essais de ce
FiGg. 20. — Détermination de la pression systolique à l'aide du sphygmotonographe de JAQUET. — La ligne inférieure montre la diminution progressive d'amplitude, puis la disparition totale des pulsations radiales, alors que la pression s'élève dans la manchette, brachiale. La ligne supérieure d'abord horizontale, puis obliquement ascendante, inscrit les variations de pression de cette manchette. La ligne horizontale, située à la partie moyenne, figure une ligne de.niveau à 5o millimètres Hg. Pour évaluer la valeur réelle de la ligne de pression au moment où se manifeste la disparition des pulsations radiales, il suffit de mesurer la distance séparant cette ligne de pression de la ligne de niveau, 1 mm. 8 correspondant à une élévation de pression, de 1 centimètre Hg au-dessus de 5o millimètres Hg. (Tracé réduit de 2/5.)
FIG. 2i. — Détermination de la pression systolique à. l'aide du sphygmotonographe de JAQUET. — Réapparition des pulsations radiales lors d'une pression décroissante dans la manchette brachiale.
MÉTHODE DE RIVA-ROCCI 41
sphygmotonographe de JAQUET, facilement adaptable sur le cardiosphygmographe ; nous avons pu nous convaincre qu'il était d'une application et d'un maniement commodes 1. — D'autres fois, le tracé artériel est recueilli par une pelote radiale et l'enregistrement assuré par l'intermédiaire d'un tambour de MAREY (DUSSENIUS, SINGER).
C'est à l'aide d'une manchette pneumatique appliquée sur l'avantbras ou le bras, qu'on enregistre, dans une seconde série d'appareils, la réapparition du pouls qui suit la baisse tensionnelle progressive du brassard préalablement gonflé à un taux supérieur à la pression systolique. — La manchet te antibrachiale a été utilisée par un très grand nombre d'auteurs. La disposition générale est identique; seul varié le procédé employé pour révéler les premières oscillations. Les deux manchettes, brachiale et antibrachiale, communiquant avec la même soufflerie, sont gonflées préalablement jusqu'à un niveau de pression que l'on considère comme supérieur à la pression systolique. Puis,, on- laisse tomber progressivement là pression, de centimètre en centimètre, jusqu'à ce que le bracelet palpeur antibrachial révèle le premier retour de la circulation. Ce retour dé la circulation peut être enregistré par un index graphique, lorsqu'on a pris soin de conjuguer le brassard avec une ampoule de MAREY ou tout autre appareil inscripteur. lien est ainsi dans les appareils de MÙNZER (1907), VAQUEZ (sphy.gm.osignal à inscription graphique, 1909), FRANCK- (191 I), DE. VRIES REILINGH (1913), BARRE et STROHL (19:17). Plus simplement, un index visuel suffit à l'indiquer. Cette disposition se trouve réalisée dans l'appareil de BLNG (1907) où la manchette est en relation avec un tube capillaire avec index liquide coloré, dans le sphj'gmosignal de VAQUEZ (1908) où un signal mobile, enfermé dans la même boîte que le manomètre, oscille dès que le retour du sang se fait sentir au niveau du brassard inférieur. Enfin, Toscillomètre de PACHON, mis en communication directe avec le brassard antibrachial, a été utilisé dans le même but par JARRICOT (1912), LIAN (1913), SURMONT. DEHON et HEITZ (1913). — D'assez nombreux
Le spygmotomographe de JAQUET a été mis obligeamment à notre disposition, avec quelques autres appareils, par MM, G. et E STREISGUTH, fabricants d'instruments de chirurgie à Strasbourg, que nous remercions de leur obli-
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auteurs,, afin de pallier à certains inconvénients de la, méthode
oscillatoire dans la détermination de la' pression systolique, ont
préconisé l'emploi d'une double manchette brachiale. Il me paraît évident qu'il ne s'agit là que d'une modification de la méthode
FIG. 22. —sphygmo-signal de VAQUEZ. — La manchette brachiale H est en communication avec le manomètre M ; la manchette antibrachiale B actionne le signal S, dont les oscillations' traduisent l'état du pouls . au-dessous de la compression ; le petit manomètre 0 renseigne sur la pression du réservoir d'air qui sert à injecter les deux manchettes.
FIG. 23. — Inscription graphique de la disparition et de la réapparition des pulsations artérielles au-dessous de la compression pneumatique. Tracé obtenu à l'aide de l'appareil enregistreur relié au sphygmosignal de VAQUEZ.
MÉTHODE DE RIYA-ROCCI 43
de BJVA-ROCCI, avec un brassard brachial inférieur servant de palpeur pour indiquer le retour de la circulation. Je citerai les brassards doubles de WYIHUW, d'AMBLARD (deux brassards de
6 centimètres), de BERGONIÉ, de FINGK (manchette brachiale composée de deux chambres à air de dimensions inégales, l'une supérieure, ayant la centimètres, l'autre inférieure, ayant 4 centimètres).
centimètres). et COTTEI (1912) ont, de même, proposé un brassard antibrachial double, d'une largeur totale de 12 centimetres, avec une chambre supérieure de 4 centimètres et une inférieure de 8 centimètres. Dan tous ces, cas, le brassard inférieur
FIG. 24. — Utilisation de l'oscillomètre fie PAÇHOIJ çqnynie palpeur antiibrachial, dans la mensuration de la tension systolique par la méthode de RIVA-ROCCI. (D'après-LIAN.)
44 . TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
est mis en communication avec un signal dé VAQUEZ ou un oscillomètre
oscillomètre PACHON.
y. Comparaison de la palpation digitale et instrumentale—- Quels sont les avantages réciproques de ces trois méthodes d'appré-: dation de la disparition des pulsations, au-dessous de la manchette brachiale : palpation simple, enregistrement graphique, contrôle visuel? Il est à peine besoin,de les signaler. La palpation digitalea pour elle la simplicité, la commodité, la rapidité, et surtout ne nécessite aucune instrumentation autre que celle de l'appareil de RIVA-ROCCI. La méthode graphique présente l'avantage dé supprimer tout coefficient personnel de l'opérateur et de laisser des documents écrits que l'on peut facilement annexer à une observation, mais elle est d'une application, sinon difficile, du moins longue et compliquée, et en tout cas impossible à pratiquer au lit du malade. La méthode visuelle, tout en étant d'une application plus facile que la méthode graphique, présente comme intérêt de se prêter ' aisément à une démonstration objective pour les assistants et d'atténuer les erreurs attribuables au coefficient personnel.
Une question beaucoup plus intéressante est celle de la sensibilité respective de ces diverses méthodes. Or, de tout ce que nous avons lu ou pu voir par nous-même en comparant ces trois méthodes, il résulte que la palpation attentive du pouls radial ou humerai est un procédé d'exploration d'une sensibilité au moins égale à celle de la méthode graphique ou visuelle. JANOWSKI, partisan cependant de la supériorité de la méthode graphique sur la palpation, écrit : « Fort de trois cents recherches comparatives, j'avoue que, par' l'emploi prudent de la palpation, il est possible d'obtenir dans un grand nombre de cas des résultats concordants avec ceux obtenus par le procédé graphique. » Comparant nous-même, chez cinq malades, les chiffres de pression systolique obtenus par la palpation, avec ceux relevés à l'aide du sphygmo-signal de VAQUEZ OU du sphygmotonographe de JAQUET, nous avons constaté que c'est . presque toujours la palpation qui fournit le chiffre le plus élevé : le sphygmo-signal donnant des chiffres égaux ou inférieurs de 3 à 4 millimètres Hg, le sphygmotonographe donnant des chiffres presque toujours plus bas, de quelques millimètres à 1 centimètre Hg et même davantage. FRANCK., enregistrant le retour du sang à l'aide d'une ampoule de MAREY reliée à la manchette anti-
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brachiale, conclut également que « les chiffres trouvés coïncident presque exactement avec ceux données parla méthode palpatoire ». Enfin, SURMONT, DEHON et HEITZ, après avoir utilisé la manchette antibrachiale reliée à l'oscillomètre de PACUON, écrivent : « Pratiquement, les chiffres que nous avons obtenus sont sensiblement égaux à ceux que donne la méthode simplement palpatoire. Disons cependant, et JARRICOT avait fait de son côté la même observation, que, dans certains cas, les chiffres obtenus par la méthode objective sont quelque peu inférieurs à ceux donnés par la palpation simple-; la différence est en général minime, pouvant approcher cependant, dans quelques cas, la valeur de i centimètre Hg. » Il faut conclure de ceci que la palpation digitale est un procédé d'une grande sensibilité, au regard duquel tous les autres modes d'exploration paraissent bien n'être que d'inutiles complications. Je ne parle pas seulement de l'enregistrement graphique, méthode aussi vaine qu'inapplicable dans la pratique courante, mais même du contrôlevisuel à l'aide de l'oscillomètre de PACHON relié à la manchette antibrachiale. Je ne nie pas que, dans quelques cas exceptionnels, ce procédé ne puisse donner certaines facilités. Mais si l'observateur veut bien s'astreindre à consacrer au perfectionnement de son tact pulsatile le temps qu'il dépenserait, à chaque mensuration, à placer et à interroger la seconde manchette antibrachiale, je ne doute pas qu'il n'arrive très rapidement à pouvoir s'en passer et à rester fidèle aune technique et à une instrumentation qui ont fait leurs preuves.
Cette sensibilité de là palpation simple, qui étonne tout d'abord, surprendra moins lorsque l'on saura que MÜLLER et BLAUEL ont trouvé ce mode d'exploration, à peu de chose près, aussi sensible (pour apprécier l'arrêt pu le retour des pulsations) qu'un manomètre mis directement en communication avec l'artère radiale. En effet, chez un malade devant subir l'amputation du-bras, une manchette brachiale ayant été placée du côté sain, une autre du côté à opérer, ils constatèrent que le doigt explorateur du côté sain annonçait la disparition des pulsations à peu près exactement au même moment (à 5 millimètres Hg près) où, du côté à opérer, le manomètre mis en communication avec la radiale montrait la cessation de toute oscillation! N'est-ce pas une nouvelle preuve, expérimentale cette fois, que la palpation attentive, pratiquée par un observateur un
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peu exercé, est capable de renseignr exactement sur le moment où cesse se rétablit la circulation dans l'artêré explorée?
. AUSES D'ERREURS. n à adressé beauoup de critiques a la méthdé de RIVA-ROCCI. Il était impossible de ontester la justesse du principé sur lequel elle repose, difficile d'invoquer (comme pour : l'appareil de OTAIN) ne compression inégalé ou- sur un plan insuf fisamment résistant d l'artèr explorée, puisque la pression se trouve répartie également et uniformément tout autour du membre. Mais du moins, pouvait-on faire, remarquer.avec vraisemblance que les chiffrés obtenus devaient être viciés par la résistance propre des parties interposées entre lé milieu sanguin artériel et le milieu aérien de la manchette (membrane de caoutchouc, parties molles, paroi artérielle).
a. La membrane de caoutchouc, pourvu qu'elle suit Suffisamment, mince et souple, ne doit offrir qu'une résistance minime; car,- bien : que Supportant une forte pression, elle n'est pas distendue par cette pression; mais simplement appliquée fortement Sur les téguments; GÙMPRECHT, qui à étudié cette Pause d'erreur pour là manchette de RiVA-ROCCI, l'a trouvée négligeable.
b. Il n'en est peut-être pas de même pour les parties molles quirecouvrent le vaisseau (peau, tissu cellulo-adipeux; aponévroses, muselés). Leur épaisseur; vraiment réduite au minimum chez certains sujets âgés et amaigris chez lesquels on sent l'humérale battre directement sous la peau au niveau du bord interne du biceps, peut devenir considérable chez des adultes vigoureux et muselés ou chez des sujets obèses V. BASCH; POTAIN estimaient à 6 où 8 milli- . mètres, au maximum, l'erreur due aux tissus interposés entré l'ampoule sphygmomanométrique et la radiale. RILLIET (1904), qui à expérimenté avec l'appareil de POTAIN, conclut que l'erreur est environ de 10 millimètres Hg par 1 ô'millimètres d'épaisseur des parties molles. GUMPRECHT, opérant avec la manchette de RlvAROCCI, admet au contraire que l'interposition de ces parties malles, peut conduire à une surestimation de 3 à 5 centimètres Hg; mais ces résultats . sont certainement dus à ce qu'il a expérimenté sur des Cadavres aux tissus durcis et rigides.
On à plutôt tendance à admettre actuellement, avec SAHLI et de nombreux autres auteurs, que l'influence des parties molles
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sans être absolument négligeable et touT eN restant assez variable suivant les individus, se trouve cependant minime à la condition expresse qu'au moment de la mensuration, les muscles du sujet soient dans un relâchement aussi complet que possible. HENSEN aurait pu relever des différences de 5 a 80 millimètres Hg dans des lectures faites simultanément aux deux bras, l'un inerte, l'autre soulevant un poids volumineux.
Ce qui prouve bien que l'épaisseur des parties molles n'a pas une très grosse importance, c'est que les auteurs qui ont relevé à l'aide de la manchette la pression au niveau de la fémorale et de l'humérale (artères qui, d'après VOLKMANN, auraient une tension sensiblement égale) ont presque toujours trouvé des chiffrés à peu près superposables, bien que l'épaisseur des parties molles soit beaucoup plus considérable à la cuisse qu'au bras. Enfin, démonstration plus directe encore, HENSEN et plus récemment JANEWAY (1909), prenant la tension sur les deux membres supérieurs de sujets présentant une atrophie musculaire unilatérale très marquée, Ont noté de côté et d'autre des chiffres exactement superposables. Dans le cas de JANEWAY, il s'agissait d'un charpentier, grand brightique, présentant, à la suite d'un ankylose du coude remontant à quarante ans, un bras très atrophié (21 centimètres et demi); alors que l'autre était au contraire très musclé (30 centimètres) ; des deux côtés la pression était identique, 300/180 millimètres Hg. Ce dernier auteur cite encore un obèse, fortement musclé et pesant 331 livres, qui n'avait qu'une pression systolique de 115 millimètres Hg, en dépit de l'épaisseur énorme des parties molles (circonférence du bras, 39 centimètres) ; on a peine à croire que; dans ce cas, le chiffre de pression, déjà assez réduit; ait été beaucoup surélevé du fait de l'épaisseur des parties molles.
c. La paroi artérielle n'est pas un facteur négligeable; Tous les auteurs se sont préoccupés de la résistance qu'elle est capable d'offrir à l'écrasement, résistance qui viendrait s'ajouter à celle des parties molles pour hausser le chiffre fourni par là méthode de RIVA-ROCCI.
D'après v. BASCH (1887), cette résistance varierait suivant l'état des artères, mais serait somme toute assez minime : 1 à 3 millimètres Hg pour des artères saines; 5 millimètres pour des artères athéromateuses. POTAIN la croyait très faible. MARTIN (1905), expé-
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rimentant sur des carotides d'homme, de cheval, de chien, arrive à des conclusions semblables et admet qu'une pression de 2 millimètres Hg suffit pour affaisser des artères saines, et une pression de 7 millimètres Hg pour triompher des artères athéromateuses. HERRINGHAM et WOMAK (1908) déterminèrent la pression nécessaire pour aplatir un segment d'artère prélevée sur le cadavre, segment où circulait un courant d'eau à une pression constante. Forts d'une cinquantaine d'expériences effectuées sur l'humérale, ils concluent que la résistance artérielle varie dans de très larges mesures et ne croît pas régulièrement avec l'âge : cette résistance à la compression oscillerait entre 4 et 24 millimètres Hg, avec une moyenne générale de 15 millimètres. Des chiffres moindres sont notés par SCHOLTYSSEK, SCHMIDT (1909), qui trouvent des valeurs de 3 à 8 millimètres Hg pour des artères provenant d'homme ou d'animaux divers.
WILLIAM RUSSEL (d'Edimbourg) s'est élevé, en 1907; contre l'opinion soutenue par v. BASCH, POTAIN, que la paroi artérielle, même sclérosée, n'offrirait à la compression qu'une résistance insignifiante. D'après lui, les expériences pratiquées sur des artères prélevées à l'autopsie ne signifient rien; la paroi artérielle étant susceptible d'offrir une résistance beaucoup plus considérable pendant la vie qu'après la mort, par suite d'un hypertonus presque permanent ayant pour effet de rétracter, d'épaissir, de durcir les différentes tuniques. L'idée est vraisemblablement juste. Mais RUSSEL exagère sans doute lorsque, pour se rapprocher davantage de cet état d'hypertonus particulier aux artères vivantes, il expérimente sur des tubes de caoutchouc d'épaisseur variable ou sur des artères préalablement fixées dans une solution de formaline à 5 pour 100 et leur trouve ainsi des résistances considérables. Il estime à 20 ou 40 millimètres Hg la surestimation de la pression artérielle attribuable à l'hypertonie, sans compter celle relevant de l'altération des parois. Aussi arrive-t-il à cette conclusion qu'il est impossible de parvenir chez les scléreux, en s'aidant des divers appareils sphygmomanométriques, à la détermination de la pression artérielle réelle. Ces appareils sont impuissants à faire la part, dans les chiffres fournis, de ce qui correspond à la pression sanguine et de ce qui dépend de l'hypertonie ou de l'épaississement de la paroi vasculaire. En revanche, le doigt, suffisamment éduqué et capable de
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faire la distinction entre l'artère normale et l'artère en hypertonie ou sclérosée, serait susceptible d'arriver à une plus juste estimation de la pression réelle; cela, même dans des vaisseaux de calibre ou de dimension différentes. A la suite de RUSSEL, WILLIAMSON (1909) fait également jouer un rôle important au spasme artériel. Pour lui, c'est ce spasme artériel, prédominant sur les artères des membres inférieurs par suite de l'hypertrophie de la musculeuse, qui devrait être tenu pour responsable des différences de tension relevées dans l'humérale et la fémorale, différences d'autant plus marquées que le sujet est plus hypertendu et dont la moyenne, selon lui, pourrait s'élever jusqu'à 32 millimètres Hg pour la pression systolique.
C'est aux idées ardemment défendues par RUSSEL et à l'inquiétude qu'elles firent naître dans les esprits, que nous sommes redevables de l'éclosion des travaux récents de JANEWAY et PARK (1910), de MACWILLIAM et KESSON (1913), destinés à nous fixer sur l'importance de la résistance de la paroi artérielle à la compression dans l'estimation de la pression sanguine. A tout prendre, dans le bras tout entier, c'est cette mince paroi qui est l'élément le plus important à considérer; car nul autre tissu n'est susceptible de présenter de telles variations du tonus ou de telles altérations structurales. Ce sont ces deux facteurs qu'il importe de considérer successivement et attentivement.
a. Causes d'erreur dues au tonus artériel — Pour comprendre toute l'importance de ce facteur, il est bon de rappeler l'intensité que peut atteindre le spasme de la tunique moyenne de certaines artères, dans des conditions pathologiques. Expérimentant sur des artères métacarpiennes et métatarsiennes de cheval, très altérées et à tuniques moyennes très hypertrophiées, MACWILLIAM et KESSON ont pu déterminer une contracture telle qu'il devenait impossible de faire passer dans la lumière du vaisseau une solution de RINGER à une pression de 300 et même de 440 millimètres Hg. La lumière, qui, dans le vaisseau relâché, atteignait 3 millimètres pour 1 millimètre de paroi, se réduisait à moins d'un demi-millimètre contre 2 millimètres d'épaisseur pariétale. Une soie, introduite avec peine à 30 millimètres, était fortement retenue et ne pouvait être extraite qu'avec une traction de 15, 20 et même 30 grammes. C'est bien le spasme qui est la cause de l'imperméabilité constatée. Si on le fait
L. GALLAVARDIN. 4
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céder complètement par un des moyens que nous signalerons plus loin, la même artère, qui ne pouvait livrer passage au liquide que sous une pression de 440 millimètres Hg, le laisse s'écouler sous des pressions progressivement décroissantes de 200, 100, et même finalement 10 millimètres Hg. De telles contractions ne sauraient, évidemment se produire dans les artères humaines, à un tel degré. Elles montrent, du moins, la nécessité dans laquelle on se trouve d'opérer sur des artères vivantes, et non mortes, lorsque l'on poursuit l'étude de leur résistance à la compression.
Les artères mortes peuvent bien présenter des altérations cadavériques, capables d'occasionner une certaine rigidité artificielle; mais elles sont toujours en relâchement musculaire. Ce qui caractérise les artères surviving ou, si l'on veut, en état de vie latente, c'est qu'elles sont capables de présenter des alternatives de contraction et de relâchement. Pour maintenir leurs propriétés fondamentales, il importe de les recueillir aussitôt que possible après la mort, de les conserver dans des milieux appropriés (sang défibriné et oxygéné, solution de RINGER, liquide de LOCKE, vaseline) et surtout en cold-storage, c'ést-à-dire à une température basse, à peine supérieure au point de congélation de la solution (de préférence entre zéro et 1 degré). Ainsi, elles se trouvent prêtes pour l'expérimentation.
Le dispositif des expériences est très simple. A travers un segment artériel d'une longueur suffisante, on fait passer un courant de solution de RINGER à pression connue, constante ou intermittente. Autour du vaisseau se trouve un manchon liquide, constitué par la même solution, et communiquant avec un manomètre indicateur de la pression à laquelle sera soumise l'artère. La température déjà solution interne et externe est réglée, suivant que l'on veut obtenir le spasme ou le relâchement. Les artères choisies de préférence sont les carotides de cheval ou de. boeuf, la mésentérique du boeuf, ou encore la carotide du mouton dont le diamètre est sensiblement celui de l'humérale de l'homme. Pour obtenir la contraction du vaisseau, on peut utiliser des solutions d'adrénaline ou de chlorure de barium à 2 pour 100 ; mais, le moyen le plus simple est de refroidir la solution qui, à la température de la chambre, suffit à provoquer un spasme intense. De même, le relâchement, qui peut être obtenu par une solution de fluorure de sodium à 1 pour 100 ou l'exposition
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pendant un certain temps à dès vapeurs d'ammoniaque, est produit beaucoup plus aisément et tout aussi sûrement, sans aucune altération de la paroi, par l'élévation de température des solutions environnantes à 38 ou 40 degrés. Parmi les autres moyens destinés à faire céder la contraction, citons le massage, la manipulation un peu prolongée, le pétrissage, la simple compression répétée ou prolongée du cylindre artériel.
Des expériences minutieusement conduites de MACWILLIAM et KESSON, il résulte que les artères relâchées peuvent être considérées comme n'offrant qu'une résistance insignifiante a la compression ; quelques millimètres Hg, parfois même un ou deux seulement. JANEWAY et PARK étaient arrivés exactement aux mêmes conclusions ; ils avaient vu des artères du diamètre de l'humérale ne demander qu'une pression de quelques millimètres Hg pour oblitérer leur lumière et ils admettaient que, chez l'homme, une paroi artérielle normale et relâchée ne devait jamais introduire une erreur de plus de 10 millimètres Hg. dans la mensuration de la pression sanguine. Dans les artères contractées, il en va tout autrement et les résistances peuvent être considérables. Dans les expériences de MACWILLIAM et KESSON, on voit des carotides de boeuf offrir une résistance ordinaire de 20 à 60 millimètres Hg et exceptionnelle de 150 à 160 millimètres Hg! Les artères métacarpiennes et métatarsiennes, épaissies, du cheval atteignent parfois les chiffres de 100 millimètres Hg, alors que les carotides de mouton (plus comparables à l'humérale de l'homme) ne dépassent guère les chiffres de 10, 20 ou 30 millimètres Hg. Cette résistance à la compression est uniquement due au spasme de la musculature, En effet, si l'on substitue à la température basse celle de 38 à 40 degrés, la résistance du vaisseau tombe dans la carotide de boeuf, de 150 à 10 ou 15 millimètres Hg, dans les artères métatarsiennes du cheval de 100 à 20 ou même à 5 millimètres, et s'abaisse dans la carotide de mouton jusqu'à 1 ou 2 millimètres Hg. Ce serait une erreur de penser que les artères humaines soient capables de présenter, à la température du corps, dès états hypertoniques offrant les mêmes résistances à la compression que les artères étudiées in vitro, à la température ambiante. De leurs expériences effectuées avec des artères numérales humaines fraîches, recueillies après amputation ou post-mortem, JANEWAY et PARK concluent « qu'un degré de
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contraction hypertonique de l'humérale pouvant causer une surestimation de plus de 30 millimètres Hg est improbable pendant la vie ». MACWILLIAM et KESSON arrivent aux mêmes conclusions et ne font aucune comparaison entre l'intensité de la contraction observée dans leurs expériences sur les artères d'animaux et celles que sont capables de présenter, dans les conditions normales, les artères humaines.
Quelque relativement modéré que soit l'obstacle hypertonique s'opposant à la compression de l'humérale, dans l'estimation de la pression artérielle par la méthode de RIVA-ROCCI, ce qu'il importe de savoir, c'est que la compression répétée ou prolongée de l'artère constitue un excellent moyen pour le faire disparaître. — Expérimentalement, MACWILLIAM et KESSON ont montré que ces compressions n'avaient aucune action sur les artères mortes ou relâchées, dont la résistance à l'affaissement peut être considérée comme nulle. Sur les artères contractées, au contraire, les compressions répétées, ou même simplement la compression prolongée pendant deux ou trois minutes, agissent comme le massage, le pétrissage ou le roulement dans les doigts du tube artériel. Dans leurs expériences, à la suite de cinq compressions, on relève des chutes de résistance, pour des parois artérielles très contractées, de 96 à 56, de 60 à 40 et même de 114 à 26 millimètres Hg. En d'autres termes, on assiste à une chute progressive de la pression jusqu'au point précis où la contraction cesse ou s'abaisse à un reliquat irréductible. Attend-on quelques minutes, le spasme se reproduit : dans une de leurs expériences, on voit la résistance de la paroi tomber de 35 à 9 millimètres Hg et remonter après quinze minutes à 31 millimètres Hg 1. — Des phénomènes de tous points analogues se constatent dans la mensuration de la pression artérielle par la méthode de RIVA-ROCCI. Chez les sujets normaux, où « le tonus ordinaire d'une artère humérale ne pré1
pré1 noter qu'au point de vue expérimental l'épreuve de la compression ne permet pas d'affirmer que la résistance de l'artère est uniquement le fait du spasme. MACWILLIAM et KESSON, opérant sur des artères mortes, durcies par la formaline à 10 pour 100, observèrent une baisse de résistance de 80 à 4 millimètres Hg après huit compressions ; au bout de quinze minutes cette résistance était remontée à 32 millimètres pour retomber de nouveau à 6 millimètres. Il est probable que de tels obstacles, cédant à l'assouplissement mécanique et aux plicatures répétées, n'existent pas chez l'homme.
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sente pas de résistance appréciable à la compression », les compressions successives, même au nombre de 10 ou de 20, n'ont aucun effet sensible. Mais, pour peu qu'il s'agisse d'artères hypertoniques — et le cas est commun chez les individus hypertendus — on voit se produire une chute de tension variant de 1 à 3 centimètres Hg et pouvant même atteindre 5 centimètres. Hg (200 à 152 millimètres Hg, dans un cas de MACWILLIAM et KESSON). La compression digitale ou le massage de l'humérale produisent un effet identique. Ces expériences sont absolument confirmatives des conclusions auxquelles j'étais moi-même arrivé en 1912, dans une étude sur la baisse systolique de la tension artérielle lors de mensurations répétées. Dès ce moment, j'avais insisté avec HAOUR sur la nécessité de faire plusieurs mensurations successives et de noter seulement la tension systolique résiduelle. Comme ce point est d'une extrême importance dans la pratique et qu'il se rattache à la question plus générale de la baisse de la tension systolique au moment de la mensuration, j'y reviendrai en détail dans un instant 4.
0, Erreurs dues aux altérations des parois artérielles. — Nous avons vu plus haut que v. BASCH, MARTIN n'attribuaient que peu d'importance à l'athérome artériel parmi les obstacles apportés à la compression. Des recherches plus récentes confirment cette impression. D'après JANEWAY et PARK, la calcification artérielle, pourvu que l'on opère sur un segment d'une certaine longueur, n'augmente que peu la résistance à la compression; expérimentant sur des artères très calcifiées, ils notent qu'en moyenne la pression nécessaire pour les affaisser est supérieure seulement de 5 millimètres et demi Hg à celle nécessitée par des artères peu athéromateuses. Ils doutent que l'erreur ainsi introduite puisse excéder 20 millimètres Hg et pensent qu'elle est ordinairement de 10 à 15 milli1
milli1 procédés ont été imaginés pour éliminer complètement, dans la mesure dé la pression, l'influence de la paroi artérielle. La méthode préconisée par DE VRIES REILINGH, qui consiste à substituer à la mesure de la pression artérielle celle de la pression veineuse après turgescence extrême de l'avantbras par compression circulaire modérée du bras, est ingénieuse. Mais son application est longue et pénible, compliquée du fait de la nécessité d'emploi d'un phléthysmographe, assez incertaine enfin, car il est loin d'être prouvé que, dans ces conditions, la pression dans les veines superficielles de l'avantbras arrive à égaler la pression artérielle systolique.
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mètres. MACWILLIAM et KESSON vont plus loin et, après de nombreuses expériences sur des artères très altérées et très épaissies, ils affirment n'avoir jamais rencontré de résistance appréciable qui ne puisse s'expliquer par le spasme, c'est-à-dire qui ne cède aux moyens qui font cesser le spasme. La raison de ce fait, en apparence paradoxal, est simple. Les altérations athéromateuses, les calcifications, quelque accusées qu'elles puissent être, ne se présentent jamais d'une façon absolument continue sur une étendue de 10 à 12 centimètres; il suffit dès lors, comme l'ont montré ces derniers auteurs, de la persistance d'un point plus souple sur un cylindre artériel de cette longueur pour permettre un affaissement circulatoire normal 1.
Rappelons enfin, pour clore cette discussion sur l'influence de la paroi artérielle, que MUMMERY et HILL, en écrasant par la compression d'un brassard une fémorale dénudée chez le chien, ont trouvé, à 1 ou 2 millimètres Hg près, le même chiffre que celui que l'on pouvait lire sur un manomètre à Hg introduit dans la fémorale du côté opposé.
C. CHIFFRES OBTENUS. — Il est difficile de fixer le chiffre de la tension systolique normale, cette valeur étant susceptible de varier dans d'assez grandes limites suivant les dispositions individuelles. On admet cependant que les limites physiologiques de ces variations sont comprises entre 100 et 130 millimètres Hg. On peut donc adopter, comme moyenne ordinaire, le chiffre de 440 à 420 millimètres. Hg, 100 millimètres Hg constituant une valeur nettement faible et 130 une valeur plutôt forte 2. Ces chiffres sont légèrement
1 H. MACCORDICK est allé jusqu'à prétendre que la rigidité des artères calcifiées est en partie un phénomène cadavérique. Pour cet auteur, les parois des artères contiendraient pendant la vie une substance analogue au mortier qui n'a pas « pris », mais qui « prend » après la mort. Une artère calcifiée, recueillie pendant une opération, est divisée en fragments. L'un d'eux est laissé à l'air libre, les autres sont plongés dans des solutions salines, alcalines ou acides. Seul, le fragment en solution alcaline garde sa souplesse et se laisse couper; les autres durcissent plus ou moins rapidement. Or, pendant la Vie, la réaction des tissus et des humeurs est alcaline et ne devient acide qu'après la mort.
2 Récemment, MELVIN et MURRAY ayant noté le chiffre de pression systolique au RIVA-ROCCI, par la méthode palpatoire simple, chez 59 sujets sains, de vingt à trente ans, ont trouvé comme moyenne 109 millimètres Hg.
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plus bas chez la femme que chez l'homme, un peu plus élevés peutêtre
peutêtre le vieillard que chez l'adulte. Nous n'avons pas besoin de
dire enfin qu'ils sont beaucoup plus forts (140 à 160), si l'on se sert
de la manchette étroite primitive de RIVA-ROCCI.
A l'état pathologique, onpeut constater des oscillations énormes autour de ces chiffres, la tension pouvant descendre jusqu'à 80
millimètres Hg et s'élever jusqu'à 280 millimètres Hg ou même davantage. On entrevoit quelle peut être la valeur séméiologique et l'importance de variations comprises dans une échelle aussi étendue, pouvant aller non seulement du simple au double, mais du simple au triple ! Car il ne saurait être indifférent que le sang circule dans nos artères avec une tension de 100, 200 ou de près de 300 millimètres Hg !
Pour que les chiffres de tension systolique soient valables, plusieurs conditions doivent être remplies.
a: Notation a la hauteur du coeur. — Les chiffres indiquant la pression systolique doivent, de toute nécessité, être recueillis à
la hauteur du coeur; sans quoi, un certain degré de pression hydraulique (facile à calculer par là distance verticale qui sépare le point exploré du niveau du coeur) vient forcément se retrancher ou s'ajouter à la tension sanguine. Le niveau du coeur, auquel doivent être reportées toutes les mensurations, peut être approximativement fixé au milieu d'une ligne allant perpendiculairement de la
partie inférieure du sternum à la colonne vertébrale.
Lorsque la manchette est appliquée à la partie moyenne du bras, le malade étant assis et l'avant-bras reposant sur une table, ou le malade étant couché son bras étendu le long du corps, elle peut être considérée comme en bonne position. Toutes les fois que l'on s'écartera de cette situation et, à plus forte raison, si l'on prend la tension sur d'autres parties du corps (jambe, cuisse, avant-bras),
les chiffres ne seront comparables entre eux, sous peine des plus grossières erreurs, qu'après avoir subi une correction les ramenant à la hauteur du coeur, Il suffira pour cela d'apprécier en millimètres Hg la hauteur de la colonne sanguine séparant le point exploré du niveau cardiaque, et de soustraire ou d'ajouter cette valeur au chiffre trouvé primitivement, suivant que le point exploré se trouvera au-dessous ou au-dessus du coeur.
Quelques exemples empruntés aux constatations de nombreux
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expérimentateurs montrent l'importance de cette règle. POTAIN (1902) s'était déjà préoccupé de cette question et avait insisté sur ces dénivellations de pression dans les mensurations effectuées au niveau de la radiale ou de la temporale : « Chez un sujet de taille moyenne, écrivait-il, la dénivellation du poignet, de la position la plus haute à la plus basse qu'il puisse prendre, est d'environ 90 centimètres. Là colonne de sang ayant cette hauteur donnerait une pression de 7 centimètres Hg à peu près. Or, 6 à 8 centimètres Hg de différence entre les deux pressions est ce que j'ai constaté dans tous les cas ou j'ai fait cette recherche, qu'il s'agisse d'hommes ou de femmes, de sujets jeunes ou âgés. Il suffit de déplacer l'avantbras de 13 à 14 centimètres dans le sens vertical pour apporter dans le résultat de l'exploration une différence d'un centimètre Hg. On obtient d'ailleurs des résultats analogues quand l'exploration porte sur la temporale et qu'on examine le sujet alternativement couché, assis, ou debout. Chez une jeune fille étendue, il suffisait d'élever la tête avec un oreiller pour voir la pression s'abaisser aussitôt de près d'un centimètre; et cet abaissement se trouvait, comme tout à l'heure, en rapport avec le degré de la dénivellation qui était d'un peu plus de 10 centimètres». Des constatations analogues furent faites sur les artères des membres inférieurs par SANFORD (1908), HILL et FLACK (1909), HILL et ROWLANDS (1012), DEADBORN (1915). Dans les expériences de HILL et FLACK, deux manchettes étaient appliquées chez un sujet sain, à la cuisse et au bras, et la lecture des pressions était faite simultanément en se guidant sur la disparition des pouls radial et tibial postérieur. Dans la situation horizontale, la pression était exactement la même, à 2 millimètres Hg près ; alors que, dans les autres situations (verticale, en L., la tête en bas), l'écart s'élevait à 50, 70, 80 millimètres Hg et représentait l'équivalent (à 1 ou 2 millimètres Hg près) de la hauteur de la colonne liquide séparant les deux brassards et calculée en millimètres de mercure. Dans la statistique de DEADBORN, portant sur une quarantaine de cas, la pression moyenne de la tibiale postérieure était de 154 millimètres Hg dans la station verticale, de 138 millimètres dans la station horizontale et de 70 dans la position élevée. J. FABRE (1913), étudiant l'influence du décubitus latéral sur la pression des deux radiales, observe également que c'est toujours au niveau du bras inférieur que la
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pression est le plus élevée; la dénivellation serait cependant moins accusée lorsque le malade est dans le décubitus latéral gauche, ce qui laisse à penser que, dans ce cas, d'autres facteurs entrent sans doute en ligne de compte.
b. Le moment de la disparition du pouls doit être noté de préférence à celui de sa réapparition.— Nous avons dit plus haut, et le fait a été universellement reconnu, que lors de compressions et de décompressions successives, le chiffre de tension auquel se produisait la disparition du pouls était toujours un peu supérieur à celui coïncidant avec sa réapparition. L'écart entre ces deux valeurs est ordinairement de quelques millimètres seulement ; mais il peut atteindre et même dépasser 1 centimètre Hg, De ces deux chiffres, lequel adopter?
De nombreux auteurs, notamment LÉONARD HILL, JANEWAY, conseillent de noter le chiffre de réapparition du pouls radial au moment de la baisse de tension dans la manchette : la raison qu'ils invoquent est que cette réapparition est un phénomène plus soudain et plus facilement perceptible que l'extinction progressive des battements.
L'argument est de peu de valeur, et il nous semble préférable de situer l'index systolique au moment précis de la disparition des dernières pulsations. On croit, dans un premier essai, avoir saisi cette extinction à 120 millimètres Hg car il n'existe plus rien à 130 ou 140. Laissons alors retomber la pression à 115, 110 millimètres Hg pour avoir une pulsation de retour tout à fait nette, ou même un peu plus bas afin de repérer à nouveau le pouls radial dans sa plénitude. Puis, par une compression nouvelle, lente et progressive, efforçons-nous de poursuivre en quelque sorte vers un niveau supérieur de pression la série des pulsations artérielles à amplitude décroissante. A 130 millimètres, on perçoit encore quelque chose, à 135 plus rien. On note alors 130 millimètres Hg, comme chiffre de pression systolique, car c'est immédiatement au-dessus de ce taux que se produit l'extinction de tout battement. L'exercice est excellent pour perfectionner l'éducation tactile des pulpes digitales. Le principe ne l'est pas moins car, tant que le sang arrive jusqu'au doigt, on est bien forcé d'admettre que les parois artérielles ne sont pas accolées d'une façon permanente et que le taux de la pression systolique n'a pas été dépassé dans le brassard.
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Cet écart entre le chiffre de la disparition et celui de la réapparition du pouls a été diversement interprété, — Pour certains, il tiendrait à, ce que, dans un cas, on mesure la pression terminale et, dans l'autre, la pression latérale de l'humérale, Le chiffre obtenu par la disparition du pouls indiquerait la pression terminale de cette artère ou la pression latérale, de la sous-clavière, car à ce moment l'artère humérale se trouve oblitérée. Celui fourni par la réapparition du pouls se trouve au contraire plus faible car, la continuité du jet sanguin étant rétablie et les résistances périphérie ques commençant à influer sur lui, on mesure non plus la pression' terminale, mais la pression latérale de l'humérale qui, naturellement, se trouve un peu inférieure à la pression latérale de la sousclavière.— A cette explication un peu précieuse, il paraît plus simple d'opposer l'espèce d'inertie offerte par les parois artérielles, complètement accolées pendant un certain temps, à la pénétration de la première ondée systolique. On comprend que cette ondée, en se creusant un chemin, perde une partie de la force qui lui permettrait d'arriver jusqu'à la radiale. Lors d'une compression progressive, pareil obstacle n'existe pas au même degré; l'accolement des parois n'ayant été réalisé que pendant un temps très court de la phase diastolique de la révolution cardiaque, et étant sans doute resté limité à la partie centrale du segment artériel emprisonné sous la manchette. Tunnel à percer dans le premier cas, simple anneau à forcer dans le second, telle est la raison qui fait que la réapparition du pouls s'enregistre fatalement à une pression manométrique de la manchette moindre que celle qui marque sa disparition. A cela, il faut ajouter que la vacuité relative du système artériel de l'avant-bras, qui succède à une compression un peu prolongée, n'est guère favorable à la transmission jusqu'à la radiale des toutes premières ondées systoliques qui ont réussi à franchir le défilé du brassard.
c. Nécessité de noter la tension systolique « résiduelle ». — Les chiffres de pression relevés chez un sujet au cours de mensurations successives, si l'on a soin de ramener très souvent la pression du brassard à o afin de soulager le malade et d'éviter la stase veineuse de l'avant-bras, peuvent être remarquablement fixes et différer à peine de 2 à 3 millimètres Hg. SCHULTZE cite une série de 50 mensurations effectuées chez un même sujet, en moins d'une heure
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par un observateur très exercé, avec un écart n'ayant jamais dépassé 1 millimètre et demi à 9 millimètres Hg! Mais le fait est loin d'être la règle et, le plus souvent, lorsqu'on fait une série de 7 à 8 mensurations, on constate une tendance très nette de la pression à s'abaisser: le chiffre le plus élevé étant presque toujours celui trouvé en premier lieu. De nombreux auteurs, notamment RECKLINGHAUSEN, SCHULTZE, ont insisté sur cette particularité et noté des abaissements de 1 centimètre et demi à 2 centimètres, la tension diastolique restant au contraire à peu près fixe. On a même cité des chutes pouvant atteindre 40 à 45 millimètres Hg (DEADBORN).
J'ai repris moi-même cette étude avec HAOUR, en 1912, sur une centaine de malades (hommes et femmes) atteints d'affections diverses. La tension était relevée cinq à six fois dans les cinq premières minutes, puis deux ou trois fois, ou davantage, jusqu'à ce qu'un quart d'heure se soit écoulé. En réglant ainsi nos expériences, nous avons remarqué que la baisse de la tension systolique était un fait presque constant. Ce n'est que chez 8 pour 100 des hommes examinés que nous l'avons vu faire défaut, chacune des mensurations successives nous ayant donné le même chiffre systolique stable. Chez les femmes, la chute systolique s'est manifestée dans tous les cas, faible ou forte, mais d'une façon générale toujours plus accusée que chez les hommes. Le tableau de la figure 26 montre que les chutes tensionnelles réalisées en un quart d'heure ont pu atteindre, chez 4 pour 100 des femmes, jusqu'à 3 centimètres et demi Hg; alors que, chez les hommes, nous n'avons jamais vu de chutes dépasser 2 centimètres et demi, et cela dans 2 pour 100 des cas seulement. Pour montrer l'importance qu'il y a à tenir compte de cette chute systolique dans les mensurations précises et comparatives de la tension artérielle, qu'il suffise de faire remarquer que cette chute, chez les femmes, a pu dans plus de la moitié des cas (58 pour 100) atteindre ou dépasser 1 centimètre et demi et, dans un quart des cas (24 pour 100), se trouver supérieure ou égale à 2 centimètres Hg. Chez les hommes, où les abaissements sont cependant moindres, nous trouvons encore dans les deux tiers des cas (68 pour 100) des chutes égales ou supérieures à 1 centimètre Hg et, dans plus d'un quart des cas (28 pour 100), des abaissements atteignant ou dépassant 1 centimètre et demi Hg. On peut invoquer, pour expliquer cet abaissement des chiffres
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indiqués par le manomètre : soit des modifications générales de la tension, provoquées par des influences psychiques (émotion du sujet, sensation pénible éprouvée lors de l'application du brassard)
ou par les mouvements qui ont précédé; soit des manifestations locales, causées directement par la compression numérale. —D'après les expériences de MACWILLIAM et KESSON, que nous avons relatées plus haut, il semble bien que la chute de la pression soit surtout le fait de la cessation du spasme artériel local et que le principal facteur
FIG. 26. — Chute totale de la pression systolique en quinze minutes.
MÉTHODE DÉ RIVA-ROCCI 61
de cette cessation soit les compressions répétées ou prolongées effectuées sur l'artère. Ce qui prouve bien qu'il s'agit surtout d'un phénomène local, c'est que, une fois la tension abaissée, il suffit souvent, comme nous l'avons signalé, du simple contact d'un morceau de glace sur l'avant-bras ou le bras pour faire remonter immédiatement la pression à son niveau initial. D'autre part, MACWILLIAM et KESSON, après SAHLI, STRAUSS et FLEISCHER, MÙNZER, ont bien mis en évidence ce fait que la compression faisait baisser la tension seulement du côté exploré et non de l'autre. Voici les résultats obtenus dans deux de leurs expériences, avec mensurations alternatives et successives sur l'un et l'autre bras :
Première Après des mensurations
mensuration. répétées.
Cas IV Br. g. . . 180 millimètres. 160 millimètres.
— Br. d. . . 187 — 158 —
Cas VI Br. g. . . 200 — 152 —
— Br, d. .. . 175 —
— Br. g. . . 152 —
— Br. d. . . 175 — 150 —
Il peut se faire que le taux de la baisse systolique persiste à peu près identique, chez un sujet donné, lors de mensurations pratiquées soit le même jour, soit les jours suivants ; mais il n'est pas rare non plus de noter d'assez grandes variations. — Ce qui laisse à penser cependant que le facteur « spasme artériel local » n'est pas tout, c'est que, si au cours de l'examen on fait parler le malade ou qu'on lui impose un léger déplacement, on assiste parfois à la réapparition Subite, partielle ou totale, de l'hypertension du début.
La conclusion pratique à tirer de ces faits, c'est qu'il ne faut jamais se contenter d'une seule mensuration de la tension systolique. Il est évident que ce que l'on tient à noter dans chaque cas, ce n'est pas le chiffre réel de la tension additionné de l'élévation produite par le spasme artériel local, mais uniquement ce chiffre de tension dépouillé de tout facteur surajouté. Il faut donc, du chiffre primitif indiqué par une mensuration rapide, descendre jusqu'au chiffre résiduel, seul véritablement important. Cela est vrai déjà des grosses hypertensions; car il n'est pas indifférent de savoir si l'on a affaire à un hypertendu à 210 ou à 180 millimètres Hg,
62 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
par exemple. Mais cela est plus important encore lorsqu'il s'agit d'hypertensions modérées ou même douteuses. Lorsqu'on se sert de la méthode de RIVA-ROCCI, la signification d'un chiffre d'hypertension
d'hypertension 150 millimètres Hg si l'on veut, est bien différente suivant qu'il s'agit du chiffre primitif, obtenu à une première mensuration, ou du chiffre résiduel. Un chiffre résiduel de 150 dénote une hypertension certaine, quoique modérée; alors que le même chiffre primitif de 150 peut n'avoir aucune importance s'il s'abaisse,
FIG. 27. — Chute de la pression systolique après cinq et quinze minutes.
METHODE DE RIVA-ROCCI 63
au bout de quelques minutes, comme cela est fréquent, surtout chez la femme, à 130 ou même à 120 millimètres Hg. Pareille précaution s'impose également si l'on veut apprécier l'évolution des états hypertensifs et juger sainement de l'effet des tentatives thérapeutiques. Il faudra donc, tout en appliquant l'a manchette, calmer l'appréhension du malade, lui conseiller l'immobilité et le relâchement musculaire, éviter de continuer l'interrogatoire pendant la prise de tension ; et, surtout, se résigner à pratiquer plusieurs mensurations successives et à attendre un certain temps avant de noter le chiffre de la pression systolique résiduelle. D'après ce que j'ai observé avec HAOUR, il suffit ordinairement d'attendre quatre à cinq minutes en faisant 5 à 6 mensurations plus ou moins espacées. Les graphiques de la figure 27 montrent qu'au bout de cinq minutes, dans 56 pour 100 des cas, la chute de la tension est complètement effectuée, que dans 42 pour 100 cette.chute ne s'aggrave plus que de 5 millimètres Hg. et que c'est seulement dans 2 pour 100 des faits que cette prolongation de la chute atteint 1 centimètre Hg, sans jamais dépasser cette valeur. Il sera du reste loisible à l'observateur d'utiliser ces cinq minutes (dans l'intervalle des mensurations successives de la pression systolique) pour la fixation de la pression diastolique, la numération du pouls, l'analyse du caractère des pulsations radiales ou de l'état des parois artérielles 1.
d. Pression systolique dans l'arythmie. — Au cours d'une arythmie extra-systolique, s'il n'y a que de rares intermittences, on négligera simplement les pulsations avortées ou même les fortes pulsations faisant suite au repos compensateur, et la tension notée sera celle des pulsations se succédant en série normale. Lorsque les intermittences sont très fréquentes, survenant toutes les deux ou. trois pulsations (pouls tri ou quadri-géminé), la mensuration peut être plus malaisée, et le plus souvent on devra se contenter de
1 Dans des. cas exceptionnels, dont j'ai observé quelques exemples depuis les recherches pratiquées avec HAOUR, on peut noter une légère élévation de la tension au cours de mensurations successives. Cette élévation est toujours très minime, un demi à un centimètre Hg. MACWILLIAM et KESSON (1913), TIXIER (1919), ont aussi noté le fait dans des circonstances très rares; pour les premiers de ces auteurs, cette élévation dépendrait toujours de variations de la pression sanguine générale, comme on pourrait s'en assurer par des mensurations pratiquées parallèlement sur le côté opposé.
64 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
prendre seulement la tension des pulsations fortes, post-extrasystoliques,
post-extrasystoliques, comme dans le pouls bigéminé. Dans les lambeaux de bradysphygmie par rythme couplé, qui interrompent chez cerFIG.
cerFIG. — Divers types d'arythmie extra-systolique objectivant les différences de tension de chaque pulsation.— I, simple intermittence extra-systolique. (avec extra-systole non transmise au pouls); la pulsaMon qui suit l'intermittence possède une tension systolique légèrement plus élevée. — II, succession régulière d'intermittences faisant suite à un rythme normal et figurant une bradysphygmie par rythme couplé; durant cette épisode bradysphygmique, la tension systolique était d'environ 15 à 20 millimètres Hg plus élevée qu'au moment du rythme normal. — III, dans les trois tracés inférieurs, spécimens de pouls bigéminé, trigéminé, quadrigéminé, mettant en évidence les modifications tensionnelles des divers types de pulsations.
METHODE DE RIVA-ROCCI 65
tains sujets le rythme normal, on note toujours, au moment de la phase de ralentissement, une élévation de la tension systolique de quelques millimètres Hg ainsi qu'un abaissement de la tension diastolique.
Dans l'arythmie complète, chaque pulsation présente une tension différente, qui dépend de la force de la contraction ventriculaire et surtout de l'intervalle plus ou moins long qui la sépare de la précédente;
précédente; des valeurs de la pression systolique, pour les plus fortes et les plus faibles pulsations, pouvant atteindre 60 millimètres Hg (SILBERBERG). On a conseillé différents moyens compliqués, et d'exactitude contestable, pour arriver à une estimation de la pression systolique moyenne 1. Je crois plus simple, dans des cas
1 Parmi les procédés recommandés, signalons les suivants : a) Notation successive de la tension des plus fortes et des plus faibles pulsations, en calculant le chiffre de pression de la manchette auquel aucune pulsation ne passe et celui auquel toutes passent. Etablissement d'une moyenne entre ces deux chiffres;
b) Numération des pulsations qui passent jusqu'à la radiale, à chaque degré de l'échelle manométrique, au moyen d'un sphygmographe appliqué à l'avantbras; et comparaison avec le chiffre réel des pulsations, enregistré sphygmographiquement sur l'avant-bras opposé (SILBERBERG, 1912),
c) Le procédé préconisé par JAMES et HART (1914) est plus compliqué. On compte les pulsations durant une minute, au coeur et à la radiale, afin d'avoir une notion sur le nombre des pulsations qui ne se propagent pas dans le système artériel périphérique. Ceci fait, une manchette est appliquée sur l'humérale et l'on fait monter la pression jusqu'à ce que le pouls soit complètement oblitéré. Puis on laisse baisser progressivement la tension de centimètre en centimètre, en comptant à chaque degré le pouls radial jusqu'à ce que le chiffre des pulsations soit le même que sans pression. " En partant de ces données, la pression systolique moyenne est calculée en multipliant le nombre des battements radiaux par le chiffre de pression au niveau duquel ils se manifestent, en ajoutant ensemble ces produits, et en divisant leur
L. GALLAVARDIN. 5
FIG. 29. - Arythmie complète. — Chaque pulsation ayant une tension systolique différente, on se contente de noter la tension des plus fortes pulsations.
68 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
dé cette sorte, de se borner à noter la tension des plus fortes pulsations , l'existence de l'arythmie complète indiquant suffisamment qu'il ne peut s'agir là que,d'une valeur maxima; rarement réalisée dans la suite des pulsations, mais au-delà de laquelle la tension ne s'élève pas.
somme par le. nombre de battements perçus au niveau du coeur. Le chiffre obtenu donne la pression systolique moyenne. » Exemple : arythmie complète avec" 131 battements au coeur, 101 à la radiale. :
Pression brachiale Nombre dé pulsations à la radiale
100 millimètres Hg 0 .
90 — 13 43 X 90 = t.. 170.
80 — 47 — 13 = 34 34 X 80 = 2.720
70 — 70 — 47 = 28 28 X 70 = 1.960.
60 — 82 — 75 = 7 7 X 60 = 420
50 — 101 — 82 =19 19 X 56 = 950
7.220
Pression.systolique moyenne.= 7.220 : 131 = 55 millimètres Hg. d) KILGORE (1915) distingué les cas dans lesquels toutes les contractions cardiaques sont transmises à la radiale et ceux dans lesquels il existe des pulsations avortées. — Dans le premier cas, on fait le décompte exact, de demicentimètre en demi-centimètre de Hg, des pulsations transmises à là radiale et les chiffres sont reportés sut un graphique avec ordonnées et abcisses indiquant le chiffre de pression et le nombre de pulsations. Il est, dès lors, facile d'obtenir la pression systolique moyenne en divisant la somme de la hauteur tensionnelle de chaque pulsation, par leur nombre. — Quand il existe des pulsations cardiaques avortées ne se transmettant pas au pouls, la seule indication supplémentaire rationnelle est fournie par l'auscultation attentive du coeur. Qu'il s'agisse de contractions extra-systoliques ou de contractions simplement affaiblies, on peut admettre que les contractions se traduisant par" deux bruits soulèvent le plancher sigmoïdien et possèdent une tension systolique au moins supérieure à la pression diastolique aortique, alors que celles qui ne donnent naissance qu'à un seul bruit ont sans doute une tension inférieure au taux de cette tension diastolique puisqu'elles sont impuissantes à soulever les nids valvulaires — Disons, accessoirement et par anticipation, qu'en s'aidant de la méthode auscultatoire (au moins dans les cas où la plus forte pression diastolique reste inférieure à la plus basse tension systolique) et à condition de considérer comme index diastolique le moment de la cessation de tout bruit artériel, cet auteur parvient à calculer le taux de la pression diastolique moyenne dans l'arythmie complète. Il suffit pour cela de faire baisser la tension de demi-centimètre en demi-centimètre et d'ausculter l'humérale; les pulsations se classent et s'éliminent d'elles-mêmes, car on ne perçoit plus que les tons artériels de celles dont le taux diastolique reste supérieur au chiffre indiqué par le manomètre. Toutes les pulsations sont inscrites dans le graphique, comme pourla tension systolique, et la valeur moyenne est facile à déduire.
METHODE DE RIVA-ROCCI
67
C'est seulement dans le pouls alternant qu'il peut y avoir un véritable intérêt à noter l'écart de pression existant entre les pulsations fortes et faibles qui se succèdent régulièrement. Cet écart
n'est plus la simple expression de la fantaisie rythmique, mais une indication précieuse du déficit de la contractilité myocardique. Dans les cas légers, la dénivellation systolique entre ces deux groupes
de pulsations est a peine sensible, quelques millimètres seulement; toutes les pulsations sont, par exemple, perçues à une pression manométrique de 150 millimètres Hg et les pulsations faibles disparaissent, pour ne laisser place qu'aux pulsations fortes, si l'on fait monter la pression à 160 millimètres Hg. Dans les alterFIG
alterFIG — A lternance du pouls très légère. — La différence de tension systolique des pulsations fortes et dès pulsations faibles est à peine sensible.
FIG. 31. — Alternance du pouls très accusée. — La différence de tension systolique entre les pulsations fortes et faibles était dans ce cas de prés de 3 centimètres Hg. Il s'agit bien de pouls alternant vrai et non de faux pouls alternant par bigéminisme retardé, car le tracé sphygmographique recueilli en grande vitesse montré que, la/.pulsation faible est plus rapprochée de la forte qui là suit que de la forte qui la précède
68 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
nances très accusées, j'ai vu l'écart de tension systolique des pulsations fortes et faibles atteindre 2 et même 3 centimètres Hg; je ne l'ai jamais vu dépasser 3 centimètres et demi. Lorsque le rythme
alternant se trouve émaillé d'extra-systoles très fréquentes, le tracé
simule un tracé d'arythmie complète et seule reste possible la mesure de la tension des plus fortes pulsations.
Les variations respiratoires des pulsations artérielles sont, à l'état normal, assez faibles pour ne pas se traduire à la mensuration de la tension systolique. Dans deux circonstances cependant, il peut se
FIG. 32. — Dédoublement des pulsations radiales au cours de la mensuration de la tension systolique dans le pouls alternant. — Lorsque
l'alternance du pouls est accusée, il est facile, en amenant la pression dans la manchette à un taux intermédiaire entre la tension systolique. des pulsations fortes et des pulsations faibles, de provoquer un dédoublement des pulsations, les pulsations fortes passant seules au-dessous du brassard. Il est possible de prendre séparément la tension systolique de ces pulsations fortes et faibles, en déterminant le niveau auquel toutes les pulsations passent (tension des pulsations faibles) et celui auquel aucune pulsation ne passe plus (tension des pulsations fortes).
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produire une dénivellation appréciable du taux de cette pression, Lorsque l'arythmie respiratoire est très accentuée, on peut voir, comme c'était le cas chez le sujet dont le tracé est reproduit cicontre, les pulsations expiratoires ralenties présenter une pression systolique supérieure de 10 à 15 millimètres Hg à celle des pulsations
pulsations accélérées. Chez des sujets dyspnéiques, chez certains emphysémateux à respiration profonde et expiration prolongée, il est commun de noter une dénivellation de 10 à 15 millimètres Hg aux dépens des pulsations inspiratoires qui se trouvent comme « avalées » par l'aspiration thoracique. Dans ces deux cas, on se trouvera bien, pour simplifier, de noter simplement la tension systolique des plus fortes pulsations. Il va sans dire, enfin, que les efforts de toux augmentent très momentanément la pression sanFIG.
sanFIG. — Variations de la pression systolique dans les formes accusées
d'arythmie respiratoire. — Dans le tracé supérieur (tracé respiratoire
et sphygmograghique), on voit les pulsations s'accélérer au moment
de l'inspiration, se ralentir au moment de l'expiration; les pulsations
ralenties expiratoires présentaient une tension systolique supérieure
d'environ 15 millimètres Hg à celle des pulsations inspiratoires. Il
s'agissait bien dans ce cas d'une arythmie respiratoire, car il a suffi,
comme le montre le tracé inférieur, de suspendre l'action du pneumogastrique
pneumogastrique une injection d'atropine pour voir, en 20 minutes, le
pouls s'accélérer notablement et disparaître toute arythmie en rapport
avec là respiration.
70 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
guine ; au moment d'une prise de tension et lorsque les battements artériels sont presque éteints par la compression du brassard, il est commun de voir une secousse de toux injecter la radiale du fait de la brusque expression des gros vaisseaux intra-thoraciques.
D. VÉRIFICATION EXPÉRIMENTALE. — Les chiffres de pression systolique, obtenus à l'aide de la méthode RIVA-ROCCI, correspondentils à la réalité? Permettent-ils d'estimer la tension intra-artérielle comme on pourrait le faire, par exemple, en mettant une artère directement en communication avec un manomètre? Cette interrogation
interrogation toute la question de la sphygmomanométrie clinique. Aussi toute discussion théorique est-elle oiseuse et convient-il de laisser parler les faits, en exposant simplement ce que nous ont
FIG. 35. — Vérification expérimentale de la méthode de RIVA-ROCCI. — Tracé obtenu, chez un homme de quarante-cinq ans, à l'aide d'un manomètre à Hg mis en communication directe avec la radiale et montrant les oscillations cardiaques et respiratoires : pression systolique 124-04 millimètres Hg, pression diastolique 80-64. Le tracé montre la chute de pression dans la radiale et la cessation de toute oscillation: au moment où la pression atteint dans la manchette brachiale 129 à 130 millimètres Hg; les pulsations réapparaissent quand la pression redescend dans la manchette au même chiffre de 130 millimètres Hg. (D'après O. MULLER et BLAUEL.)
METHODE DE RIVA-ROCCI 71
appris les tentatives de vérification expérimentale poursuivies dans ce but par de nombreux auteurs.
Cette vérification fut d'abord tentée au moyen d'appareils de fortune, notamment de tubes de caoutchouc plongés dans une sorte de manchon rempli d'eau figurant les parties molles ; puis, sur le cadavre, a l'aide de circulations artificielles établies dans l'humérale ou dans un tube de caoutchouc mis a sa place (GUMPRECHT) ; enfin, chez divers animaux (FELLNER et RUDINGER chez le chien. SCHILLING chez le veau, en 1906). Mais les animaux se prêtent souvent mal à ces recherches, soit du fait (pour les animaux de la boratoire) des dimensions restreintes des segments de membres, soit à cause (pour les animaux plus gros) de la forme conique de ces segments de membres
et surtout de la présence d' un cuir épais, couvert de poils, qui vient vicier les résultats.
Des expériences beaucoup plus précises ont pu être faites directeFIG
directeFIG — Vérification expérimentale de la méthode de RIVA-ROCCI. — Trace obtenu, chez une femme de trente cinq ans, en mettant en communication l' artère radiale avec un manomètre métallique, au cours d'une amputation de l'avant bras. Les parties gauche et droite de la courbe montrent les oscillations cardiaques et respiratoires de la pression sanguine pression systolique 110 120 millimètres Hg, pression diastolique 70-80 La dépression du trace montre la disparition de tout battement dans la radiale des que la pression dans une manchette brachiale large, préalablement mise en place, a atteint 130 millimètres Hg, et leur réapparition des que cette pression redes cend dans la manchette au même chiffre de 130 millimètres Hg (D'après O. MULLER et BLAUEL. )
72 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
ment chez l'homme, au cours d'amputations des membres supérieur ou inférieur. Les plus importantes et les premières en date sont celles de O. MULLER et BLAUEL (1907); Un manomètre, métallique ou à mercure, est mis en communication directe avec l'artère humérale ou radiale, tandis qu'on fait monter progressivement la pression dans une manchette brachiale préalablement fixée sur le même bras, Dans ces conditions, le manomètre indique : 1° la hauteur de la tension sanguine ; 2° par la cessation des oscillations de l'aiguille ou de la colonne de mercure, le moment où la pression développée dans la manchette devient capable de faire équilibre à cette pression sanguine et d'arrêter le cours du sang dans l'humérale, Ces expériences ayant un intérêt absolument capital et nous fixant sur la valeur réelle de la méthode de RIVA-ROCCI, nous les résumerons brièvement dans le tableau ci-contre :
On ne peut moins faire, en considérant ces chiffres, que d'être frappé de l'approximation remarquable que donne la méthode de RIVA-ROCCI, pratiquée avec une manchette large, dans l'appréciation de la tension systolique. Dans les deux premiers cas, on notait par ce procédé une tension de 13 centimètres Hg, alors que dans la radiale la pression systolique maxima (au moment de l'expiration) était de 12 centimètres Hg, soit une différence de 4 centimètre Hg seulement ! Nul doute que la différence n'eût été encore un peu moindre si la pression avait pu être prise directement dans l'humérale. Dans le troisième cas, la tension donnée par la méthode de RIVA-ROCCI n'accuse plus qu'un écart de 8 millimètres Hg avec le chiffre indiqué par la mensuration sanglante! Si l'on calcule, comme l'ont fait MULLER et BLAUEL, l'erreur moyenne accusée par la méthode de RIVA-ROCCI, on trouve qu'elle donne une surestimation de 7, 5 pour cent sur le chiffre véritable de la pression sanguine. Chez des personnes amaigries, l'écart peut devenir encore moindre et s'abaisser à 6 pour cent.
Tous les essais de vérification expérimentale de la méthode de RIVA-ROCCI, tentés postérieurement, ont donné des résultats presque absolument superposables. LOCKHARD-MUMMERY (1908) constata que lorsqu'on applique une manchette sur l'une des fémorales, le chiffre manométrique enregistré lors de la réapparition du pouls, pendant la décompression, est identique à celui indiqué par un second manomètre mis directement en communication avec l'autre fémorale,
MÉTHODE DE RIVA-ROCCI 73
Pression systolique Pression de la man- Pression de la mansanglante
mansanglante di- chette suffisante chette suffisante
rectement dans l'ar- pour faire disparaî- pour faire disparaîtère
disparaîtère ou hu- tre toutes les pul- tre toutes les pulmérale,
pulmérale, un ma- sations dans les ar- sations dans les arnomètre
arnomètre tères sous-jacentes tères sous-jacentes
(écart dû aux oscil- (manchette large de (manchette étroite
lations respiratoires 15 centimètres). de 6 centimètres). de la pression)
OBS. I — Homme,
45 ans, forte musculature.
musculature. ...
tion de l'avant-bras 105 121 millim. 130 millim.
gauche pour un carcinome de la main. Canule dans la radiale, en communication avec un 110-126 millim 173 millim. manomètre métallique.
OBS. II. — Femme de 35 ans, à musculature moyennement développée ; amputation de l'avant-bras
l'avant-bras pour 110-120 millim. 130 millim. 170 millim.
un phlegmon étendu de la main.
Canule dans la radiale et manomètre métallique.
OBS. III. — Femme 33 ans, avec musculature et pannicule adipeux très peu développés. Amputation du bras 79-109 millim. 116-118. millim. 130 millim. droit pour tuberculose du coude.
Canule dans l'humérale
l'humérale manomètre métallique
VOLHARD (1909), dans des expériences analogues à pelles de MULLER et BLAUEL, arrive aux mêmes conclusions : la surestimation de la méthode de RIVA-ROCCI pouvait être estimée à 13 millimètres Hg chez un sujet à tension normale, à 20 millimètres Hg chez un hypertendu, Mêmes résultats dans les vérifications de DEHON, DUBUS et
74 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
HEITZ (1912), Ayant recueilli chez trois malades, au cours d'amputations de la cuisse ou de la jambe, la tension systolique, d'une part dans la tibiale antérieure (à l'aide d'un manomètre à Hg mis en rapport avec l'artère par une canule remplie d'une solution anticoagulante), d'autre part dans l'humérale à l'aide de la méthode de RIVA-ROCCI, ces auteurs ont relevé les chiffres suivants :
Tension intra-artérielle systoliqne Tension systolique notée par la
dans la tibiale antérieure méthode de RIVA-ROCCI dans
(manomètre Hg). l'artère humérale.
Expérience I. 87 millimètres. 115 millimètres.
— II. 100 — 110 -
— III. 84 — 100 —
Dans une quatrième expérience, on notait :
Tension intra-artérielle relevée Tension systolique notée par la méthode dans la radiale gauche de RIVA-ROCCI, au niveau de
(manomètre Hg). l'humérale droite.
Expérience IV. 130 millimètres. 140 millimètres.
Ces auteurs concluent que «la méthode de RIVA-ROCCI leur a donné le chiffre de pression systolique avec une erreur à peine supérieure à 10 millimètres Hg et ne dépassant pas 10 à 11 pour cent dans trois cas. Dans un cas, cependant (exp. I), l'erreur s'est élevée à 28 millimètres, ce qui ramène l'erreur moyenne des quatre expériences à plus de 15 pour cent ». LIAN et MOREL (1913) ont encore invoqué, en faveur de la méthode de RIVA-ROCCI, les constatations expérimentales suivantes. Une manchette est appliquée sur la cuisse d'un chien anesthésié ; et la pression systolique, déterminée par la méthode de RIVA-ROCCI, est par exemple de 150 millimètres Hg. La pression de la manchette est alors poussée jusqu'à 22 ou 23 centimètres de mercure et l'artère tibiale antérieure sectionnée de façon à juger du moment où la circulation réapparaîtra. Or, c'est exactement à une pression de 15 centimètres de mercure dans la manchette, fémorale que le sang s'écoule par la tibiale antérieure sectionnée, sous forme d'un jet rythmé par les pulsations. « Cette expérience, disent les auteurs, a été répétée plusieurs fois successivement et sur plusieurs chiens ; les résultats se sont toujours produits dans le même sens ». Notons cependant qu'elle constitue moins
MÉTHODE DE RIVA-ROCCI 75
une vérification expérimentale de la méthode de RIVA-ROCCI qu' une nouvelle preuve (à ajouter a celles signalées plus haut) de l'excellence de l'exploration digitale pour apprécier le retour de la circu - lation.
Toutes ces expériences n'ont pas été sans soulever quelques objections de la part des partisans fervents de la méthode oscillatoire, qui sont portes à considérer la méthode de RIVA-ROCCI comme très inférieure. Une des objections mises en avant est certainement fondée, et c'est en s'appuyant sur elle qu'ils tendent a dénier toute valeur aux vérifications expérimentales signalées ci-dessus. Il s'agit de l'emploi du manomètre Hg comme critère d'estimation de la pression sy stolique au cours des mensurations intra-artérielles effectuées chez l'animal Depuis longtemps, comme nous l'avons vu plus haut, MAREY a montre que le manomètre à mercure n'était pas capable de renseigner exactement sur les variations rapides de pression PACHON et PONS ont de nouveau illustré ce fait par les expériences très concluantes, que nous avons également relatées. Malgré cela, nous estimons que les experiences ci-dessus conservent leur valeur pour deux raisons D'abord parce que dans plusieurs d'entre elles — notamment dans nombre de celles très démonstratives rapportées par MULLER et BLAUEL, — la determination sanglante de la pression artérielle a été faite a l'aide d'un manomètre métallique dont les indications exactes ne sauraient être suspectées. Ensuite, parce que même dans les cas où la détermination a été faite a l'aide du manomètre a mercure, comme l'a fait remarquer LIAN, il y a toute probabilité pour que le chiffre de tension systolique indique se soit trouve supérieur et non inférieur au chiffre véritable. Dans toutes les expériences de PACHON et PONS, en effet, le manomètre a mercure donnait une surestimation de la tension systolique (ou une pression au moins égale à ce chiffre) tant que le pouls n'atteignait pas une fréquence de près de 130 pulsations a la minute, fréquence qui n'était vraisemblablement pas dépassée dans les expériences en question Une telle surestimation peut bien atténuer artificiellement l'écart entre le chiffre de la tension întraartérielle et celui indique par la méthode de RIVA-ROCCI; elle ne saurait en aucune façon prouver l' infériorité de cette méthode vis-à-vis de la méthode oscillatoire que nous étudierons plus loin. Prenons un exemple Mesurée dans l'artère a l'aide d'un mano-
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mètre Hg, la pression systolique est de 120 millimètres ; dans ce même cas, la méthode de RIVA-ROCCI indique le chiffre de 130 millimètres et là méthode oscillatoire 150 millimètres (c'est là la moyenne de l'écart entre ces deux méthodes). Si la valeur indiquée par le manomètre à Hg est trop élevée (pouls au-dessous de 1 30 à la minute), cela aggrave évidemment la surestimation fournie par la méthode de RIVA-ROCCI; mais la même aggravation vient aussi grever la surestimation de la méthode oscillatoire qui demeure toujours beaucoup plus forte.
E. CONCLUSIONS. — 1° La mensuration de la pression systolique par la méthode de RIVA-ROCCI (avec une manchette large de 12 à 15 centimètres) donne encore, comme l'appareil de POTAIN, une certaine surestimation sur le chiffre réel de la tension sanguine intra-artérielle.
2° Cette surestimation est très minime puisque, d'après les vérifications expérimentales citées plus haut, elle ne serait que de 7,5 pour 100 en moyenne; soit, pour un chiffre de 140 millimètres Hg accusé par la manchette, une pression réelle intra-humérale de 130 millimètres Hg.
3° De plus, bien qu'influencée par l'épaisseur des parties molles ou l'état des parois artérielles, cette surestimation, à cause même de son faible degré, n'est susceptible de présenter que des variations individuelles peu étendues.
Nous verrons plus loin que ces conclusions permettent de placer délibérément la méthode de RIVA-ROCCI au premier rang, parmi les méthodes se proposant de mesurer la tension systolique.
4° Tonomètre de Gaertner. — C'est en 1899 que G. GAERTNER. fit connaître un appareil simple et commode pour mesurer la tension sanguine. Cet appareil, basé sur le principe de la compression circulaire introduit par RIVA-ROCCI, en différait par ce fait que le manchon brachial était remplacé par un' simple anneau digital et que le rétablissement de la circulation, au lieu d'être annoncé par la réapparition de battements artériels trop difficiles à percevoir, se manifestait par la simple rougeur du doigt rendue très apparente, par l'anémie préalable de la pulpe. Cette méthode eut un rapide
TONOMÈTRE DE GAERTNER 77
succès ; très employée en Autriche, elle fut assez rapidement introduite en Allemagne, puis en France où elle fut vulgarisée par l'appareil et les travaux de BOULOUMIE.
a. Instrumentation et technique. —L'appareil, très portatif, se compose d'un doigtier, d'une poire à insufflation et d'un manomètre. Dans le modèle primitif de GAERTNER, le doigtier, figuré par un
cercle de métal revêtu à son intérieur d'une double membrane de caoutchouc, n'avait que 1 centimètre de hauteur, sur.2 centimètres et demi de diamètre; c'était plutôt un anneau qu'un doigtier. Ultérieurement, on reconnut que cette hauteur n'était pas suffisante, aussi fut-elle portée à 3 centimètres par RECKLINGHAUSEN en 1901, puis par GAERTNER; en France, le doigtier de l'appareil de BOULOUMIE, dont on se sert habituellement, mesure 2 centimètres de hauteur. Quant au revêtement extérieur dont la première qualité est d'être inextensible, il peut être formé par un anneau de métal revêtu ou non de caoutchouc, ou simplement par une épaisse membrane de caoutchouc suffisamment résistante. L'appareil à insufflation peut être quelconque, soufflerie Richardson, compresseur mécanique; mais la quantité d'air qu'on doit envoyer dans l'anneau
FIG. 37.- Tonomètre de GAERTNER (modèle avec compresseur mécanique et manomètre à Hg à cuvette).
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étant très minime; il suffît d'une simple poire reliée par un tube de caoutchouc au doigtier et que l'opérateur comprime ou décomprime à volonté, avec sa main. Le manomètre est soit à mercure, comme dans l'appareil primitif de GAERTNER; soit simplement métallique, comme dans le " sphygmotonomètre » de BOULOUMIE constitué
simplement par un doigtier branché sur le sphygmomanomètre de POTAIN. Dans le dernier modèle du tonomètre de GAERTNER, on utilise un manomètre à air comprime, gradué par comparaison avec un manomètre à mercure.
L'application de l'appareil, aussi facile que rapide, consiste à obtenir l'anémie de là pulpe digitale par un procédé quelconque, à maintenir cette anémie à l'aide de la compression de l'anneau pneumatique placé au-dessus, à étudier enfin le moment précis du retour de la circulation lors de la baisse progressive de la pression dans le doigtier. Pour faciliter la manoeuvre, il est indispensable d'introduire le doigtier au lieu où il doit être appliqué (le plus souvent la seconde phalange) avant d'anémier l'extrémité du doigt. On cherchait autrefois à réaliser cette anémie dudoigt, par la compression exercée à l'aide d'une sorte de petit dé en caoutchouc. Mais l'anémie
FIG. 38. —Sphygmotonomètre de BOULOUMIÉ : association du sphygmomanomètre de POTAIN et du doigtier de GAERTNER.
TONOMETRE DE GAERTNER.
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ainsi obtenue était incomplète et l'on se serf actuellement soit de petits anneaux de caoutchouc que l'on fait glisser de l'extrémité dit doigt jusqu'au bord du doigtier, soit d'un tube de caoutchouc souple que l'on enroule avec soin de la périphérie au centre, également
également bord du doigtier. Ceci fait, on comprime assez fortement la poire à insufflation de façon à obtenir dans le doigtier une pression supérieure à celle que l'on pense trouver, par exemple 20 centimètres Hg, et l'on enlève rapidement petits anneaux ou tube de caoutchouc. Le doigt apparaît alors pâle, livide ou, si l'on s'est servi du tube, légèrement plaqué de taches roses. La main, qui tient toujours comprimée la poire de caoutchouc, la relâchetrès lentement et très progressivement en réglant cette décompression sur la descente régulière de l'aiguille du manomètre, tandis que l'observateur fixe attentivement la pulpe anémiée de façon à préciser le moment exact du retour du sang dans le doigt. Ce retour de la circulation est annoncé de façon assez variable : si le doigt est uniformément pâle, par une onde bu une sorte dé nuage rosé qui envahit brusquement le champ anémique et qui bientôt se transforme en rougeur diffuse, puis en teinte pourpre; si le doigt a été anémié plus irrégulièrement et se trouve un peu marbré, par la teinte plus foncée qui envahit une des taches en s'étendant proFIG.
proFIG. Mode d'application du tonomètre de GAERTNER. — Le doigtier est placé, non gonflé, sur la seconde phalange, on enroule le tube de caoutchouc de l'extrémité du doigt jusqu'au bord de l'anneau et on l'enlève rapidement, après avoir insufflé de l'air dans le doigtier jusqu'à Une pression supposée supérieure à la pression artérielle.
80 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
gressivement tout autour. En même temps que s'accuse la rougeur du doigt, le sujet, qui avait perçu sous forme de battements très nets le retour des premières ondées sanguines, éprouve une sensation de tension congestive étendue à toute la pulpe.
On obtient par cette méthode, en opérant chez des individus normaux et en prenant comme critérium le premier signe visible du retour de la circulation, des chiffres qui oscillent presque toujours entre 120 et 130 millimètres Hg, en général un peu plus faibles chez la femme que chez l'homme 1. A l'état pathologique, ces chiffres sont susceptibles de varier dans des proportions considérables, s'abaissant parfois à 60 ou 70 millimètres Hg ou s'élevant à 200, 250 millimètres Hg et même davantage.
b. Causes d'erreurs. — Ces chiffres, comme nous le verrons dans un instant, sont loin de posséder une valeur absolue et d'indiquer la tension artériolaire qu'ils sont censés représenter. De plus , même considérés dans leur valeur relative, ils sont soumis, par suite de causes d'erreurs tenant soit à l'appareil et à son mode d'application, soit à des différences individuelles, parfois aussi chez un même sujet, à des variations de 2, 3 et même 4 centimètres Hg.
A propos du doigtier, nous n'avons considéré tout à l'heure que sa hauteur. Son diamètre importe tout autant. Avec un diamètre uniforme de 2 centimètres et demi, il est évident que son adaptation sera bien différente suivant la grosseur du doigt exploré. Un tel doigtier placé sur un doigt très grêle, l'auriculaire ou l'annulaire d'une main de femme par exemple, sera beaucoup trop large et présentera de ce fait un double inconvénient. La compression du doigt, au lieu de s'effectuer sur toute la hauteur de l'anneau, ne se fera, par suite de la courbe convexe décrite par la lame de caoutchouc distendue, que sur une hauteur bien moindre : 1 centimètre ou 1 centimètre et demi pour un doigtier de 2 centimètres. De plus, cette compression ne sera pas régulière, le manchon élastique, lorsqu'il est trop distendu, présentant sur sa face interne une série de plis stellaires ou radiés ; et l'on comprend que la com1
com1 chiffres moyens donnés par les auteurs sont : GAERTNER, 100 a 120 millimètres; DOLESCHAL, 120 millimètres; WEISS, 110 à 120 millimètres; LEROY, 100 à 130 millimètres; HIRSCH, 100 à 140 millimètres; RILLIET, 120, à 130 millimètres.
TONOMÈTRE DE GAERTNER 81
pression de l'artériole contre" la phalange osseuse se fera d'une manière inégale suivant que l'artériole correspondra à la base ou au sommet d'un de ces plis. Le meilleur doigtier est celui, ni trop large, ni trop étroit, qui glisse sur la phalange à explorer, à frottement à peine sensible. Cette cause d'erreur pourrait atteindre, d'après MAX NEU, avec un doigtier très large, 15 à 20 millimètres et, avec un doigtier trop étroit, 10 à 20 millimètres Hg. C'est pour obvier à ces inconvénients qu'il existe dans le nouveau tonomètre de GAERTNER un jeu de trois doigtiers de diamètres inégaux, ayant de plus une forme légèrement conique et s'adaptant exactement à la configuration du doigt 1.
La lenteur de la décompression a aussi une importance. SCHLEISIK. a montré que si l'on décomprimait de 5 millimètres en 5 millimètres, en attendant dix secondes chaque fois, on obtenait un chiffre plus élevé de 15 millimètres environ que si l'on n'attendait que trois secondes. Il est à peine besoin de faire remarquer* que la. décompression devra être d'autant plus progressive que le pouls sera plus ralenti. Le mieux est de pratiquer une première mensuration rapide, orientant à peu près sur le chiffre de la pression artériolaire, puis de faire de nouvelles mensurations plus exactes, en gonflant le doigtier à 2 ou 3 centimètres Hg seulement au-dessus du point de repère précédemment trouvé, et en descendant très lentement, sinon de 5 millimètres en trente secondes comme le conseille RILLIET, au moins de 5 millimètres en quatre à cinq secondes.
Le procédé employé pour anémier le doigt peut aussi modifier les résultats. Le retour du sang, comme nous avons pu le vérifier, est parfois plus précoce lorsque le sang a été chassé par le tube de caoutchouc que lorsque L'anémie a été obtenue par les anneaux. Dans le premier cas, en effet, les parties de la pulpe comprimée par le tube présentent une vaso-dilatation paralytique qui tranche sur la pâleur des parties environnantes. Les capillaires ainsi dilatés offrent au sang qui revient dans le doigt une voie d'accès plus facile et plus large ; aussi voit-on une marbrure ou une raie se foncer nettement à un chiffre de tension un peu supérieur à celui indiqué
1 Pour éviter l'inconvénient pratique réel de la multiplicité des doigtiers, on a proposé aussi un petit manchon digital ajustable, sur le modèle du brassard de RIVA-ROCCI, mais dont l'emploi ne s'est pas généralisé.
L. GALI AVARDIN. 6
82 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
par la coloration diffuse du doigt dans le procédé de l'anneau, Remarquons à ce propos qu'il est alors nécessaire, avant de commencer la décompression, d'attendre que la réaction vaso-paralytique succédant à la vaso-constriction du début se soit achevée et que le sang ait émigré dans les parties primitivement comprimées par le tube, sans quoi on s'exposerait à prendre cette simple migration du sang pour le retour de la circulation dans le doigt. La situation de l'anneau importe aussi et, d'après,RILLIET, plus on se rapproche de l'extrémité du doigt, plus l'on atteindrait un chiffre élevé 1. Parmi les causes d'erreurs tenant à des variations individuelles, citons tout d'abord le degré d'anémie du malade. Chez des malades très anémiques ou très cachectiques, il peut être assez difficile, soit à cause de la pâleur du sang, soit à cause du spasme capillaire périphérique, d'apprécier le moment précis du retour du sang. L'état des vaso-moteurs importe aussi beaucoup et le rétablissement de la circulation est beaucoup plus malaisé à voir chez les malades qui, même sans anémie, présentent des extrémités pâles, exsangues, par suite d'un spasme vaso-constricteur permanent. Dans de pareils cas, GAERTNER conseillait d'établir tout d'abord, à l'aide d'un léger degré de pression dans le doigtier, une congestion passive de la pulpe avant de procéder à la mesure de la tension. Le froid agit sans doute de la même façon ; MAX NEU, cependant, n'a pas vu de différence en trempant le doigt dans de l'eau à 5° ou 45°. Enfin, l'épaisseur des téguments est encore un obstacle qui peut retarder d'une façon notable l'apparition de l'ondée sanguine et abaisser ainsi le chiffre de la pression. MAX NED a remarqué chez, certains malades, au moment de la desquamation de la scarlatine, une différence de 10 à 15 millimètres en faveur des parties fraîchement desquamées, sur celles revêtues de leur vieil épiderme. La difficulté peut être vraiment extrême chez des ouvriers aux mains calleuses ou chez les hommes adultes à épiderme épais et jaunâtre. Pour remédier à ces inconvénients, FRANÇOIS FRANCK a eu recours à
1 Les auteurs ont discuté sur la coloration qu'il fallait prendre comme critérium du retour du sang, GAERTNER attendant la couleur pourpre de la pulpe, SCHAW la couleur chair. En réalité, il est plus logique de se contenter du premier indice du retour de la circulation, pourvu que cet indice soit certain. Nous signalons ces différences de critérium parce qu'elles peuvent conduire dans la pratique à d'assez grands écarts.
TONOMÈTRE DE GAERTNER 83
l'emploi de son ancien appareil amplificateur, le sphygmographe volumétrique, qui, associé au nouveau modèle du tonomètre de GAERTNER, permet de préciser exactement le retour du sang dans la troisième phalange, dès que la décompression de la deuxième est suffisante. « On constate ainsi, avec l'inscription simultanée des chiffres de la décompression, de la durée de chaque étape et du signal correspondant à la recoloration commençante, que celle-ci est en retard comme temps, mais non comme valeur manométrique, sur le début de l'élévation de la courbe volumétrique digitale : il s'écoule toujours de quatre à six secondes entre les deux phénomènes. "
Mais ce qu'il y a de plus troublant dans l'emploi du tonomètre de GAERTNER, ce sont certainement les variations que l'on rencontre chez un même sujet, suivant que l'on explore tel ou tel doigt de la main, ou encore lors de mensurations successives effectuées sur un doigt déterminé. — Ces variations sont surtout accusées au niveau des différents doigts où elles ont été signalées par tous les auteurs (MAX NEU, RECKLINGHAUSEN, WEISS, RILLIET, etc.). Dans de très nombreuses mensurations, faites à l'aide de l'anneau du sphygMotonomètre de BOULOUMIÉ sur tous les doigts d'une main et même des deux mains, j'ai constaté très communément (en faisant trois ou quatre mensurations successives à chaque doigt) des différences
le 1 centimètre et demi à 2 centimètres et parfois de 3 à 4 centimètres
centimètres les doigts, et cela sans pouvoir dégager la loi de ces variations, Ces variations ne dépendent pas (ou du moins pas
uniquement) du diamètre différent des doigts et de l'adaptation imparfaite de l'anneau. Parfois, en effet, Ja pression la plus élevée
se trouvait à l'auriculaire (exemple : 13 au médius, 16 et demi à l'auriculaire) ; mais, dans un cas de ce genre, tandis qu'on notait
cette différence à une main, il y avait égalité de l'autre côté, malgré
la même différence de diamètre. Assez souvent aussi, la variation se fait' en sens contraire (exemple : 17 au médius, 13 et demi à l'auriculaire, ou encore 13 à l'index, 9 et demi à l'auriculaire). Il est peu probable que ces écarts dépendent de variations dans la structure anatomique des doigts et notamment dans la situation ou
la grosseur des artères collatérales, car elles sont souvent momentanées ou même alternantes. Chez un malade examiné très soigneusement avec trois mensurations successives et concordantes
à chaque doigt, je vis d'abord très nettement, dans deux examens
84 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
pratiqués à quatre jours de distance, un excédent en faveur de l'auriculaire (auriculaire 17, médium 13 et demi), tandis que, deux mois plus tard, deux examens pratiqués à quatre jours de distance et également concordants dans leurs résultats, dénotaient une égalité parfaite entre les deux doigts ou même un excédent d'un demi ou 1 centimètre en faveur du médius.— Ce qui prouve encore que ces variations ne relèvent, uniquement, ni, du diamètre des doigts, ni de différences anatomiques plus profondes, c'est qu'on peut les constater d'une façon indiscutable dans des mensurations successives pratiquées sur un même doigt. Dans de nombreux cas, ces variations sont très minimes et je les ai souvent vues dans des mensurations répétées (cinq à chaque doigt) ne pas dépasser un demi-centimètre; fréquemment même, elles sont absentes. Mais on les voit assez communément atteindre 1 centimètre ou 1 centimètre et demi, et beaucoup plus exceptionnellement 2 centimètres à 2 centimètres et demi. Ces variations sont le plus souvent descendantes, le premier chiffre obtenu étant le plus élevé ; mais on constate aussi le phénomène inverse. Il est difficile d'invoquer, pour expliquer ces variations, les oscillations respiratoires de la pression sanguine, qui ne sont pas aussi accusées, et ne sont guère perçues par la méthode RIVA-ROCCI. Peut-être s'agit-il d'un mode de compression différent des collatérales qui, suivant le cas, se trouvent pincées directement contre le bord interne de la phalangine et qui, dans d'autres cas, pourraient fuir un peu vers la face antérieure de l'os? Peut-être aussi faut-il admettre que ces variations sont déterminées en partie par des modifications vaso-motrices intéressant les capillaires de la pulpe ou directement les collatérales des doigts. Il ne semble pas, en tous cas, qu'elles puissent s'expliquer uniquement par la chute de la pression au moment de la mensuration, du fait de la cessation du spasme des artères collatérales .
Pratiquement, dans les mensurations rapides qu'on est appelé à faire, on peut se contenter de deux ou trois mensurations faites à l'index ou au médius. Si les chiffres ne présentent que des différences d'un demi-centimètre, on peut les considérer comme négligeables. En cas d'écarts sont plus élevés, on peut faire la moyenne entre les deux chiffres obtenus ou plutôt prendre de préférence le chiffre le plus faible. .
TONOMETRE DE GAERTNIER 85
c. Vérification expérimentale. — Avant toute vérification expérimentale, la simple réflexion permet de prévoir que le chiffre du GAERTNER, s'il a la prétention de renseigner sur la tension maxima des artères collatérales des doigts, est un chiffre trop élevé. On le trouve, en effet, égal ou même un peu supérieur à celui de 110 à 120 millimètres fourni, chez un sujet normal, parla manchette de RIVA-ROCCI appliquée sur l'humérale. Et cependant, la tension sanguine, si elle reste relativement stationnaire dans les grosses artères, baisse assez rapidement dans les fines artérioles.
Les vérifications expérimentales confirment cette manière de voir. MAX NEU, prenant la tension au GAERTNER sur la queue d'un chien, coupée ou liée deux centimètres au-dessous de l'anneau, et faisant ensuite une mensuration directe dans l'artère sacrée moyenne, trouva toujours un excédent de plus de 30 pour 100 pour le chiffre de cet appareil (excédent de 37 millimètres pour une pression de 160 à 180 au GAERTNER, de 12 millimètres pour une tension de 50 millimètres au GAERTNER).
Dans le travail de MULLER et BLAUEL que nous avons cité plus haut, noué trouvons une vérification expérimentale, faite chez un homme lors d'une amputation du bras, qui nous renseigne avec toute la netteté désirable sur la valeur absolue des chiffres fournis par le GAERTNER, Du côté droit, où l'on pratiquait l'amputation, on put prendre successivement la tension dans l'humérale, la radiale, et dans une artère digitale (branche de l'arcade palmaire superficielle) ayant sa bifurcation en collatérales des doigts; tandis que, du côté gauche, on prenait simultanément la tension au tonomètre de GAERTNER, soit à l'annulaire, soit au médius. Les chiffres obtenus furent les suivants 1 :
Chiffres obtenus Chiffres obtenus
par mensuration directe à l'aide au GAERTNER
d'un manomètre métallique sur le médius gauche
Humérale . 109 millimètres 110 105 millimètres
Radiale . . 115 — 120-122 —
Art. digitale 75-9° — 105-110 —
1 Les tensions prises au niveau des différentes artères le furent à des intervalles assez éloignées, ce qui explique que dès variations de tension aient pu se produire et que la pression de la radiale se trouve plus élevée que celle de l'humérale.
Le doigtier employé était.celui du nouvel appareil de GAERTNER, et, comme
86 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMETRIQUE
On voit donc clairement que l'appareil de GAERTNER, bien que construit sur le principe du RIVA-ROCCI, ne donné pas, comme on pouvait le croire ; lé taux de la pression systolique des artères collatérales des doigts; mais une valeur bien supérieure. Le chiffre fourni par cet instrument est de près de 20 pour 100 plus élevé que celui de la pression systolique prise directement dans une artère digitale. Or, comme la pression terminale d'une artère digitale donné la pression systolique latérale de l'arcade palmaire et qu'il doit y avoir encore une chute de pression appréciable de l'arcade jusqu'aux artères collatérales, on voit que l'écart se montrerait encore plus considérable et atteindrait peut-être près de 30 pour 100, si l' on pouvait comparer directement le chiffre du GAERTNER avec la pression latérale réelle d'une artère collatérale. Le chiffre donné par le tonomètre de GAERTNER, dans les expériences d'O. MULLER et BLAUEL, s'est en même temps montré supérieur à celui de la pression systolique de la radiale et même de l'humérale : ce qui prouve combien peut être fausse l'idée communément répandue que cet appareil donne la pression moyenne du sang dans les grosses artères ! Pour une pression moyenne de 86 à 88 millimètres dans l'humérale, on obtenait, en effet, au GAERTNER, des chiffres oscillant entre 105 et 115 !
Quelle est la raison de cette surestimation? On peut bien accuser le lit capillaire de la pulpe, dans lequel le sang se déverse, de causer certaines irrégularités constatées plus haut dans la perception du retour du sang (tension artério-capillaire de BOULOUMIE) ; mais on ne saurait vraiment le rendre responsable de cette surestimation. Il ne fait, en effet, que laisser apparaître, et même un peu, tardivement 1, le sang qui a pénétré dans la pulpe et tendrait par conséquent plutôt à abaisser qu'à élever le chiffre de la pression. Cette surestimation ne peut tenir qu'à une chose, c'est que,
critérium du retour de la circulation, on prenait non le chiffre correspondant à la perception de la première tache, mais celui correspondant à la rougeur, diffuse de tout le doigt, par conséquent un chiffre plutôt bas.
1 Si l'on prend, en effet, comme signe de rétablissement de la circulation, non plus la coloration de la pulpe, mais la sensation de battements éprouvée par le sujet au niveau du doigtier, et qui indique certainement que le sang pénètre déjà dans les collatérales, on voit que ce chiffre est encore supérieur de 5 à 20 millimètres à celui donné par la rougeur du doigt (MAX NEU, RILLIET).
TONOMÈTRE DE GAERTNER 87
soit à cause de la faible hauteur ou de la disposition du doigtier, soit du fait de la structure des parties molles du doigt ou de la situation des artères collatérales, la pression du doigtier ne se transmet pas intégralement à l'artère ou, du moins, à son contenu. C'est pourquoi le sang, qui n'a sans doute dans les artères collatérales des doigts qu'une tension systolique de 6 à 7 centimètres au maximum, commence à filtrer sous le petit manchon, alors que la pression n'y est encore descendue qu'au chiffre de 11 ou 12 centimètres.
d. Conclusions.— 1° L'exploration de la pression systolique à l'aide de l'appareil de GAERTNER est un procédé commode, d'application facile et rapide, qui théoriquement doit indiquer non la pression moyenne ou même la tension artério-capillaire, mais la tension systolique dans les artères collatérales des doigts.
2° Cet appareil indique cette tension systolique des collatérales, mais avec une surestimation considérable, qui atteint certainement 20 à 30 pour 100.
3° Ajoutons que cette surestimation n'est pas fixe ; qu'elle varie, dans de certaines limites, chez les divers individus ; et que, chez un même sujet, elle est susceptible de présenter parfois des écarts de 2 à 3 centimètres, suivant les doigts examinés ou même à un seul doigt.
4° Si donc cet appareil est capable de rendre quelques services au clinicien et de fournir des renseignements sur la tension systolique générale et ses modifications, ce ne peut être qu'à la condition de n'attacher d'importance aux variations de ces chiffres que si elles dépassent vraiment la marge des variations individuelles possibles.
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CHAPITRE II DÉTERMINATION DE LA PRESSION DIASTOLIQUE.
Nous venons de voir qu'il est possible, par l'appréciation de la disparition du pouls au-dessous du point de compression d'une artère, de fixer la valeur de la pression systolique ou maxima; non pas exactement, mais avec une approximation suffisante, surtout à l'aide du procédé de RIVA-ROCCI. On peut donc, au sommet de cette véritable courbe de tension que figure le tracé sphygmographique, inscrire un chiffre qui indique la pression que le liquide sanguin circulant dans l'artère atteint, mais ne dépasse pas, même au moment où l'ondée ventriculaire s'engouffre brusquement dans les gros vaisseaux de la base.
Ce chiffre de tension maxima n'est réalisé que d'une façon passagère, et son estimation ne donne que la connaissance d'un moment fugitif des variations de la tension artérielle. Il ne nous apprend rien sur la façon dont se comporte cette pression artérielle après avoir atteint son fastigium, rien non plus sur la profondeur de sa chute avant que la prochaine systole la relève brusquement à son niveau initial; et le tracé sphygmographique reste toujours ce que disait FREY : une courbe de tension à laquelle il manque des ordonnées. Et cependant, cette tension artérielle décroissante, qui règne dans le système vasculaire pendant l'intervalle qui sé-
TENTATIVES DE MESURE DE LA PRESSION DIASTOLIQUE 93
pare deux systoles cardiaques, serait importante et instructive à connaître. C'est elle somme toute qui, dépositaire momentanée de la force vive développée par la systole ventriculaire, va commander l'injection du système vasculaire périphérique ; nul doute que ses variations, sa pente, la profondeur de sa chute, ne soient capables de nous donner de précieux renseignements sur la résistance ou la facilité de cette circulation périphérique. En un mot, après avoir déterminé le chiffre de tension au-dessus duquel le sang ne monte pas, il faudrait pouvoir fixer celui au dessous duquel il ne descend pas : la force de tension moyenne utilisée dans la circulation étant comprise entre ces deux valeurs.
On peut considérer qu'il existe dans le système artériel une pression constante, différente du reste pour chaque segment de ce système, sur laquelle vient se greffer, lors de chaque systole ventriculaire. une vague de pression variable qui s'affaisse lentement
jusqu'à la prochaine contraction. C'est a cette pression constante, qu'on donne le nom de pression diastolique ou dépression minima Pris à la lettre, le terme de pression diastolique est doublement inexact: tout d'abord, parce que le mot de diastole se rapporte au ventricule et non à l'artère qui, à ce moment-là, est au contraire dans sa phase de systole ; en second lieu, parce que la phase diastolique de la tension artérielle, qui commence au dicrotisme, n'a pas une
FIG. 40. - Représentation schématique des variations de la tension sanguine à l'intérieur des artères. — La pression constante est située au-dessous de la pression diastolique et la pression variable, ou pression du pouls,se trouve comprise entre les chiffres de pression diastolique et de pression systolique.
84 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMETRIQUE
valeur fixe mais décroît progressivement jusqu'au pied de la pulsation suivante. Mais si l'on entend, par pression diastolique, la préssion qui règne dans le système artériel à la fin de la diastole ventriculaire, il faut convenir que sa signification devient parfaitement, claire et l'on comprend que ce terme, qui s'oppose bien à celui de pression systolique, ait été conservé comme synonyme de pression minima par la majorité des cliniciens.
Deux tentatives furent faites pour arriver à l'évaluation de cette pression diastolique, à l'aide du procédé suivant. La tension du sommet de la courbe sphygmographique étant connue, il s'agissait de fixer la tension d'un autre point pris sur cette courbe ; puis de calculer, à l'aide d'une échelle proportionnelle, le chiffre correspondant au point le plus déclive. POTAIN, avec son sphygmomanomètre, s'efforçait, sur des pouls très dicrotes, non plus d'arrêter la pulsation, mais seulement d'éteindre le dicrotisme. La pression lue sur le manomètre à ce moment-là donnait donc la tension du point de la courbe sphygmographique où s'inscrit l'ondulation dicrote ; et il était facile de déduire de cette valeur, par un simple calcul, celle de la pression diastolique, qui se trouvait atteindre en moyenne les , trois cinquièmes de la pression maxima. HENSEN proposa, en 1900, une méthode un peu différente. On recueille d'un côté, chez un individu, un tracé sphygmographique ; de l'autre, on détermine la pression systolique par la méthode de RIVA-ROCCI. Ceci fait, un aide comprime l'aorte abdominale tandis que l'on prend un nouveau tracé sphygmographique avec l'appareil laissé en place et que l'on fait une seconde estimation de la pression systolique au RIVA-ROCCI. On a donc, en superposant les deux tracés, deux ordonnées dont on connaît les valeurs en chiffres : celles correspondant aux sommets des pulsations recueillies avant et pendant la compression de l'aorte, et partant de là on calcule la pression diastolique. HENSEN conseille d'utiliser de la même façon certaines arythmies légères, en s'efforçant de prendre séparément au RIVA-ROCCI la pression des grandes et des petites pulsations, ou encore les inégalités du pouls d'origine respiratoire, lorsqu'elles sont suffisamment marquées. Nous ne nous attarderons pas à faire la critique des difficultés techniques que peut présenter l'application de ces deux méthodes, et ferons simplement remarquer que le principe sur lequel elles reposent — à savoir la proportionna-
TENTATIVES DE MESURE DE LA PRESSION DIASTOLIQUE 95
lité absolue entre la courbe de la pression et les oscillations, du tracé sphygmographique — vrai peut-être pour des pressions très faibles, ne l'est certainement pas pour des pressions, élevées.
On comprend que, devant l'insuffisance de ces procédés,, on ait cherché ailleurs. Pendant longtemps, on crut trouver la solution du problème dans l'appréciation, lors de l'application d'une manchette brachiale, non plus de la disparition, mais de la première diminution d'amplitude des pulsations.
1° Appréciation de la première diminution d'amplitude des pulsations. — Cette méthode fut préconisée. successivement, et indépendamment les uns dès autres, par JANEWAY (1901), MASING (1902), STRASBURGER (1904) et SAHLI (1904).
a. Le principe sur lequel elle repose est facile à saisir. Supposons une manchette appliquée sur un bras et faisons monter progressivement la pression à son intérieur. Tant que la pression du
brassard n'a pas atteint la pression diastolique, l'artère humérale reste constamment béante et les pulsations passent inaltérées jusqu'à la radiale. Au moment précis où cette pression diastolique est atteinte ou plutôt légèrement surpassée, l'artère s'affaisse un temps très court, pour se relever presque immédiatement lorsque survient l'onde systolique suivante. Insuffle-t-on de nouveau de l'air dans la manchette de façon à dépasser davantage encore la pression diastolique, l'artère continuera à s'affaisser entre chaque systole cardiaque, mais durant un temps un peu plus long. Cet affaissement commençant plus tôt sur la pente diastolique et finissant plus tard,l'onde pulsatile ne soulèvera la paroi artérielle qu'au moment où sa tension surpassera légèrement celle de la manchette. Augmente-t-on encore la pression dans le brassard, le collapsus artériel deviendra
FIG. 41. — Diminution de l'amplitude du pouls produite par l'ascension de la pression dans la manchette.— Les pulsations artérielles, graduellement rongées par la base, voient leur amplitude se réduire progressivement jusqu'à leur disparition totale.
96 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
encore plus prolongé et une minime partie seulement de l'onde sanguine sera capable de franchir l'humérale; jusqu'au moment où pression du brassard devenant supérieure à la tension systolique maxima, l'artère restera indéfiniment close, ne livrant plus passage à aucune goutte de sang.
En un mot, tout se passe comme si l'onde pulsatile qui traverse le manchon était progressivement (qu'on nous permette cette expression) rongée par sa base, pour n'arriver qu'amoindrie et mutilée dans les artères sous-jacentes jusqu'au moment de sa disparition totale. On comprend donc, dans ces conditions, que le moment ou la tension de la manchette atteint où dépasse légèrement la pression diastolique soit annoncé, à l'exploration du pouls radial, par une diminution d'amplitude des pulsations.
b. Les procédés employés pour apprécier cette première diminution des pulsations artérielles sont exactement les mêmes que ceux étudiés plus haut et dont la mission était d'annoncer sa disparition totale,
C'est d'abord la palpation simple, préconisée surtout par STRASS RURGER. Le doigt, appliqué sur la radiale pendant l'insufflation lente et progressive de la manchette brachiale, palpe l'artère avec soin, attentif à la première diminution d'amplitude des pulsations. Le procédé est commode, d'application simple, mais demande une certaine habitude. La tendance est, au début, de donner des chiffres etrop élevés, c'est-à-dire de percevoir trop tard le rapetissement des pulsations. STRASBURGER lui-même déclare que, pendant assez longtemps, il ne trouvait à l'état normal que des chiffres. inférieurs de 30 millimètres à la pression systolique, alors que, plus exercé, la différence entre les deux tensions s'élevait à 40 millimètres Hg. Il est possible aussi de procéder de façon inverse, c'ést-a-dire d'apprécier le moment où, la pression baissant dans la manchette brachiale, les pulsations radiales acquièrent toute leur amplitude; mais les indications ainsi fournies sont encore moins précises.
La méthode graphique, employée d'abord par JANEWAY, MASING, SAHLI, le fut ensuite par BINGEL, STRAUSS, FLEISCHER, STURSBERG et plus récemment par DAVENPORT WINDLE (1911), à l'aide du polygraphe de MACKENSIE. Elle nécessite les mêmes appareils que ceux décrits précédemment à propos de la détermination de la pression systolique, c'est-à-dire un bon sphygmographe ou turgosphygmographe, avec inscription au-dessus de la ligne du tracé sphygmo-
TENTATIVES DE MESURE DE LA PRESSION DIASTOLIQUE 97
graphique de la courbe de' la tension de la manchette brachiale. Si l'on emploie le sphygmographe de JAQUET, la modification introduite
introduite SAHLI afin d'éviter la turgescence veineuse de l'avant-bras
est particulièrement utile, sans quoi le tracé manifeste, de luiL,
luiL, 7
93 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
même et sans que la pression augmente beaucoup dans là manchette, une tendance à s'élever et à diminuer d'amplitude. Comme
on peut le remarquer sur les tracés ci-joints, que nous avons recueillis en 1909 à l'aide du sphygmographe de JAQUET, la première
TENTATIVES DE MESURE DE LA PRESSION DIASTOLIQUE 99
modification du tracé sphygmographique annonçant la pression diastolique se manifeste : 1° par une ligne diastolique plus horizontale ; 2° par une diminution de hauteur de la pulsation, dont la base semble s'élever sur un plan invisible. Sur tous les tracés de cette sorte, ces premières modifications de la pulsation nous ont toujours paru beaucoup plus faciles à saisir lors de la compression, que de la décompression delà manchette; et la pression diastolique obtenue dans le premier cas était toujours nettement plus élevée que dans le second. C'est ce même procédé qui a été récemment repris par STROHL et BARRÉ (1917) qui ont insisté, comme critère diastolique, sur les modifications de forme des pulsations recueillies à l'aide d'une manchette antibrachiale formant pléthysmographe, notamment sur la disparition du raccord horizontal entre deux pulsations, La disparition de ce raccord est évidemment la conséquence de la restauration de la pleine amplitude des pulsations et de ce fait que ces pulsations ne sont plus, comme nous le disions plus haut, « rongées par la base ».
Le contrôle visuel de la première diminution d'amplitude du pouls est aussi facile que celui de sa disparition avec les appareils signalés plus haut. La pression diastolique doit être notée au moment précis où commence à diminuer l'amplitude des oscillations du signal dans l'appareil de VAQUEZ, de. l'index capillaire dans celui de BING.
On connaît les avantages réciproques de ces diverses méthodes d'exploration. Leur sensibilité respective est à peu de chose près la même. Cependant, bien que STRASBURGER prétende avoir presque toujours obtenu les mêmes chiffres à l'aide de la palpation simple que de l'enregistrement graphique et assure « qu'un doigt exercé parvient à explorer une artère de façon plus parfaite encore qu'il n'est possible avec le sphygmographe », la plupart des auteurs admettent que la méthode graphique donne, pour la tension diastolique, des chiffres inférieurs de 5 millimètres à 1 centimètre Hg à ceux de la palpation simple. Quant à la méthode visuelle de BING, STRASBURGER, qui l'a expérimentée comparativement avec la palpation, ne lui trouve pas d'avantage appréciable.
2° Vérification expérimentale et conclusions. — STRASBURGER, ayant tenté la vérification expérimentale de cette méthode d'appréciation de la pression diastolique, la trouve suffisamment
100 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
exacte. Après avoir établi une circulation artificielle dans un tube de caoutchouc, avec pression constante et intermittente, et placé un manchon pneumatique à la partie supérieure du tube, un splrygmographe plus bas, il vit le tracé diminuer d'amplitude au moment où le chiffre de la pression constante était atteint dans le manchon.
Les expériences pratiquées directement sur l'homme par O. MULLER et BLAUEL furent loin de donner des résultats aussi satisfaisants. La pression diastolique était mesurée directement du côté amputé à l'aide d'un manomètre métallique (le manomètre Hg donnant, à cause de l'inertie et des oscillations propres de la colonne métallique, des chiffres beaucoup trop élevés) ; tandis que, de l'autre côté, la pression diastolique était enregistrée graphiquement par BINGEL lui-même à l'aide d'une manchette brachiale et de son appareil. Or, les chiffres trouvés par BINGEL pour la pression diastolique, dans trois mensurations successives, furent 83 à 84 millimètres Hg, alors que le manomètre métallique du côté opposé, enregistrant directement la pression latérale de l'humérale, donnait des chiffres de beaucoup inférieurs, variant entre 60 et 65 millimètres Hg 1. Bien qu'il s'agisse là d'une vérification expérimentale unique, elle nous paraît suffisamment démonstrative et nous permet d'affirmer que la méthode qui consiste à déterminer la pression diastolique par la diminution de l'amplitude du pouls (même enregistrée graphiquement) donne des chiffres notablement trop élevés. Dans l'expérience précédente, cette surestimation dépassait de 25 pour 100 le chiffré de la pression diastolique réelle.
Cette erreur pouvait, semble-t-il, être prévue et se trouve, du moins, aisément explicable. L'affaissement diastolique dé l'humérale, lorsqu'il commence à se produire, se manifeste pendant un temps extrêmement court, tout au fond de la vallée qui sépare deux pulsations, et, par conséquent, ne diminue pas sensiblement l'amplitude de la pulsation qui suit. Ce n'est que lorsque la pression
1 Les auteurs font remarquer que, dans ce cas, la tension était bien égale des deux côtés, car il fallait des deux côtés une même pression de 128 à i3o millimètres dans la manchette pour produire l'arrêt des pulsations au. manomètre ou au doigt. A remarquer également que ces chiffres de pression diastolique, relativement bas, sont probablement dus à la narcose profonde(ce qui n'empêche en rien leur comparaison avec ceux enregistrés par l'appareil de BINGEL) .
TENTATIVES DE MESURE DE LA PRESSION DIASTOLIQUE 101
s'élève un peu dans le manchon que l'affaissement est assez prolongé pour ronger vraiment l'onde systolique et produire une diminution appréciable du pouls 1.
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1 Nous verrons plus loin que l'exploration au-dessous du point de compression est capable, si l'on prend comme point de repère non plus la première diminution d'amplitude des pulsations, mais une certaine vibrance du pouls, de donner des chiffres se rapprochant beaucoup plus de la pression diastolique vraie. Mais cette vibrance spéciale du pouls, bien que se percevant audessous du point de compression, se relie d'une façon tellement intime au phénomène des oscillations de la paroi artérielle à l'intérieur, du manchon que nous croyons à la fois plus logique et plus naturel de repousser son étude au chapitre suivant.
DEUXIÈME PARTIE
PROCÉDÉS UTILISANT LES OSCILLATIONS DE LA PAROI ARTERIELLE AU NIVEAU DE LA COMPRESSION
MÉTHODE OSCILLATOIRE ET SES ÉQUIVALENTS
« C'est à une conception géniale de MAREY, écrit v. RECKLINGHAUSEN, que nous devons une nouvelle méthode de mensuration de la pression sanguine », En effet, la méthode proposée par MAREY repose sur un principe vraiment nouveau, n'ayant rien de commun avec les précédents; et dont la découverte, chose étrange, a : précédé toutes les recherches que nous venons de signaler sur, la mesure de la pression sanguine.
C'est dans les «Travaux du Laboratoire » qu'on peut Suivre pas à pas le développement de la pensée du Maître. Il imagine tout d'abord un nouveau procédé de compression artérielle : « Si, dit-il, au lieu de comprimer un vaisseau sur une de ses faces, on plongeait ce vaisseau dans un milieu comprimé à une pression qu'on put graduer, il est clair qu'en élevant peu à peu la pression du milieu ambiant, on arriverait à un moment où la pression intérieure serait vaincue. Le moment où se produirait l'affaissement du vaisseau signalerait l'instant où la pression ambiante, mesurable au manomètre, arriverait à dépasser la pression intra-artérielle » (1876), De là, à enfermer non plus une artère, mais une partie du corps, dans un petit réservoir inextensible rempli de liquide, par l'intermédiaire duquel on pourrait opérer la compression, il n'y avait qu'un pas, qui fut vite franchi. Il fit construire deux appareils, l'un
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pour le bras, l'autre pour le doigt (sphygmoscope), dans lesquels la partie introduite plongeait dans de l'eau dont on pouvait à volonté faire varier la pression. Puis, s'avisant d'enregistrer à l'aide d'un manomètre à Hg les oscillations déterminées par le pouls total du membre dans la masse liquide, il découvrit ce fait capital : que les mouvements oscillatoires de cette masse variaient d'amplitude, suivant la pression régnant dans le réservoir. Il rechercha alors, dans chaque cas, la contre-pression nécessaire pour obtenir les oscillations les plus amples du manomètre, estimant qu'à ce moment les parois vasculaires, complètement détendues, flottaient librement et que « les choses devaient se passer comme si la pression du sang était appliquée directement au manomètre ». On. peut ainsi déterminer, dit-il, la valeur de la pression qui fait équilibre à celle du sang et il insiste sur tous les services qu'a pu lui rendre cette méthode dans l'étude de la pression sanguine chez l'homme. Plus tard, en 1878, revenant sur la description de son sphygmoscope, il ajoute : « Si j'indique ces dispositions nouvelles de l'expérience et ces nouveaux essais, c'est avec l'espoir que d'autres physiologistes s'attacheront à améliorer cette méthode encore imparfaite et chercheront à rendre plus simple et plus précise la détermination directe de la pression du sang chez l'homme ». Le voeu de MAREY a été exaucé, mais près de vingt-cinq ans plus tard ; et, grâce aux travaux do Mosso, ROY et ADAMI, OLIVIER, HILL et BARNARD, PAL, RECKLINGHAUSEN, J. ERLANGER, PACHON, la méthode oscillatoire est devenue un des procédés les plus couramment employés dans la détermination clinique de la pression artérielle. Parallèlement à l'étude directe des courbes oscillatoires, l'attention des chercheurs était attirée par d'autres phénomènes dérivant eux aussi, en droite ligne, des oscillations de la paroi artérielle et perceptibles non plus visuellement, mais à l'aide de l'auscultation ou de la palpation. Ces méthodes, que l'on peut groupersous la dénomination d'équivalents de la méthode oscillatoire, méritent une étude attentive qui viendra après celle consacrée à la méthode oscillatoire proprement dite.
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CHAPITRE PREMIER
METHODE OSCILLATOIRE PROPREMENT DITE
Afin d'apporter un peu de clarté dans l'exposition d'un sujet dont le principe, déjà compliqué à l'origine, l'a été davantage encore dans la suite par la diversité des interprétations proposées, la multiplicité des appareils imaginés avec leurs innombrables modifications de détail, nous procéderons là comme précédemment.. Au lieu de passer en revue tous les appareils ou procédés divers - ce qui demanderait de trop longs développements — nous ferons une étude très générale de cette méthode d'exploration et étudierons successivement :
1° Les oscillations;
2° Les appareils destinés à mettre en évidence les oscillations ; 3° La pression systoliqùe oscillatoire ; 4° La pression diastolique oscillatoire.
§ 1. LES OSCILLATIONS.
Depuis les premiers travaux de MAREY, les oscillations qui prennent naissance au contact d'une artère progressivement comprimée dans un milieu fluide, ont fait l'objet, dans ces vingt dernières années surtout, d'innombrables travaux.
Il s'agit, à l'origine, de véritables oscillations de la paroi artérielle. Cette paroi, en soulevant les parties molles environnantes, détermine dans le milieu qui entoure le membre des oscillations de pression qu'il est facile de retransformer en nouvelles oscillations sensibles, en mettant ce milieu en communication directe avec un manomètre quelconque. Pratiquement, il suffit, pour recueillir ces oscillations, de placer autour du bras d'un sujet une manchette ordinaire de 12 à 13 centimètres de hauteur, dans laquelle on élèvera la pression à l'aide d'une soufflerie quelconque, et de relier cette manchette à un appareil inscripteur ou simplement à un manomètre mé-
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tallique très sensible. Si l'on examine avec attention, et chez plusieurs malades, les courbes oscillatoires, inscrites sur le papier noirci ou simplement figurées par la succession des mouvements de l'aiguille du manomètre, on ne tarde pas à remarquer que, sur le thème uniforme et fondamental d'oscillations d'amplitude progressivement croissantes et décroissantes, viennent se greffer des différences individuelles considérables, des variations d'aspect parfois déconcertantes, qui rendent assez difficile la lecture, le repérage et, par conséquent, l'interprétation de ces courbes. Il importé, afin d'éviter les interprétations erronées, de faire une étude détaillée et raisonnée de ces courbes oscillatoires, en mettant successivement en évidence leurs caractères fondamentaux (courbe théorique) ; les modifications que leur imprime forcément la Structure des parois artérielles (courbes expérimentales) ; enfin, les variations résultant des conditions dans lesquelles on peut les recueillir chez l'homme (courbes cliniques).
I° Courbe oscillatoire théorique.— Bien que cette courbe ne soit jamais exactement réalisée dans la pratique, ses éléments se retrouvent facilement dans tous les cas. On peut la figurer par le schéma suivant dans lequel il est aisé de distinguer trois parties : I° une série de petites oscillations d'amplitude progressivement croissante ; 2° une série de grandes oscillations régulièrement décroissantes, séparées des précédentes par une démarcation brusque ; 3° une ligne droite figurant l'extinction absolue de toute oscillation.
a. La genèse des petites oscillations d'amplitude croissante s'explique par la dilatation variable de l'artère, suivant le degré de compression qu'elle subit. Supposons qu'il existe dans, l'humérale une tension diastolique ou minima de 80 millimètres et une tension systolique de 130 millimètres Hg, par conséquent une pression variable de 50 millimètres Hg. Au moment où la pression est nulle dans la manchette brachiale, l'air qui y est contenu n'éprouvera, lors de chaque pulsation, que des variations de pression à peu près insignifiantes, car l'expansion de la paroi artérielle répondant à des variations de tension, sur sa surface interne, de 80 à 130 millimètres Hg est très minime. Elevons, dans la manchette brachiale, là pression de l'air à 20 millimètres Hg : les oscillations vont devenir
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sensiblement plus considérables, carie premier effet de cette pression sera de détendre d'une quantité égale la paroi artérielle et de grossir son expansion ultérieure. Au moment de la diastole, en effet, la paroi artérielle, supportant en dedans une pression de 80 millimètres et à l'extérieur une pression agissant en sens contraire de 20 millimètres, sera soumise à une tension réelle dé 60 millimètres seulement; et l'onde systolique qui reste uniformément de 50 millimètres Hg, agissant sur une paroi tendue à 60 millimètres au
lieu de 80, produira une expansion plus accusée. C'est une loi bien connue des membranes élastiques, et en particulier des parois artérielles, que leur élasticité, où pour mieux dire leur dilatabilité, n'est nullement proportionnelle à la pression qu'elles supportent, mais augmente nettement (pour une même variation de pression) dans la mesure où diminue leur tension initiale. Lorsque la pression de la manchette brachiale arrivera à 40, 60, 70 millimètres Hg, les oscillations iront toujours en croissant et atteindront leur maximum au moment précis où, la pression extérieure égalant la tension diastolique de 80 millimètres, la paroi artérielle, supportant une pression égale à l'intérieur et à l'extérieur, va se trouver complètement détendue, libre, flottante, capable par conséquent de présenter une expansion maxima sous l'influence de l'excédent des
1 Dans celle figure schématique, comme dans la plupart des suivantes, nous ayons supposé une pression du pouls égale, ou du moins un mouvement d'ascension de la pression réglé de façon à produire un même nombre d'osdilations dans l'intervalle qui sépare la pression diastolique de la pression systolique. De plus, pour plus de simplicité, nous avons donné à toutes les. oscillations une même base sur une ligne fictive horizontale,
FIG. 44. - Courbe oscillatoire théorique. — Au-dessous de la pression diastolique Mn se trouve une phase d'oscillations à amplitude progressivement croissante, dues à la simple dilatation de l'artère: au-dessus de la pression systolique Mx, se voit une ligne horizontale traduisant l'absence de toute oscillation; entre Mn et Mx,prend place la phase des grandes oscillations, à amplitude subitement accrue, puis progressivement décroissante, dues a la superposition des valeurs de dilatation et des valeurs de décollapsus artériel 1.
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50 millimètres Hg que réalise rythmiquement à son intérieur l'arrivée de l'onde systolique.
b. L'explication de la seconde phase caractérisée par les grandes oscillations à amplitude décroissante, est tout aussi simple. Au moment où nous venons de laisser la manchette brachiale, la pression qui règne à son intérieur est juste égale à la pression diastolique. Elevons cette pression de quelques millimètres et voyons ce qui va se passer. L'artère numérale, supportant une pression nettement supérieure à celle qui existe à son intérieur lors de la fin de la dias-, tole, va s'affaisser brusquement et entrer en collapsus complet, jusqu'à ce que survienne la prochaine ondée systolique. Cette ondée systolique, pénétrant dans cette artère aux parois accolées, aura pour effet: 1° de faire cesser le collapsus artériel et de restaurer le calibre initial du vaisseau; 1° de produire, de plus, une expansion artérielle correspondant à une pression du pouls de 50 millimètres Hg agissant sur une paroi artérielle à peu près détendue. La première oscillation qui va traduire au dehors les variations de volume de l'artère comprimée dans la manchette offrira donc d'emblée une amplitude beaucoup plus élevée que la précédente, puisqu'elle va ajouter, à une valeur de dilatation à peu près égale, une valeur nouvelle — que nous appellerons valeur de décollapsus — qui vient d'entrer brusquement en scène.
Mais les oscillations ne se maintiendront pas longtemps à cette hauteur. Laissons monter la pression du brassard jusqu'à 100 millimètres : l'affaissement artériel diastolique se produira de la même façon, mais la paroi vasculaire se trouvant surchargée en dehors par une pression de 100 millimètres, le décollement ne se produira que lorsque la pression systolique aura atteint le même chiffre. Il ne restera donc, pour produire l'expansion artérielle supplémentaire venant s'ajoutera la valeur de décollapsus, qu'un excédent de pression du pouls de 30 millimètres au lieu de la pression totale initiale de 50 milimètres Hg. Par suite, l'oscillation sera donc d'amplitude un peu moindre. Avec une pression de 120 millimètres dans le manchon, l'onde systolique sera encore capable de décoller les parois numérales, mais ne pourra plus consacrer à la distension du cylindre artériel qu'une pression de 10 millimètres Hg, d'où une diminution encore notable de l'oscillation produite. Avec une pression enfin de 130 millimètres à l'intérieur du brassard,l'onde systo-
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lique, dont la tension est de 130, sera juste suffisante pour restaurer le calibre de l'artère et Sera incapable de produire la moindre distension supplémentaire. L'oscillation se trouvera donc réduite simplement à la valeur du décollapsus artériel.
c. La troisième phase, figurée par une simple ligne horizontale,. n'a pas besoin.d'être expliquée. La pression de la manchette étant devenue supérieure à la pression systolique, l'écrasement de l'artère reste permanent et les oscillations sont complètement abolies.
De tout ceci, il résulte que l'amplitude des oscillations est réglée à chaque moment par deux sortes de valeurs, que nous dénomnierons valeurs de dilatation et valeurs de décollapsus. Dans la.
phase initiale, les premières entrent seules en jeu et l'amplitude croissante des oscillations est due à l'augmentation progressive des valeurs de dilatation. Dans la deuxième phase, dont le début' marque la pression minima, et la fin la pression maxima, chaque oscillation est due à la superposition des deux valeurs : l'une uniforme, la valeur de décollapsus, l'autre variable et décroissante, la valeur de dilatation. Ainsi s'explique la diminution progressive de ces oscillations, depuis le début où la valeur de décollapsus a exhaussé brusquement leur niveau, jusqu'à la fin où, la valeur de
FIG. 45. — Variations de volume d'un tube artériel sous l'influence de la circulation d'une onde pulsatile et de la compression extérieure. — La figure de gauche montre les différents stades de dilatation artérielle, en partant de la position zéro (artère vide ou avec pression égale à l'intérieur et à (l'extérieur) sous l'influence de la pression diastolique (Mn) et de la pression systolique (Mx). La figure de droite montre les situations en demi-collapsus et collapsus complet, en partant de la situation relâchée (O).
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dilatation ayant disparu, elle se trouve réaliser à elle seule, toute leur amplitude.
Le taux de ces deux sortes de valeurs est éminemment variable suivant les individus; car il dépend, pour les valeurs de dilatation, de l'élasticité des parois artérielles et du chiffre de la pression du pouls, pour les valeurs de décollapsus, du calibre de tarière considérée 1. IL nous est possible d'en prendre une idée en nous reportant aux recherches expérimentales de STRASBURGER. Expérimentant sur des artères numérales normales, à l'aide d'un procédé que nous ne pouvons détailler ici, cet auteur a trouvé que la valeur en capacité du décollapsus, pour une numérale normale de Il centimètres de longueur, était de 0,70 c. c. Quant à la valeur de la distension artérielle sous l'influence des diverses pressions, elle est loin d'être négligeable. Cet auteur a trouvé que, si l'on part du point d'équilibre de la paroi artérielle un changement de tension de 0 à 40 millimètres produit une dilatation qui, mesurée en capacité, équivaut parfois à la presque totalité (2 cas sur 3) et toujours à plus de la moitié de la valeur de décollapsus ; de 40 à 80 millimètres, à un peu moins de la moitié; de 80 à 120 millimètres, à peu près au quart de cette valeur. Ces chiffres sont importants à connaître. Ils donnent une idée dé la réduction de capacité que peut subir l'espace aérien de la manchette brachiale chez un individu normal, réduction qui peut atteindre plus de 1 centimètre cube au moment des grandes oscillations; ils montrent, d'autre part, qu'avec une pression du pouls élevée (par exemple ,60 à 80 millimètres Hg) la valeur de dilatation de l'artère peut parfois surpasser en hauteur la valeur de décollapsus 2.
STRASBURGER a figuré de la façon suivante les déplacements d'air qui s'effectuent dans la manchette brachiale, chez un individu normal,
1 D'après MACWILLIAM et KESSON (1913), les dimensions moyennes de l'artère numérale humaine seraient les suivantes: épaisseur de la paroi, 0,78 millimètres, dont 0,03 pour l'endartère, 0,50 pour la tunique moyenne, 0,25 pour la tunique externe; lumière, 4 millim. 17.
3 On peut objecter à ces mensurations, fait remarquer STRASBURGER, qu'elles ont été faites sur des artères mortes, c'est-à-dire sans tonus. Mais, d'après MACWILLIAM, le tonus artériel persisterait assez longtemps après la mort et, de fait, STRASBURGER a montré que des mensurations faites après un temps très long donnaient des chiffres bien supérieurs, par suite de la disparition de ce tonus.
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et dont la grandeur doit théoriquement régler l'amplitude des oscillations :
PRESSION VARIATIONS DE VOLUME DE L'HUMBRALE
dans la
Par décollapsus Par dilatation Total
manchette artériel artérielle
P. systolique
130mm » » »
120 0,50 » 0,50
110 0,50 0,15 0,65
100 0,50 0,30 0,80
90 0,50 0,40 0,90
80 0,50 0,45 0,95
P. diastolique
80 » 0,45 0,45
70 » 0,35 0,35
60 » 0,27 0, 27
50 » 0, 20 0,20
40 » 0,20 0,20
30 » 0,19 0,19
20 » 0, 15 0, 15
10 » 0,14 0, 14
» » 0,10 0,10
2° Courbes oscillatoires expérimentales. — Même avant toute vérification expérimentale, il est facile de prévoir que, dans la pratique, les courbes oscillatoires n'offriront pas des caractères aussi; tranchés que ceux que nous venons d'indiquer. Il est un facteur, en effet, avec lequel il va falloir compter : l'inertie de la paroi artérielle. Alors même que la pression extérieure sera nettement supérieure à la tension diastolique, cette paroi exigera un certain temps pour réaliser un collapsus artériel complet, étant donné la présence à son intérieur d'un cylindre sanguin à expulser ; et, comme nous allons le voir, ce temps lui sera tout d'abord très mesuré.
Tout au début et lors d'une pression croissante à l'intérieur de la manchette, alors que la pression diastolique vient seulement d'être atteinte dans le brassard, cette pression n'est supérieure à la pression artérielle minima que pendant l'intervalle de temps extrêmement court — quelques centièmes de seconde à peine — figuré sur un
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tracé sphygmographique par le bas-fond de la vallée qui sépare deux pulsations 1. Or, il est parfaitement plausible d'admettre que, durant ce court intervalle, le cylindre artériel n'ait pas le temps d'entrer en collapsus complet en chassant brusquement son contenu sanguin, mais que ses parois décrivent simplement une légère inflexion qui sera d'autant plus accusée que l'excédent de pression se maintiendra plus longtemps, jusqu'à ce qu'elle arrive, en fin de compte, à déterminer l'oblitération totale de l'artère. Une autre circonstance qui tend à rendre l'écrasement artériel incomplet au début, c'est que, au fur et à mesure que la paroi artérielle se déprime, la tension doit nécessairement s'abaisser légèrement dans le manchon; et il faut absolument, pour aboutir au collapsus total, que la pression dans le brassard reste supérieure à la pression diaslolique, alors même que l'affaissement artériel aura augmenté d'autant sa capacité. Quelle que soit la valeur respective de toutes ces explications dans la genèse du phénomène en question, elles aident cependant à comprendre comment, alors qu'un affaissement total et complet de l'artère produirait d'emblée des oscillations maxima, un affaissement d'abord partiel et incomplet de cette même artère n'est capable de donner lieu qu à des oscillations d'amplitude croissante, n'atteignant que progressivement cette valeur maxima.
C'est ce qu'ont démontré jusqu'à l'évidence les recherches expérimentales récentes de MACWILLIAM et MELVIN (1914)- Ces auteurs ne sont pas les premiers à avoir tenté la vérification exacte des lois de l'oscillométrie artérielle. Avant eux et depuis MAREY , ERLANGER, HOWELL et BRUSH (1901) avaient expérimenté sur des tubes artériels enfermés dans des manchons de verre où s'exerçait la compression. Mais leurs recherches ont été conduites avec une telle rigueur, les points qu'ils ont élucidés sont d'une telle importance pour tout ce qui a trait à l'interprétation des courbes oscillatoires, que nous devons nous y arrêter longuement.
MACWILLIAM et MELVIN opèrent sur des segments artériels de ta à 15 centimètres de longueur, enfermés dans des manchons de verre
1 Si le pouls bat à 90 à la minute, la durée de la pulsation mesure 75 centièmes de seconde, et le bas-fond de la vallée ne compte pas plus de 3 à 5 centièmesde seconde.
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d'égale dimension. Ces artères sont « vivantes ", c'est-à-dire susceptibles de présenter des alternatives de contraction et de relâchement, suivant la température a laquelle elles sont soumises, et empruntées ordinairement à la carotide du mouton afin dé se rapprocher le plus possible du diamètre de l'humérale. Le manchon est rempli d'une solution de RINGER dont la pression, réglable à volonté, est indiquée par un manomètre à Hg; les oscillations de
pression de ce manchon liquide sont recueillies par un manomètre de FICK et enregistrées graphiquement. A l'intérieur de l'artère, est établie une circulation artificielle rythmique de solution de RINGER, avec un dispositif spécial à l'extrémité du tube d'écouler ment donnant l'équivalent des résistances périphériques. Pour éliminer toute erreur dans l'estimation des valeurs minima et maxima de la pression du liquide circulant, on ne se contente'pas de les enregistrer à l'entrée du tube par deux manomètres distincts affectés l'un à la pression maxima, l'autre à la pression minima, la circulation du liquide dans l'artère pouvant occasionner une chuté appréciable de ces valeurs initiales. Le même enregistrement est pratiqué également à la sortie et, au lieu de prendre une moyenne(qui pourrait être inexacte,) entre ces deux valeurs, en amont et en aval, on ne considère comme utilisables que les expériences dans lesquelles il ne s'est pas produit de chute appréciable entre l'entrée et la sortie. De cette façon, on est donc bien certain des pressions réelles régnant à l'intérieur de l'artère sur laquelle on va experimenter.
La première conclusion à laquelle arrivent ces auteurs est que les
FIG. 46. — Schéma du dispositif expérimental utilisé par MACWILLIAM et MELVIN.
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oscillations maximales se produisent toujours lorsque la pression du manchon extérieur est très nettement supérieure à la pression diastolique. Ces oscillations maximales sont souvent assez étendues, se montrant parfois dans une zone de 20 millimètres Hg. Elles commencent à se manifester lorsque la pression régnant dans le manchon est supérieure de 10, 20 millimètres Hg, ou même davantage, à la pression diastolique. Pour ne citer qu'un exemple,' emprunté à la figure 12 de ces auteurs, ces oscillations maximales apparaissent à 90 millimètres Hg, alors que la pression diastolique intra-artérielle oscille entre 66 et 64 millimètres Hg (valeurs recueillies en amont et en aval du tube). On n'est donc plus autorisé à admettre, comme 1 écrivait MAREY en 1876, que « les expansions d'une artère soumise a une contre-pression graduelle présentent leur amplitude maxima au moment où cette contre-pression fait équilibre à la pression constante . Ce décalage des oscillations maximales, par rapport au niveau de la pression constante, est dû à ce que ces _ oscillations ne se produisent jamais du fait de la simple dilatation artérielle et sous l'influence d'une paroi détendue et passive, comme le pensait MAREY, mais toujours par suite du décollapsus artériel surajouté, ainsi que nous l'avons dit plus haut. D'après MACWILLIAM et MELVIN, la position artérielle qui donne par excellence les oscillations maximales dans les artères normales n'est pas le collapsus complet, mais le demi-collapsus, c'est-à-dire la situation réalisée lorsque l'artère aplatie représente environ le demi-diamètre du cylindre primitif; si le collapsus devient complet, les oscillations diminuent. Le fait n'est paradoxal qu'en apparence. Pour réaliser un collapsus total, la pression du manchon doit être suffisamment élevée pour avoir le temps de produire l'affaissement artériel dans le minime intervalle séparant deux battements ; mais alors, elle l'est trop pour permettre une dilatation artérielle complète lors de la prochaine onde. Dans ces conditions, l'onde systolique s'use en quelque sorte à restaurer, et même à restaurer incomplètement, la forme circulaire primitive du vaisseau; tandis que, dans le demicollapsus, l'excédent de pression extérieure est très léger et n'oppose pas d'obstacle appréciable au décollapsus et à la dilatation artérielle consécutive. Cette loi est du reste sujette à quelques variations. Dans les artères dures ou contractées, il faut un plus grand degré de collapsus ou même un collapsus presque complet pour donner L. GALLAYAHDIJN. 8
114 . TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQtJE
naissance aux oscillations maximales; dans ce cas, en effet, les valeurs de dilatation ne comptent plus guère, et c'est le maximum de restauration du cylindre artériel, même s'il n'arrive pas à être total, qui produites oscillations maximales.
Voici donc rigoureusement et définitivement prouvée cette « nonconcordance des oscillations maximales avec la pression diastolique », non-concordance que beaucoup d'auteurs avaient depuis longtemps soupçonnée, que nous avions nous-même admise en 1910, niais que nombre d'autres s'obstmaient à méconnaître. Le fait n'aurait qu'une importance minime si le décalage de ces oscillations maximales avait lui-même une valeur constante. Mais il n'en est rien. Le second point sur lequel insistent MACWIIXIAM et MELV» est que, dans la zone des grandes oscillations, la place des oscillations maximales n'est pas fixe. Suivant telle ou telle circonstance, ce groupe a de la tendance à se rapprocher du niveau de la pression, systolique ou de celui de la pression diastolique; et c'est ce qui rend si variable l'écart entre la première grande oscillation et la.: plus grande oscillation, en dehors même de toute modification dans là tension du pouls. — D'après MACWILLIAM et MELVIN, les oscillations maximales ont de la tendance à se rapprocher du niveau de la tension systolique dans deux circonstances. D'abord, lorsque l'artère se trouve plus facilement compressible a son extrémité distale ; cette extrémité distale s'affaisse alors sous l'effet d'une pression qui n'est guère supérieure à celle nécessaire pour provoquer les grandes oscillations dans le reste du tube. MACWILLIAM et MELVIN ont souvent vu dans leurs expériences et dans des conditions analogues « le, maximum oscillatoire se rapprocher d'une remarquable façon du niveau de la pression systolique ». Le même phénomène peut encore dépendre de la courbe de la pression pendant la durée de la pulsation. Si la courbe de pression de l'artère est telle que le niveau de la pression minima ne s'abaisse que très fugitivement audessous de celui du manchon extérieur, le collapsus (et partant le décollapsus) n'a pas le temps de se produire; il faut alors quela pression extérieure devienne très notablement supérieure au taux diastolique pour qu'un collapsus suffisant puisse avoir lieu. Car le facteur temps a une grande importance ; et, comme nous l'avons, déjà dit, il faut du temps, à cause de l'inertie de la paroi, pour que s'établisse une modification de la capacité artérielle, collapsus
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partiel bu total. — C'est surtout sous l'influence de rallongement dit tube artériel que le groupe des oscillations maximales aurait de la tendance à se rapprocher du niveau de la pression diastolique. On parle toujours uniquement de la dilatation expansive du vaisseau survenant du fait de l'excès de la pression intérieure, alors qu'il se produit aussi à ce moment un allongement de l'artèrê. Dans l'appareil, à travers la paroi de verre, on peut constater de la façon la plus nette que la compression extérieure raccourcit l'artère et la redresse, alors que l'excédent de pression intérieure l'allonge et la rend tortueuse. Ces valeurs d'allongement doivent donc entrer eh ligne de compte, surtout, disent MACWILLIAMI et MELVLN, si le segment artériel n'est pas fixé à ses deux extrémités. « Nous concluions donc de nos expériences, ajoutent ces auteurs, que le déplacement du maximum oscillatoire vers un niveau inférieur peut être dû, en partie au moins, au rôle joué par l'élongation artérielle, les variations de volume dues a cette cause intervenant d'une façon très précoce, alors même que le chiffre de tension diastolique n'a pas été atteint dans la manchette extérieure ; car, il n'y a pas besoin que l'artère soit entrée en collapsus, et la simple dilatation- artérielle, sans décollapsus, allonge aussi l'artère ». A signaler encore que, lors de la baisse de tension dans le manchon liquide, les oscillations maximales sont plus amples et surtout plus bas situées que lorsque l'on procède en faisant monter la pression. Même remarque avait été faite, en 1910, par EWALD opérant sur un « bras artificiel » Le phénomène est du reste de constatation courante chez l'homme et l'on sait que la première grande oscillation repérée lors d'une décompression de là manchette se trouve souvent à un niveau un peu inférieur (0 cm. 5 à 1 cm. Hg) à celui indique par l'apparition de cette première grande oscillation lors d'une compression croissante.
La pression diastolique ne coïncidant pas avec les oscillations maximales, où faut-il donc placer l'index diastolique dans ces courbes oscillatoires expérimentales? MACWILLIAM et MELVIN insistent sur ce fait que, le plus souvent, la pression diastolique correspond presque exactement aux petites oscillations qui, lors d'une pression descendante, sont les premières à réapparaître sur la courbe après lu diminution brusqué dès grandes oscillations. En fixant cet index sur la première petite oscillation (lors d'une pression
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décroissante dans le manchon), on procède plus exactementqu'en le plaçant sur la première ou plutôt la dernière grande oscillation ; cette grande oscillation prouve en effet que le taux de la tension diastolique a été surpassé, puisque le collapsus a pu se produire. En résumé, ils confirment les vues défendues par de nombreux auteurs et par nous-même, à savoir que la transition brusque entre la zone des grandes oscillations et des petites oscillations, quand elle existe, est le critérium le plus sûr de la pression diastolique,
Nous disons quand elle existe, car elle n existe pas toujours. D'une extrême netteté sur certains tracés (fig, 47), elle devient
beaucoup plus incertaine sur d'autres, dont la lecture est dès lors_ plus difficile. Elle peut faire totalement défaut sur un certain nombre. On voit alors les oscillations diminuer très régulièrement et très progressivement d'amplitude, sans qu'il soit possible de fixer aucune démarcation entre la zone des grandes et des petites oscillations (fig. 49). Nous ne saurions trop insister sur l'importance de ces courbes oscillatoires expérimentales (recueillies cependant dans des conditions idéales), dans lesquelles cette transition brusque si importante manque de netteté ou fait complètement défaut. Au lieu de dissimuler de pareils faits, nous estimons
FIG. 47.— Courbe oscillatoire expérimentale. — Figuration schématique d'un tracé recueilli par MACWILLIAM et MELVIN sur une carotide de brebis (Heart, 1914, P. 166, fig. 12). Il existe sur ce tracé une dénivellation très brusque au taux dépression extérieure de 80 millimètres Hg; mais on remarque que ce chiffre est encore très supérieur à la tension diastolique intra-artérielle (66 à 64 millimètres Hg). On voit donc à quelle erreur on s'exposerait en notant le chiffre depression diastolique, au moment où se produisent les oscillations maximales ou juxtamaximales, le taux de la pression extérieure à l'artère à ce moment-là (90 et 80 millimètres Hg) étant beaucoup plus élevé que celui de la tension diastolique intra-artérielle (66 à 64 millimètres Hg).
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au contraire qu'il convient de les mettre en pleine valeur, car ils montrent les difficultés et aussi les limites do la méthode oscillatoire.
oscillatoire. eux se trouve expliqué et justifié l'embarras très réel 1 dans lequel on se trouve assez fréquemment en clinique, si l'on
veuf être sincère, même en usant des appareils les plus perfectionnés et les plus sensibles.
Nombreuses, lorsque l'on y réfléchit, sont les causes capables d'atténuer ou de masquer cette transition brusque entre la zone des petites et des grandes oscillations. La cause de cette transition
FIG 48.— Courbe oscillatoire expérimentale. — Figuration schématiqued'un tracé recueilli par MACWILLIAM et MÉLVIN sur une carotide de boeuf (relâchée) (Hearl, 1914, p. 170, fig.16). Les chiffres supérieurs indiquent la pression extérieure à laquelle se trouve soumise l'artère; dés deux rangées de chiffres inférieurs, la première indiqué la tension diastolique à l'entrée du cylindre artériel, la seconde, cette même pression diastolique à la sortie; la tension diastolique régnant à l'intérieur de l'artère étant vraisemblablement intermédiaire, à ces deux valeurs. On remarque que la brusque dénivellation des oscillations au moment ou la pression extérieure est de 50 millimètres Hg correspond sensiblement au taux de la pression diastolique (48-46 millimètres Hg), et que la dénivellation inférieure fournit encore une indication plus rigoureusement exacte (45 millimètres Hg de pression extérieure pour une tension diastolique de 46 à 44 millimétrés Hg). A noter également le fait un peu anormal que l'amplitude des grandes oscillations reste stationnaire sur une étendue de pression de 20 millimètres
millimètres
FIG. 49. — Courbe oscillatoire expérimentale. — Oscillations artérielles d'amplitude très régulièrement croissante, sans aucune dénivellation brusque permettant" de fixer le niveau de la pression diastolique. Figuration schématique d'un tracé recueilli sur une carotide de boeuf (contractée), par MACWILLIAM et MELVIN (Heart, 1914, p. 177, fig. 17).
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brusque réside essentiellement dans l'écart entre le taux des valeurs de dilatation et celui des valeurs de décollapsus ; cet écart devant être d'autant plus accusé que les valeurs de dilatation seront plus faibles, et les valeurs de décollapsus seront plus étendues et surtout d'apparition plus brusque. Or, même dans les expériences conduites in vitro, la compression se faisant sentir également sur tout le cylindre
cylindre ces conditions sont loin d'être toujours réunies. Parmi les facteurs capables d'effacer ou d'estomper la démarcation brusque dans la succession des oscillations, on peut citer avec MACWILLIAM et MELVIN une trop grande dilatibilité artérielle, ou encore une rigidité excessive, comme aussi la présence de zones inégalement résistantes sur le trajet du tube artériel. Une artère trop dilatable aura non seulement l'inconvénient dé présenter d'énormes valeurs de dilatation, qui feront pâlir celles dues au décollapsus, mais celui d'y joindre une élongation dont l'effet, se manifestant dès la période subdiastolique, viendra grossir encore
FIG. 5O. — Différences de réduction dans la capacité d'un tube artériel, sous l'influence de pressions extérieures progressivement croissantes, suivant qu'il s'agit d'une artère « relâchée » ou « contractée ». (D'aprèsMACWIILLIAM et MELVIN.)
MÉTHODE OSCILLATOIRE 119
les plus élevées de la zone des petites oscillations. Dans les artères trop rigides, la transition risquera également d'être masquée. Dans de tels vaisseaux, le collapsus est en général très progressif, très lent à s'établir, par suite de la résistance marquée des parois à l'affaissement; ce collapsus sera donc minime durant le temps très court où la pression extérieure surpassera la tension diastolique et, partant, les valeurs de décollapsus ne croîtront que progressivement. On comprend enfin que, dans des tubes aux parois inégalemont résistantes, le développement parcellaire et graduel de l'accolement pariétal s'opposera à l'addition brusque d'une valeur importante de décollapsus aux valeurs de dilatation déjà existantes1.
3° Courbes oscillatoires cliniques. — Ici, la compression
1 Depuis les premières recherches de MAREY, l'étude expérimentale des oscillations de la paroi artérielle a suscite toute une série de travaux dont la revue suffirait a alimenter un travail d'ensemble Nous nous sommes borné à l'analyse du travail dé MACWILLIAM et MELVIN qui nous a semblé un des mieux conduits, un des plus instructifs, et surtout un des plus propres, à mettre en lumière les réelles difficultés de la méthode oscillatoire.
Nous devons signaler, cependant, une importante étude d'ERLANGER (1916) réalisée a l'aide d'une technique un peu différente. L'appareil employé est celui de BROOKS et LUCKHARDT, et l'expérimentation porte soit sur des tubes de caoutchouc, soit sur des artères animales La différence la plus importante est qu'au lieu de produire dans ces tubes une sorte de pouls artificiel, on les amène d'une façon stable en position systolique ou diastolique; un trait honzontal enregistré à chaque phase marque le sommet et la base des. oscillations, dont il est facile de restituer la série par la suite. De cette façon, ERLANGER estime qu'on élimine les erreurs dues au rythme pulsatoire, aux résistances périphériques (qui sont complètement supprimées), sans compter que la véritable pression systolique ou diastolique intra-artérielle est calculée san sdifficulté puisqu'il s'agit de valeurs stables. On peut se demander, toutefois, si l'on se rapproche plus de cette façon des. conditions de la mensuration clinique Quoi qu'il en soit, l'auteur arrive à cette conclusion que la configuration de la courbe oscillatoire, la situation des oscillations maximales sont capables de varier suivant de multiples conditions: compressibilité et dimensions plus ou moins glandes de l'espace péri-artériel, dilatabilité du tube en expérience, configuration et étendue des cônes supérieur et inférieur d'accolement incomplet, établissement de la pression extérieure pendant la période de collapsus ou de décollapsus artériel, etc. A signaler aussi que; dans d'autres expériences conduites à l'aide d'un pouls artificiel, pet auteur a vu le maximum oscillatoue se superposer au collapsus complet de l'artère. Il estime que si, dans les expénences de MACWILLIAM et MELVIN, ce maximum oscillatoire coïncidait avec un état de demi-collapsus artériel, c'est que le pouls artificiel produit par ces auteurs se trouvait de forme atypique.
120 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
s'exerce sur. l'artère humérale humaine, par l'intermédiaire des parties molles du bras, au moyen d'une manchette pneumatique. Les modifications imprimées, du fait de ces circonstances nouvelles, à la courbe oscillatoire sont multiples : présence d'oscillations au-dessus de la pression systolique, altération de la zone des grandes oscillations, sans compter les variations individuelles dépendant de chaque cas particulier.
a. Oscillations supra-maximales. — La partie supérieure de la courbe, représentée précédemment par une simple ligne horizontale, va se trouver occupée, sur un espace variable, par quelques oscillations
oscillations de très faible amplitude. Ces oscillations, qui se produisent alors que la pression du brassard est supérieure à la pression systolique et que par conséquent l'artère humérale reste continuellement affaissée, sont dues au choc rythmique du pouls huméral contre le bord supérieur du manchon. Du fait de la présence des oscillations supérieures, la courbe oscillatoire se trouve donc divisée en trois segnents : au milieu, les grandes oscillations dont le début et la fin marquent la pression diastolique et systolique; au-dessus et au-dessous, d'autres oscillations, que l'on pourrait dénommer oscillations supra-maximales et oscillations inframinimales puisqu'elles se produisent respectivement, soit au-dessus : de la pression maxima, soit au-dessous de la pression minima.
b. Altération de la zone des grandes oscillations. — Dans les expériences que nous avons relatées plus haut, nous avons déjà vu l'allure générale de cette zone des grandes oscillations se modifier singulièrement du fait de l'inertie de la paroi artérielle, alors même que la pression extérieure était transmise directement; intégrale
FIG. 51. — Courbe oscillatoire réelle. —Première modification consistant dans l'adjonction, aux deux phases déjà existantes des oscillations infra-minimales et des grandes oscillations, d'oscillations supra-maximales dues au choc du pouls humeral contre le rebord supérieur de la manchette brachiale.
METHODE OSCILLATOIRE 121
ment et surtout uniformément, à toute l'étendue du cylindre vasculaire. Ces modifications persistent dans les courbes recueillies chez l'homme et vont se trouver encore aggravées par suite de l'entrée en scène d'un nouveau facteur.
Ce facteur, c'est l'inégale transmission de la pression aux différentes parties de l'artère emprisonnée sous la manchette. V. RECKLINGHAUSEN a depuis longtemps signalé l'écrasement plus précoce de l'artère sous la partie centrale que sous les parties périphériques de la manchette ; mais le point est de telle importance et sa méconnaissance a conduit à de telles erreurs dans l'appréciation de la valeur
valeur la méthode oscillatoire que nous devons y insister. Que la pression du brassard ne se transmette pas intégralement même à la portion centrale du segment artériel, cela se comprend aisément et l'interposition des parties molles, l'inertie des différents milieux, sont autant de facteurs qui expliquent suffisamment cette minime déperdition centrale ou perpendiculaire. Elle n'est pourtant pas la seule à considérer. Sur les portions du vaisseau sous-jacentes aux bords de la manchette, se produit une déperdition, que l'on pourrait appeler marginal cou tangentielle, et dont il est facile de comprendre la cause. Supposons qu'il existe dans la manchette une pression de 150 millimètres Hg. La partie centrale de l'artère qui reçoit le maximum de pression vient de s'affaisser sous une pression qui, si l'on veut, est de 145 millimètres Hg. Mais, cette même pression ne règne pas jusque sur les extrémités de l'artère. Au dessous du centre de la manchette et jusqu'au contact de l'artère, existe une zone circulaire étroite de parties molles où la tension oscille entre 150 et 145 millimètres. Suffisamment en dehors des bords de la manchette, ces mêmes parties molles ne sont soumises qu'à la seule pression atmosphérique. Existerait-il donc, à l'extrême limite des bords de
FIG. 52 — Figure schématique montrant l'inégalé transmission de la pression de la manchette pneumatique à l'artère et le mode d'écrasement, de cette artère.
122 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMETRIQUE
la manchette, et limitée par un plan perpendiculaire, une tranche moléculaire idéale qui supporterait sur sa face interne une pression de 145 millimètres Hg et sur sa face externe une pression de zéro ? Evidemment non, et l'on est bien obligé d'admettre que, du centre de la manchette jusqu'au delà de ses bords, la pression qui pèse sur les parois artérielles subit une dégradation de 150 ou 145 millimètres à zéro, dégradation dont la pente peut être suffisamment raide dans des circonstances favorables, mais aussi plus inclinée dans d'autres circonstances moins heureuses. Cette déperdition marginale doit; en effet, représenter une valeur éminemment variable (même avec un brassard identique) suivant l'épaisseur des parties molles et la hauteur de la pression initiale. Dès lors, pour une pression de 145 millimètres Hg, transmise à la partie centrale de l'artère, celle qui va régner sur les portions périphériques sera peut-être seulement de 140, 130 millimètres Hg, ou peut-être moins, suivant les cas 1. Ce facteur nouveau introduit, dans les courbes oscillatoires cliniques, un trouble analogue à celui occasionné par l'inertie de la paroi artérielle dans l'oscillométrie expérimentale. Le collapsus incomplet, dû à un affaissement artériel ne se réalisant que progressivement, s'aggrave, du fait de la transmission inégale de la pression de la manchette, d'un collapsus partiel ou régional intéressant d'abord le centre et ne s'étendant que graduellement aux deux extrémités du tube artériel. Deux circonstances dont les conséquences vont s'additionner, pour substituer un collapsus artériel progressif au collapsus théorique d'emblée total et général. — La première conséquence de ce fait est que les grandes oscillations, lors d'une compression croissante dans la manchette, au lieu de présenter d'emblée leur maximum, augmenteront
1 D'après SAHLI, la pression étant un peu moins forte dans le bout périphérique de l'humérale que dans le bout central, c'est ce bout périphérique qui s'écraserait tout d'abord. Cette hypothèse est assez peu probable, car la chute de la pression le long d'un cylindre humeral de 10 à 12 centimètres ne doit pas atteindre le taux de la déperdition marginale de la pression s'exerçant sur les deux bords du vaisseau. Il en est autrement, lorsqu'une pression identique règne sur toute l'étendue de l'artère, et, dans leurs expériences, MACWILLIAM et MELVIN ont bien constaté que, « lors d'une pression externe ascendante, l'affaissement de l'artère commence par l'extrémité distale et que. les mouvements sont plus considérables à ce niveau quand la pression monte davantage. »
MÉTHODE OSCILLATOIRE 123
progressivement d'amplitude pendant un certain temps. Le maximum oscillatoire n'eût été atteint d'emblée que si la première valeur de décollapsus entrant en scène avait été l'expression d'un décollement se produisant sur toute la longueur du vaisseau ; or, nous venons de voir que seules les parties centrales, commençaient à s'affaisser. De là résulte que ce maximum n'occupera plus exactement le début du segment moyen de la courbe, mais un point plus ou moins éloigné entre la pression systolique et
la pression diastolique On verra donc s'intercaler et grandir, à la partie inférieure de la zone des grandes oscillations, cette phase d'oscillations presque maximales ou juxta- maximales dont l'importance variera suivant l'élévation de la pression et aussi, sans. doute, suivant l'épaisseur du bras soumis à la compression, — Pour des raisons analogues, mais inverses, les grandes oscillations, tout en haut de la courbe, ne présentent pas d'emblée toute l'amplitude à laquelle elles auraient droit théoriquement. Suivant le sens dans lequel on effectue la lecture de cette courbe, on peut dire qu'elles diminuent trop rapidement ou qu'elles n'atteignent pas d'emblée l'amplitude qu'elles devraient avoir. C'est qu'en effets en haut de la courbe comme en bas, la valeur de décollapsus qui va se superposer dans chaque oscillation a la valeur de dilatation n'atteint pas de suite, mais progressivement, son véritable taux. Supposons, dans le brassard, une pression supérieure à la tension systolique et laissons-la tomber lentement jusqu'à ce qu'elle devienne égale ou
FIG. 53.- Courbe oscillatoire réelle. — Deuxième modification se traduisant par une démarcation moins nette de la phase des grandes oscillations d'avec la phase des oscillations infra-minimales ou supramaximales.
supramaximales. des grandes oscillations, au lieu de s'établir
brusquement, croit progressivement, puis diminue plus rapidement
après avoir atteint son maximum: Il résulte de là que le début et la
fin de la phase, des grandes oscillations se détachent moins nettement
sur la courbé oscillatoire, et que les oscillations maximales et juxtamaximales
juxtamaximales correspondent plus à la pression diastolique, mais à une pression assez notablement supérieure. Comparer cette nouvelle courbe avec la courbe théorique de la figure 44 et avec celle, déjà modifiée, de la figure 51.
124 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
un peu inférieure à la tension maxima. Ace moment, l'extrême sommet de l'ondée systolique va pouvoir pénétrer dans le segment humeral emprisonné et affaissé sous le manchon; mais seule la partie supérieure du vaisseau située sous le bord du brassard, et supportant de ce fait une pression moindre, se laissera tout d'abord injecter. De plus, cette inondation n'aura lieu que pendant un temps extrêmement court, comme il est facile de s'en rendre compte en considérant le sommet aigu d'un sphygmogramme. Ce n'est qu'au fur et à mesure, la pression s'abaissant dans le brassard, que l'ondée systolique aura la force et le temps de pénétrer dans toute la longueur du tunnel artériel, pour restaurer son calibre initial et réaliser un décollapsus total et général.
Parmi les causes susceptibles d'altérer les courbes oscillatoires en clinique, il faut encore compter avec ce fait que, dans la compression du bras, l'humérale, pour être l'artère la plus importante, n'entre sans doute pas seule en jeu. On ne peut éliminer absolument d'autres branches artérielles assez volumineuses, dont la pression diastolique est un peu inférieure à celle de l'humérale et qui se laissent écraser pareillement. Condition défavorable, qui contribue à donner moins de netteté à la limitation inférieure ou supérieure de la zone des grandes oscillations.
c. Variations individuelles. — Il suffit de prendre la tension sanguine par la méthode oscillatoire chez un certain nombre de malades et de suivre attentivement la succession des mouvements de l'aiguille du manomètre pour se rendre compte des variations considérables de la courbe oscillatoire, suivant les sujets. Ces variations peuvent affecter chacun des trois segments de la courbe et relèvent de conditions multiples : valeur absolue de la tension sanguine, hauteur de la pression du pouls, état de l'élasticité artérielle, calibre du vaisseau, épaisseur des parties molles, etc.
Les oscillations infra-minimales diffèrent beaucoup d'amplitude et de netteté. Les conditions qui paraissent le plus favorables à leur développement sont celles qui donnent lieu au pouls ample, bondissant: c'est-à-dire une tension systolique élevée et une forte pression du pouls, le tout allié à une élasticité artérielle parfaite, permettant une forte expansion du vaisseau. De cette façon, se trouvent réunies toutes les conditions propres à faire monter le taux des valeurs de dilatation, sous l'influence desquelles se trouvent ces
MÉTHODE OSCILLATOIRE 125 .
oscillations infra-minimales. Lorsqu'elles sont très amples, leur début peut se manifester très tôt, dès que la pression s'est élevée de quelques millimètres Hg seulement dans la manchette, ou même dès que le brassard est ajusté sur le bras. C'est dans l'insuffisance aortique, la néphrite chronique, qu'elles atteignent leur plus haute valeur. Leur accroissement est assez régulier, mais se fait peut-être plus rapidement, comme l'a fait remarquer STRASBURGER, vers la partie supérieure de la courbe que vers la partie inférieure. Lorsque le pouls est petit, filiforme, elles deviennent très peu apparentes et leur début est plus tardif; dans des cas de ce genre, et notamment dans un cas de rétrécissement aortique pur, nous les avons vues se manifester seulement avec une pression de 4 à 5 centimètres Hg dans la manchette brachiale.
Les variations individuelles sont encore plus considérables en ce qui concerne les oscillations supra-maximales. Ces variations semblent dépendre au moins autant de la configuration du bras, de l'épaisseur des parties molles, du calibre de l'artère, que des qualités du pouls. Tantôt réduites à quelques oscillations à peine sensibles, précédant de peu. (lorsqu'on fait baisser la pression dans le brassard) la naissance des grandes oscillations, elles affectent d'autres fois une amplitude très marquée, se manifestant sur une grande étendue, ne cessant même pas lorsque la pression de la manchette surpasse de 8 à 10 centimètres Hg la tension maxima. MAREY, du reste, avait parfaitement noté qu'avec son sphygmospope il était souvent impossible de faire disparaître ces oscillations, même avec une pression de 20 à 3o Centimètres Hg.
Pour ce qui a trait à la phase des grandes oscillations, les variations individuelles ne sont pas moins marquées.. - L'amplitude de ces oscillations ne présente rien d'absolu et dépend uniquement du taux respectif des valeurs de dilatation et de décollapsus dans le cas considéré. C'est dire que ces oscillations, très accusées et parfois même gigantesques (1 centimètre et demi au tonomètre de RECKLIKGHAUSEN, plusieurs centimètres à l'oscillomètre de PACHON, jusqu'à 10 ou 12 centimètres au sphygmoscope de PAL) lorsqu'il s'agit d'artères volumineuses avec pouls ample et tendu, peuvent devenir extrêmement minimes et presque imperceptibles dans le cas d'artères petites avec pouls filiforme. En un mot, ce terme de « grandes oscillations » n'a de valeur que par rapport aux oscillations infra-
126 TECHNIQUE SPHYMOMANOMETRIQUE
minimales où supra-maximales de la même courbe ; il n'autorise aucune comparaison d'une courbe à l'autre. - L'importance des déformations de la courbe, sur lesquelles nous avons si longuement insisté plus haut, diffère de même beaucoup suivant les individus. Elle se trouve soumise a plusieurs facteurs et, pour une grande partie sans doute, à l'épaisseur des parties molles. Disons aussi que ces déformations sont grossies en quelque sorte par le chiffre de la tension du pouls. Cela est vrai surtout pour les déformations de la partie inférieure de la courbe. Si la tension du pouls est réduite (20 à 30 millimètres Hg par exemple), l'amplitude maxima des oscillations suit d'assez près, à un demi-centimètre Hg a peine, le début des grandes oscillations. Lorsqu'au contraire, comme dans l'insuffisance aortique, la néphrite chronique, là tension du pouls très augmentée atteint les chiffres de 60, 80 ou 100 millimètres Hg, l'amplitude maxima n'est souvent réalisée qu'après 2, 3 et même 4 centimètres Hg au-dessus du point marquant le premier décollapsus. On peut voir, enfin, le maximum oscillatoire se stabiliser et les grandes oscillations présenter, pendant un certain temps, une même amplitude. Tout en haut de la courbe oscillatoire, se manifestent les mêmes variétés ; et, s'il est des cas où la disparition et la naissance des grandes oscillations est manifeste, il en est d'autres, comme nous le verrons, où l'on éprouve les plus grandes difficultés à les distinguer des oscillations supra-maximales.
§ 2. LES APPAREILS
Le but de ces appareils, nous l'avons dit, est de recueillir les variations de pression déterminées par les mouvements de la paroi artérielle; puis; de restaurer les oscillations primitives de cette paroi en rendant de nouveau sensibles, sous forme de mouvement, ces variations de pression.
1° Dispositif permettant de recueillir les oscillations, de la paroi artérielle. — C'est toujours à l'aide d'un appareil compresseur que l'on opère, puisque c'est la compression seule qui fait naître les mouvements de la paroi artérielle qu'il s'agit d'étudier. La méthode la plus couramment employée est la compression cir-
MÉTHODE OSCILLATOIRE 137
culaire pneumatique. On peut utiliser encore là compression à l'aide d'un pléthysmographe ou la compression artérielle localisée.
a. Compression circulaire pneumatique. — Les appareils employés sont exactement les mêmes que ceux utilisés dans les méthodes précédentes. Qu'il s'agisse d'une manchette brachiale ou d'un bracelet antibrachial, le principe est identique; ce sont toujours les oscillations pariétales de l'artère principale du membre sur lequel on opère que l'on s'efforce d'enregistrer. Ce qu'on peut faire sur l'humérale, la fémorale, les artères antibrachiales, peut être essayé aussi sur les artères digitales à l'aide du doigtier de GAERTNER ; et différents auteurs, PAL, HORNER, OLIVER, ont reconnu la possibilité de déterminer par la méthode oscillatoire, au moins dans certains cas, la pression systolique et diastolique dans ces fines artérioles.
Pratiquement, c'est presque toujours de la manchette brachiale de 12 centimètres que l'on fait usage. La conformation cylindrique du bras permet une compression régulière et facile, le diamètre et la superficialité de l'humérale rendent les oscillations particulièrement nettes; sans compter que, dans toute mensuration, on a intérêt à se rapprocher le plus possible du coeur, puisque somme toute c'est la pression intra-aortique que l'on désire connaître. Le brassard antibrachial de 8 centimètres de l'appareil de PACHON tend de plus en plus à être rejeté, tant à cause de ses dimensions réduites, que de la compression plus difficile des artères de l'avant-bras logées dans le chenal radio-cubital.
Les procédés utilisés pour comprimer l'air dans la manchette pneumatique sont les mêmes que ceux énumérés plus haut au sujet de la méthode de RIVA-ROCCI.
b. Compression pléthysmographique. C'est la méthode primitivement employée par MAREY (1876) dans son sphygmoscope, puis par Mosso (1895) dans son sphygmomanomètre digital, ultérieurement par BRUSH et FYREWEATHER (1898) dans leur appareil à contrepression totale de la main. Tous ces appareils consistent en un manchon de verre ou métallique, rempli d'eau, dans lequel s'introduisent le bras tout entier, la main, ou simplement un ou plusieurs doigts recouverts d'une membrane de caoutchouc, comme dans le sphygmoscope de MAREY. Les variations de pression de la masse liquide peuvent s'obtenir aisément à l'aide d'un entonnoir dont on
128 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMETRIQUE
fait varier la hauteur, du jeu d'une seringue ou d'une simple vis de
pression.
Tous ces appareils ne sont guère utilisés en clinique. Cependant, FLEISCHER a proposé l'emploi d'un pléthysmographe digital, consistant essentiellement en un réservoir de mercure dans lequel
plonge le doigt coiffé d'une mince membrane de caoutchouc ; à l'aide d'une vis de pression, il est facile de donner au contenu du réservoir la tension que l'on désire, et le mercure, en s'élevant dans un tube vertical, indique à la fois la hauteur de la pression et l'amplitude des oscillations. Il y a quelques années, enfin, FRANÇOIS FRANCK a insisté sur le parti que l'on pouvait tirer de la pléthysmographie digitale dans l'appréciation des variations des réactions vaso-motrices périphériques.
c. Compression artérielle localisée. — Diverses tentatives ont été faites pour enregistrer directement les oscillations d'une artère superficielle, en général la radiale, par l'intermédiaire d'un compresseur non circulaire. Dès 1890, ROY et ADAMI utilisèrent la compression au moyen d'une ampoule pleine de liquide appliquée sur la radiale et susceptible de mettre en évidence le phénomène
FIG. 54. — Pléthysmographe de Mosso.
METHODE OSCILLATOIRE 129.
des oscillations maxima au moment dune contre-pression optima. Plus tard, G. OLIVER, en 1898, dans son « Haemodynamomètre », se servit d'un large disque ampullaire plein de liquide, appliqué sur la
radiale, et dont la tige, agissant sur un ressort très sensible du type BOURDON, indiquait, par le mouvement d'une aiguille, la phase des oscillations maximales et la cessation de toute oscillation ; en 1908, le même auteur substituait au manomètre métallique un petit manomètre à air comprimé et a index liquide. HILL et BARNARD, en 1898, se servirent d'une petite cupule en verre, remplie de glycérine colorée, dont la partie inférieure, fermée par une membrane souple, était placée sur la radiale et dont la partie supérieure se prolongeait en un tube vertical. Par la compression exercée sur l'artère, le liquide montait dans le tube vertical, indiquant ainsi la pression à laquelle était soumis le vaisseau; la phase des oscillations maxima du niveau supérieur du liquide permettait de noter là tension diastolique, comme la cessation de toute oscillation, la tension systolique. Un appareil analogue a été présenté par G. DUMAS, en 1912, avec simple substitution du mercure à la glycérine.
C'est surtout FRANÇOIS FRANCK qui s'est ingénié, dans ces dernières années, à rajeunir le petit sphygmomanomètre de POTAIN et à l'adapter à la mensuration de la tension artérielle par la méthode oscillatoire. Dans les deux modèles imaginés par cet auteur,
l'ampoule de POTAIN est enveloppée d'une coque métallique sur toutes lés parties de son pourtour qui ne sont pas en contact avec l'artère, et maintenue sur la radiale par une large bride inextensible placée autour de l'avant-bras ou par une plaque extérieure servant de L. GALLAVARDIN. 9
FIG. 55. — Inscription d'un pouls digital normal, sous des pressions différentes, croissant de bas en haut, à l'aide du pléthysmographe digital de FLEISCHER. (D'après FLEISCHER.)
130 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMETRIQUE
point fixe. L'artère est comprimée par la descente de l'ampoule, ou mieux par les variations de pression agissant à son intérieur Les oscillations de la paroi artérielle sont, dans le modèle de laboratoire, transmises par l'ampoule de POTAIN remplie d'eau a un manomètre à Hg, muni d'un levier amplificateur et inscripteur qui repose sur une membrane à peine tendue; dans le modèle clinique, simplement communiquées par l'ampoule pleine d'air à un tonometre de RECKLINGHAUSEN ou à un oscillomètre de PACHON, Il est possible, dans ces conditions, d'obtenir des pulsations maxima en présence d'une certaine contre-pression supportée par l'artère radiale et de tenter la mesure de la pression artérielle oscillatoire maxima et minima.
Nous ne nous serions pas arrêté aussi longuement sur ces divers procédés s'ils n'étaient susceptibles de présenter quelques avantages dans certaines circonstances bien déterminées. FRANÇOIS FRANCK a insisté, en effet, sur ce point que le mode de compression a l'aide d'une manchette circulaire pneumatique réalisait une sorte de pléthysmpgraphe établi sur la continuité d'un membre, et que les oscillations obtenues par ce procédé étaient dues à la superposition et à la totalisation des effets manométriques, artériels et des effets pléthysmographiques. Lorsque il s'agit d'enregistrer certaines mani festations des réflexes vaso-moteurs chez l'homme (par exemple, les réactions hypertensives produites par une impression froide sur une partie du territoire cutané), les variations pléthysmographiques, comparées aux variations artérielles directes, peuvent être d'intensité différente et même de sens contraire. Il y aurait donc intérêt, dans ces cas-là, à user de préférence de sphygmomanomètres à contre-pression artérielle localisée, capables de renseigner sur les variations de la pression intra-artérielle indépendamment de toute turgescence ou de tout affaissement des tissus périphériques.
Cette remarque est parfaitement juste ; mais la possibilité de mettre en évidence de fines variations vaso-motrices réflexes, qui sont presque du domaine de la physiologie, ne saurait prévaloir en clinique contre l'emploi si simple et si commode des sphygmpmanomètres à contre-pression circulaire pneumatique. Cette simple considération nous dispensera d'entrer dans une critique plus approfondie des causes d'erreur pouvant tenir à une compression défectueuse de la radiale, capable de fuir facilement sous l'ampoule, ou à
METHODE OSCILLATOIRE 131
la difficulté d'appréciation du taux exact de la pression diastolique, si l'on ne veut pas se contenter, comme le fait FRANÇOIS FRANCK, de fixer cette pression diastolique au niveau des oscillations maximales dont le repérage est sans aucun doute plus aisé, mais certainement moins correct que celui du véritable index diastolique sur lequel nous reviendrons plus loin.
2° Dispositif permettant de mettre en évidence les oscillations. — Il est facile, en partant des variations de pression imprimées à l'air de la manchette pneumatique, de régénérer le mouvement oscillatoire qui leur a donné naissance. Les appareils diffèrent cependant, suivant que l'on utilise dans ce but un simple manomètre ou un instrument distinct ne servant qu'à enregistrer les oscillations.
a. Procédés mano-oscillométriques. — On peut grouper sous cette dénomination les procédés dans lesquels un même manomètre donne, à la fois, le niveau de pression à l'intérieur du brassard et les oscillations dépendant des variations de pression correspondant à chaque pulsation.
Le manomètre à Hg a été employé par quelques auteurs, et l'observateur lit sur la graduation la hauteur de la pression et l'amplitude des oscillations. Il est facile de faire monter ou baisser la pression lentement, de centimètre en centimètre par exemple, en laissant chaque fois se produire le mouvement oscillatoire. L'inscription des oscillations peut se faire directement en utilisant les dénivellations de la colonne de Hg; il suffit alors d'un léger flotteur avec aiguille en aluminium (appareil de G.-A. GIBSON), et la courbe qui s'inscrit sur le cylindre enfumé indique à la fois la hauteur de la pression et l'amplitude des oscillations. L'inconvénient d'une telle utilisation du manomètre Hg saute aux yeux. La colonne de mercure mise en mouvement tend, en vertu de son inertie, à osciller comme le ferait un pendule, avec un rythme qui lui est propre ; et, suivant que ce rythme coïncidera ou non avec celui des oscillations de la paroi artérielle, le mouvement oscillatoire total se trouvera augmenté ou diminué, mais toujours altéré. Dans des cas particulièrement favorables, un petit manomètre métallique du type de celui annexé à l'appareil primitif de POTAIN, peut suffire, par les petites saccades de son aiguille, à mettre en évi-
132 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÊTRIQUE
dence la série des oscillations et à fixer avec assez de netteté la délimitation supérieure ou inférieure de la zone des grandes oscillations; Il faut, pour cela, à la fois une grande pulsatilité artérielle et une démarcation particulièrement abrupte de cette zone des grandes
oscillations : deux conditions qui se trouvent trop rarement réunies pour qu'il soit possible de voir dans l'emploi de cet appareil autre chose qu'un procédé d'exception.
Il en va tout autrement du grand manomètre métallique sensible utilisé dans de nombreux appareils, parmi lesquels nous citerons
FIG. 56. — Tracé obtenu à l'aide du sphygmomanomètre de G.-A. GIBSON chez un sujet sain.— La ligne horizontale inférieure indique le zéro du manomètre; le tracé supérieur, obliquement descendant, montre les oscillations inscrites par la colonne de Hg. Pour avoir les valeurs exactes de la pression systolique et de la pression diastolique, indiquées par le début et la fin des grandes oscillations, il est nécessaire de doubler les hauteurs au-dessus de la ligne du zéro, le manomètre ayant la forme en U.
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le sphygmomètre de HILL et BARNARD, le sphygmométroscope d'AMBLARD, le tonomètre de RECKLINGHAUSEN. Chaque instrument a
évidemment la valeur de sa sensibilité, car il importe que les oscillations soient suffisamment amples dans chaque cas ; mais, avec une
sensibilité suffisante, on peut dire qu'il s'agit là d'un procédé très simple de détermination de la tension artérielle par la méthode oscillatoire.
b. Procédés oscillométriques. — Dans les appareils appartenant à cette série, le manomètre (qui est soit un petit manomètre de POTAIN, soit un manomètre à Hg) n'est là que pour donner l'indiFIG,
l'indiFIG, - Tracé obtenu avec le même appareil, chez un sujet atteint d'insuffisance aortique. —Pression systolique, 140: pression diastolique très basse à 58.
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cation de la pression qui règne dans la manchette à chaque instant de la compression ou de la décompression. La mise en évidence des oscillations est dévolue à un instrument distinct qui fonctionné en dehors de toute indication de pression. Quelle que soit sa disposition, on peut lui donner le nom général d'oscillomètre, suivant la dénomination proposée pour la première fois et très justement par PACHON, Dans le plus grand nombre des appareils; c'est un simple tambour de MAREY qui joue le rôle d'oscillomètre ; et ce tambour
est mis en communication avec l'intérieur de la manchette par l'intermédiaire d'une sorte de sphygmoscopes dont l'idée a été encore empruntée à MAREY: Il s'agit d'un petit ballon de caoutchouc assez résistant, dont l'intérieur communique avec le brassard et qui se trouve enclos dans une petite sphère de verre : chaque expansion du ballon déterminera des variations de pression dans le volume d'air environnant, et ce sont ces variations seulement qui impressionneront l'ampoule de MAREY. On évite ainsi la distension de cette ampoule par la pression souvent énorme de la manchette, distension qui serait mal supportée par sa mince membrane élastique et qui, en tout cas, lui enlèverait toute sensibilité. Qu'on ajoute a ce dispositif un papier enfumé sur lequel s'inscriront les mouvements du stylet, et l'on aura le thème général uniforme d'une interminable série d'appareils avec inscription graphique, variant à peine par
FIG. 58. — Sphygmométroscope d'AMBLARD. — La manchette brachiale présente un compartiment supérieur destiné à supprimer les oscillations supra-maximales.
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quelques points de détail. Le premier en date, très utilisé en Amériqne et en Angleterre, est le sphygmomètre d'ERLANGER ( 1904). Puis viennent le tonographe de REGKLINGHAUSEN, le sphygmotonographe d'USKOFF, les turgolonographes de MÙNZER et de STRAUSS , l'oscillographe de ZIMMERMANN, le sphygmomanomètre de WYBAUW, etc. ; sans compter le sphygmo-oscillographe optique de BOUCHARD (1913),
dans lequel le stylet inscripteur de l'ampoule de MAREY est remplacé par un petit miroir collé sur la membrane de caoutchouc, Certains de ces appareils, comme l'oscillographe récemment imaginé par STROHL (1917), sont doués d'une sensibilité constante, quelle que soit la compression imposée à l'artère, et permettent une analyse plus minutieuse, non seulement de la hauteur, mais de la forme des pulsations à différents régimes de pressions
Une disposition plus originale a été réalisée dans le sphygmoscope de PAL (1906). La pression de la manchette est formée dans cet appareil par un manomètre Hg; les variations de cette pression sont indiquées par les oscillations d'un index capillaire d'alcool ou de
FIG. 59, - Sphygmomètre d'ERLANGER avec inscription graphique.
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pétrole coloré, flottant dans un tube fin de 15 centimètres de longueur environ. Par suite des dispositions de l'instrument, ce petit index figure en quelque sorte une membrane absolument détendue, parfaitement mobile, supportant initialement la même pression sur chacune de ses deux faces : un jeu de robinets permet de mettre en communication une des faces de cet index capillaire avec l'air de la manchette toutes les fois qu'on le veut, et de rétablir entre chaque essai la même pression sur les deux côtés du petit cylindre liquide. On obtient de cette façon un oscillomètre remarquablement sensible.
et, chez certains malades, nous avons souvent vu les oscillations atteindre une amplitude de plus de 10 à 12 centimètres.
L'oscillomètre sphygmométrique de PACHON (1909) est basé sur un principe analogue. Un manomètre métallique ordinaire donne la hauteur de la pression ; la grandeur des oscillations est indiquée par une capsule manométrique très mince et très sensible, que l'on peut mettre en communication quand on le veut, à l'aide d'un petit séparateur, avec l'intérieur du brassard. Mais le point important est que cette capsule manométrique plonge elle-même dans un réservoir d'air constamment à la pression de la manchette. On obtient donc ainsi, par suite de l'absence de tension des parois de la capsule, un indicateur des pulsations d'une grande sensibilité et surtout d'une sensibilité constante. Aussi ingénieusement conçu qu'habilement construit, l'appareil de PACHON est certainement le
FIG. 60.— Tracé oscillographique, obtenu à l'aide de l'appareil d'ERLANGER (D'après MELVIN et MURRAY.)
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meilleur des oscillomètres. Il présente sur celui de PAL, qui seul pourrait lui être comparé, de multiples avantages. Il est plus portatif, d'un maniement infiniment plus commode. De plus, si dans les
deux appareils, membrane — liquide ou métallique — dont les déplacements vont mesurer l'amplitude des oscillations, est parfaitement
parfaitement au départ, les dimensions réduites du tube de verre font que, dans le sphygmoscope de PAL, l'index liquide au cours de ses migrations fonctionne en réalité comme un manomètre à air comprimé, alors que-, dans l'oscillomètre de PACHON, la grande
FIG. 61. — Oscillomètre sphygmometrique de PACHON.
FIG. 62. — Schéma de l'oscillomètre sphygmométrique de PACHON. — Le manomètre M indique la pression de l'air insufflé dans le brassard B ; la capsule manométrique c, qui plonge dans un réservoir E rempli d'air à la pression de la manchette et que le bouton s permet de mettre en communication seulement avec cette manchette, enregistre par les mouvements de l'aiguille les oscillations de la pression dans le brassard et, par conséquent, les oscillations de la paroi artérielle.
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différence dé capacité de la mince ampoulé souple et de la boîte spacieuse environnante atténue, peut-on dire, complètement cette légère cause d'erreur.
Parmi tous ces appareils, quels sont ceux qui sont vraiment à retenir dans la pratique journalière de la méthode oscillatoire?
Nous éliminerons tout d'abord tous les modèles à inscription graphique. Sans doute, ils peuvent fournir des indications objectives précieuses et permettent l'analyse à tête reposée des courbes oscillatoires; mais leur emploi compliqué, leur maniement délicat, ne sont pas compensés par des avantages suffisants dans une recherche d'un ordre aussi courant que celle de la mesure de la tension artérielle.. C'est à peu près comme si l'on voulait demander au médecin de recueillir un tracé sphygmographique toutes les fois qu'il s'agit de faire la numération du pouls ! Ce sont des procédés de laboratoire, non des procédés cliniques.
Deux sortes d'appareils restent donc en présence : dans la série oscillométrique, l'oscillomètre de PACHON; dans la série mano-oscllométrique, un grand manomètre métallique quelconque répondant aux types signalés plus haut, à la condition qu'il soit suffisamment sensible.
C'est à l'aide de ces appareils que nous allons maintenant explorer les courbes oscillatoires recueillies chez l'homme et nous efforcer de repérer, dans ces courbes, les deux seuls points réellement importants qui contiennent en eux toute la vertu de la méthode oscillatoire : à savoir le début et la fin de la phase des grandes oscillations, indicateurs, le premier de la pression systolique, le second de la tension diastolique 1.
1 Quelque procédé que l'on adopte dans la pratique de la méthode oscillatoire, il va sans dire que, pour augmenter l'amplitude des oscillations, on aura toujours intérêt à restreindre le plus possible la capacité totale de l'air contenu dans les diverses parties de l'appareil. Pour cela, on aura soin de veiller à une application étroite et exacte de la manchette sur le bras et de réduire le plus qu'il sera possible la longueur et surtout le diamètre dès tubes de caoutchouc reliant manomètre, manchette et soufflerie. Pour cette même raison, il est possible que le brassard à pelote pneumatique localisée sur le trajet de l'artère humérale présente quelques avantages.
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§ 3. PRESSION SYSTOLIQUE OSCILLATOIRE
Un lecteur peu averti qui parcourrait la littérature de ces dernières années, en quête de documents sur les différents procédés sphygmomanométriques et notamment sur la méthode la plus correcte pour fixer le chiffre de la tension systolique, risquerait fort de rester aussi perplexe que l'âne du conte. Il y a deux camps; celui des partisans de la méthode de RIVA-ROCCI, celui des tenants de la méthode oscillatoire. Des deux côtés, même ténacité ou même entêtement ; avec cette nuance que les partisans de là méthode de RIVAROCCI, à défaut d'autre mérite, semblent bien tenir le record de l'impénitence, car, si l'on signale d'assez nombreux partisans de la méthode oscillatoire ralliés à la méthode de RIVA-ROCCI, semblables défections — ou conversions — sont loin d'être aussi communes dans le camp adverse.
Après avoir étudié, dans la première édition de cet ouvragé, en 1910, les divers procédés capables de fournir cette tension systolique, je concluais nettement à la supériorité de la méthode de RIVAROCCI. Je n'avais à cela aucun mérite, car les expériences que je relatais commandaient cette conclusion. Or, il n'y à pas de point de vue qui ait été plus contesté et par des voix plus autorisées; Je me suis entendu accuser de Riva-Roccisme avec autant de véhémence qu'on en mettait à accuser de jansénisme ceux qui, au XVIIe siècle, se frottaient à Port-Royal. Il n'y avait qu'une méthode rigoureuse, scientifique, rationnelle, de prendre là tension systolique, c'était la méthode oscillatoire : hors d'elle, pas de salut! A l'aide de ce procédé seulement, la pression maxima était déterminée de façon à la fois élégante, facile et exacte.
A cette heure, le différend n'est pas apaisé. Là question vaut donc qu'on l'examine, car j'estime qu'au point de vue dé là pratique courante il n'y a pas de problème plus important; et il serait désirable de dissiper l'inquiétude qui s'est emparée de l'esprit des médecins. L'exposé qui va suivre ne sera pas fait sans idée préconçue, puisqu'il est celui d'un partisan convaincu de la supériorité de la méthode de RIVA-ROCCI; j'espère cependant qu'on n'y trouvera rien de contraire à la vérité.
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a. Difficultés de la mesure Oscillatoire de la tension systolique. Il n'y a pas d'hésitation sur le point de la courbe oscillatoire qui correspond à la pression maxima, et tout le monde est d'accord pour placer l'index systolique à l'union des grandes oscillations et de ces oscillations supra-maximales, dues au choc de. l'ondée sanguine sur le bord supérieur du manchon, et que nous avons appris à connaître plus haut. Toute la difficulté consiste à repérer exactement ce point.
Si l'on se sert d'un mano-oscillomètre, cette limite supérieure des grandes oscillations est plus facile à fixer en laissant tomber lentement la pression dans la manchette brachiale, après ravoir élevée à un chiffre supérieur à celui de la tension systolique, qu'en déterminant son ascension progressive. Lorsqu'il n'y a pas d'oscillations supra-maximales, comme le fait se présente parfois, la détermination de la pression systolique est particulièrement facile, car l'aiguille qui descendait progressivement présente d'emblée, après un arrêt court et subit, une pulsation qui est une grande oscillation et qui marque la pénétration du sang sous le manchon: Lorsqu'il existe des oscillations supra-maximales, et c'est le cas de beaucoup le plus commun, la détermination de la démarcation supérieure des grandes oscillations reste très souvent d'une extrême netteté. L'aiguille du manomètre, qui n'était animée que de vibrations très minimes, décrit en s'abaissant une oscillation qui offre à la fois une amplitude nettement plus grande et un rythme plus, soudain, plus brusque; et les oscillations suivantes conservent et accusent encore ces caractères: D'autres fois, la transition est, bien moins nette, il faut s'y reprendre à plusieurs fois, examiner avec attention, pour surprendre la variation subite d'amplitude ou la modification de rythme qui est certainement aussi caractéristique. Parfois enfin, il faut bien l'avouer, la démarcation entre les petites oscillations supra-maximales et les grandes oscillations est vraiment impossible à surprendre ou du moins à fixer avec certitude. Les petites oscillations, dues au choc du pouls humeral sur le rebord supérieur de la manchette, augmentent progressivement d'amplitude à mesure que la pression tombe, jusqu'à devenir assez grandes, puis très grandes, et donner l'impression nette que l'on est dans les grandes oscillations, comme en témoigne du reste la réapparition du pouls radial perçu à la palpation.
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Mais, même en recommençant l'épreuve plusieurs fois et avec soin, il est impossible de surprendre la sauté brusque d'amplitude et la détente vive qui marquent d'ordinaire la limite supérieure des grandes oscillations. Cette difficulté ou impossibilité que l'on a dans certains cas à fixer exactement le chiffre de tension systolique à l'aide du tonomètre a été notée par tous les auteurs. CORDIER et REBATTU, en 1911, au cours de recherches très consciencieuses, ont relevé le fait dans 14 pour 100 des cas.
Les difficultés sont elles moindres avec l'oscillomètre de PACHON? Il ne semble pas. Avec cet appareil, ce n'est pas chez 14 pour 100 des sujets, mais chez 38 pour 100, que CORDIER et REBATTU se sont heurtés aux mêmes difficultés ou impossibilités ; et ces auteurs remarquent que c'est surtout chez les sujets ayant une tension supérieure à la normale que cette difficulté de lecture est fréquente. La sensibilité plus grande de l'appareil ne facilite donc aucunement le repérage exact du début de la phase des grandes oscillations. Cette opinion a, depuis, été confirmée par de très nombreux observateurs. « Ces constatations, écrivent ENRIQUEZ et COTTET en 1912, cadrent absolument avec les nôtres : nous avons, nous aussi, noté que les difficultés de lecture de la première oscillation croissante, peu marquée chez les hypotendus et les normaux, devient d'autant plus accusée qu'on a affaire à des sujets ayant une tension sanguine plus haute. » SURMONT, DEHON et HEITZ, en 1913, arrivent aux mêmes conclusions : « Il est très fréquent de voir les oscillations, tout d'abord extrêmement minimes, augmenter progressivement sans qu'à aucun moment il soit possible de relever avec exactitude l'instant où les oscillations deviennent franchement et nettement progressives. » Une impression plus vécue, et de même sens, est encore donnée par LIAN lorsqu'il écrit : « Même après une longue pratique de la méthode oscillatoire, il n'est pas rare, qu'on soit embarrassé à 2 centimètres Hg près, parfois même à 3 ou 4 centimètres Hg près, pour fixer la valeur de Mx..... Ainsi l'équation personnelle intervient; et tout naturellement le médecin est plus ou moins disposé à fixer Mx de bonne heure selon qu'il s'attend à trouver une pression haute ou basse..... Dans d'autres cas, deux médecins très habitués à la méthode oscillatoire trouvent l'un Mx normal, l'autre de l'hypertension ; et, après mensuration en présence des deux, l'un finit par convenir qu'il s'était
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trompé. Enfin, par la méthode oscillatoire, il est facile de dire à tort hypotension artérielle, car, en pareil cas, pour peu que les oscillations de l'aiguille ne soient pas amples, on fixe trop tardivement l'oscillation différenciée caractérisant Mx.» MARTINET donne il est vrai une impression plus optimiste :« Dans la plus part des cas (75 pour 100 des cas environ) les tensions, tant maxima que minima, peuvent être appréciées quant à la lecture à 1 demi-centimètre près; dans 20 pour 100 des cas, à 1 centimètre près; dans 5 pour 100, approximativement et plus difficilement, à 1 centimètre et demi ou 2 centimètres près. » Afin de faciliter le repérage de l'index systolique oscillatoire, divers auteurs (DELAUNAY, BARRÉ, BILLARD) ont proposé de figurer sur du papier quadrillé la hauteur des oscillations, pour chaque centimètre ou demi-centimètre de pression dans la manchette, et de rechercher cet index sur ces « courbes oscillométriques », Mais, même de cette façon, sur une cinquantaine de courbes examinées, BARRÉ n'a pu fixer avec précision l'index systolique oscillatoire que dans 28 pour 100 des cas, le repérage restant douteux dans 32 pour 100 et impossible dans 4° pour 100. DELAUNAY n'arrive pas à des conclusions aussi pessimistes; mais le procédé dont il conseille d'user dans les cas douteux, et qui consiste à situer, dans les figurations oscillométriques, l'index systolique à « l'intersection de la ligne des premières oscillations les plus croissantes et de la ligne des oscillations supra-maximales » ne peut être qu'une approximation, capable d'éluder plutôt que de résoudre la difficulté. Au total, on a bien l'impression que l'appareil de PACHON n'a nullement levé les difficultés de la mensuration de la tension systolique par la méthode oscillatoire et que, dans de très nombreux cas, le coefficient personnel intervient dans une large mesure pour entacher d'erreur les résultats.
Les résultats sont-ils meilleurs en utilisant non plus seulement la figuration, mais l'inscription graphique des oscillations ? En aucune façon. Expérimentant à l'aide de l'appareil d'ERLANGER, VEYSSE et LÜTZ (1913). ont montré qu'il était impossible de fixer la limite supérieure des grandes oseillations sur leurs tracés, dans 37 pour 100 des cas; et MELVIN et MURRAY (1914), sur 54 cas pathologiques, ont trouvé cette lecture impossible dans 25 pour 100 des faits et douteuse dans 7 pour 100. Dans une statistique de
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KILGORE (1915) que nous aurons l'occasion de citer plus loin, bien que l'auteur ait fait appel à des observateurs de choix, les résultats ne se sont pas montrés plus favorables 1.
Je ne parlerai que pour mémoire des combinaisons de doubles manchettes brachiales (WYBAUW, AMBLARD, FINCK) ou antibrachiales (EKRIQUEZ et COTTET), de dimensions égales ou différentes, imaginées pour éteindre les oscillations supramaximales, dues au choc de l'ondée systolique sur le bord supérieur de la manchette et si gênantes dans l'appréciation de la première grande oscillation. Dans toutes ces combinaisons, l'interprétation des oscillations notées dans la manchette supérieure est aidée par la naissance d'oscillations dans la manchette inférieure. Lorsque des oscillations commencent a se produire dans la seconde manchette, on est bien sûr que les oscillations de la première ne sont pas dues au simple choc du sang contre son rebord supérieur, mais au passage du sang sous cette manchette Sans doute; mais, comme je l'ai fait remarquer à propos de la publication de FINCK, on ne saurait plus parler là de mensuration de pression par la méthode oscillatoire. C'est en réalité la méthode, de RIVA-ROCCI qui se trouve ainsi appliquée. La manchette inférieure fonctionne comme sphygmopalpeur pneumatique ; la manchette supérieure ne sert que de compresseur (le plus souvent trop étroit), et c'est par simple superfétation que l'on note a son intérieur la présence, d'oscillations dont l'interprétation va dépendre entièrement de l'arrivée du sang sous la seconde manchette.
Si, au moins, la méthode oscillatoire de détermination de la pression systolique était plus simple que la méthode de RIVA-ROCCI ! Mais elle est à la fois plus compliquée dans son instrumentation et dans son principe. Dans son instrumentation, cela va sans dire,
1 Cette difficulté de démarcation entre les oscillations dites supra-maximales et les plus supérieures des grandes oscillations prouve bien qu'une distinction absolue entre ces deux phases oscillatoires est artificielle. Comme nous le verrons plus loin, il existe un chiffre de pression déterminé auquel le sang passe nettement sous la partie centrale de la manchette, et des chiffres de pression plus élevés auxquels il ne passe pas, Avant que le sang ne parvienne à franchir le tunnel humerai, il y a tous les intermédiaires entre le moment ou le sang bute simplement contre le bord supérieur du brassard (oscillations supra-maximales) et celui où il parvient à décoller un segment artériel assez appréciable pour donner naissance à une « grande-oscillation ».
144 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMETRIQUE
puisqu'il faut remplacer le petit manomètre de POTAIN ou le manomètre Hg par un grand mano-oscillomètre ou un oscillomètre. Dans son principe aussi, puisqu'elle substitue une simple variation d'amplitude oscillatoire, dont le repérage est souvent douteux, à l'apparition d'un phénomène nouveau (disparition ou réapparition du pouls) de constatation forcément plus tranchée, S'il peut au début y avoir un certain flottement dans l'appréciation du moment exact de la disparition du pouls ou de sa réapparition et si, là comme pour toute chose, il faut-une certaine éducation, la marge d'erreur est loin d'être aussi étendue que pour le repérage de la première grande oscillation.
b. Les chiffres de tension systolique obtenus à l'aide de la méthode oscillatoire sont plus élevés que ceux fournis par la méthode de RIVA-ROCCI. — Faisons abstraction des cas dans lesquels le chiffre de tension systolique oscillatoire est difficile ou impossible à fixer et ne retenons que ceux où celte estimation peut être effectuée avec exactitude. Que constatons-nous ? Une surestimation très nette du chiffre de tension systolique oscillatoire sur celui de la tension systolique palpatoire, obtenu à l'aide de la méthode de RIVA-ROCCI.
Ce fait est de constatation très ancienne. La première préoccupation des auteurs qui introduisirent la méthode oscillatoire dans la mesure clinique de la tension systolique fut évidemment de comparer les chiffres donnés par elle avec ceux fournis par la méthode antérieurement employée de RIVA-ROCCI. Ils n'y ont pas manqué, et tous, sans exception, notèrent que le chiffre de la tension systolique oscillatoire était plus élevé que celui obtenu par la méthode palpatoire ; car, au moment où le pouls réapparaissait au-dessous de la compression, il y avait déjà un certain temps que l'aiguille du manomètre était entrée dans la phase des grandes oscillations. En d'autres termes, la première grande oscillation, indicatrice du chiffre de pression systolique, apparaissait au manomètre très nettement avant que le pouls artériel pût être senti au-dessous de la manchette. C'est ce qu'a montré une fois de plus PACHON, en 1909, en substituant dans cette expérience son oscillomètre au mano-oscillomètre.
Le taux de cette surestimation de la pression systolique oscilla-
MÉTHODE OSCILLATOIRE 145
toire sur la pression systolique palpatoire, ou plutôt (pour ne rien préjuger de la signification qu'il conviendra de lui attribuer) la valeur de cet écart varie suivant l'instrument employé. Avec un mano-oscillomètre, il est assez minime. RECKLINGHAUSEN note un écart moyen en faveur de la méthode oscillatoire de 3 à 7 millimètres Hg et exceptionnellement de 1 centimètre ou de 1 centimètre et demi Hg; HOEPFFNER, un écart ordinaire de 2 à 4 millimètres et extrême de 7 à 12 millimètres Hg; WINTERHALDER, sur plus de 350 cas, une surestimation moyenne de 1 centimètre Hg. D'après notre expérience personnelle, l'écart oscille entre 5 et 15 millimètres Hg et il est assez rare d'observer une surestimation de 2 centimètres. CORDIEU et REBATTU sont arrivés à peu près aux mêmes conclusions; sur 47 malades, cet écart n'a atteint 2 centimètres Hg que chez 6 d'entre eux et dépassé ce chiffre chez 2 seulement. Avec l'oscillomètre de PACHON, l'écart est plus considérable. On se souvient que les chiffres normaux de tension systolique obtenus par la méthode de RIVAROCCI oscillent entre 110 et 120, ou, comme limites extrêmes, entre 100 et 130 millimètres Hg. Avec l'oscillomètre de PACHON, MARTINET donne comme chiffre le plus fréquent 140 à 150 avec variations possibles entre 130 et 160 ou même 120 et 170 millimètres Hg. D'après LIAN, le chiffre normal chez l'adulte approcherait' de 160-170 millimètres : « Avec cet appareil, ajoute-t-il, une pression maxima ne nous paraît vraiment pathologique que si elle est inférieure à 150 ou supérieure à 180 millimètres Hg ». D'après ce même auteur, l'écart moyen avec les chiffres obtenus avec la méthode, de RIVA-ROCCI serait de 4 centimètres Hg. Ce qu'il y a de plus grave, c'est que cet écart déjà considérable, bien loin de constituer une valeur fixe, varié dans de larges limites suivant les sujets et le taux de la tension.. Dans la statistique de SURMONT, DEHON et HEITZ, on note quelques écarts de 1 centimètre et demi, puis d'autres de 5 à 6 centimètres (18 à 13, 27 à 22, 26 à 20, 5); d'autres enfin beaucoup plus considérables (24 à 16, 22 à 12, 26 à 19) dans lesquels on se plaît a croire que la difficulté de lecture de la première grande oscillation doit avoir une part. La moyenne de surestimation de la pression systolique oscillatoire, mesurée au PACHON, sur le chiffre donné par la méthode de RIVA-ROCCI est, de même, de 3 centimètres et demi Hg entre les mains de MARFAN et DORLENCOUET (16,3 au lieu de 12,8 chez 156 sujets). Il en est de même du lieu d'application, et
L. GALLAVARDIN, 10
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RIBIERRE, PAGNIEZ, HEITZ; VAN BOGAERT ont noté, au PACHON appliqué successivement à l'avant-bras et a la jambe, des différences de pression systolique de 3, 4 et même 5 ou 6 centimètres de Hg chez des sujets en situation horizontale, alors que chez ces mêmes malades la pression, prise au bras et a la jambe a l'aide de la méthode de RIVAROCCI, donnait des chiffres identiques ou a peu de chose près. Il est possible que l'importance et la variabilité de ces écarts tiennent en partie à l'emploi dans l'appareil de PACHON d'une courte manchette antibrachiale dont la substitution a la manchette brachiale large ne semble pas avoir été une innovation heureuse Mais là n'est pas le facteur unique, CORDIER et REBATTU, expérimentant avec un tonomètre et avec l'oscillomètre de PACHON attelés a une même manchette brachiale, ont toujours noté des chiffres de tension systolique oscillatoire plus élevés avec le dernier de ces instruments qu'avec le premier; même avec cette manchette large, la surestimation du chiffre de tension systolique obtenu au PACHON sur celui donné par là méthode de RIVA-ROCCI, qui s'abaisse parfois a 10 ou 15 millimètres, s'élève assez souvent à 30, 40 et même 55 millimètres Hg. Quelle est la raison de cette surestimation de l'oscillomètre de PACHON sur le simple mano-oscillomètre dans la mesure, oscillatoire de la tension systolique? La sensibilité de l'oscillomètre permet-elle de déceler plus exactement la première grande oscillation; ou a-t-elle au contraire l'inconvénient de placer trop haut celte première grande oscillation, parmi les dernières supra-maximales? D'après ce. que nous avons dit plus haut de la genèse des premières grandes y oscillations et des dernières supra-maximales, de leur mode de production vraiment identique par choc plus ou moins appuyé sur le bord supérieur de la manchette ou légère pénétration sous ce bord — avant que l'onde sanguine franchisse réellement le tunnel compresseur — toute discusssion à ce sujet nous paraît oiseuse, puisque, comme nous allons le voir, ces deux chiffres oscillatoires doivent céder le pas au chiffre palpatoire obtenu par la méthode de RIVA-ROCCI.
c. Des deux chiffres de tension systolique.— celui obtenu par la méthode oscillatoire, celui fourni par la méthode palpatoire ou de RIVA-ROCCI — quel est le meilleur ? — Question très importante pratiquement, car il s'agit de savoir si l'on est autorisé, comme on
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a tenté de le faire, a imposer au médecin désireux de prendre correctement cette tension systolique l'usage d'un grand manomètre sensible ou de l'oscillomètre de PACHON, au lieu du petit manomètre métallique de POTAIN si commode et si transportable.
Théoriquement, la méthode oscillatoire semble avoir pour elle tous les avantages. Il est certain que le premier soulèvement de la paroi artérielle, enregistre au lieu direct de la compression, semble devoir être un phénomène indicateur beaucoup plus délicat que le résultat de la simple palpation du pouls au dessous et souvent loin de la compression On comprend d'autant mieux que beaucoup de médecins se soient laisse séduire par cette méthode qu'on a pu dresser plusieurs objections contre l'exploration palpatoire et que certaines conditions seraient capables de retarder très notablement la réapparition du pouls au-dessous de la compression La manchette compressive, a-t-on dit, représente un long tunnel offrant une certaine résistance au passage des premières ondes systoliques qui doivent décoller les parois artérielles et se frayer péniblement un passage avant d'arriver a l'avant-bras PACHON s'est aussi demandé si la tiansformation de l'humérale en un tube aplati et facilement extensible ne constituerait pas une sorte d'anevrysme artificiel, susceptible d'absorber et d'amortir par son élasticité l'onde pulsatile, l'arrêt apparent de la circulation au-dessous de la compression tiendrait alors, non a la suppression de l'écoulement, mais à l'uniformisation du cours du sang qui se poursuivrait au delà de la poche extensible, continu et sans saccades jusqu'au moment où les variarions de pression seraient assez soudaines et assez accusées pour restaurer le pouls véritable
Toutes ces objections, auxquelles on pourrait encore ajouter la méfiance instinctive qu'inspirait la simple palpation digitale comparée a l'exploration instrumentale, prenaient corps davantage et recevaient une apparence de consécration expérimentale troublante lorsqu'on montrait — lors d'une décompression progressive du brassard - les grandes oscillations, dues indubitablement à la pénétration du sang sous la manchette, apparaître très nettement avant que le pouls puisse être senti à la radiale, au même à l'humérale. Cette ancienne constatation, rééditée et rendue plus frappante avec l'oscillomètre, devint « l'expérience cruciale; » de PACHON ; et nombreux
148 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMETRIQUE
sont les auteurs qui jugèrent dès lors complètement, définitivement
ruinée, la méthode de RIVA-ROCCI.
Heureusement, il y avait un autre moyen d'instruire le procès et de décider quelle était la meilleure des deux méthodes, oscillatoire ou palpatoire, de mensuration de la tension systolique : c'était de comparer les chiffres obtenus, avec ceux fournis par des mensurations sanglantes de la pression, à l'aide d'un manomètre mis en communication directe avec l'intérieur de l'artère. C'est là un critérium qu'on aurait mauvaise grâce à récuser ; car, enfin, que voudraiton dire en prétendant qu'un chiffre de pression est meilleur qu'un autre, si l'on n'entendait par là que le chiffre le meilleur est celui le plus rapproché de la pression intra-artérielle ?
Voici par exemple un sujet chez lequel on note — suivant les écarts ordinairement observés — 150 millimètres à l'oscillomètre de PACHON, 130 millimètres au mano-oscillomètre, 120 millimètres par la méthode de RIVA-ROCCI. Quel est, chez ce sujet, le chiffre réel de la tension intra-artérielle? Toutes les mensurations sanglantes dont nous avons connaissance et que nous avons relatées plus haut (pratiquées au cours d'amputations du bras ou de l'avant-bras) ont toujours donné, pour la pression systolique intra-artérielle, un chiffre inférieur à celui fourni par la méthode de RIVA-ROCCI, soit par exemple 110 millimètres dans le cas particulier. J'admets parfaitement que quelques-unes de ces expériences ne sont pas à l'abri de toute critique. Certaines d'entre elles — notamment celles de DEHON, DUBUS et HEITZ, qui concluent à une surestimation de l'oscillomètre de PACHON de 47 pour 100 sur le chiffre réel de la pression1 — ont été faites à l'aide d'un manomètre à mercure. Bien qu'il soit probable que, dans les conditions ordinaires de rapidité cardiaque, le manomètre à Hg donne plutôt une surestimation qu'une sous-estimation de la pression systolique, comme l'a fait remarquer LIAN commentant les expériences de PACHON et PONS, la conviction qu'elles entraînent n'est pas absolue. Par contre, les expériences de MÜLLER et BLAUEL, pratiquées avec un manomètre métallique,
1 Dans l'expérience IV de DEHON, DUBUS et HEITZ, pratiquée lors d'une transfusion sanguine, on trouve notées les pressions systoliques suivantes : Pression intra-artérielle (radiale gauche) . . . .120 millimètres Pression à l'oscillomètre de PACHON (radiale droite). 175 —
Méthode de RIVA-ROCCI (humérale droite) . . . . 130 —
MÉTHODE OSCILLATOIRE 149
restent toujours inattaquées et elles ont montré que le chiffre de tension systolique fourni par la méthode de RIVA-ROCCI (notablement inférieur à celui donné par la méthode oscillatoire) était encore supérieur au taux réel de la pression intra-artérielle, En revanche, nous ne croyons pas qu'il ait été publié actuellement une seule vérification expérimentale dans laquelle le chiffre de pression sanglante se soit montré supérieur à celui obtenu par la méthode de RIVA-ROCCI. Tant que de telles expériences n'auront pas été produites, nous continuerons donc à soutenir, comme nous le faisions en 1910, que, dans la mesure de la tension systolique, la méthode de RIVA-ROCCI est nettement supérieure à la méthode oscillatoire, celle ci donnant à la fois une surestimation plus élevée et des écarts plus variables sur le chiffre réel de la pression intra-artérielle.
Après avoir étudié complètement celte question, de nombreux auteurs, parmi lesquels nous citerons surtout HEITZ et LIAN, sont arrivés à des conclusions identiques. « La méthode oscillatoire, écrit LIAN en 1913, donne une surestimation considérable dans l'évaluation de Mx et constitue par suite une méthode défectueuse de mesure de la pression artérielle maxima. La méthode de RIVA-ROCCI appliquée avec une manchette de 12 centimètres est de beaucoup la meilleure méthode de mesure de Mx chez l'homme... L'emploi prolongé et la comparaison consciencieuse de ces deux méthodes nous ont conduit à des conclusions pratiques bien franches : tous les avantages sont à la méthode de RIVA-ROCCI. "
L'assentiment est cependant loin d'être unanime. PACHON, MARTINET et leurs élèves continuent à être convaincus de la supériorité de l'oscillométrie dans la détermination de la pression systolique, et WEISS, dont on connaît l'autorité dans ces questions de physique médicale, a pu écrire, en 1910 : « Je ne puis croire pour ma part que la pression systolique chez l'homme adulte, à l'état de santé, soit aussi basse que le donne la méthode de RIVA-ROCCI. Je crois très sincèrement que c'est le PACHON qui est le plus près de la vérité, et que, chez l'homme normal adulte, on ne commet pas une grande erreur en adoptant 15 à 16 centimètres comme représentant la valeur de la pression systolique. »
Il convient donc de pousser la discussion plus loin ; et, comme l'on se rend difficilement à une évidence que l'on n'explique pas, il importe de mettre à nu la tare secrète de la méthode oscillatoire
150 TECHNIQUE SMYGMOMANOMÉTRIQUE
dans la détermination de la pression: systolique. Il faut montrer pourquoi cette méthode oscillatoire, si séduisante dans son principe, si rigoureuse même dans ses résultats, comme nous le verrons plus loin; quand il s'agit de l'évaluation de la pression diastolique, se trouve au contraire viciée et faussée dans son application quand on lui demande de fixer le niveau de la pression systolique.
Nous avons vu qu'au niveau supérieur de la zone des grandes oscillations existait une phase (d'étendue variable suivant les sujets et l'instrumentation employée) dans laquelle l'aiguille présente nettement de grandes oscillations alors que la palpation artérielle ne permet pas de percevoir le retour du pouls. C'est sur ce sigment de la courbe oscillatoire, que l'on pourrait appeler « segment des grandes oscillations non pulsatoires » , que va porter toute la
discussion ; c'est dans son exacte interprétation que gît le noeud du problème posé par l'apparente antinomie entre l'excellence théorique et l'infériorité pratique de la méthode oscillatoire dans la mesure de la tension systolique. L'aiguille oscille, donc le sang passe maigre que l'on ne sente rien au pouls, disent les partisans de la méthode oscillatoire; il y a bien de grandes oscillations, mais en réalité le sang ne passe pas encore, répondent les partisans de là méthode de RIVA-ROCCI.
Pourquoi donc le sang ne passe-t-il pas sous la manchette; alors que les grandes oscillations sont cependant d'une extrêrne netteté ? A cause d'un phénomène capital sur lequel nous avons déjà insisté.
FIG. 63. — Comparaison schématique des procédés oscillatoire et palpatoire (méthode de RIVA-ROCCI) de détermination de la pression systolique. — On voit sur la courbe oscillatoire, à la partie supérieure de de la phase des grandes oscillations, un segment de " grandes oscillations non pulsatoires », caractérisées par ce fait que le pouls n'a pas encore réapparu dans les artères situées au-dessous de la manchette, alors que les grandes oscillations sont cependant d'une netteté indiscutable à l'oscillomètre.
MÉTHODE OSCILLATOIRE 151
mais sur lequel il faut toujours revenir lorsqu'on discute sphygmomanométrie à l'aide de la compression pneumatique circulaire ; l'inégale transmission de la pression de la manchette sur la surface du cylindre artériel emprisonné à son intérieur.
Supposons une manchette brachiale en place et laissons tomber progressivement la pression. A 150 millimètres, les grandes oscillations se dessinent à l'oscillomètre; faut-il conclure que ce chiffre de 150 représente le taux de la tension systolique? Nullement, car c'est là simplement le chiffre de la pression à l'intérieur de la manchette ; et il n'est légitime d'en déduire le chiffre de tension systolique que si cette pression aérienne est à ce moment égale a celle pesant sur le segment artériel dont on étudie les modifications. Or, cette pression de 100 millimètres rie se transmet pas uniformément sur la surface de la paroi artérielle ; si la portion centrale du segment huméral supporte une pression à peu près équivalente, 148 millimètres par exemple, l'extrémité périphérique
supérieure ne supporte peut-être qu'une pression de 130 millimètres, avec dès chiffres intermédiaires dans l'intervalle. Si à ce moment le cône artériel supérieur commence à s'entr'ouvrir sous la poussée sanguine, faut-il en conclure que la pression systolique soit de 150 millimètres? En aucune façon, il lui suffit d'être de 135 mm. Hg 10
FIG. 64. — Explication de la phase des grandes oscillations non pulsatoires. - Figure schématique montrant le mode de dilatation de la partie supérieure du segment artériel, situé sous la manchette. Au fur et à mesure que la pression s'abaisse dans la manchette, on voit l'entonnoir artériel pulsatile s'allonger progressivement et donner naissance, par la transmission de ses battements, à de véritables « grandes
oscillations », bien que la partie médiane de l'artère reste toujours imperméable.
152 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
Pour fixer le chiffre de la pression systolique par la méthode oscillatoire, ce qu'il faut connaître, c'est le chiffre de la pression réellement transmise sur l'extrémité supérieure du segment huméral emprisonné sous le brassard ; et c'est ce que l'on ne connaît pas, car il y a là une dégradation très appréciable et, qui plus est, éminemment variable, suivant la hauteur de la pression pneumatique et la configuration extérieure du bras.
Si la pression extérieure s'abaisse encore d'un centimètre Hg, comme le montre le second graphique de la figure 64, le cône artériel supérieur va se dilater et s'allonger sous l'influence de la poussée systolique, rendant ainsi les grandes oscillations plus manifestes sans que son sommet atteigne encore le centre de l'artère qui supporte la plus forte pression. Puis, la pression baissant encore un peu, l'anneau artériel central cédera de lui-même et le pouls apparaîtra dans les artères sous-jacentes. On voit donc à quelle phase artérielle correspond ce segment des « grandes oscillations non pulsatoires » dont nous avons parlé plus haut. Il correspond à cette dilatation progressive du cône artériel supérieur précédant le forçage de l'anneau central; et son étendue, dans l'échelle de pression, est exactement celle qui mesure l'écart entre la déperdition marginale et la déperdition centrale de la pression aérienne pneumatique. Entre les dernières oscillations suprà-maximales et ce groupe supérieur de grandes oscillations non pulsatoires, il y a bien le plus souvent une transition assez brusque, qui apparaît plus ou moins tôt suivant la sensibilité de l'instrument ; mais cette transition n'a nullement comme on le pensait la valeur d'un index systolique oscillatoire. Il s'agit toujours d'oscillations supra-maximales, qui se produisent à un moment où la pression de la manchette est encore nettement supérieure à la pression sanguine.
Comme je le disais en 1912, en développant toutes ces considérations, étant donné que l'on ne peut lire à chaque moment que la pression de la manchette, une méthode sphygmomanométrique basée sur la compression circulaire pneumatique d'un membre aura d'autant plus de chances d'être exacte qu'elle interrogera, au niveau du segment artériel exploré, un phénomène central et non un phénomène périphérique. Or, dans la mesure de la tension systolique, la méthode oscillatoire interroge un phénomène périphérique (dilatation du cône artériel supérieur), la méthode palpatoire un
MÉTHODE OSCILLATOIRE 153
phénomène central (forçage de l'anneau artériel médian) ; et tant que l'on n'aura pas trouvé le moyen d'enregistrer séparément les oscillations des parties périphériques et de la partie centrale d'une même manchette, la méthode de RIVA-ROCCI restera la meilleure méthode de mensuration de la tension systolique. Sans doute, il est fort possible qu'une minime partie de la force vive delà pulsation artérielle s'épuise dans la restauration de la perméabilité humérale ; mais, dans la notation du chiffre de tension systolique, cette déperdition se trouve probablement compensée, et peut-être au delà, par la transmission imparfaite de la pression de la manchette au milieu sanguin intra-artériel. Quant à cet anévrysme artificiel dont parlait PACHON, il se réduit, entre le moment où le sang passe et ne passe pas, à bien peu de chose. Sa capacité est mesurée à chaque instant par la valeur du décollapsus artériel ; et nous ayons vu précédemment combien l'établissement de ce décollapsus était lent et progressif, tout en haut de la courbe oscillatoire.
Comme confirmation expérimentale de tout ce qui précède, je citerai les expériences de LIAN et MOREL (1913) qui tendent bien à prouver que, durant la phase des grandes oscillations non pulsatoires dont j'ai parlé plus haut, le sang ne franchit vraiment pas la manchette. - « La première série d'expériences, disent ces auteurs, a été faite chez plusieurs adultes sains ou malades. Un doigt est entouré, de l'extrémité à la racine, avec une bande de caoutchouc pour en chasser le sang. Pendant que le doigt est ainsi serré, on introduit dans une manchette brachiale de l'air sous une pression de 20 centimètres Hg. Puis on libère le doigt. Celui-ci est complètement exsangue. On baisse la pression progressivement dans la manchette jusqu'à 13 centimètres Hg. De 16 à 13, l'oscillomètre de PACHON. relié à la manchette brachiale, marque des oscillations croissantes, mais le doigt est encore exsangue ou à peu près ; l'artère radiale ne bat pas. Enfin, pour une pression de 12 centimètres Hg dans la manchette, en même temps que les pulsations radiales apparaissent, le doigt exsangue devient immédiatement d'un beau rose. Nous ne considérons pas, ajoutent ces auteurs, cette expérience comme absolument démonstrative. Néanmoins, elle tend à prouver que, pour des pressions de 16 à 13 centimètres Hg dans la manchette brachiale, le sang ne franchissait pas la manchette brachiale et n'arrivait pas à l'avant-bras et à la main, et qu'au contraire,
154 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMETRIQUE
il a franchi la manchette humérale et s'est précipité d'un seul coup jusqu'à la main au moment précis où la méthode de RIVA-ROCCI indiquait Mx, soit 12 centimètres Hg. La deuxième série d'expériences effectuée sur les chiens paraît plus démonstrative. Sur un chien anesthésié, on entoure une cuisse d'une large manchette reliée à un oscillomètre de PACHON. A la partie moyenne: de la jambe, l'artère tibiale antérieure est sectionnée et liée. On constate Mx oscillatoire = 19, Mx RIVA-ROCCI = 15. Puis, tandis que la manchette fémorale est sous une pression de 22 à 53. centimètres Hg, l'artère tibiale antérieure est sectionnée immédiatement au-dessus de la ligature qui avait été jetée sur elle auparavant; le sang pourra donc couler facilement par cette artère sectionnée. On attend deux à cinq minutes que l'artère tibiale antérieure se vide, puis on fait baisser progressivement la pression dans la manchette fémorale. C'est seulement pour 15 centimètres Hg dans fa manchette fémorale (valeur de Mx RIVA-ROCCI) que le sang s'écoule par la tibiale antérieure sectionnée, et d'emblée cet écoulement est rythmé par des battements correspondant aux fortes pulsations du pouls inégal du chien. Et, pour 14 ou 13 centimètres Hg dans la manchette fémorale, l'écoulement est, rythmé par les battements de toutes les pulsations, Cette expérience a été répétée plusieurs fois successivement, et cela sur plusieurs chiens. Les résultats se sont toujours produits dans le même sens. Pour éviter une cause d'erreur possible due à une coagulation intra-artérielle, l'expérience a été reprise sur un chien dont le sang avait été rendu incoagulable grâce à une injection intra-veineuse d'extrait de têtes de sangsues. Les résultats ont été les mêmes. Toutefois, dans quelques cas, pour Mx oscillatoire 19, Mx RIVA-ROCCI 15, le sang a commencé à opuler sans battre pour une pression de 16 centimètres Hg dans la manchette fémorale. » — A ces constatations, nous ajouterons celles plus récentes de MARFAN et DORCENCOURT ( 1916), de BARRÉ et STROHL (1917) qui semblent bien prouver que durant la phase oscillatoire supérieure il n'y a pas d'écoulement de sang, même continu, sous le brassard. « Pas de pouls au-dessous de la manchette, pas d'écoulement sanguin », telle est aussi la conclusion à laquelle arrive un élève de SAHLI, BAUMANN, en 1917 1.
1 Un élève de PACHON, PONS (1917), s'est ingénié récemment à démontrer que le sang pisse bien sous le brassard durant cette phase oscillatoire supé-
METHODE OSCILLATOIRE 155
§ 4. PRESSION DIASTOLIQUE OSCILLATOIRE
1° Valeur. — C'est ici que se manifeste l'excellence de la méthode oscillatoire. Depuis que cette méthode à été appliquée en clinique à la mesure de la tension diastolique, on à pu discuter sur tel ou tel point de détail ou de technique, mais aucune voix ne s'est élevée pour mettre en doute la correction du principe sur lequel elle repose.
Ce principe est absolument différent de celui basé sur l'exploration de la circulation au-dessous de la compression, et certainement meilleur. Au lieu d'épier péniblement à la périphérie, parla palpation simple du pouls (STRASBURUER) ou par la méthode graphique (JANEWAY, MASING, SAHLI), la première diminution sensible des pulsations radiales lors d'une pression croissante dans la manchette, elle s'efforce simplement de surprendre et de: noter le moment précis où s'effectue le premier collapsus artériel diastolique.
L'application de ce principe ne se trouve pas entachée de la cause d'erreur que nous avons signalée à propos de la mesure de la tension systolique. En prenant comme point de repère le premier décollapsus qui suit le premier affaissement, c'est un phénomène artériel central, non périphérique, que l'on étudie. On pourra donc plus correcment conclure, à ce moment, du chiffre de pression noté dans la manchette à celle qui pèse effectivement sur la partie du segment artériel dont on étudie les modifications.
Toutes les tentatives de vérification expérimentale qui ont été
rieure. Une ampoulé très sensible appliquée sur la radiale (polysphygmographe de PACHON) arriverait à enregistrer les « ondes respiratoires » du, pouls, avant que les « ondes cardiaques » ne soient sensibles! A vrai dire, les tracés reproduits ne nous paraissent nullement convaincants et seraient susceptibles d'interprétations multiples.
Nous ferons remarquer à ce propos que, même si un pléthysmographe sensible arrivait à déceler une certaine turgescence de l'avant-bras durant cette phase oscillatoire, l'expérience ne serait pas absolument concluante. Ne faut-il pas compter, en effet, avec les artères qui cheminent dans le canal osseux de l'humérus et qui, elles, ne sauraient être atteintes par la compression pneumatique?
156 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
pratiquées sont manifestement en sa faveur, — Disons d'abord que les chiffres qu'elle donne sont constamment et nettement inférieurs à ceux fournis par les méthodes étudiées plus haut (p. 93). Tous les auteurs sont d'accord sur ce point, bien qu'ils ne publient pas dé statistiques précises à cet égard. D'après ce que nous avons vu, en prenant dans cinq cas, comparativement, la pression diastolique par la méthode graphique à l'aide du tonomètre de JAQUET et par la méthode oscillatoire, l'écart serait de 1 centimètre à 1 centimètre et demi Hg lors d'une pression moyenne, et pourrait atteindre 3 centimètres à 3 centimètres et demi dans des cas d'hypertension. En montrant que ces chiffres de tension diastolique obtenus par cette méthode graphique étaient trop élevés de plus de 25 pour 100 sur le taux réel de la pression minima intra-artérielle, MÜLLER et BLAUEL. ont fait la preuve indirecte de l'exactitude de la méthode oscillatoire. La sous-estimation de cette méthode oscillatoire, par rapport aux résultats donnés par l'appréciation de la diminution du pouls au-dessous de la compression, est en effet à peu près équivalente à la surestimation de cette dernière méthode sur les résultats fournis par la mensuration sanglante. — Les constatations expérimentales de DEHON, DUBUS et HEITZ, pratiquées chez l'homme vivant, en 1912, ont montré que « la méthode oscillométrique fournit des chiffres de pression diastolique correspondant, à 5 millimètres près, aux chiffres exacts de la pression minima artérielle ». Mais ces expériences ont été faites uniquement à l'aide du manomètre à Hg et demanderaient à être contrôlées 1. — Nous rappellerons enfin les expériences in vitro, si scrupuleusement et si patiemment conduites, de MACWILLIAM et MELVIN, sur lesquelles nous avons longuement insisté plus haut. Nous estimons qu'à l'heure présente, en l'absence de vérification expérimentale directe chez l'homme à l'aide de manomètre métallique, ce sont elles qui nous donnent les meilleures raisons de croire à l'excellence de la méthode oscillatoire dans la mesure de la pression diastolique ; car, dans chaque cas, la coïncidence entre les premiers phénomènes de collapsus ou de décollapsus artériel et la pression.
1 On est étonné, en effet, de trouver dans les expériences de ces auteurs des écarts vraiment très minimes entre les chiffres de pression systolique et diastolique, exemple : 100/95, 84/79, 130/115. Il est probable que des variations aussi réduites sont attribuables à l'inertie de la colonne mercurielle.
MÉTHODE OSCILLATOIRE 157
diastolique régnant à l'intérieur du tube vasculaire était presque parfaite.
2° Index diastolique. — Nous savons qu'il existe dans les courbes oscillatoires deux parties nettement distinctes : l'une inframinimale correspondant à de simples valeurs de dilatation artérielle ; l'autre supra-minimale, dans laquelle des valeurs de décollapsus viennent s'ajouter aux valeurs de dilatation. Quel est dans cette courbe oscillatoire, telle qu'on peut la lire sur des tracés ou la reconstituer par la succession et la figuration schématique des mouvements de l'aiguille du manomètre, l'accident, le phénomène indicateur précieux, permettant d'établir la démarcation entre ces deux zones et pouvant servir d'index diastolique?
Personne ne soutiendrait plus aujourd'hui, comme l'avaient fait, à la suite de MAREY, ROY et ADAMI (1890), SAHLI (1899), MARTIN, GIBSON, HOWEL, PACHON (1909), AMBLARD (1910), etc., que cet index diastolique doive être placé au niveau des oscillations maximales. Lorsque ces oscillations maximales figurent sur la courbe, au lieu d'un sommet aigu, une sorte de plateau plus ou moins étendu (et le cas est assez fréquent), on n'est pas davantage autorisé à choisir comme repère le milieu de ce plateau ou son rebord inférieur, comme le voulait ERLANGER, qui recommandait de noter comme tension diastolique « la pression la plus basse à laquelle les oscillations étaient maximales ».
Ce ne sont pas non plus les oscillations juxta-maximales qui peuvent servir de phénomène indicateur, et, à ce point de vue, nous ne pensons pas qu'on puisse accepter l'opinion soutenue par quelques auteurs, notamment par PACHON, que « la première oscillation plus faible, succédant aux plus grandes oscillations, correspond à la pression minima ». Un tel index diastolique peut se trouver sensiblement exact dans les cas exceptionnels où cette phase juxtamaximale est extrêmement réduite; mais il ne saurait être généralisé. En comparant la courbe ci-dessous, empruntée à PACHON, aux courbes oscillatoires recueillies expérimentalement par MACWILLIAM et MELVIN, on se rend compte que c'est plutôt au-dessous, à une dénivellation très inférieure, qu'on devrait placer l'index diastolique. Nous avons vu plus haut en détail qu'il existait audessous du maximum oscillatoire une phase d'oscillations manifes-
158 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMETRIQUE
tement décroissantes, d'étendue variable suivant les sujets et l'élévation de la tension, mais pouvant atteindre de 10 à 25 millimètres
millimètres dans l'échelle de pression, et appartenant manifestement à la zone des grandes oscillations. Nous ne reviendrons pas sur l'explication de ces oscillations « presque maximales » signalées depuis longtemps, figurées par nous en 1910 dans nos courbes schématiques, et récemment étudiées par MACWILLIAM et MELVIN sous le nom d' « approximately maximal » ; qu'il nous suffise de rappeler qu'elles recèlent encore des valeurs de décollapsus et qu'elles ne sauraient par conséquent servir d'index diastolique,
C'est indubitablement à la limite inférieure le cette zone, au niveau de la vraie démarcation entre la phase des grandes et des petites oscillations, que doit être placé cet index. Peut-on préciser davantage ? Lors d'une pression croissante dans la manchette par exemple, faut-il prendre comme point de repère la dernière petite oscillation ou la première grande oscillation? Théoriquement, ni l'une ni l'autre, mais le chiffre de pression intermédiaire; car la petite oscillation montre que le premier collapsus ne s'est pas encore produit et la première grande oscillation que la pression suffisante pour l'occasionner a été dépassée. Pratiquement, si l'on opère avec un mano-oscillomètre en faisant varier très progressivement et très lentement la pression, il n'y a pas d'inconvénient à prendre comme repère le pied de la première grande oscillation qui marque le passage d'une phase à l'autre. Si, au contraire, on emploie, l'oscillomètre de PACHON ou un appareil à enregistrement graphique et si l'on fait baisser la pression de centimètre en centimètre, on pourra prendre, comme le conseillent MACWILLIAM et MËLVIN, une
FIG, 65. — Situation de l'index diastolique dans une courbe oscillatoire, d'après PACHON. — Dans une courbe analogue à celle reproduite ci-dessus, il n'y a aucune certitude pour que la première dénivellation, qui suit immédiatement le maximum oscillatoire, représente le niveau de la pression diastolique, de préférence à la dénivellation suivante. Tout porte à croire que l'index diastolique doit être plus légitimement fixé au moment où se produit cette seconde dénivellation.
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valeur intermédiaire aux deux chiffres trouvés ; à 80 millimètres Hg, les grandes oscillations persistent a 70 millimetres, on est entré dans la phase des petites oscillations , on pourra donc inscrire le chiffre intermédiaire de 75 millimètres qui ne sera peut-être pas le plus exacte mais celui avec lequel on aura la certitude que l'erreur de notation n'excédera pas 5 millimètres Hg Si l'on était désireux d'avoir les plus grandes chances de se rapprocher encore davantage de la tension diastolique intra-artérielle, il serait préférable en manoeuvrant soit avec le manomètre, soit avec l'oscillomètre, de, choisir de préférence le chiffre de pression auquel se produit la première petite oscillation, car il faut tenir compte de la déperdition légère de la pression de la manchette dans sa transmission au segment central de l'humérale, de la résistance de la paroi artérielle ; et les constatations de MACWILLIAM et MELVIN ont montre que le chiffre réel de pression diastolique était le plus souvent un peu inférieur a celui auquel s'installaient les petites oscillations
Le plus ou moins de facilite de la détermination de la pression diastolique par la méthode oscillatoire dépend de la brusquerie et de la profondeur qu'offre la démarcation entre la phase des grandes et des petites oscillations.
S'il n'y a, dans toute l'étendue de la zone critique de la courbe oscillatoire, qu'une seule diminution soudaine et marquée dans l'amplitude des oscillations, le doute n'est pas permis et la pression diastolique peut être fixée facilement et correctement ; que cette diminution se produise immédiatement après le maximum oscillatoire, comme le fait existe dans quelques cas exceptionnels, ou qu'elle se produise après l'interposition d'une phase d'oscillations juxta-maximales comme cela arrive le plus souvent (voir fig. 53). Ces cas, dans lesquels la fixation de la pression diastolique est aisée, sont communs, et, quelle que soit l'instrumentation employée, ils le deviennent de plus en plus avec l'habitude.
A côté d'eux, nous l'avons vu, il en est d'autres où cette détermination devient difficile ou même impossible, Les causes d'erreur sont alors de deux sortes, la transition entre les deux phases oscillatoires pouvant sembler déplacée ou masquée. — Le déplacement apparent de l'index diastolique se fait d'ordinaire dans la zone immédiatement supérieure par suite de variations d'amplitude assez brusques se produisant au moment de l'installation de
160 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
la phase des oscillations juxta-maximales: Ce groupe (surtout lorsque l'on fait tomber la pression de centimètre en centimètre) est souvent séparé du maximum oscillatoire par une démarcation assez nette qui peut donner le change ; parfois même, une seconde dénivellation se produit dans son milieu, ainsi que l'ont vu MACWILLIAM et MELVIN. Mais cette première du ces deux dénivellations successives sont en général moins marquées, et surtout d'installation moins brusque, que celle qui vient après et marque nettement la transition entre petites et grandes oscillations. Dans d'autres circonstances, ce déplacement a tendance à se faire dans cette zone immédiatement inférieure qu'on peut appeler la zone des oscillations infra-minimales supérieures et qui s'observe surtout chez les sujets à très grande pulsatilité artérielle et à tension élevée (insuffisance aortique, hypertension). Dans ce cas, l'observateur est très troublé par la grandeur insolite de ces oscillations infra-minimales supérieures et a toujours de la tendance à placer trop bas le chiffre
de pression diastolique. L'erreur est d'autant plus facile que ces oscillations augmentent souvent assez rapidement d'amplitude vers leur quart supérieur, comme l'a fait remarquer STRASBURGER, car la paroi artérielle presque complètement détendue présente des oscillations proportionnellement beaucoup plus amples, pour une même élévation de la pression intérieure. De plus, ces oscillations inframinimales supérieures, déjà très élevées, ne montrent pas souvent, au moment de leur transformation en grandes oscillations, une variation d'amplitude aussi frappante. Dans des artères à tension élevée et grande pulsatilité, en effet, les valeurs de dilatation, augFIG.
augFIG. — Courbe oscillatoire dans un cas de pouls assez tendu et bondissant. — Par suite de l'augmentation assez brusque des valeurs de dilatation, l'observateur peut être exposé à placer trop bas le niveau de la pression diastolique et à prendre pour les grandes oscillations le groupe des oscillations infra-minimales supérieures, d'autant que le début véritable des grandes oscillations est marqué davantage par une modification du rythme de l'aiguille que par une variation brusque d'amplitude.
MÉTHODE OSCILLATOIRE 161
mentant beaucoup alors que les valeurs de décollapsus restent stationnaires, on comprend que le supplément apporté à la dernière oscillation infra-minimale par la première valeur de décollapsus soit proportionnellement moindre que dans d'autres circonstances.— Ce danger de déplacement de l'index diastolique est d'autant plus à_ craindre que l'index véritable peut être masqué plus ou moins complètement.
complètement. nous lavons dit plus haut, la netteté de cet index diastolique tient uniquement à l'écart existant entre les valeurs de dilatation et les valeurs de décollapsus. Ces valeurs varient suivant le calibre du vaisseau, la résistance et l'élasticité de ses parois, le mode d'installation plus ou moins complet ou rapidement généralisé du collapsus. Il suffit, dès lors, d'imaginer la
coexistence dès causes qui augmentent l'amplitude des infra-minimales supérieures (grande pression du pouls, dilatabilité artérielle marquée) et de celles qui diminuent l'importance des valeurs de décollapsus (petit calibre de l'artère; établissement graduel et partiel du collapsus), pour comprendre que le phénomène indicateur de la transition brusque puisse arriver à disparaître complètement ou presque complètement. Le cas est assez fréquent, comme le
L. GALLAVARDIN. 11
FIG. 67. — Courbe oscillatoire dans un cas de pouls moyennement tendu et bondissant. — Par suite de l'amplitude des oscillations infra-minimales, de l'augmentation et de la diminution très progressives des grandes oscillations, la délimitation nette de la phase des grandes oscillations est devenue difficile, mais reste cependant possible.
FIG. 68. — Courbe oscillatoire dans un cas de pouls tendu et très hondissant. - L'absence de démarcation suffisamment nette du début et
de la fin de la phase des grandes oscillations rend impossible la détermination de la pression sanguine diastolique, par la méthode oscillatoire.
162 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMETRIQUE
montrent les tracés ci-joints, chez les sujets atteints ,d'insuffisance aortique ou simplement de pulsatilité artérielle, excessive (fjg, 68),
comme chez d'autres à pouls filiforme et à tension faible (fig. 69), ou encore dans des cas de troubles circulatoires graves avec hypertension diastolique.
Tous les auteurs qui se sont occupés de la question signalent cette impossibilité, dans laquelle on se trouve assez souvent, de prendre la tension diastolique. La proportion de ces cas, dans lesquels cette mensuration est impossible, est évidemment difficile à fixer. Disons cependant qu'expérimentant sur 400 malades, avec le tonomètre de RECKLINGHAUSEN, WÏNTERHALDER n'a pu déterminer la tension diastolique dans 7 pour 100 des cas. MÉLVIN et MURRAY, opérant avec l'appareil d'ERLANGER, arrivent à peu près à la même proportion (mensuration impossible dans 8 pour 100 des cas, douteuse dans 4 pour 100). L'inscription graphique des courbes oscillatoires et la possibilité de les analyser à tête reposée n'éliminent nullement les difficultés, c'est un point sur lequel, insistent MELVIN et MURRAY, qui utilisaient précisément l'appareil d'ERLANGER à inscription graphique (fig. 70). « Quelquefois, écrivent-ils, les oscillations diminuent graduellement pendant deux ou trois phases avant qu'un rapetissement brusque se montre et, dans quelques cas, il n'existe de diminution brusque et marquée à aucune phase. Dans de telles conditions, l'interprétation du tracé présente de sérieuses difficultés et des lectures différentes peuvent être faites par plusieurs observateurs 1. » -
1 Dans le but de montrer, à la fois, les difficultés inhérentes à la méthode oscillatoire et l'impuissance de l'inscription graphique à lever les hésitations, je citerai l'intéressante statistique publiée par KILGORE, en 1915.
Cet auteur eut l'indiscrétion d'envoyer à des observateurs d'une compétence indiscutable (CANNON, ERLANGER, HIRSCHFELDER, MOFFITT,WILBUR) une centaine de graphiques obtenus à l'aide de l'appareil d'ERLANGER (le plus utilisé en Amérique), en les priant de noter simplement par un trou d'aiguille
FIG. 69. — Courbe oscillatoire dans un cas de pouls petit et de faible tension. — La délimitation de la phase des grandes oscillations, est devenue impossible, par suite de la variation d'amplitude trop faible et trop progressive de ces grandes oscillations.
METHODE OSCILLATOIRE
163
On ne saurait trop insister sur ces difficultés de la détermination de la pression diastolique par la méthode oscillatoire. Il ne s'agit
les points où, selon eux, devaient être lues les pressions systolique et diastolique. Parmi les réponses reçues, il prit soin d'éliminer, complètement tout tracé dont la lecture était déclarée impossible par les six observateurs ou
FIG. 70. - Variations dans la netteté de l'index diastolique sur les courbes oscillatoires. — Sur ces trois graphiques, empruntés à MELVIN et MURRAY et recueiUis à l'aide de l'appareil d'ERLANGER, on voit que la démarcaton entre la phase des grandes oscillations et celle des petites oscillations apparaît avec une extrême netteté sur le premier (60 millimètres Hg), avec une netteté très suffisante, sur le deuxième (80 millimètres Hg), mais devient beaucoup plus difficile à préciser sur le troisième. Dans ces trois cas, la pression diastolique, mesurée à l'aide de la méthode auscultatoire, était respectivement de 60, 80, et 68 millimètres Hg.
164 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMETRIQUE
pas en effet d'énoncer dans chaque cas, avec assurance, un chiffre de tension diastolique ; il faut être certain que cette estimation est légitime. Plus on connaîtra les difficultés d'une méthode, plus on aura de chances de l'appliquer correctement ; et l'indécision ou la retenue que l'on se résignera à conserver dans les cas douteux ne feront que donner plus de poids aux mensurations que l'on considérera comme justifiées.
3° Technique instrumentale — Ici, comme pour la méthode de RIVA-ROCCI, et pour les mêmes raisons, nous mettrons de côté les appareils à inscription graphique dans lesquels on fait baisser la pression de centimètre en centimètre, en inscrivant à chaque stade les oscillations sur du papier enfumé. La manoeuvre est longue et difficile ; si elle peut être intéressante pour montrer les difficultés qu'on a parfois à situer l'index diastolique, elle est vraiment inapplicable dans la pratique courante. Deux instruments restent donc en présence : un grand manomètre métallique sensible fonctionnant comme mano-oscillomètre et l'oscillomètre de PACHON.
Nous ne pensons pas qu'on puisse invoquer aucun argument de principe pour ou contre l'une ou l'autre de ces deux méthodes d'exploration. Pour exclure par exemple la méthode mano-oscillomême
mano-oscillomême un seul d'entre eux; n'étaient retenus que les tracés ayant réuni . l'assentiment unanime. Or, sur trente-six tracés où la notation de la pression systolique fut indiquée par tous les observateurs, il existait le plus souvent des écarts de 15 à 35 millimètres Hg, avec une moyenne atteignant 29 millimètres Hg. Sur cinquante-six tracés utilisés pour la mensuration de la tension diastolique, on note encore, dans le plus grand nombre des cas, des écarts de 10 à 25 millimètres Hg, avec une moyenne de 18 millimètres Hg.
Ce qui prouve que ces discordances d'appréciation ne sont pas dues uniquement à l'adoption par les différents observateurs de critères oscillatoires distincts, mais en grande partie aussi à de véritables difficultés de lecture, c'est que deux observateurs adoptant le même index diastolique ou systolique arrivent encore à des écarts très appréciables dans leur notation. Bien plus, l'un d'eux (ERLANGER), prié à un an de distance d'examiner et de pointer les mêmes graphiques, montre encore dans ses appréciations des écarts qui s'élèvent à 16 millimètres Hg en moyenne pour la pression systolique et à 5 millimètres et demi pour la pression diastolique. A ce dernier propos, ERLANGER fait remarquer avec raison que le peu d'écart (demi-centimètre Hg) entre ses appréciations successives de la tension minima ne peut être inscrit au passif de la méthode oscillatoire.
MÉTHODE OSCILLATOIRE 165
métrique, on ne peut mettre en avant les deux avantages particuliers à l'oscillomètre de PACHON ; grande sensibilité et sensibilité constante. La sensibilité constante, c'est-à-dire la possibilité de comparer rigoureusement l'amplitude dès oscillations à différents régimes de pression, de même que la grande sensibilité seraient des qualités extrêmement précieuses, s'il s'agissait de déterminer exactement le point où les oscillations sont maximales ou de repérer d'une façon précise la première oscillation d'amplitude décroissante. Ces deux qualités ne deviennent plus indispensables si l'on songe que c'est un phénomène grossier, c'est-à-dire une diminution abrupte et marquée dans l'amplitude des oscillations qu'il s'agit de repérer comme index diastolique. Cette transition brusque se produit, de plus, entre des chiffrés de pression très voisins (entre 75 et 80 millimètres Hg par exemple) auxquels la sensibilité de l'appareil, même s'il s'agit d'un mano-oscillomètre, ne peut présenter que des variations insignifiantes. Pour la même raison, une extrême sensibilité n'est pas indispensable, la variation d'amplitude des oscillations observées n'ayant vraiment de valeur et ne pouvant entraîner la conviction que si elle est suffisament marquée. En maniant le sphygmoscope de PAL, où les oscillations sont très belles et dépassent parfois 10 centimètres chez des sujets à grande pulsatilité artérielle, j'avais remarqué, en 1910, que la lecture de la courbe oscillatoire était plus brouillée et que le repérage del'index diastolique n'était nullement facilité ; des dénivellations assez considérables et presque égales apparaissent à des baisses successives de pression de 1 cent. Hg et l'on ne sait plus où placer la diminution caractéristique. En expérimentant comparativement avec l'oscillomètre de PACHON et avec le tonomètre de RECKLINGHAUSEN, CORDIER et REDATTU sont arrivés à des conclusions analogues et estiment que « la facilité de lecture n'est nullement proportionnelle à l'amplitude des oscillations ». Quant à dire que l'oscillomètre de PACHON, comme l'ont prétendu certains auteurs, « élimine d'une façon absolue tout coefficient personnel » (MORICHEAB-BEAUCHAMP), c'est une opinion que l'on peut bien admettre si l'on conserve, comme index diastolique uniforme, la première diminution des oscillations faisant suite au maximum oscillatoire, qui est évidemment toujours facilement repérable; mais que l'on ne peut vraiment plus soutenir, sans donner l'illusion d'une fausse sécurité, si l'on a
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recours à l'index diastolique; plus correct, sur lequel nous avons insisté plus haut et si l'on se souvient des difficultés presque insurmontables rencontrées dans certains cas. En réalité, chaque instrumentation présente des avantages qu'il faut mieux analyser qu'opposer les fins aux autres.
Les quelques avantages du mano-oscillomètre paraissent être les suivants: Son maniement est très commode puisqu'il n'y a aucun séparateur à faire jouer, et surtout la courbe oscillatoire explorée est en quelque sorte continue au lieu d'être fragmentée. Avec l'oscillomètre de PACHON; comme du reste avec le sphygmoscope de PAL, on fait tomber la pression de centimètre en centimètre ou de demicentimetre en demi-centimetre et l'on mesure à chaque niveau l'amplitude des oscillations en faisant jouer le séparateur. La manoeuvre du mano-oscillomètre est plus simple. Là poire de RICHARDSON étant comprimée par une main, il est facile de faire monter et descendre l'aiguille du manomètre dans toute l'étendue de la zone critique, de faire varier à son gré la rapidité dès mouvements de l'aiguille, de répéter l'expérience enfin à plusieurs reprises en un temps très court, en épiant attentivement la modification oscillatoire attendue. Un phénomène dont nous n'avons pas encore parlé et qui aide beaucoup à la fixation de l'index diastolique, le changement de rythme de l'aiguille, s'apprécie très facilement au mano-oscillomètre. A mesure que la pression augmente dans la manchette; l'aiguille monte en décrivant des oscillations de hauteur rapidement croissante; puis brusquement; soudainement, l'aiguille décrit une première oscillation, puis d'autres; qui différent nettement des précédentes par leur amplitude plus élevée et un changement de rythme très caractéristique. Alors que, dans les oscillations infra-minimales ; l'aiguille était projetée vivement à chaque pulsation pour retomber immédiatement à son point de départ, cette même aiguille, dès là première grande oscillation, présente un départ plus brusque, suivi d'un mouvement plus uniforme et plus calme, un sommet moins aigu où elle semble stationner un certain temps, une descente peut-être plus lente. Cette modification du rythme oscillatoire, superposée à la variation d'amplitude concomitante; a été signalée par tous les auteurs ; elle est facilement appréciable à un oeil attentif et un peu exercé et se trouve certainement d'un très grand secours dans la délimitation du début des grandes
MÉTHODE OSCILLATOIRE 167
oscillations 1. Ce changement de rythme est précieux, car, même lorsque les valeurs de dilatation et de décollapsus sont modifiées ou altérées au point de ne pas laisser voir de démarcation très brusque dans leur succession, il indique ce quelque chose de nouveau qui est introduit dans la sommation de l'amplitude oscillatoire par ie premier décollapsus artériel. Or, il semble qu'il soit plus facilement appréciable dans l'exploration continue de la courbe oscillatoire au mano-oscillomètre qu'à son analyse fragmentée a l'oscillomètre. Gomme dernier avantage, la manoeuvre du mano-oscillomètre n'immobilisant aucune main, je signalerai la possibilité pour là main libre d'explorer parallèlement l'humérale au pli du coude, afin de superposer en quelque sorte les sensations tactiles aux sensations visuelles pour apprécier plus sûrement l'index diastolique. C'est après avoir appris à connaître la « vibrance humérale », que nous étudierons dans quelques pages, que l'on pourra juger de l'intérêt d'un tel avantage. Tout ceci, pour dire que la voie reste encore ouverte aux constructeurs qui ambitionneraient de nous doter d'un manomètre métallique très sensible (davantage encore que ne le sont les modèles actuellement en circulation), sans cesser pour cela d'être transportable.
Par contre, l'oscillomètre de PACHON; du fait de sa grande sensibilité, présente des avantages incontestables qui justifient le succès qu'il a rencontré auprès des médecins. Lorsqu'on a soin de situer l'index diastolique à sa véritable place, et à la condition bien entendu que cet index tranche par sa netteté sur lès autres dénivellations de la courbe, il en rend la démonstration objective très frappante. C'est surtout dans les cas à faible tension et pulsatilité artérielle réduite, et dans lesquels cependant la démarcation entre la zone des grandes et petites oscillations ne s'est pas trop émousséè, que la sensibilité de l'appareil devient intéressante en grossissant en quelque sorte cette démarcation et en facilitant le repérage de l'index
1 Ce changement de rythme trouve son explication dans les modifications de forme des pulsations artérielles, révélées par l'inscription graphique des oscillations : variations de l'obliquité des lignes d'ascension ou de descente, apparition ou disparition d'ondes accessoires (anacrotisme et dicrotisme). (Voir in Archives des Maladies du Coeur, 1911 p: 438-443.) Cette étude graphique des oscillations, recueillies en conjuguant au moyen de dispositifs divers la manchette brachiale avec une ampoulé de MAREY, a été reprise récemment par
ERLANGER. GUILLEMINOT, FANTUS, BARRE, etc.
168 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
diastolique. L'oscillomètre présente de plus un très grand avantage, qui est de permettre la figuration graphique des courbes oscillatoires (DELAUNAY, BARRÉ, BILLARD). L'inscription de ces courbes, en reportant sur papier quadrillé la hauteur des oscillations suivant chaque dénivellation de pression, est très instructive. Elle permet, par une analyse à tête reposée des courbes litigieuses, de discuter la légitimité ou l'impossibilité de fixation de l'index diastolique, comme aussi peut-être de mettre en évidence certaines particularités circulatoires. J'ajoute enfin que l'avantage reste incontestablement à cet appareil, comme nous le verrons plus loin, dans tous les cas où il s'agit non pas tant de mesurer la pression artérielle que d'explorer la pulsatilité artérielle, que l'on veuille se rendre compte des variations survenues dans la perméabilité des gros troncs vasculaires des membres ou encore de certaines particularités circulatoires. PACHON et JEANNENEY ont insisté sur les services que pouvait rendre l'étude de l'amplitude des oscillations, de « l'indice oscillométrique » comme ils l'appellent, dans de nombreuses circonstances (oblitérations artérielles complètes ou incomplètes, blessures de vaisseaux, état de la circulation après les ligatures, shock chirurgical, etc.). Signalons, enfin, que BALARD a insisté sur les services que l'oscillomètre pouvait rendre comme « critère de la persistance de la circulation dans la mort apparente du nouveau-né ».
Au reste, en sphygmomanométrie, il faut se garder de tout ostracisme comme de toute préférence absolue; se persuader que ce n'est pas tel ou tel instrument, mais bien la méthode, qui recèle la vérité, et que la correction des résultats dépend souvent davantage de la connaissance qu'on aura, par exemple, de la méthode oscillatoire et de ses difficultés, que de l'appareil employé. En fait, il y a des courbes oscillatoires facilement lisibles et tous les appareils sont bons. Il y a des courbes difficilement lisibles, où la zone critique s'estompe trop souvent en une zone indécise; et l'on fera bien de s'entourer de toutes les garanties, instrumentales ou autres, pour arriver à une solution que l'on puisse avoir chance de considérer comme exacte. Il y a enfin des courbes qui sont illisibles (elles sont communes lorsqu'on expérimente sur des artères à nu, on ne peut donc s'étonner de les rencontrer dans la pratique) ; et cette infériorité ne peut alors être suppléée par rien. Il serait aussi fallacieux que
MÉTHODE OSCILLATOIRE 169
dangereux d'attendre de l'extrême sensibilité de l'instrument un secours qui ne pourrait qu'incliner l'observateur à choisir à tout prix telle ou telle dénivellation oscillatoire, comme index diastolique supposé. Lorsque nous étudierons les équivalents de la méthode oscillatoire, nous verrons du reste que l'intérêt de cette méthode oscillatoire proprement dite a beaucoup perdu de son importance depuis quelque dix ans, et, dès maintenant, il n'est pas téméraire d'affirmer que le médecin praticien peut s'en passer complètement dans la clinique sphygmomanométrique courante.
4e Chiffres obtenus. — Ils diffèrent quelque peu suivant l'instrumentation employée.
La plupart des médecins qui ont employé le tonomètre de RECKLINGHAUSEN donnent, chez les sujets normaux, comme taux de là pression diastolique normale, des chiffres oscillant entre 70 et 75 millimètres Hg ; le chiffre moyen donné par cet auteur était également de 73 millimètres Hg. Même résultat avec l'appareil d'ERLANGER à inscription graphique. Expérimentant à l'aide de cet instrument, chez 52 adultes jeunes et sains, MÉLVIN et MURRAY ont relevé une moyenne de 68 millimètres Hg.
Les chiffres de tension diastolique sont assez nettement plus élevés avec l'oscillomètre de PACHON. D'après MARTINET, « 80 et 100 millimètres Hg paraissent devoir être considérés comme les limites normales habituelles de la tension artérielle minima ». LIAN donne ces mêmes chiffres comme « semblant représenter pour cet appareil la limite des variations physiologiques de Mn...., 16/9 étant les valeurs normales trouvées habituellement avec cet appareil ». Chez 49 hommes adultes, VÉRUT trouve une tension diastolique normale de 90 millimètres Hg et, chez 45 femmes, une moyenne de 80 millimètres. Des chiffres analogues sont donnés par JOSUÉ (9 à 10 centimètres), par MARFAN et DORLENCOTJRT (9 cm 3 sur 156 cas). A l'occasion de récentes études chez des aviateurs, JOSUÉ (1918) note avec cet appareil, à l'état normal, « une pression minima de 8 à 10 et même 11 centimètres Hg ». En résumé, il ressort de là que, en utilisant l'oscillomètre de PACHON tous les auteurs notent le chiffre de 90 millimètres Hg comme absolument normal, alors qu'avec le mano-oscillomètre ce même chiffre est déjà nettement trop élevé et correspond d'ordinaire à une hypertension sys-
170 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMETRIQUE
tolique modérée, mais indéniable, de 160 millimètres Hg (au lieu
de la normale, 120 à 130 millimètres Hg);
D'où provient cette légère surestimation de la pression diastolique recueillie au PACHON ? Pour la plus grande part, sans doute, du déplacement de l'index diastolique : la plupart des auteurs qui utilisent cet appareil notant uniformément cette tension lors de la première décroissance des oscillations maximales 1, En partie, aussi, à la substitution du brassard antibrachial à la manchette brachiale: SURMONT, DEHON et HEITZ, en 1913, ayant mesuré la pression diastolique au PACHON chez 53 sujets, alternativement à l'aide d'une manchette antibrachiale de 8 centimètres et d'un brassard de 12 centimètres, ont trouvé chez 51 d'entre eux un chiffre plus élevé à l'àvant-bras (en moyenne de 15 millimètres Hg). Il est cependant problable, qu'il y a autre chose que ces deux causes d'erreur, car CORDIER et REBATTU, comparant les chiffres de tension diastolique obtenus au PACHON et au RECKLINGHAUSEN au niveau d'une même manchette brachiale et utilisant le même index diastolique, ont encore trouvé au PACHON des chiffres supérieurs dans 84 pour 100 des cas, égaux dans 10 pour 100, inférieurs dans 6 pour 100 seulement ; la surestimation des chiffres donnés par le PACHON variait de 5 à 20 millimètres Hg ou même davantage et était en moyenne de 13 millimètres Hg. HÉITZ, en 1916, mesurant là tension diastolique au PACHON et à l'aide d'une manchette brachiale ordinaire chez 50 sujets normaux, trouve encore des chiffres variant entre 70 et 100 millimètres Hg, avec une moyenne de 83 millimétres Hg; On peut donc se demander si avec cet appareil on n'aurait pas de la tendance à placer un peu trop haut la démarcation entre la zone des grandes et des petites oscillations. Nous disons trop' haut et non
1 La preuve que l'index diastolique habituellement utilisé par les médecins qui se servent du PACHON est indubitablement trop élevé se trouve dans certaines formules tensionnelles signalées par quelques auteurs. MARTINET; dont la compétence est indiscutable, note dans certains cas d'hyposphyxie des tensions de 125/115 et même dans un cas, chez une jeune femme de trente ans, 115/105. Si l'on admet que, dans ce dernier cas par exemple, la tension systolique oscillatoire de 115 est déjà en surestimation notable sur le chiffre réel de tension intra-artérielle; l'étendue de la pression variable devient manifestement insuffisante. Il serait aisé de relever de très nombreux exemples analogues dans la littérature médicale sphygmomanométrique édifiée à l'aide de cet appareil.
MÉTHODE OSCILLATOIRE 171
plus haut, car, comme nous le verrons plus loin, les notations oscillant autour de 75 millimètres Hg ont quelque chance d'être plus exactes; étant donné leur coïncidence avec celles fournies par les méthodes vibratoire et auscultatoire que nous allons maintenant étudier.
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MÉTHODE OSCILLATOIRE 175
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176 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMETRIQUE
CHAPITRE DEUXIEME
ÉQUIVALENTS DE LA MÉTHODE OSCILLATOIRE
La méthode oscillatoire utilise, comme nous venons de le voir, les variations de pression transmises à l'air de la manchette brachiale par les oscillations de la paroi artérielle. Ces oscillations artérielles, surtout lors des alternatives de collapsus et de décollapsus, sont assez brusques et assez étendues pour se révéler par d'autres phénomènes indicateurs que l'on peut grouper sous la rubrique d'équivalents de la méthode oscillatoire. Ils reconnaissent, en effet, la même origine et sont capables de se mesurer sur le terrain pratique avec la méthode oscillatoire proprement dite. Après avoir dit quelques mots des sensations subjectives éprouvées par le sujet (méthode subjective), nous insisterons plus longuement sur les bruits perçus à l'auscultation de l'humérale (méthode auscultatoire), enfin sur une vibrance spéciale du pouls au-dessous de la manchette (méthode vibratoire1).
1 Dans certaines conditions, cependant, il devient possible de voir directement les oscillations des parois artérielles engendrées par la compression. Cela au niveau des seules artères de l'organisme battant à nu, sous un milieu transparent, et facilement accessibles à l'oeil de l'observateur : les artères' rétiniennes.
Dès 1909, BAILLIART faisait remarquer que, chez les hypertendus, il était nécessaire d'exercer une forte pression sur le globe oculaire pour faire disparaître le pouls rétinien. MELVILLE BLACK, en 1911, avait préconisé un procédé pour déceler l'hypertension chez les sujets jeunes et adultes, en se basant, uniquement sur des données ophtalmoscopiques. Le fait qu'on ne parviendrait pas à observer, par une pression exercée sur le globe oculaire, l'effacement et la blancheur des vaisseaux rétiniens, serait de nature à faire soupçonner l'existence d'une assez forte hypertension artérielle.
Plus récemment, BAILLIART (1917) a serré la question de plus près en s'efforçant de déterminer, par une compression progressive et graduée du
MÉTHODE SUBJECTIVE 177
ARTICLE PREMIER
MÉTHODE SUBJECTIVE
Parlant des sensations du doigt emprisonné dans son sphygmoscope, MAREY écrivait : « Pendant les phases où les oscillations manométriques ont une grande amplitude, le patient à conscience des pulsations de ses artères ; il les perçoit, sauf la douleur, comme dans un doigt atteint de panaris, tandis que, s'il n'y a pas de pression exercée sur le doigt, il n'éprouve rien. » Il est bien probable que les sensations éprouvées par le sujet au niveau du point comprimé, comme l'ont-récemment rappelé LUTENBACHER et GAMBIER, sont occasionnées par la série des décollapsus artériels se produisant a chaque pulsation; aussi n'est-il pas étonnant que l'on ait essayé de les utiliser pour délimiter la zone des grandes oscillations. Dans cette
globe oculaire, le niveau de la tension systolique et diastolique des artères rétiniennes. La compression du globe est obtenue au moyen d'un nouveau modèle de sphygmomanomètre à tige (analogue au BLOCH-VERDIN), mais beaucoup plus sensible et gradué non plus en centimètre Hg, mais en grammes (de 25 à 200 gr.). Les points choisis comme critères de la pression systolique ou diastolique sont les suivants. La pression diastolique est lue au moment où se manifestent, à l'image renversée ou mieux à l'image droite, les premiers battements artériels qui suivent l'affaissement des vaisseaux au bas-fond de la vallée diastolique; la pression systolique, à l'instant précis où réapparaissent les premiers battements artériels, lors du relâchement de la compression qui a produit leur disparition totale. Reste à traduire en modifications réelles de la pression intra-oculaire les chiffres lus sur la tige de l'appareil, au moment de l'apparition des critères tensionnels. Point assez délicat, car il importe de tenir compte à la fois de la tension intra-oculaire initiale et de là compression exercée. On peut, soit vérifier au tonomètre de SCHIOTZ, parallelement appliqué, les modifications de tension correspondant à une pression donnée de la tige du sphygmomanomètre; soit, plus simplement, se reporter à un barème de cerrespondance établi par l'auteur pour divers chiffres de tension intra-oculaire et de compression. Mesurée d'après ce procédé, la tension des artères rétiniennes de l'oeil normal serait de 25 millimètres Hg, pour la pression minima et de 50 millimètres Hg pour la pression maxima. Ajoutons qu'au point de vue subjectif, les sensations de « pulsation visuellement-perçue », puis de « cécité totale momentanée ", seraient également en rapport, d'après BAILLIART, avec les taux de pression diastolique et systolique des artères rétiniennes.
L. GALLAVARDIN. 12
178 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMETRIQUE
méthode, on admet que les premiers battements perçus par le sujet sous la manchette, lors de la baisse de la pression, indiquent la tension systolique, et que la disparition de ces battements marque la pression diastolique. ERLANGER, comparant cette méthode' à la méthode oscillatoire, a trouvé à peu près exactement les mêmes chiffres ; RECKLINGHAUSEN, des chiffres souvent superposables, au moins pour la pression systolique. Quant à la pression diastolique, son appréciation de cette façon est beaucoup plus difficile, les chiffres obtenus étant tantôt plus élevés, tantôt inférieurs 1.
Malgré son approximation assez grande, cette méthode a les inconvénients de toutes les méthodes subjectives, les renseignements donnés dépendant de l'intelligence et de la sensibilité du malade, sans compter là difficulté réelle de séparer les battements se produisant au niveau du bord supérieur du manchon, de ceux naissant vraiment sous le brassard.
On peut encore rapprocher de cette méthode le procédé conseillé par FREY pour fixer la tension sanguine maxima. On plonge le bras dans une cuve de mercure à la température du corps et l'on mesure avec un ruban métrique la distance de la surface du mercure au point où les battements artériels disparaissent complètement. Cette hauteur fixe la pression systolique. MAX NEU, comparant cette méthode avec les résultats obtenus à l'aide du tonomètre de GAERTNER, aurait trouvé, chez 22 malades, des chiffres absolument concordants dans 8 cas et présentant, dans les 14 autres cas, un écart maximum de 1 centimètre et demi, en plus ou en moins.
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— la Pression artérielle dans les branches de l'artère centrale de la rétine;
1 Lorsqu'on fait la même épreuve avec le doigtier de GAERTNER, on se rend compte, comme nous l'avons dit plus haut, que la pression à laquelle le sujet ressent des pulsations sous l'anneau est toujours supérieure de 5 à 10 millimètres Hg à celle où se manifeste la rougeur du doigt.
MÉTHODE AUSCULTATOIRE 179
nouvelle technique pour la déterminer (Annales d'Ocutistique, novembre 1917).
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ARTICLE II MÉTHODE AUSCULTATOIRE
Cette méthode, basée sur l'auscultation de l'huméralé au-dessous de la manchette brachiale, fut découverte par un médecin russe, KOROTKOW, en 1900. Etudiée depuis par KRYLOFF, JANOWSKY et de nombreux auteurs dont on trouvera les noms cités plus loin, soumise au contrôle expérimental par MACWILLIAM et MELVIN, vulgarisée en France, depuis nos premières publications, par LAUBRY, COTTET, et surtout par TIXIER (de Nevers) qui s'en est fait l'ardent champion, elle tend de plus en plus à se répandre et à occuper une place importante en sphygmomanométrie.
1° Technique. — L'auscultation se pratiqué d'ordinaire directement au-dessous du brassard, à la partie inférieure et interne du bras, sur le trajet de l'humérale, ou au pli du coude. En plaçant le stéthoscope sur la manchette, les bruits se laissent encore entendre très distinctement. Dans la mensuration de la tension ailleurs qu'au bras, cette méthode peut également être appliquée, L'auscultation
180 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMTRIQUE
se pratique sur la radiale lorsqu'on utilise un brassard antibrachial, sur la tibiale postérieure ou la pédieuse si la manchette est placée sur le mollet, sur la poplitée si c'est la cuisse que l'on comprime; mais, comme le fait remarquer MURRAY, au niveau de cette dernière artère, l'auscultation est malaisée à cause de la profondeur du vaisseau et les résultats sont souvent inutilisables.
Le stéthoscope ordinaire peut être employé ; mais la nécessité de maintenir cet instrument dans une position invariable pendant la durée de l'exploration, la torsion de la tête et la difficulté que l'on a à suivre des yeux l'aiguille du manomètre sont autant d'incommodités qui lui font préférer lé stéthoscope flexible bi-auriculaire. Bien que quelques auteurs soient restés fidèles à ce dernier mode d'exploration (COTTET), l'emploi d'un phonendoscope, capable d'amplifier les bruits artériels et d'accuser la netteté des contrastes est
préférable. Par des déplacements successifs au-dessous de la manchette et par la palpation préalable de l'humérale, il est facile de repérer le point où l'application de la plaque phonendoscopique donne les tous les plus nets, comme aussi d'éviter les bruits adventices provoqués par le contact du bord inférieur du brassard.
FIG. 71. — Mesure de la tension artérielle par la méthode auscultatoire à l'aide d'un phonendoscope ordinaire.
METHODE ALSCULTATOIRE 181
La pression de l'instrument doit être assez minime pour ne pas comprimer l'artère, assez appuyée pour éliminer tout bruit de frottement entre les téguments superficiels et la membrane réceptrice. Plus récemment, JAMES PREUDEGART (1913) et LAUBRY (I9I4) ont préconisé l'emploi d'une capsule réceptrice fixée sur un lien circulaire ; ce dispositif, qui est une complication un peu superflue, aurait pour avantage de recueillir les bruits vasculaires sur une
étendue assez large pour qu'on n'ait plus à tenir compte des détails anatomiques, et surtout de laisser les deux mains de l'observateur absolument libres pour la palpation simultanée du pouls ou la manoeuvre de la poire d'insufflation 1. LAUBRY, dans son sphygmophone, a également perfectionné la disposition des tubes transmetteurs, afin d'assurer la fixité des écoutes dans les conduits auditifs et de permettre, si on le désire, à deux observateurs dis1
dis1 les cas délicats, afin d'assurer une meilleure transmission des bruits, TIXIER se contente de fixer au pli du coude la plaque du phonendoscope par un ou deux tours d'une bande de crêpe Velpeau dont on noue simplement les deux extrémités,
FIG. 72. — Sphygmophone de LAUBRY.
182 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
tincts de contrôler leurs sensations et de procéder simultanément à la mesure auscultatoire de la pression artérielle.
Il est à peine besoin d'insister sur les précautions à prendre pour , éloigner autant que. possible toute cause d'erreur : silence aussi complet que possible dans l'entourage, immobilisation complète du bras du malade, etc.
Tous les auteurs sont d'accord pour admettre que la série des bruits artériels se perçoit plus facilement et plus nettement lors de la décompression progressive du brassard qu'au moment de sa compression. Il va sans dire que cette décompression s'effectuera très progressivement et d'autant plus lentement que les pulsations seront plus ralenties,
2° Tons artériels et mode de production, - Si l'on pratique l'auscultation pendant que la pression, que l'on aura pris soin d'élever au-dessus du niveau de la pression systolique, s'abaisse dans la manchette, on voit succéder au silence absolu une série de phénomènes acoustiques qu'on peut, suivant l'exemple. d'ETTINGER (1907), FISCHER (1909), OLIVER (1911), GOODMAN et HOWELL (1911), GITTINGS (1912), répartir en quatre phases :
1er phase : légers tons artériels ;
2e phase : série de souffles succédant aux bruits, précédents;
FIG. 73. — Sphygmophone de LAUBRY, avec dispositif permettant à deux observateurs d'ausculter simultanément l'humérale.
MÉTHODE AUSCULTATOIRE 183
3e phase : tons artériels nets et éclatants, d'intensité croissante, puis décroissante;
4° phase : bruits tout à fait légers et sourds faisant suite aux précédents et disparaissant rapidement.
Ces phases", dont la succession se perçoit d'ordinaire très facilement, sont soumises suivant les individus à d'assez notables variations, touchant leur plus ou moins de netteté, la facilité de leur démarcation,
démarcation, durée respective. — Les légers tons artériels du début sont absolument constants, bien que d'une perception plus ou moins facile à leur tout premier stade.— On n'en saurait dire autant des souffles. « Constants et légers, comme le dit BARD, chez les sujets dont la circulation est normale, ils sont absents ou extrêmement intenses (suivant les cas) chez les sujets dont la circulation présente des troubles pathologiques ». Comme le fait remarquer le même auteur, cette phase de souffles est ainsi encadrée entre deux phases de tons, d'ailleurs très inégales de durée, se plaçant plus près de la limite, supérieure des bruits que de leur limite inférieure, et n'occupant au reste qu'une assez minime partie de la distance qui sépare ces deux seuils 1. — Les tons artériels de la troisième phase sont les bruits les plus facilement perceptibles, les plus caractéristiques de toute lasérie. Dans les cas typiques, ils sont intenses, éclatants, résonnants
1 A cause de l'inconstance de ces souffles, de leur peu d'importance dans la détermination des valeurs systolique et diastolique de la tension artérielle, on peut sans inconvénient les, négliger dans la figuration des courbes auscultatoires C'est ce que nous avons fait, à l'instar de TIXIER, dans la plupart de nos graphiques qui ne reproduisent, dès lors, qu'une série de tons artériels d'intensité croissante, puis décroissante.
FIG. 74 — Figure schématique représentant la succession des bruits perçus à l'auscultation de l'humérale au-desssous de la manchette à l'aide d'un phonendoscope. — I, tons artériels, légers et de courte durée; II. bruits plus intenses, à caractère soufflant; III, tons artériels violents, en bruit de gong; IV, bruits terminaux très faibles.
184 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
à l'oreille comme autant de chiquenaudes sur un tambourin, comme des coups de gong ; même lorsqu'ils sont plus amortis, ils surpassent comme intensité et comme netteté ceux de la première et de la quatrième phase. — Nous verrons dans quelques instants les variations assez considérables auxquelles sont soumis les tons assourdis et légers de la quatrième phase.
Quel mécanisme, quel lieu de production assigner a ces bruits artériels ? — A la suite de KOROTKOW, la plupart des auteurs et notamment OLIVER, EHRET, avaient de la tendance à incriminer uniquement la brusque distension des parois artérielles du segment humerai situé au dessous de la manchette, distension d'autant plus brusque que ces parois se trouvaient être anormalement relâchées du fait de l'interruption périodique du cours du sang à leur intérieur. Déjà, cependant, GITTINGS faisait remarquer que la simple compression à l'aide d'une bande d'ESMARCH ne donnait naissance qu'à des bruits très douteux et il attachait une certaine importance à la résonance aérienne du brassard. -MACWILLIAM et MELVIN arrivent, en 1914) à des conclusions différentes. Pour eux, les tons artériels seraient liés directement aux mouvements d'expansion du cylindre artériel emprisonné sous la manchette,. nullement à des modifications du cylindre artériel sous-jacent. En étudiant, à l'aide du dispositif expérimental décrit plus haut, les modifications de la pression dans le segment artériel distal, ils montrent tout d'abord que ces variations de pression, au cours de la compression du cylindre artériel enfermé dans le tube, sont le plus souvent insuffisantes pour expliquer la genèse de tels bruits; mais, comme l'analyse de ces variations de pression présente peutêtre plus d'intérêt pour ce qui à trait à l'explication de la vibrance humérale, nous remettons leur étude au chapitre suivant. Ces auteurs s'appuient, au reste, sur des arguments plus directs pour localiser dans le segment artériel comprimé la genèse des phénomènes acoustiques étudiés ici. En effet, lorsque l'on fait monter la pression et que l'on observe directement le cylindre artériel à travers la paroi de verre de l'appareil, les sons commencent à se manifester au moment où ce cylindre artériel est à peine déformé et alors qu'il ne saurait y avoir à cet instant ni amoindrissement appréciable du courant sanguin, ni diminution sensible des pressions systolique ou diastolique au-dessous de la compression. En auscultant sur le
MÉTHODE AUSCULTATOIRE 185
tube de verre de sortie, les tons artériels sont tout aussi développés que sur l'artère elle-même ; et, si l'on ajoute un segment artériel au tube de verre, les bruits perçue sur ce segment sont nettement moins forts que sur le tube. Substitue-t-on, dans l'appareil, un tube de caoutchouc assez épais à l'artère, il s'affaisse parfaitement; mais il ne se produitaucun bruit sur le tube de sortie ou sur une artère placée à sa suite. Enfin, la compression d'une zone très limitée d'une artère ne donne qu'un son très faible au-dessous, alors qu'en réalité les bruits devraient y être tout aussi développés s'ils dépendaient uniquement des modifications de la circulation sous-jacente. Le facteur joué par la longueur du segment artériel sur lequel s'exerce la compression montre que c'est à son niveau que les bruits doivent se produire. L'existence d'un certain courant sanguin à travers le vaisseau a aussi de l'importance, tout au moins pour charrier les bruits produits, car, ainsi que l'a montré EHRET, la compression de l'artère distale atténue nettement les phénomènes acoustiques. Quant à la résonance aérienne invoquée par GITTINGS, elle n'est certainement pas nécessaire; les tons artériels se produisent de la même façon, si l'on s'assure que le manchon liquidien compresseur est absolument purgé de toute bulle gazeuse 1. Selon une interprétation plus récente d'ERLANGER (1916), les sons de compression de KOROTKOW se produiraient surtout au niveau de la partie inférieure du segment humerai compris sous la manchette et, dans certains cas, un peu au-dessous. Ils seraient dus à un phénomène analogue au « marteau d'eau, » au « coup de bélier », c'est-à-dire à l'exagération subite de pression qui se produit quand le mouvement d'une masse fluide est subitement arrêté. D'après cet auteur, le sang qui pénètre sous la manchette la parcourt avec une vitesse supérieure à sa vitesse habituelle. Cette onde sanguine vient buter brusquement, vers la partie inférieure du segment artériel, contre l'onde sanguine stagnante ; le coup de bélier se produit et l'excès de pression distendant brusquement
1 Parlant de ce principe que les tons artériels se produisaient au niveau du segment humeral emprisonné sous la manchette et qu'ils s'entendaient parfois en auscultant directement le brassard; nous avons essayé avec TIXIER d'insérer, d'une façon étanche, une plaqué phonendoscopique à la partie moyenne et à l'intérieur du brassard. Nos essais ne furent pas heureux, les tons artériels se trouvant alors couverts par de multiples bruits de froissement, de déplissement, qui empêchaient absolument leur analyse,
186 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
la paroi donne naissance aux sons caractéristiques. Pour que ces bruits aient un maximum d'intensité, il faut naturellement que le volume de l'ondée sanguine pénétrant sous le brassard soit suffisant et que la partie inférieure de l'artère soit presque pleine de sang, deux conditions qui se trouvent réunies au maximum au moment de la troisième phase.
3° Pression systolique auscultatoire. — Mesurée à l'aide de la méthode auscultatoire, la tension systolique doit être fixée tout au début de la première phase, au moment où apparaissent les premiers tons artériels.
D'après tous les auteurs qui se sont livrés à des mensurations comparatives et qui ont publié des statistiques à ce sujet, les chiffres de tension systolique obtenus par la méthode auscultatoire sont intermédiaires aux chiffrés fournis par les méthodes oscillatoire et palpatoire. Ils sont inférieurs de quelques millimètres à la tension systolique oscillatoire et supérieurs, également de quelques millimètres, aux chiffres donnés par la méthode de RIVA-ROCCI. La surestimation moyenne du chiffre systolique auscultatoire sur celui fourni par la palpation oscille entre 5 et 10 millimètres Hg 1.
Pratiquement, l'intérêt de la méthode auscultatoire dans la mesure systolique nous paraît très secondaire. Les chiffres qu'elle fournit, étant plus élevés que ceux donnés par la palpation, ont peu de chance d'être plus exacts puisque, nous l'avons vu, ces derniers sont déjà un peu forts. D'autre part, elle n'est pas d'application plus facile ou plus simple, et ses plus phauds partisans (DEHIO, GIBSON, MACWILLIAM et MELVIN, TIXIER, etc.) conseillent toujours de contrôler ses résultats, dans les cas douteux, par la méthode de RIVA-ROCCI. En définitive, c'est donc cette dernière méthode qui décide en dernier ressort,
4° Pression diastolique auscultatoire. — Nul doute que la méthode auscultatoire ne constitue, dans la mesure de la pression
1 Citons parmi ces chiffres : 3 millimètres Hg (MELVIN et MURRAY), chez-des enfants; 4 à 8 millimètres (SCHRUMPF et ZABEL) ; 5 millimètres (KILGORE); 5 à 10 mlllimètres (TIXIER); 6 millimètres (MARPAN et DORLENCOURT); 5 à 7 millimètres (STERZING); 5 millimètres (WINTERHALDER) ; 8 à 11 millimètres(WARFIELD); 10 à 12 millimètres (KOROTKOW); 16 millimètres (GITTINGS), etc.
MÉTHODE AUSCULTATOIRE 187
diastolique, non seulement une méthode intéressante, mais une excellente méthode. Les nombreux travaux suscités par elle, durant ces dernières années, sont garants de cette conclusion.
Comme première preuve invoquée en sa faveur, je citerai tout d'abord certaines vérifications expérimentales dont le résultat paraît assez probant. En utilisant le dispositif dont nous avons déjà parlé à plusieurs reprises (dispositif qui permettait à la fois d'inspecter directement la carotide de brebis enfermée dans le manchon compresseur et de pratiquer l'auscultation à la sortie, soit sur le tube de verre, soit sur un nouveau segment artériel figurant la continuation de l'humérale), MACWILLIAM et MELVIN arrivèrent, en 1914, à des conclusions intéressantes. Ils virent que le maximuni d'intensite des bruits coïncidait toujours avec les plus grandes oscillations de la paroi artérielle; la limite inférieure des sons se superposant au contraire à la brusque diminution des oscillations et « au moment où la pression extérieure était devenue assez basse pour ne plus causer aucune déformation appréciable dans la forme circulaire du tube ». Quant au murmure qui se produit dans la phase intermédiaire (et qui peut s'accompagner d'un thrill, sensible au doigt, sur le tube), il répond à des vibrations nettement visibles de la paroi artérielle donnant lieu à des oscillations de la colonne d'eau au dessus du manchon extérieur. Ce murmure correspond aux grands collapsus artériels, qui réalisent une sorte de canal rétréci par où passe le sang, et sa tonalité est d'autant plus élevée que la pression est plus forte. En insérant, dans d'autres expériences, le même dispositif artériel (l'artère étant directement contre l'os) dans un membre d'animal comprimé par une manchette pneumatique, cesauteurs arrivent à des conclusions analogues ; les bruits sont moins nets, mais leur limite inférieure coïncide avec la pression diastolique mesurée au manomètre. En opérant non plus in vitro ou in mortuo, mais in vivo, mêmes résultats. Une manchette étant placée sur le cou d'un mouton anesthésié, un observateur note en amont sur la carotide, à l'aide d'un manomètre à valves, les pressions maxima et minima; un autre observateur note en aval, sur, la même artère, la pression diastolique auscultatoire. Or ; les chiffres obtenus par ces deux observateurs, au cours de ces déterminations simultanées, coïncident remarquablement.
Dans toutes ces expériences, il n'est parlé que de la « cessation
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des tons artériels » car, en opérant dans des. conditions en quelque sorte idéales, les tons artériels disparaissent brusquement et il n'existe pour ainsi dire pas de quatrième phase. Chez l'homme, il n'en est pas de même; et. le premier problème qui se pose est de savoir où placer l'index diastolique auscultatoire pour arriver à une détermination correcte de la pression minima. Deux opinions sont en présence. — La première, soutenue par KOROTKOW, SAHLI, ETTINGER, EHRET, GITTINGS, OLIVER, GOODMAN et HOWELL, TCHERTKOFF, etc., mais semblant actuellement périmée, place cet index à la fin de la quatrième phase, c'est-à-dire au moment précis de la disparition de tout bruit. — La seconde, défendue par FISCHER, DEHIO, LANG et MANSWETOWA, TACSSIG et COOK, WEYSSE et LUTZ, WARFIELD, MACWILLIAM, MELVIN et MURRAY, LAUBRY, TIXIER, etc., le fixe plus justement à l'inion de la troisième et de la quatrième phase.
Cet index a rallié la très grande majorité des suffrages et tout le monde est actuellement d'accord pour lire la pression diastolique, lors d'une pression décroissante dans la manchette, à l'instant précis où lés tons artériels clairs et aigus de la troisième phase sont soudainement remplacés par les tons sourds, graves, d'intensité plus faible de la quatrième. La légitimité de cet index semble bien confirmée par une expérience très précise de WARFIELD (1912), se rapprochant autant que possible des conditions dans lesquelles on opère chez l'homme. Sur un chien anesthésié, cet auteur inscrit la pression diastolique de la fémorale droite et comprime la fémorale
FIG. 75. — Superppsition d'une courbe oscillatoire et d'une courbe auscultatoire, — L'index diastolique auscultatoire doit être situé au moment précis où les tons artériels violents de la troisième phase font place aux tons assourdis et légers de la quatrième phase. Cet index correspond, sur la courbe oscillatoire, à la démarcation brusque entre la zone des grandes et des petites oscillations.
METHODE AUSCULTATOIRE 189
gauche jusqu'à disparition de tout bruit dans le bout inférieur de cette artère; puis, aucours d'une décompression lente, il note sur la courbe de pression sanglante la succession dès différentes phases de tons artériels (phases exactement semblables, dans la fémorale du chien, à celle de l'humérale de l'homme). Or, dans trois expériences successives, il constate la coïncidence rigoureuse du moment, où au dernier ton clair succédait le premier ton sourd, avec le chiffre de pression diastolique obtenu par voie sanglante dans l'artère du côté opposé1.
Cette question de la situation exacte de l'index diastolique dans la mensuration de la tension par la méthode auscultatoire est de premiere importance ; car, suivant que l'on suit l'une ou l'autre de ces deux méthodes, on s'expose à des écarts que mesure exactement là durée, de la quatrième phase. Il se peut aussi que l'appréciation, parfois difficile, de la transition entre cette troisième et cette quatrième phase devienne le germe d'interprétations défectueuses. Que représente donc exactement cette quatrième phase ?
D'après l'opinion la plus plausible, celle soutenue notamment par MACWILLIAM et MELVIN, cette phase ultime de bruits assourdis correspondrait aux variations du calibre artériel entre la position zéro et la position diastolique. A ce moment, le segment artériel, bien que restant circulaire, se trouve légèrement réduit de diamètre et, sous l'influence de l'ondée systolique, sa dilatation est plus vive. Elle se superposerait assez exactement, selon nous, à cette portion de la courbe oscillatoire que nous avons appris à connaître sous le nom de « segment des oscillations infra-minimales supérieures » et
1 TIXIER a signalé, chez quelques sujets, sous l'influence de compressions un peu prolongées, une certaine tendance de l'index diastolique auscultatoire à s'élever, ce qui pourrait faire croire inexactement à une ascension de la tension minima au cours de la mensuration. Il est probable que de telles modifications sont attribuables à des variations dans le tonus de la paroi artérielle, qui la rendent moins propre à vibrer; Lorsqu'on aura affaire à des cas de ce genre, où l'index diastolique auscultatoire semble ascensionner en même temps qu'il perd de sa netteté, TIXIER conseille de laisser le bras un instant décomprimé afin de permettre à l'artère de récupérer sa fraîcheur de réaction primitive, et de pratiquer ultérieurement des mensurations assez rapides afin d'éviter la reproduction du même phénomène. On pourra se trouver bien également, surtout si les tons artériels sont un peu estompés, de fixer la plaque phonendoscopique au bras par un ou deux tours de bande de gaze ou de crêpe Velpeau.
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qui ne se sépare de la partie la plus inférieure de la courbe que par la grandeur anormale des valeurs de dilatation.
Quelle est là durée de cette quatrième phases — OLIVER la tenait pour négligeable, Chez des sujets normaux, GOODMAN et HOWELIL l'estiment en moyenne à 6 millimètres Hg, WARFIELD autour de 4 à 10 millimètre Hg et ne dépassant souvent pas 2 à 4 millimètres , comme limite maxima, WEYSSE et LUTZ lui assignent 25 millimèters Hg. — D'une étude reprise, en 1914, par MACWILLIAM et ses élèves MELVIN et MORRAY, il résulte que l'âge des sujets joue un rôle important dans la prolongation plus marquée de cette phase.: Chez les enfants, dans la grande majorité des cas, sa durée serait seulement de quelques millimètres Hg, si bien que le point d'abolition des bruits siégerait presque au même niveau que la démarcation considérée comme index diastolique légitime. Chez les jeûnes sujets ou les adultes normaux, on peut assister de même à la disparition rapide et immédiate de tout bruit. Mais, très souvent, surtout si l'examen se fait dans une chambre tout à fait silencieuse, la quatrième phase revêt une durée très appréciable qui oscille parfois entre 30 et 50 millimètres Hg. Sur 59 sujets examinés, ces auteurs rapportent 14 cas dans lesquels cette quatrième phase oscillait entre 28 et 55 millimètres Hg, avec une moyenne de 38 millimètres ! On voit donc à quelles erreurs pourrait conduire la situa* tion de l'index diastolique à la, partie inférieure de cette phase. Cette prolongation de la quatrième phase se rencontrerait moins souvent chez les individus plus âgés. Des observations analogues ont été faites par TIXIER, observant dans des conditions moyennes de silence ambiant : « Il nous a semblé, écrit-il, que, chez les sujets normaux, cette quatrième phase était très nettement en rapport avec l'âge du sujet examiné; sa durée paraît être en moyenne de 2 centimètres Hg chez l'homme de vingt à trente ans, de 1 centimètre chez l'homme de trente à quarante ans, de 5 millimètres enfin, avec une tendance à devenir nulle; au dessus de cet âge » — Dans les cas pathologiques, surtout chez les sujets âgés et dans le cas d'hypertension, cette quatrième phase aurait pour le même auteur tendance à s'effacer. Il faut faire exception toutefois pour certains cas d'insuffisance aortique où, de l'avis unanime, la prolongation, de cette phase peut être extrême et parvenir jusqu'au niveau le plus inférieur de l'échelle de pression. On sait du reste que la perception
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de tons artériels, sans aucune compression sus-jacente, au niveau de différents vaisseaux, a été donnée comme un des signes périphériques de ce vice valvulaire 1. — Pareille occurrence, en dehors de toute insuffisance aortique, peut encore se rencontrer dans certains cas anormaux et doit sans doute être mise sur le compte d'une exagération insolite de la pulsatilité artérielle. TIXIÈR signale l'exagération de cette quatrième phase chez des sujets jeunes, à coeur éréthique et à parois artérielles très élastiques. MACWILLIAM et MELVIN ont pu observer un jeune homme, sans aucune lésion aortique, chez lequel les bruits persistaient même après décompression totale.
Si l'on tente la comparaison des chiffres de pression diastolique auscultatoire et oscillatoire, en utilisant dans les deux cas les index diastoliques légitimes, on est frappé de la concordance générale de ces deux valeurs. Cette concordance serait la règle pour LANG et MANSWETOWA, SCHRUMPF et ZABEL, et atteindrait encore 82 pour 100 dans la statistique de FISCHER, 52 pour 100 dans celle de FREIMANN. Pour certains cependant, la pression diastolique auscultatoire aurait une tendance presque constante à être un peu plus basse que l'oscillatoire. Cette étude comparative de la situation respective des index diastoliques, auscultatoire et oscillatoire, à été reprise avec soin par MELVIN et MURRAY qui utilisèrent les courbes recueillies à l'aide de l'appareil d'ERLANGER. — Chez cinquante neuf sujets adultes et sains, de vingt à trente ans, ces auteurs notent une pression diastolique oscillatoire moyenne de 68 millimètres Hg, contre un chiffre moyen de pression diastolique auscultatoire de 65 mm. 7, différence très minime comme on le voit 2. Si l'on superpose
1 MURRAY a montré que, dans l'insuffisance aortique, là durée dé la quatrième phase était susceptible de varier suivant l'artère considérée. Dans quelques cas, on perçoit les tons artériels, sans pression du brassard, sur toutes les artères (humérale, radiale, tibiale postérieure, dorsale du pied, poplitée). D'autres fois, la prolongation de la quatrième phase est variable, suivant les troncs artériels considérés ; la loi générale est alors que la durée de cette phase est plus longue aux membres supérieurs qu'aux membres intérieurs, plus marquée également dans le segment proximal que dans le segment distal de chaque membre. En résumé, la prolongation de cette phase s'atténue au fur et à mesure qu'on s'éloigne du coeur
3 La pression diastolique auscultatoire, chez ces cinquante-neuf sujets normaux, variait entre 50 et 82 millimètres Hg : dans, 50 pour 100 des cas, la pression était de 60 à 70 millimètres; dans 20 pour 100, de 50 à 60; dans
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l'index auscultatoire, dans ces cas étudiés par MELVIN et MURRAY, aux courbes graphiques oscillatoires, il est loisible de faire plusieurs constatations. Tout d'abord, comme on pouvait s'y attendre, cet index auscultatoire ne correspond jamais aux oscillations maximales, mais ordinairement à une diminution brusque de la courbe oscillatoire faisant suite aux oscillations maximales ou aux « presque maximales ». Plus rarement, il tombe entré ces deux points; plus exceptionnellement encore, l'index auscultatoire ne correspond à aucun point particulier du tracé ou coïncide parfois avec une diminution marquée des oscillations (la plus subite et la plus nette s'inscrivant sur le tracé), mais survenant à une phase inférieure' aux deux repères précédemment signalés. Il est à remarquer que l'index diastolique auscultatoire peut coïncider avec la première diminution des maximales, même lorsque le groupe des oscillations presque maximales est présent. — Chez des sujets atteints d'affections diverses, ces auteurs sont loin de noter un pareil accord entre les deux méthodes. Chez cinquante et un malades examinés, on notait en effet de fréquentes et sérieuses discordances entre les indications fournies par la méthode oscillatoire et la méthode auscultatoire. Alors que la tension diastolique oscillatoire moyenne s'élevait à 99 millimètres Hg, le taux moyen de la pression diastolique auscultatoire ne dépassait pas 84 millimètres 6; c'est donc un écart moyen de 15 millimètres Hg qui se substituait à celui de 3 millimètres, à peine, relevé chez les sujets normaux. Dans trente cas, sur ces cinquante et un, l'écart oscillait entre 10 et 40 millimètres Hg, avec une moyenne de près de 3 centimètres. Sur les courbes, l'index diastolique auscultatoire coïncidait alors tantôt avec la transition brusque qui suit les oscillations maximales, tantôt avec celle faisant suite aux « presque maximales », tantôt enfin avec un point situé plus bas dans le tracé. Ce point inférieur pouvait coïncider avec une diminution assez marquée dans l'amplitude des oscillations ou être quelconque, si bien qu'alors l'index ne
30 pour, 100 de 70 à 80. En considérant le détail de ces cas, on en trouvait 19 (soit 31 pour 100) dans lesquels l'écart des deux chiffres était supérieur à 10 millimètres Hg (l'index auscultatoire étant plus bas dans 14 d'entre eux, plus élevé dans les 5 autres).
D'après TIXIER, la pression diastolique auscultatoire normale oscillerait entre 65 et 80 millimètres Hg, avec une moyenne de 75 millimètres Hg.
MÉTHODE AUSCULTATOIRE 193
correspondait plus à aucun accident particulier du tracé (comme le montre la figure reproduite ci-dessous). Des différences entre les chiffres oscillatoire et auscultatoire (pouvant, atteindre jusqu'à 13 à 15 millimètres) se manifestaient même alors que la dénivellation brusque, du tracé se trouvait,; non après les maximales, mais après les « presque maximales » ; d'une façon générale, cependant, elles
étaient plus accusées dans le premier cas. Ajoutons enfin que MELVIS et MURRAY, dans les cas où il existait une discordance évidente entre les deux méthodes, attachent plus de foi à l'index auscultatoire à cause, disent-ils, « de la complexité et de la variabilité des phénomènes qui conditionnent l'amplitude des oscillations, comme de l'exactitude prouvée expérimentalement de la méthode auscultatoire ».
L. GALAVARDIN. 13
FIG 76. - Cas de discordance entre la méthode oscillatoire et la méthode auscultatoire dans la détermination de la pression diastolique. (D'après MELVIN et MURRAY, Quarterly Journ, of Med.. juillet 1914.) —-
Homme de soixante-deux ans. La pression diastolique oscillatoire peut être fixée d'après les auteurs entre 120 et 130 (125 millimètres Hg), alors que l'index diastolique auscultatoire tombé à 110 millimètres Hg, c'est-à-dire en un point qui ne correspond à aucun accident bien défini dans le tracé.
194 TECHMQUE SPHYGMOMANOMETRIQUE
Bien qu'il soit difficile de porter une appréciation définitive sur la valeur de la méthode auscultatoire dans la détermination de la pression diastolique, on ne peut mettre en doute qu'elle ne gagne constamment du terrain et ne soit en voie (de concert avec la méthode vibratoire que nous étudierons bientôt) de faire une concurrence redoutable à la méthode oscillatoire proprement dite « Grâce à sa simplicité, sa rapidité, son exactitude, écrit NORIS en 1916, cette méthode a supplanté toutes les autres en clinique » . et des appréciations aussi flatteuses sont portées par nombre de ses partisans. L'appareillage qu'elle demande est en effet fort simple, sa technique des plus commodes. Lorsqu'on la pratique dans les cas favorables (qui sont la grande majorité), on ne peut moins faire que d'être frappé de la saisissante netteté des tons de la troisième phase, dont la disparition, ou mieux la diminution brusque, est très facile à repérer Comme toutes les méthodes cependant, elle a ses défauts que n'ont pas cherché a dissimuler ses plus chauds partisans. " Il faut que le médecin sache, écrit TIXIER, que pour toutes les méthodes sphygmomanometriques, l'auscultatoire comme les autres, il y a des mensurations faciles (la majorité), des mensurations difficiles. et qu'il peut en être même d'impossibles » La cause d'erreur la plus commune tient à la difficulté que l'on a parfois à séparer avec précision la fin de la troisième phase du
commencement de la quatrième, dp même que, dans la méthode oscillatoire, il est souvent malaisé de faire le. départ entre,« la dernière grande oscillation » et le groupe des « grandes infraFIG.
infraFIG. — Superposition d'une courbe oscillatoire et d'une courbe auscultatoire dans un cas de pouls assez tendu et bondissant. — La courbe oscillatoire présente des oscillations infra-minimales supérieures assez élevées et la courbe auscultatoire montre une accentuation et une prolongation de la quatrième phase.
METHODE AUSCULTATOIRE 195
minimales supérieures » immédiatement sous-jacent. Comme à tous les auteurs, cette difficulté ou cette impossibilité de fixer l'index diastolique auscultatoire nous ont paru se présenter surtout dans deux circonstances : 1° dans les cas d'insuffisance aortique ou simplement chez les sujets à grande pulsatilité artérielle, par suite de la persistance longue, parfois indéfinie, de tons artériels que leur intensité permet malaisément de séparer de ceux de la troisième
phase; 2° inversement, chez les sujets a pulsatilité très réduite, dans le cas d'artères dures et petites, chez les malades présentant de là faiblesse cardiaque, des congestions veineuses périphériques accentuées et tendant vers ce type d'hypertension diastolique, avec réduction considérable de la pression du pouls, que nous apprendrons à connaître plus loin 1.
1 La proportion des cas difficiles ou impossibles varie suivant l'habitude que l'opérateur peut avoir de la méthode ou la rigueur du critère exigé. KILGORE (1915) semble s'être montre particulièrement difficile en notant, sur plus de 500 mensurations conduites chez une soixantaine de sujets, un total de près de 300 mensurations douteuses (exactement 296 sur 505) ! Dans la plupart des statistiques, c'est environ dans un dixiène des cas que les auteurs admettent les mensurations difficiles ou vraiment impossibles. C'est la proportion que nous relevons dans celle de WINTLRHALDER (mensuration impossible dans 41 cas sur 400), dans celle de TIXIER (mensuration impossible dans 4 pour 100, difficile dans 5 pour 100 des cas).
Dans la statistique de MELVIN et MURRAY, citée plus haut, on est étonné de voir le désaccord entre les chiffres de pression diastolique oscillatoire et auscultatoire, presque nul chez les individus normaux, s'accuser chez les sujets
FIG. 78. – Superposition d'une courbe oscillatoire et d'une courbe auscultatoire dans un cas de pouls tendu et très bondissant d'insuffisance aortique. - L'accentuation et la prolongation indéfinie de la quatrième
phase. l'absence de démarcation nette d'avec la troisième phase rendent impossible, tout comme dans la courbe oscillatoire, la détermination
détermination de la pression minima.
196 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
Disons, en terminant, que l'on a voulu demander davantage encore à la méthode auscultatoire; et divers auteurs se sont ingéniés à fixer la valeur séméiologique qu'il convenait d'attribuer aux variations des, différentes phases de l'échelle des bruits. Sans vouloir dissimuler les inconnues et les contradictions d'un tel sujet, nous devons signaler ces tentatives qui pourront servir de point de départ à des travaux ultérieurs. — L'allongement de. la deuxième phase traduirait, pour TORNAÏ, l'insuffisance cardiaque, si bien que de l'existence, de l'intensité, de l'absence des souffles, on pourrait conclure aux variations de l'action du coeur. Une opinion analogue a été défendue par GOODMAN et HOWELL; alors que, pour COOK. et TAUSSIG, c'est principalement chez les hypertendus, du fait de l'accroissement des résistances périphériques, que cette deuxième phase aurait de la tendance à disparaître. BARD a bien mis en valeur le rôle de ces résistances périphériques dans la production des souffles de cette deuxième phase. Ces souffles artériels sont dus au rétrécissement de l'artère comprimée, mais « c'est le degré de vacuité du segment périphérique de l'artère observée, au-dessous du rétrécissement, degré de vacuité conditionné lui-même par celui de l'écoulement dans les capillaires, c'est-à-dire en somme par l'état des résistances périphériques », qui en règle, à la fois, l'intensité et la durée; ils seraient donc capables de fournir des données intéressantes sur « les modalités de cette circulation périphérique 1 » — Du plus ou moins de netteté de la troisième phase, pn s'est efforcé de tirer des conclusions sur l'état du coeur ou des vaisseaux. Pour WARFIELD,
pathologiques, et la sous-estimation de la méthode auscultatoire atteindre : fréquemment chez eux des valeurs de 3 à 4 centimètres Hg-. Or, comme ces auteurs insistent sur ce fait que la quatrième phase, très nette et souvent allongée chez les adultes sains, se trouve ordinairement très diminuée ou même absente chez les sujets âgés ou malades, on peut se demander si ce ne serait pas parfois, à la méconnaissance ou à la différenciation tardive de cette quatrième phase que serait due cette sous-estimation. Lorsqu'il existe un écart marqué entre les chiffres fournis par ces deux méthodes, comme dans le tracé de ces auteurs reproduit plus haut (fig, 76), la certitude de la supériorité du chiffre auscultatoire ne saurait s'imposer sans discussion.
1 BARD a également insisté sur le secours que l'on peut demander à la méthode auscultatoire dans le diagnostic des cas légers d'alternance du pouls, les tons artériels clangoreux arrivant à se produire, à une phase inférieure de. décompression, une fois sur deux pulsations.
MÉTHODE AUSCULTATOIRE 197
une troisième phase longue et nette indiquerait un coeur fort, alors que le raccourcissement de cette phase ferait, au contraire, présager un coeur faible ; cet auteur reconnaît cependant qu'un coeur faible, si les artères sont sclérosées, donne les mêmes signés d'auscultation artérielle qu'un coeur fort ! GOODMANN et HOWELL établissent aussi un certain rapport entre l'allongement et l'intensité de cette troisième phase et le degré d'hypertrophie du coeur.Pour JANOWSKI, c'est surtout le degré du tonus artériel qui influerait sur la durée de la troisième phase ; le raccourcissement de cette phase reconnaissant comme cause une exagération du tonus artériel, son prolongement une diminution de ce même tonus. De cette façon, la comparaison des chiffres oscillatoire et auscultatoire serait capable de donner quelques indications sur le degré de ce tonus, qui serait augmenté si le chiffre auscultatoire est au-dessus du chiffre oscillatoire, diminué si ce chiffre auscultatoire est plus bas que l'oscillatoire. TIXIER a signalé ce fait intéressant qu'au cours de mensurations, un peu prolongées, chez certains sujets, la troisième phase avait de là tendance à s'estomper, à se raccourcir, donnant ainsi l'impression d'une ascension de la pression diastolique au cours de la mensuration. Il est bien probable qu'il s'agit là de modifications du tonus occasionnées par la compression. L'avenir dira quelle signification il convient d'attacher à de telles modifications de la tonicité artérielle. — Les conditions de prolongation de la quatrième phase ont été étudiées spécialement par TIXIER, qui invoque très justement parmi ses principaux facteurs l'augmentation de l'élasticité artérielle, la vacuité relative du système artériel ou une vaso-dilatation périphérique anormale. Cette phase tend à s'atténuer ou à disparaître complètement dans la sclérose artérielle, Les états pléthoriques artérioveineux ; à se prolonger au contraire d'une façon insolite chez les sujets jeunes, à coeur éréthique et à parois artérielles élastiques, dans les insuffisances aortiques, chez les convalescents de pyrexies, dans le décours des hémorrhagies, etc. 1.
1 On peut rencontrer, dans des cas tout à fait exceptionnels, des anomalies singulières de la courbe auscultatoire :
1° Cette courbe auscultatoire peut apparaître très nettement comme creusée dans sa partie moyenne; le creux pouvant être assez profond et, son talus inférieur assez amorti pour ne laisser apparent, à une observation un peu rapide, que le rebord supérieur qui conserve sa pente abrupte ordinaire, Nous
198 TECHNIQUE PHYGMOMANOMETRIQUE
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avons décrit cette anomalie: avec TIXIER, dans un cas de rétrécissement aortique très serré, avec coexistence d'insuffisance aortique, pulsus tardus et anacrotisme. Il existé alors; entre la courbe oscillatoire et la courbe ausculiatoire, une dissociation singulière que nous étudierons plus loin, en détail à propos du rétrécissement aortique, en essayant d'éclairer sa signification..
2° Dans d'autres cas, cette courbe auscultatoire est véritablement trouée en son centré. Il existe alors, comme le dit TIXIER qui à décrit cette altération, « Une zone dé silence, durant 2 à 3 centimètres Hg, siégeant en plein milieu de. la zone mensurante, précédée et suivie d'une zone de tons artériels nets » (Paris médical, 29 juin 1918, p. 502). Une telle anomalie est, comme la précédente; d'une extrême rareté; TIXIER ne l'a rencontrée que deux fois sur plusieurs milliers de mensurations (voir les observations résumées in GALLAVARDIN et TIXIER, Archives des maladies du coeur, 1919).
3° De tels faits se rapprochent par transitions insensibles de ces autres, exceptionnels aussi, dans lesquels toute mensuration de la pression diastolique par la méthode auscultatoire est impossible. Il n'y a plus seulement un creux ou un trou dans l'étendue de la courbe auscultatoire ; on assiste à l'effacement complet de toute la série des bruits ordinairement perçus à l'auscultation de l'humérale, et cela, comme l'a remarque TIXIER ; sans que les oscillations perdent souvent de leurs amplitude ordinaire.
Nous pouvons dire par anticipation que toutes ces anomalies dans les courbes auscultatoires s'inscrivent parallèlement sur les courbes vibratoires ; la méthode vibratoire, que nous étudierons dans les pages suivantes, tra-
METHODE AUSCULATOIRE 199
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duisant au doigt les mêmes phénomènes que la méthode auscultatoire révèle à l'oreille Si nous les avons signalées a propos de la méthode auscultatoire c'est qu'elles sont en général plus nettement perceptibles à l'aide dé ce dernier procédé
De tels faits sont capables d'eclairer la valeur respective des méthodes oscillatoire et vibro-auscultatoire dans la determination de la tension diastolique. En réalité, l'élément qui occasionne la vibrance artérielle, auditive ou tactile, repère des méthodes auscultatoire et vibiatoire, semble avoir un seuil, de production qui se trouve détermine peut être plus par la soudaineté de l'augmentation de la* pression intra arténelle que par la simpie amplitude de ses variations Au-dessous d'une ceitame vitesse dans là crue tensionnelle systolique, la paroi arténelle ne vibre pas Sans doute, aussi, certaines modifications du tonus artenel (telles que celles signalées par TIXIER sous l'influence de compressions prolongées) peuvent-elles modifier' les qualités de vibrance pariétale du vaisseau
Bien que de telles modifications des courbes auscultatoire ou vibratoire soient tout à fait exceptionnelles et incapables de porter atteinte a la valeur pratique générale de ces méthodes, il importe de les connaître afin d'éviter les interprétations inexactes dans les cas ou ces courbes sont comme creusées ou trouées (en adoptant alors, comme index diastolique, le repère inférieur des tons artériels vibrants), ou en leur substituant la méthode oscillatoire dans les cas ou ces courbes complètement effacées indiquent que le décollapsus artériel n'est plus ni vibiant, ni sonore.
200 TECHNIQUE TECHNIQUE SPHYGMOMANOMETRIQUE
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ARTICLE III MÉTHODE VIBRATOIRE
Le moyen d'exploration se modifie, mais la méthode fondamentale ne change pas. C'est toujours le premier décollapsus artériel dont il s'agit de préciser le moment d'apparition. Au lieu d'interroger par la vue la première grande oscillation du manomètre, de surprendre par l'ouïe les premiers tons artériels caractéristiques, c'est par le tact qu'il va s'agir de déceler, au niveau du segment huméral sous-jacent à la manchette, le phénomène indicateur de ce premier décollapsus.
La constatation de certaines modifications des battements artériels se produisant au-dessous de la compression remonte à plusieurs années. Dès ses premiers travaux, STRASBURGER (bien que donnant, comme nous l'avons vu plus haut, un procédé tout différent pour l'appréciation de la tension diastolique) avait remarqué que si l'on palpe attentivement un pouls radial un peu bondissant, en même temps que l'on insuffle lentement de l'air dans la manchette brachiale, il arrive un moment où les pulsations, avant de diminuer d'amplitue, deviennent plus fortes, plus vibrantes. Le phénomène,
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comme le fait remarquer cet auteur, se perçoit particulièrement bien chez des malades atteints d' insuffisance aortique ou de néphrite chronique ; mais; avec un peu d'attention, on peut le constater aussi dans de nombreux autres cas Apres lui, bien d'autres auteurs firent la même constatation, mais sans attacher grande importance a cette modification du pouls. C'est EHRET qui, en 1909 et dans de nombreuses publications ultérieures, attira de nouveau l'attention sur ce phénomène et proposa le premier de le faire servir à la détermination de la tension diastolique. Dès 1910, dans la première édition de cet ouvrage, nous insistions longuement sur l'importance de cette méthode et la netteté de ses résultats ; depuis, nous avons eu l'occasion d'y revenir à plusieurs reprises et, comme nous, LIAN, FINCK ont montré tout le parti que l'on pouvait en tirer dans là' pratique courante.
1° Vibrance humérale. — La modification des battements artériels, déjà évidente si l'on palpe un pouls radial un peu bondissant, devient infiniment plus nette si, comme le conseille EHRET, on fait porter l'exploration directement sur l'humérale. L'origine de cette modification se trovant dans les alternatives de collapsus et de décollapsus du segment artériel huméral, on a tout intérêt à se rapprocher le plus possible du bord inférieur de la manchette.
Supposons le brassard appliqué sur le bras gauche du malade. De sa main gauche, l'observateur saisit la poire de Richardson de façon à pouvoir, par une pression douce et progressive, faire monter et descendre lentement la tension à l'intérieur de la manchette ; les doigts de la main droite, legèrement recourbés et entdurant la partie antérieure du bras, vont à la recherche de l'humérale sur la partie antéro-interne du membre, immédiatement au-dessous du brassard. Cette artère repérée, on s'efforce avec deux du trois doigts de là fixer et de la comprimer directement contre l'humérus, afin de percevoir les battements artériels dans les meilleures conditions possibles, c'est-à-dire sur une certaine étendue et avec le maximum d'amplitude. Supposons qu'il s'agisse d'un sujet un peu hypertendu, avec tin pouls suffisamment ample et vibrant. Au fur et à mesure que là pression s'élève dans la manchette et tant que cette pression reste inférieure à la tension diastolique, les doigts qui palpent
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l'humérale perçoivent des battements artériels normaux, d'intensité très légèrement croissante. Puis, brusquement, d'une pulsation à l'autre, le caractère de ces battements se modifie. A un soulèvement normal fait suite une pulsation brutale, vibrante, qui percute les doigts explorateurs à la manière d'une chiquenaude vive et brusque. C'est là le phénomène signalé par EHRET. en 1909, et auquel on peut donner le nom de vibrance humérale Dans les cas typiques, sa
netteté est telle que ceux auxquels on le montre pour la première fois en sont émerveilles, et il suffit d'avoir perçu le phénomène une seule fois pour ne plus le meconnaître. Cette modification du pouls ne porte pas sur une seule pulsation mais bien sur un groupe de pulsations à vibrance d'abord croissante, puis décroissante, dont le nombre varie avec l'élévation de la tension sanguine et surtout avec la hauteur de la pression du pouls Plus cette tension du pouls est élevée, plus le nombre de pulsations cinglantes et bondissantes a de la tendance a augmenter, si l'on admet bien entendu une même vitesse d'ascension de la pression dans la manchette et une mente rapidité du pouls Chez les hypotendus, les bacillaires, dont la pression du coeur n'excède souvent pas 20 à 30 millimètres Hg, on peut n'avoir qu une ou deux pulsations vibrantes, alors qu'il en existe parfois 6, 7 8 ou même davantage chez les brightiques
FIG 79 — Mesure de la tension diastolique par la méthode vibratoire
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avec pression du pouls de 80 à 100 milliniètres Hg. En faisant baisser la pression dans la manchette, on assiste à la succcession inverse des mêmes phénomènes. Les pulsations d'abord nulles, puis minuscules, augmentent progressivement d'amplitude et prennent rapidement le caractère de vibrance signalé plus haut. Après avoir persisté un certain temps, cette vibrance va en s'atténuant légèrement pour cesser brusquement lors du retour, des battements normaux. Il est à remarquer que la cessation des pulsations vibrantes se fait en général à un niveau un peu inférieur (de 3 à 5 millimètres Hg) à celui qui marquait leur établissement.
Pratiquement, on peut procéder, pour la détermination de la pression diastolique par la méthode vibratoire, soit en faisant monter la pression dans lé brassard, soit en la faisant descendre. La manoeuvre adoptée est indifférente et le plus souvent affaire d'habitude. Cependant, dans les cas difficiles, on se trouvera bien de procéder de la façon suivante, afin de localiser plus aisément l'index vibratoire. Les doigts explorateurs étant en place, on se rend compte par une mensuration un peu rapide de la situation du groupe des pulsations vibrantes, qui se trouve placé dans la moitié ou le tiers inférieur de l'échelle de pression qui sépare les niveaux maxima et minima de la tension sanguine. La main, qui avait' comprimé la poire d'insufflation pour maintenir la pression en
FIG. 80. — Superposition d'une courbe oscillatoire et d'une courbé vibratoire. — La courbe inférieure, qui figure-la série de sensations éprouvées par le doigt à la palpation de l'humérale au-dessous de la manchette, montre que le groupe des pulsations vibrantes se. superpose au groupe des plus grandes oscillations. L'index diastolique vibratoire doit être situé au point précis où, lors d'une pression décroissante dans la manchette, la dernière vibrance humérale fait place à une pulsation normale. Cet index correspond, sur la courbe oscillatoire, à ta démarcation brusque qui sépare la zone des grandes et des petites oscillations.
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205
pleine zone vibrante, se relâche peu à peu et très progressivement, afin de déterminer d'une façon aussi précise que possible l'instant où une pulsation normale ou simplement encore un peu appuyée succède à une pulsation nettement vibrante ; démarcation facile à établir dans les cas ordinaires, plus délicate à fixer et demandant souvent plusieurs essais dans des cas que nous étudierons plus loin.
La dernière pulsation vibrante prouve que l'on se trouve toujours au-dessus de la pression diastolique, puisqu'un décollapsus artériel
s'est encore produit ; la pulsation normale qui la suit montre que l'on s'est abaissé un peu au-dessous de cette valeur, puisque l'affaissement artériel n'a plus lieu. La tension diastolique véritable est entre ces deux niveaux. Pratiquement, on peut superposer l'index vibratoire à la dernière pulsation vibrante ou mieux à la première pulsation normale qui fait suite à la dernière pulsation vibrante lors de la décompression lente et progressive de la manchette.
FIG. 81. — Tracé recueilli à l'aide du sphygmolonographe de JAQUET. - La ligne supérieure, obliquement ascendante, enregistre la pression de la manchette. Sur le tracé du pouls radial, on peut voir que les pulsations comprises sous l'accolade forment un groupe spécial caractérisé par une amplitude plus grande et un sommet un peu modifié (sommet plus aigu et abaissement du ressaut systolique). Ce groupe, qui se trouve compris entre les pulsations normales et les pulsations à amplitude diminuée et à ligne diastolique horizontale, correspond aux pulsations vibrantes perçues à la palpation de l'humérale.
206 - TECHNIQUE SPHYGMOMANOMETRIQUE
Cette vibrance artérielle est un phépomène d'une telle netteté qu'on peut l'enregistrer graphiquement Déjà, en 1910, j'avais montre qu il était possible de le mettre en évidence sur un tracé sphygmographique radial, recueilli pendant la compression de la manchette. Depuis, HRET est également parvenu à enregistrer ces battements artériels bondissants à l'aide d'un sphygmographe
de MAREY placé sur l'humérale ou d'une manchette antibrachiale mise en relation avec un tonographe de RECKLINGHAUSEN.
2° Mécanisme de production - Quelle est la cause de cette vibrance humérale presque paradoxale ? Pourquoi, lors d'une compression graduelle, les battements, d'une artère, au lieu de diminuer progressivement et régulièrement d'amplitude, deviennent-ils passagèrement plus amples et plus bondissants ?
Que le phénomène soit en rapport étroit avec les alternatives de collapsus et de décollapsus artériels, cela ne peut faire aucun doute, étant donné la spperposition presque exacte du groupe des pulFIG.
pulFIG. — Tracé recueilli, comme le précédent, à l'aide du sphygmotonographe de JAQUET. — Les modifications d'amplitude et de forme des pulsations correspondant à la vibrance spéciale du pouls et précédant la diminution véritable des pulsations sont encore plus nettes. Ces modifications précèdent même le relèvement de la ligne diastolique qui ne se manifeste que sur les trois dernières des cinq pulsations comprises sous l'accolade.
MÉTHODE VBRATOIRE 207
sations vibrantes à la zone des grandes oscillations. Un certain flottement persiste cependant dans son interprétation exacte. — Il est peu probable qu'il faille invoquer pour l'expliquer un débit sanguin momentanément plus abondant; bien qu'on puisse se demander si un affaissement très momentané de la paroi artérielle ne pourrait pas déterminer (dans le segment artériel sus-jacent et par un phénomène analogue au coup de bélier) un excès de pression qui, ne coïncidant pas encore avec une diminution très sensible du débit, donnerait à la pulsation suivante une force et une amplitude inusitées. — Suivant toute vraisemblance, et c'est aussi l'avis d'EHRET, cette vibrance doit être attribuée au relâchement plus grand de la paroi artérielle qui suit chaque collapsus. Les premiers collapsus, en effet, ne sont sans doute ni assez prolongés, ni assez accusés, pour diminuer sensiblement la quantité de sang qui pénètre dans l'humérale lors de l'ondée systolique suivante. Ils le sont cependant assez pour permettre au segment humeral situé au-dessous du brassard de se vider et de se détendre plus qu'à l'ordinaire. La pression s'abaisse à l'intérieur de ce segment à un taux insolite, puisque, pendant un court instant, il continue à se vider de sang sans en recevoir. C'est ce qui explique que la prochaine ondée systolique (dont le volume, rappelons-le, est à peine diminué), arrivant dans une artère humérale ainsi détendue, donnera l'impression d'un pouls cinglant et bondissant ; tout comme dans l'insuffisance aortique où sa pathogénie est en somme la même, à cela près que la fuite sanguine s'effectue vers le centre au lieu de se produire à la périphérie.
Cette explication de la vibrance humérale étant liée à l' évolution de la tension artérielle au-dessous de la compression, c'est ici que nous devons relater les intéressantes constatations expérimentales de MACWILLIAM et MELVIN, touchant les modifications de cette pression en aval du point comprimé. Dans leur dispositif, comme on se le rappelle, les pressions maxima et minima étaient notées au-dessus et au-dessous du segment artériel enfermé dans le manchon liquidien. Ces auteurs établissent tout d'abord que, jusqu'à un certain degré d'élévation de la pression extérieure, la tension varie très peu en amont et en aval. Dans la figure 9 de leur travail, on; relève les chiffres suivants :
208 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
Pression Pression Pression
développée autour de l'artère intra-artérielle en amont intra-artérielle en aval
40 millimètres Hg 110/84 104/80
60 millimètres Hg 112/86, 104/78
80 millimètres Hg 118/90 108/80
A une certaine phase de là compression, on peut voir dans quelques expériences se produire d'assez notables modifications. Les deux tensions s'abaissent en aval, mais la tension diastolique montre une chute plus précoce et plus accusée que la pression systolique. Exemple, dans la figure 8 :
Pression Pression Pression
développée autour de l'artère intra-artérielle en amont intra-artérielle en aval
30 millimètres Hg 80/30 66/ 29
35 millimètres Hg 80/30 62/20
40 millimètres Hg 80/32 60/14
45 millimètres Hg 85/35 60/6
Comme on le voit, tandis que dans le segment central les pressions systolique et diastolique ont une légère tendance à s'élever, elles s'abaissent dans le segment périphérique ; la prédominance de la chute sur la pression diastolique étant bien en faveur de lexplication fournie plus haut de la vibrance artérielle. Il faut dire, pour être exact, qu'il n'en est pas toujours ainsi et l'on peut voir les deux pressions s'abaisser assez brusquement dans le segment périphérique sans qu'à aucun moment l'écart entre les deux chiffres extrêmes soit augmenté. Exemple, dans la figure 13 :
Pression Pression Pression
développée autour de l'artère intra-artérielle en amont Intra-artérielle en aval
60 millimètres Hg 114/62 102/60
70 millimètres Hg 112/61 100/60
80 millimètres Hg 126/58 . 20/16
Le moment où s'effectuent ces modifications de la pression en aval n'est pas moins variable. Apparaissant parfois dans une phase correspondant assez exactement à la pression diastolique (chiffres de la figure 8), elles ne se manifestent bien souvent que lorsque la pression externe est suffisamment élevée pour produire les oscilla-
MÉTHODE VIBRATOIRE 209
tions maximales ou même pour dépasser cette phase, c'est-à-dire lorsqu'elle est notablement plus élevée que la tension diastolique. Ajoutons que cette variation se produit souvent à un niveau différent, suivant qu'on élève ou qu'on abaisse la tension.
Ce qu'on peut dire, en résumé, de ces constatations de MACWILLIAM MELVIN, c'est qu'elles n'apportent pas la confirmation constante et éclatante de l'explication donnée plus haut de la vibrance humérale. Sans doute, cela tient-il au dispositif employé par ces auteurs qui n'avaient nullement en vue dans leurs expériences la solution de ce problème. Le cylindre artériel est en effet comprimé régulièrement sur toute son étendue et non d'abord au centre, comme cela se produit chez l'homme. De plus, au niveau du segment périphérique, le tube de verre situé à la sortie n'aide pas à la chute diastolique de la tension artérielle comme doit le faire le retrait de la paroi élastique d'une artère primitivement distendue par la systole. Enfin, il y aurait sans doute quelque imprudence à assimiler pleinement la pulsation artificielle produite par ces auteurs avec l'ondée sanguine physiologique.
3° Pression diastolique vibratoire; comparaison avec les méthodes oscillatoire et auscultatoire. — En opérant comme nous l'avons dit plus haut, en suivant de l'oeil l'aiguille du mano-oscillomètre ou de l'oscillomètre pendant que les doigts appliqués sur l'humérale sont à l'affût des moindres modifications des battements, il est facile de superposer mentalement, à la courbe oscillatoire, la courbe vibratoire, c'est-à-dire la série de sensations perçues par le doigt à la palpation de l'humérale. La première conclusion qui s'impose est que le groupe des pulsations vibrantes se trouve correspondre au début de la phase des grandes oscillations et se superpose assez exactement à ce groupe des oscillations « maximales » ou « presque maximales » étudié plus haut. La seconde est que, dans la grande majorité des cas, on constate une coïncidence remarquable de la première pulsation vibrante et de la première grande oscillation. Dans la première édition de cet ouvrage, en 1910, nous estimions la fréquence d'une coïncidence aussi parfaite à près de 70 pour 100 des cas, Nous faisions aussi remarquer que cette exacte superposition s'observait de préférence dans des pouls un peu tendus,'moyennement bondissants, et que, en opérant
L. GALLAVARDIN. 14
210 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÊTRIQUE
en faisant baisser la tension dans la manchette, le chiffre de presion diastolique vibratoire se lisait souvent à un niveau un peu inférieur (2 à 4 millimètres Hg) à celui du chiffre oscillatoire. Des constatations analogues furent faites par d'autres auteurs ; et EHRET, dans une étude plus approfondie publiée Sur ce sujet en, 1911, va même jusqu'à dire que la méthode oscillatoire et la méthode vibratoire « donnent dans tous les cas exactement les mêmes chiffres 1. » La même concordance générale existe entre les résultats fournis par la méthode auscultatoire et la méthode vibratoire, comme cela ressort de multiples statistiques 2. TIXIER, après avoir comparé ces deux méthodes et constaté que les chiffres fournis par elles sont le plus souvent superposables, donne cependant la préférence à la première d'entre elles. La méthode auscultatoire serait, à la fois, d'un emploi plus facile et plus constante dans ses résultats que la méthode vibratoire, par suite de « l'acuité plus grande et plus éduquéë de l'ouïe, chez le médecin, comparée à celle du tact ». L'écart entre ces deux méthodes, même pour cet auteur, ne serait cependant pas considérable puisque, sur un très grand nombre d'essais, il arrive
1 La concordance complète ou presque complète de la première pulsation vibrante et de la première grande oscillation avait été notée fréquemment par ZABEL, en 1909; et PRHIMANN, en 1911, estimait sa fréquence à 60 pour 100 des cas. Comme ces deux auteurs, EIIRET avait bien noté qu'il existait dans certains faits une discordance assez marquée entre les résultats fournis par lés deux méthodes, la méthode vibratoire (surtout lorsque les oscillations croissaient très progressivement, au point de rendre assez difficile la lecture dé la première grande oscillation) donnant alors des chiffres notablement supérieurs à ceux fournis par la méthode oscillatoire. Mais, pour lui, cette discordance n'est qu'apparente et tient, comme il a pu s'en convaincre eu examinant avec RECKLINGHAUSEN les cas litigieux, à ce que, dans ces courbes, on a de la tendance à placer trop haut l'index oscillatoire.
2 La concordance serait parfaite pour EHRET, entre la méthode auscultatoire et la.méthode vibratoire. Une pareille concordance n'est cependant notée que dans 5o pour 100 des cas par FREIMANN, cet auteur trouvant comme ZABEL que dans les faits discordants la méthode auscultatoire donne en général des chiffres un peu inférieurs à ceux fournis par la méthode vibratoire. La surestimation de cette dernière méthode tiendrait, pour ces auteurs, a ce que là vibrance humérale indiquerait de préférence le début des oscillations maximales, alors que les méthodes oscillatoire et auscultatoire-marqueraient plus, exactement le début des « presque maximales ». Lorsque cette phase des oscillations « presque maximales » est nulle ou peu étendue, la concordance des trois méthodes serait parfaite; dans le cas contraire, on observerait une certaine surestimation de la méthode vibratoire sur les deux autres.
METHODE VIBRATOIRE
211
à la proportion suivante de cas à détermination difficile ou impossible, par ces deux procédés :
Cas difficiles Cas impossibles
Méthode auscultatoire 5 % 5 % 4 %
Méthode vibratoire 10 % 6 %
Dans les cas d'arythmie, il va sans dire que le taux de la pression diastolique peut différer d'une pulsation à l'autre ; il s'abaissera
s'abaissera autant plus que la pulsation précédente aura ete plus taible et la pause artérielle plus prolongée. Ces variations de la pression diastolique atteignent leur maximum dans l'arythmie complète; foute Mesuré de la pression minima ne saurait alors être qu'illuFIG.
qu'illuFIG. A Iternance des index diastoliques vibratoire et auscultatoire
dans le pouls alternant. — Le tracé sphygmographique supérieur,
recueilli sur l'humérale par l'intermédiaire d'une manchette brachiale,
- ffipiitre la chute diastolique plus profonde de la tension après les
pulsations faibles. En laissant tomber progressivement la pression
dans la' manchette, il arrive un moment où cette pression, comme le
montrela figure schématique située au-dessous du tracé, est intermédiare
intermédiare la tension diastolique des pulsations fortes et faibles du pouls
alternant. Le décollapsus artériel ne se produit alors que toutes les
deux pulsations et il se produit, au doigt, une alternance de pulsations
vibrantes et amorties, à l'oreille, une alternance de tons vibrants et
de tons sourds, que figure la succession de gros traits noirs et de petits
traits gris représentés au bas de la figure.
212 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMETRIQUE
soire, chaque pulsation ayant une tension diastolique différente 1. Dans le pouls alternant, la tension diastolique, comme le montre le tracé sphygmographique reproduit à la partie supérieure de la figure 83, s'abaisse davantage après la pulsation faible. Lorsque la pression de la manchette aura atteint un taux intermédiaire à celui de la pression diastolique des pulsations fortes et des pulsations faibles, le doigt ne percevra la pulsation humérale vibrante que lors d'une pulsation sur deux. Cette alternance de pulsations vibrantes et de pulsations amorties, de même qu'à l'auscultation la succession de tons artériels violents et de tons sourds, constituent ainsi un excellent moyen de diagnostic ou de vérification de l'alternance du pouls.
4° Difficultés et causes d'erreur. — Les lignes qui précèdent, à défaut de conclusion générale inattaquable, montrent du moins que la méthode vibratoire, comme toutes les autres méthodes, peut se trouver aux prises avec certaines difficultés de perception et conduire à quelques erreurs d'interprétation.
Parmi les circonstances susceptibles de rendre difficile la perception de la. «vibrance humérale », nous signalerons tout d'abord celles tenant à la situation de l'artère. Si le débutant éprouve toujours des difficultés à repérer exactement le cylindre huméral audessous de la manchette, soit qu'il égare ses recherches trop en dedans ou trop en dehors, il suffit d'un peu d'habitude pour explorer rapidement la partie antéro-interne du bras et porter d'emblée les doigts sur la zone pulsatile ; on peut vraiment dire qu'il n'y a pas d'humérale qui ne soit suffisamment accessible, pourvu que le sujet ne soit pas trop gras. Il peut en être autrement chez les sujets obèses, surtout chez les femmes aux bras opulents ; l'humérale profondément enfouie se refuse alors à toute exploration. Lorsque là vibrance est très nette, elle peut cependant être perçue d'une façon diffuse, mais tout aussi caractéristique, en appliquant simplement les doigts sur la région inférieure et antéro-interne du bras. Si, pour d'autres causes, la pulsatilité artérielle se trouve en même temps réduite, l'a méthode vibratoire est impuissante à fournir le chiffre de pression diastolique.
1 Voir le renvoi de la page 66.
MÉTHODE VIBRATOIRE 213
Le calibre artériel et la résistance des parois ont également de l'importance. La vibrance, particulièrement nette au niveau d'une humérale un peu ample, aux parois souples et élastiques, s'estompe et peut même s'éteindre complètement si l'on explore un vaisseau de calibre très réduit, dont les parois se trouvent par surcroît exagérément épaissies ou simplement très bypertoniques.
Mais c'est surtout l'état de la pression intrà-artérielle qui introduit les plus grandes causes d'erreur dans la perception de la vibrance. — Dans les cas de pouls très bondissants, que la pression soit élevée ou peu différente de la normale, on a quelquefois de la difficulté à localiser exactement l'index vibratoire. Il y a là, immédiatement au dessous de la zone, franchement vibrante, des pulsations encore très bondissantes, presque cinglantes, et la démarcation
peut devenir difficile à tracer entre ces deux groupes ; tout comme, dans la méthode oscillatoire, il peut être presque impossible de séparer la première grande oscillation des infra-minimales supérieures ; ou, dans la méthode auscultatoire, de préciser le moment où les tons artériels violents de la troisième phase font placé aux bruits encore éclatants d'une quatrième phase anormalement sonore. Ce qu'il faut alors s efforcer de percevoir, en opérant comme nous l'avons dit plus haut (c'est-à-dire en prenant la poire d'insufflation
FIG. 84 - Superposition d'une courbe oscillatoire et d'une courbe vibratoire dans un cas depouls très bondissant. — Il existe au-dessous de lA première pulsation franchement vibrante — et coïncidant avec le groupé des oscillations infra-minimalés supérieures — un groupe de pulsations à vibrance un peu atténuée. Dans des cas de ce genre,
l'index diastolique vibratoire doit être placé au point où se manifeste
unediminution brusque et nette de la vibrance humérale, plutôt
qu'au moment où les pulsations redeviennent franchement normales.
214 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
à pleine main et en faisant, à plusieurs reprises, monter rapidement la pression au dessus du niveau diastolique pour la laisser tomber lentement par la suite), c'est le moment où une atténuation soudaine,' bien que légère, de la vibrance artérielle, un caractère moins « piqué » des pulsations, démontrent que l'on est entré dans la phase inférieure et que le décollapsus artériel a cessé de se produire. La difficulté peut être au maximum dans certains cas d'insuffisance ■ aortique à pouls très bondissant. Par suite de l'hypotension minima qui est ia règle dans cette affection, et du relâchement diastoliqUe: de la paroi artérielle qui en est la conséquence, les pulsations deviennent très rapidement vibrantes lors de là compression de la manchette' (elles le sont parfois même avant toute compression) ; et l'augmentation de cette vibrance, caractéristique du premier Collapsus artériel, pourra être masquée complètement. Avec un peu
d'habitude, on arrive cependant à prendre la tension diastolique. par la méthode vibratoire dans la grande majorité dés câs.d'ihsuffr-. sance aortique ; mais il pourra arriver que l'on reste dans le douté, surtout dans les insuffisances aortiques avec artères dilatées et chuté diastolique profonde (fig. 85). —-Pour des raisons inversés, là
FIG. 85. — Possibilité de la transformation de la zone critique en zone douteuse, dans un cas de pouls particulièrement tendu et bondissant (hypertension artérielle avec grosse insuffisance aortique). — Pas plus dans les courbes vibratoire et auscultatoire que dans la courbe
oscillatoire, il n'est possible de placer avec certitude l'index diastolique. La vibrance humérale et les tons artériels vibrants persistent jusqu'à la partie inférieure de la courbe.
MÉTHODE VIBRATOIRE 315
vibrance peut être de perception tout aussi difficile chez les sujets &ç pulsatilité artérielle réduite, que"la pression soit faible ou simplement normale. Au lieu de revêtir un caractère vibratoire franc, les pulsations numérales apparaissent seulement un peu plus fortes et nn peu plus appuyées, dans le niveau correspondant- à la zone des grandes oscillations ; le début ou la fin de cette modification peuvent être difficiles à saisir et l'observateur a plutôt de la tendance à
plèlr ilû peu trop bâtit l'index diastolique. Cette atténuation dé la vibrance se rencontre au maximum dans certains cas d'hypertension diastolique ; l'engorgement du système àrtérieL la diminution.de l'écart entre les deux pressions réduisant considérablement la pulsatilité artérielle et, par conséquent, la vibrance qui n'en est qu'une modalité exagérée et provoquée. f
Dans une statistique publiée en 1911, EHRET prétend n'avoir pu fixer la tension diastolique par ce procédé que dans 5 cas sur 1.000 (dont un seul cas d'insuffisance aortique, sur 19 examines) ! Notre impression n'est pas aussi favorable et nous ne faisons aucune difficulté pour reconnaître qu'il existe vraiment des cas — dont le nombre va en se réduisant avec l'habitude — dans lesquels il est impossible de fixer la pression diastolique à l'aidé dé cette méthode. Il faut du reste voir, dans cette circonstance, moins la marque d'une infériorité de la méthode vibratoire, que la preuve dé là difficulté de la méthode oscillatoire.en général. Qu'on ne s'y trompe pas en effet, ces cas dans lesquels l'index vibratoire est insuffisamment net, sont bien souvent les mêmes: que ceux dans lesquels la méthode auscultatoire ou là méthode oscillatoire rie donnent que des résultats difficiles à interprétêt ou même franchement
FIG. 86. - Superposition d'une courbe oscillatoire et d'une courbe vibratoire dans un cas' de pouls faible et peu tendu. — Le groupe
des pulsations vibrantes est remplacé simplement par quelques put(
put( un peu plus appuyées et l'index diastolique doit être placé au
point où ces pulsations très légèrement vibrantes font place aux
pulsations normales.
216 TECHNIQUE-SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
douteux. Il serait aussi puéril de vouloir opposer d'une façon intransigeante ces méthodes les unes aux autres, qUE d'exalter l'une aux dépens des autres. Dans la pratique Courante, la méthode' vibratoire, qui ne demande pas d'autre instrumentation que celle de la mesure, de la tension systolique par là méthode de RivA-RoeCi, peut être considérée comme suffisante, et ceux qui voudront bien s'y appliquer ne tarderont sans doute pas à s'en déclarer satisfaitsC'est à cette conclusion qu'arrive également KILCORE (1918) qui, après une série de travaux comparatifs, sur les différentes méthodes d'examen de la pression sanguine, en arrive à donner la préférence à la méthode palpatoire, plu s simple et tout aussi exacte que les autres. Dans les cas difficiles, on aura toujours intérêt à pratiquer parallèlement la méthode auscultatoire, qui ne demande en plus qu'un petit phonendoscope de poche, afin de contrôler et d'étayer les résultats obtenus. Dans bien des cas, la lecture sera indubitablement plus facile par l'auscultation artérielle ; dans les cas douteux, la coïncidence des deux index sera un argument précieux pour justifier la notation adoptée. On pourra de même recourir à la méthode oscillatoire, si l'on* dispose de l'instrumentation suffisante, comme moyen d'information supplémentaire.
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NOTATION ET FIGURATION SPHYGMOMANOMETRIQUE 217
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LIAN, Comment mesurer la pression artérielle, (Paris médical, 20 décembre 1913).
MACWILLIAM et MELVIN, loc. cit., in Heart, 1914.
PEZZI, le Phénomène d'EHRET et les dimensions du brassard dans la mesure de la tension artérielle (Société de Biologie, 1er mai 1913).
TIXIER, Voir in Méthode auscultatoire.
ZABEL, Que nous apprend la comparaison des chiffres dé pression diastolique obtenus par les différentes méthodes (Berlin. klin. Woch., 19 juillet 1909)-
NOTATION ET FIGURATION SPHYGMOMANOMÉTRIQUES
La lecture des travaux sphygmomanométriques est trop souvent rendue difficile par le défaut de précision des auteurs, et il y aurait intérêt à unifier les règles, qui doivent présider à l'inscription des chiffres de tension.
1° Notation sphygmomanométrique. — Une bonne notation doit non seulement transcrire fidèlement les valeurs obtenues, mais encore préciser les conditions dans lesquelles la mensuration a été faite, afin de rendre comparables les observations recueillies par différents médecins. Certaines de ces conditions, comme la méthode employée, le soin que l'on aura mis à noter la tension résiduelle, la rapidité du rythme cardiaque, influent en effet notablement sur les chiffres obtenus.
La méthode employée devra toujours être indiquée 1. Celles de POTAIN, de GAERTNER, sont rarement utilisées à l'heure actuelle. Si l'on prendles tensions systolique et diastolique par la méthode oscillatoire, on pourra se contenter de mettre entre parenthèses l'épi1
l'épi1 chiffres de tension, cités par nous dans cet ouvrage ou figurés graphiquement, ont été recueillis à l'aide de la méthode palpo-vibraloire. Ce n'est que dans les cas où la mesure delà pression diastolique était trop difficile ou impossible par la méthode vibratoire que nous avons, eu recours à la méthode auscultatoire ou à la méthode oscillatoire.
218 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMETRIQUE
thète « oscillatoire ». Si la mensuration de la pression maxima est faite par la méthode de RIVA-ROCCI, comme nous le conseillons, on devra le dire et, en même temps, signaler le procédé qui aura servi à la détermination de la pression minima. Exemples ;
Tension (oscillatoire) :
les deux tensions sont prises par la méthode oscillatoire.
Tension (palpo-oscillatoire) :
la tension systolique est donnée par la méthode palpatoire de RIVA-ROCCI, la diastolique par la méthode oscillatoire.
Tension (palpo-vibratoire) :
la tension maxima est fournie par la méthode de RIVARocci, la minima parla méthode vibratoire.
Tension (auscultatoire) :
les deux tensions sont prises par la méthode auscultatoire.
Tension (palpo-ausouitatoire) ;
la tension systolique est prise par la méthode de RIVARocci, la diastolique par la méthode auscultatoire.
Tension (palpo et vibro-auscultatoire) :
la tension systolique est donnée par la méthode palpatoire (RIVA-ROCCI) ; pour déterminer la tension diastolique, on s'àide de la méthode vibratoire et de la méthode auscultatoire.
Si l'on emploie la méthode oscillatoire et qu'il s'agisse dé mensurations particulièrement rigoureuses, on pourra mentionner l'instrument dont on se sera servi (oscillomètre de PACHON, mahooscillomètre, appareil à inscription graphique, etc.).
A défaut d'indications contraires, il pourra être sous-entendu que la mensuration aura été faite au bras, à l'aide d'une manchette large (12 centimètres) et cette manchette étant placée à la hauteur du Coeur (le sujet étant assis ou Couché). Si l'on utilise la' méthode de RIVA-ROCCI, il sera convenu aussi que c'est le moment de la disparition du pouls et non celui de sa réapparition qui aura été noté ; de même, le chiffre de tension diastolique, relevé a l'aidé
NOTATION ET FIGURATION SPHYGMOIIANOMÉTRIQUES 219
de la méthode oscillatoire ou de ses équivalents, sera censé avoir été repéré à l'aide d'un index correct.
Les chiffres obtenus peuvent, être inscrits en centimètres ou en millimètres de Hg. Nous préférons la notation en millimètres Hg qui rend plus facile l'inscription des fractions de centimètres. On pourrait objecter à cette manière de faire que l'approximation en centimètres est pratiquement suffisante et qu'il est inutile de faire appel aux fractions de centimètre pour donner l'apparence d'une précision illusoire. Nous estimons, au contraire, que la marge d'erreur, entre les chiffres sphygmomanométriques et le taux réel de la pression intra-artérielle, est déjà assez grande pour ne pas y ajouter l'écart, facilement évitable, dû à une lecture défectueuse. En revanche, tenir compte, pour plus dé précision, de fractions inférieures au demi-centimètre paraît pratiquement inutile. Quant à la singulière notation en centimètres d'eau, imaginée et encore énergiquement défendue par RECKLINGHAUSEN, c'est une de ces idées d'outre-Rhin n'engendrant que confusion sous prétexte de clarté et dont le bon sens a depuis longtemps fait justice.
Pour distinguer les chiffres de tension systolique de ceux de tension diastolique, on peut les faire précéder des initiales S et D, ou mieux de Mx, Mn, qui sont les abréviations très employées' dé « tension maxima» et « tension minima». Exemple :
Tension (palpo-vibratoire) :
Mx, 120 millimètres Hg, Mil, 70 millimètres Hg,
Pratiquement, il est plus commode de grouper les deux chiffres sous forme d'expression fractionnelle, eu supprimant les abréviations inutiles (Mx, Mn, mm Hg). Exemple :
Tension (palpo-vibratoire) :
160/95.
Un point important en technique sphygmomanométrique, sur lequel nous avons longuement insisté plus haut, est d'attendre là baisse initiale de la pression systolique, qui se produit au bout de quelques minutes sous l'influence des compressions répétées ou du calme psychique, et de noter ce que nous avons appelé la tension systolique résiduelle. La notation suivante :
Tension (palpo-vibratoire) : 175-160/90,
suffira à indiquer, à la fois, que l'on à blen attendu la baisse
220 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMETRIQUE
initiale de la tension et le taux de cette baisse. Il est tellement indispensable de tenir compte de cette chute initiale, surtout si l'on se livre à des mensurations comparatives chez le même individu (pour établir par exemple l'effet de telle ou telle médication), que nous conseillons, pour éviter toute méprise, de toujours notér les déuxchiffres de tension systolique, même en l'absence de toute dégradation, afin de montrer que, si la baisse initiale n'existe pas, elle a du moins été recherchée. Exemple :
Tension (palpo-vibratoire) : 170-170/95.
Nous n'avons rien dit précédemment de la légère dénivellation qui peut s'observer pareillement dans la tension diastolique au moment de la mensuration. D'ordinaire, du fait de l'échelle plus réduite de ces variations ou par suite d'autres causes, le chiffre de la tension diastolique ne présente que des modifications assez insignifiantes. Même lors de compressions répétées ayant entraîné une baisse appréciable de la tension systolique, il est commun de ne noter qu'une chute de quelques millimètres sur le taux initial de la pression diastolique. Cependant, lorsque la chute systolique est anormalement accentuée, on peut voir la pression diastolique s'abaisser notablement. Rien n'est alors plus facile que de signaler cette cir-_ constance un peu exceptionnelle dans la formule sphygmomanométrique :
Tension (palpo-vibratoire) : 175-150/95-85.
A cette formule de tension, il est indispensable d'ajouter un chiffre indiquant le taux des pulsations à la minute, surtout si l'onveut apprécier judicieusement les rapports entre la tension maxima et la tension minima. Comme nous le verrons plus loin, la longueur de la diastole joue un rôle de premier ordre dans l'abaissement de la tension diastolique ; et le degré d'accélération ou de ralentissement du pouls peut modifier sensiblement la signification de telle ou telle formule de tension. D'où, une dernière addition à la notation sphygmomanométrique :
Tension (palpo-vibratoire) : 175-170/95, p. 76.
Enfin, lorsque la tension diastolique ne pourra être fixée avec certitude, même en s'aidant de plusieurs méthodes, on ne rougira
NOTATION ET FIGURATION SPHYGMOMANOMÉTRIQUES 221
pas d'exprimer le doute ou l'incertitude dans la formulé tensionnelle. Dans un cas d'insuffisance aortique par exemple, où la mesure de la pression diastolique sera particulièrement difficile, on notera :
Tension (palpo et vibro-auscultatoire ou palpo et vibro-oscillatoire) :
145-140/50? ou 145-140/?
Dans l'arythmie complète, on se contentera de noter la tension systolique des plus fortes pulsations. S'il existe une alternance prononcée, il pourra être intéressant d'inscrire séparément les tensions résiduelles des pulsations fortes et des pulsations faibles, cette dénivellation donnant en quelque sorte la mesure de l'intensité de la déficience contractile :
Tension (palpo-vibratoire) :
175-150/110-95.
2° Figuration sphygmomanométrique. — Bien que superflue dans la pratique, la représentation graphique des Valeurs de la tension artérielle parle davantage aux yeux et donne une démonstration plus frappante de certains types circulatoires que nous étudierons plus loin.
Le simple tracé sphygmographique est déjà une courbe de tension. Il donne une image des variations de la pression à l'intérieur de l'artère sur laquelle on le recueille, mais une image incomplète et inexacte : incomplète, car il manque au tracé une sorte de piédestal figurant la pression constante sur laquelle vont s'inscrire les variations dues au phénomène du pouls; inexacte, parce que, même dans le dessin de la pression variable, les ordonnées de la courbe sont imprécises et changeantes. La hauteur du tracé, au lieu d'être en rapport, en chaque point, seulement avec l'élévation de la pression sanguine variable, dépend en réalité de conditions aussi multiples que contingentes (dureté du ressort, mode d'application de l'instrument, état de la paroi artérielle et des parties interposées, etc.). Comme on l'a dit bien souvent, la courbe sphygmographique est une courbe de pression, dont on ne connaît ni la valeur absolue, ni le régime de variations.
La connaissance exacte des chiffres de pression qui correspondent au sommet et à la base de la pulsation a permis à SAHLI (1904)
222 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMETRIQUE
de restituer à la courbe sphygmographique ses véritables ordonnées et de dresser ce qu'il a appelé le sphygmogramme absolu. Il suffit. pour cela de disposer de papier quadrillé sur lequel les temps vont
s'inscrire en abcisses et les pressions en ordonnées. La base de la pulsation se trace sur la ligne des abcisses, à raison d'une division par 1/10e de seconde; le calcul est facile, à l'aide d'un tracé sphygmographique avec repère au 1/5e seconde ou de la simple numération du pouls. Le sommet de la pulsation, réprésenté par le sommet du triangle, sera marqué sur une ligne correspondant à la pression systolique (à raison d'une division par centimètre Hg), en
FIG. 87. — Consturction du sphygmogramme absolu. — te premier sphygmogramme a été construit d'après le tracé d'un sujet normal (tension systolique, 130 tension diastolique, 25 millimètres Hg); le second sphygmogramme, d'après le tracé d'un brightique à hypertension modérée (tension systolique, 160, tension diastolique, 90). Sur la ligne des ordonnées, chaque division répond à 1 centimètre Hg; surla ligne des abcisses ou du temps, une division correspond à un dixième de seconde. La partie du sphygmogramme à striation foncée et oblique figure la pression variable et peut être superposée au tracé sphygmographique; le soubassement, à striation verticale et claire, correspond à la pression constante.
NOTATION ET FIGURATION SPHYGMOMANOMETRIQUE 223
un point que l'on calculera, sur la ligne des abeisses, en tenant compté approximativement de la distance qui sépare, sur un tracé en grande vitesse, le début de la pulsation de son point culminant.
La ligne d'ascension et la ligne de descente se traceront aisément en reliant le sommet au point de début ou de terminaison de la pulsation, sur la ligne correspondant au chiffre de la pression diastolique. On néglige d'ordinaire les accidents de la ligne de descente, comme le dicrotisme, que l'on pourrait cependant inscrire sur une ligne de tension intermédiaire à la pression systolique et diastolique, en tenant compte de la situation de cet accident 1. Ce sphygmogramme
1 Dans certains cas très rares et très favorables, il peut être possible de
FIG. 88. - Superposition de sphygniogrammes absolus et de tracés sphygmographiques chez un brightique hypertendu et un bacillaire de tension à peu près normale. — On voit que l'amplitude du tracé sphygmographique est loin d'être toujours en rapport avec le taux de
la tension artérielle,
224 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMETRIQUE
absolu présente l'avantage de donner l'image exacte des variations de la tension sanguine à l'intérieur de l'artère, alors que le
tracé sphygmographique n'en offrait qu'une image imparfaite et déformée. Il suffit, du reste, pour s'en rendre compte, de comdétailler
comdétailler la ligne d'ascension du sphygmogramme absolu, en fixant le niveau tensionnel exact de l'ondulation qui correspond à l'anacrotisme (voir plus loin à propos du rétrécissement aortique).
FIG. 89. — Superposition de sphygmogrammes absolus et de tracés sphygmographiques, recueillis chez un brightique hypertendu et un bacillaire hypotendu. — Le contraste entre l'amplitude du tracé sphygmographique et la valeur réelle de la tension artérielle apparaît encore plus nettement.
NOTATION ET FIGURATION SPHYGMOMANOMETRIQUES 225
parer certains sphygmogrammes absolus aux tracés sphygmographiques correspondants 1.
1 De plus, comme le fait remarquer SAHLI, le sphygmogramme absolu est seul capable de donner une mesure exacte de ce qu'on appelle la vitesse ou la lenteur delà pulsation (pulsus celer, pulsus tardus). Il est impossible, en effet, sur un tracé ordinaire, de juger de l'inclinaison et de l'obliquité véritables de la ligne d'ascension, car cette obliquité dépend de la hauteur du tracé qui elle-même relève de facteurs multiples. Avec le sphygmogramme absolu, la hauteur du tracé est absolument fixe, correspondant à la valeur de la pression systplique, et il est alors facile de juger du degré d'inclinaison exact de cette ligne d'ascension.
L. GALLAVARDIN.
FIG. 90. - .Courbes sphygmomanométriques. — D'ans le tracé I, sont indiquées seulement la tension systolique résiduelle et la tension diastolique ; c'est cette, notation que l'on emploie le plus communément. Le tracé Il montre comment on pourrait figurer l'abaissement initial de la tension, systolique, dans les cas où l'étude de cette chute tensionnelle serait capable de présenter quelque intérêt. De même, la chute de la tension diastolique pourrait être inscrite aisément (tracé III) dans le cas où elle serait très appréciable à la mensuration.
286 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMETRIQUE
De véritables courbes de pression peuvent être établies plus simplement, comme l'a proposé MARTINET (1911), en inscrivant sur un papier rayé les taux de pression variable, obtenus lors de diverses mensurations. On peut se servir indifféremment, soit de simples feuilles de température, soit d'un modèle analogue à celui que nous reproduisons ci-dessus, où se trouve inscrite en marge la figuration de la pression normale et où sont réservées des cases pour l'inscription du quantième et du chiffre du pouls. La succession des traits représentant la valeur de la pression systolique forme une première courbe, celle des traits inférieurs répondant à la pression diastolique en forme une seconde, et l'intervalle compris entre ces deux lignes correspond à la pression variable. Le défaut de parallélisrne de ces deux lignes, leur écartement ou leur convergence, figure sur l'ensemble du tracé, surtout lorsque l'on raye la surface intermédiaire, une série de rétrécissements ou d'élargissements qui objectivent bien les variations de la pression. Il est bien entendu que ce sont les chiffres de tension résiduelle qui seront portés sur la courbe. Dans le cas où cela pourrait avoir quelque intérêt, il serait facile de figurer les chutes de tension, systolique ou diastolique, observées au moment de la mensuration. Suivant l'ordre de phénomènes que l'on se propose d'étudier, les divisions de la ligne des abcisses peuvent répondre à des heures, des jours, des mois ou des périodes plus espacées. Lorsque les études sphygmomanométriqués seront suffisamment poussées pour permettre de suivre à très longue échéance l'évolution des états hypertensifs, de telles figurations graphiques ne manqueront pas d'être très instructives 1.
BIBLIOGRAPHIE
GALLAVABDIN et HAOUR, Baisse systolique de la tension et notation sphygmomanométrique (Archives des Maladies du coeur, février 1912).
MARTINET, Représentation graphique des tensions artérielles (Presse médicale, 22 février 1911).
SAHLI, Sphygmogramme absolu et sa signification clinique (Deutsch. Arch. f. klin. Med., 1904, p. ligo-btis).
1 L'exploration de la tension artérielle et l'établissement de la formule spbygmomanomélrique sont loin de résumer l'ensemble des efforts tentés
CONCLUSIONS TECHNIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE 227
CONCLUSION GENERALES DE TECHNIQUE SPHYGMOMANOMETRIQUE
Après plusieurs années de pratique sphygmomanométrique, nous nous croyons autorisé à émettre les conclusions suivantes :
1° Tension systolique ou maxima. — La méthode de détermination de la pression systolique la plus simple et la plus exacte est la méthode palpatoire (méthode de RIVA-ROCCI).
1° Tension diastolique ou minima. — Il n'existe qu'un procédé correct pour prendre la tension diastolique: fixer le moment où se produit le premier décollapsus artériel. On peut y arriver par la méthode oscillatoire, la méthode vibratoire et la méthode auscultatoire.
Dans la pratique ordinaire, nous conseillons nettement la méthode vibro-auscultatoire. Los méthodes vibratoire et auscultatoire sont deux méthodes soeurs, qui mettent respectivement en évidence les qualités de vibrance ou de sonorité du premier décollapsus. Dans chaque cas, on se trouvera bien d'employer d'abord la méthode vibratoire, qui est la plus simple ; si la vibrance humérale est nette, cela suffit. Si cette vibrance n'a pas toute la netteté désirable, on recourra
pour prendre une idée exacte de la circulation sanguine et de ses variations au cours fies maladies.
Pour ce qui à trait au travail du coeur, au calcul de l'ondée ventriculaire, on trouvera dans la première, édition de cet ouvrage (p. 177 à 194) une longue série de considérations et de calculs que nous ne jugeons pas à propos de reproduire ici, afin de ne pas surcharger cette seconde édition. Sur ces deux questions, comme aussi sur tout ce qui concerne le calcul de l'ondée circulatoire périphérique, l'appréciation du travail effectué par la pulsation artérielle (sphygmobolométrie de SAHLI, sphygmoénergométrie de
CHRISTEN), la vitesse de la circulation, la mesure de la pression capillaire et de Impression veineuse et, d'une façon générale, sur toutes les méthodes d'exploration de la circulation, le lecteur se reportera avec fruit à l'ouvrage si
complet et d'une si riche documentation de J. DE MEYER, de Bruxelles (les Méthodes modernes d'examen du coeur et des vaisseaux, Paris, Baillière et fils,
1914).
228 TECHNIQUE SPHYGMOMANOMETRIQUE :
à la méthode auscultatoire qui, dans presque tous les cas, fournira des renseignements plus précis. En utilisant, dans la détermination de la tension diastolique, cette seule méthode vibro-auscultatoire
vibro-auscultatoire rapide, commode, et qui ne demande qu'une instrumentation des plus réduites — le médecin sera capable de faire de l'excellente sphygmomanométrie.
La méthode oscillatoire, qui exige une instrumentation plus compliquée et dont les résultats sont souvent d'interprétation diffiFIG.
diffiFIG. — Mise en évidence du premier décollapsus artériel par les méthodes oscillatoire, vibratoire et auscultatoire. — Ce premier décollapsus donne naissance à la première grande oscillation, à la première vibrance humérale, au premier ton artériel retentissant.
CONCLUSIONS DE TECHNIQUE SPHYGMOMANOMETRIQUE 229
cile, ne peut être considérée comme une méthode de choix. Pratiquée à l'aide de l'oscillomètre de PACHON, elle est une méthode de secours. Il existe, en effet, quelques cas, — moins de 10 pour 100 certainement — dans lesquels le décollapsus artériel n'est pas suffisamment vibrant ou sonore, pour être décelé par la méthode
vibro-auscultatoire 1. Dans un certain nombre d'entre eux, la pression diastolique pourra être fixée sur la courbe oscillatoire, à la conditiond'utiliser un index correct.
Il reste enfin quelques faits dans lesquels le chiffre de pression diastolique ne peut être fixé avec certitude ni par la méthode vibroauscuitatoire, ni par la méthode oscillatoire.
1 Les Conditions qui éteignent ou estompent les qualités habituelles de vibran ce ou de sonorité du décollapsus artériel sont encore insuffisamment connues. À côté de celles pouvant tenir au taux de la pression sanguine et surtout a la réaction anormale de la paroi artérielle, il faut compter avec certaines modifications d'origine cardiaque, telles qu'il peut s'en produire exceptionnellement dans quelques lésions aortiques, notamment dans certains rétrécissements aortiques très serrés avec insuffisance aortique (voir plus loin, a propos du rétrécissement aortique).
FIG. 92. - Instrumentation très simple permettant de prendre la tension artérielle, systolique et diastolique, par la méthode palpo et vibroauscultatoire.
vibroauscultatoire. Cette instrumentation se composé d'un sphygmomanomètre du type RIVA-ROCCI et d'un petit phonendoscope ordinaire.
MODIFICATIONS DE LA TENSION ARTERIELLE
(CLINIQUE SPHYGMONOMETRIQUE)
Plus le champ d'une fonction est étendu et plus sont multiples les facteurs qui la conditionnent, plus apparaissent variés les assauts qu'elle peut subir. A ce titre, la tension artérielle n'a rien à envier à aucune.
Un fonctionnement du coeur impeccable, une adaptation parfaite' des vaisseaux, une direction harmonieuse du système nerveux, des exigences limitées des différents organes, il faut tout cela - et dans toute l'étendue ou la profondeur du corps — pour maintenir le taux normal de la tension artérielle et assurer, sans défaillance comme sans excès, cette circulation sans fin, cette course sans repos du milieu intérieur, qui ne cessent qu'avec la mort.
Aussi, les modifications qui se groupent autour du chiffre normal de la tension artérielle sont-elles sans nombre. Suivant leur origine, ce sont des modifications physiologiques, pathologiques, thérapeutiques; en les étudiant successivement, nous verrons ce que peuvent faire, sur une fonction aussi importante, la nature, la maladie, le médecin.
232 CLINIQUE SPHYGMOMANOMETRIQUE
SECTION I
MODIFICATIONS PHYSIOLOGIQUES DE LA TENSION ARTÉRIELLE
On peut grouper, sous cette dénomination, toutes les variations de la tension artérielle qui apparaissent chez l'homme en dehors de l'état de maladie, qu'elles soient sous l'influence du développement (âge, sexe), des diverses fonctions organiques (respiration, digestion, menstruation, grossesse et accouchement, sommeil, exercices musculaires, influences nerveuses etc.), ou des variations du milieu extérieur. —
I° Age. — D'une façon générale, la tension artérielle s'élève. progressivement avec l'âge ; mais cette ascension est très lente.
C'est dans l'enfance et l'adolescence qu'elle est le plus nette. — La pression artérielle du nouveau-né est assez difficile à fixer. En opérant à l'aide de la méthode de RIVA-ROCCI, pour la pression systolique et de la méthode auscultatoire pour la pression diastolique, POPOF note, chez l'enfant à terme, le chiffre de 70/40 millimètres Hg. D'après Mlle KOESSLER, qui a fait de nombreuses mensurations à l'aide de l'appareil de PACHON durant les premiers mois de la vie, les chiffres extrêmes oscilleraient entre 60/25 et 80/50 ; mais de tels écarts semblent davantage être le fait de difficultés d'appréciation (embonpoint variable des enfants, peu de netteté des, phases oscillatoires) que de variations réelles aussi étendues. La pression augmenterait légèrement à l'étatde veille et pendant la tétée (BALARD), pendant l'es pleurs ou les cris (POPOF). — Chez l'enfant d'un à quinze ans, la tension systolique mesurée par la méthode de RIVA-ROCCI (en se servant d'un brassard de 8 à 10 centimètres suivant l'âge) monté progressivement de 80 à 110 millimètres Hg. Pour ne pas reproduire en détail les statistiques publiées par de nombreux
MODIFICATIONS PHYSIOLOGIQUES 233
auteurs (SEILER, COOK et BRIGGS, KAUPE, TAVASHYMA, HENSEN, KATZENSBERGER, MELVIN et MURRAY, etc., etc.), nous nous sommes contenté de dresser le graphique ci-joint qui représente à peu près la moyenne des chiffres obtenus par eux. On y peut constater que le chiffre de tension systolique augmente très lentement, à peu près de 1 centimètre Hg tous les cinq ans : 80 millimètres à un an, 90 à cinq ans, 1-10 à quinze ans, 120 à vingt ans 1. Pendant toute cette
période, le pouls diminue au contraire de fréquence, comme le montre l'entrecroisement des courbes dans le graphique.' La-tension diastolique est plus difficile à préciser, par suite de la diversité des méthodes employées dans les statistiques. Avec l'appareil de PACHON, Mlle KOESSLER a obtenu, d'un à seize ans, une progression assez régulière de 55 à 90 millimètres Hg, chez les filles, de 45 à 100 millimètres chez les garçons. Ces chiffres, au moins dans la zone supérieure, s'ont plus élevés que ceux de KATZENSBERGER qui, par la méthode auscultatoire, a noté de quatre à quinze ans une progression
1 A l'oscillomètre de PACHON, d'après Mlle-KOESSLER, la progression de un a seize ans serait de 90 à 145 millimètres Hg chez les filles et de 90 à 155 chez les garçons. Au GAERTNER, on note 90 à 100 millimètres Hg (HAYASKI,
SCHAW).
FIG. 93. — Variations de la tension artérielle dans l'enfance et dans l'adolescence. — On voit, dans ce graphique établi d'après les nombreuses statistiques publiées, que la courbe de la tension systolique évolue en sens inverse de celle des pulsations. A l'âge d'un an, le pouls est à 120, la tension à 75 millimètres Hg; à vingt ans, la tension s'est élevée à 120 millimètres Hg et le pouls s'est abaissé à 75.
234 CLINIQUE SPHYGMOMANOMETRIQUE
de 55 à 70 millimètres Hg 1. MELVIN et MORRAY, opérant sur 40 enfants sains de quatre à quatorze ans, avec un brassard de 8 centimètres, obtinrent, comme moyenne de pression diastolique auscultatoire, le chiffre de 70 millimètres Hg ; ils font remarquer que ce chiffre est légèsrenient plus élevé que celui trouvé chez l'adulte (65 millimètres Hg), sans doute à cause de la plus grande rapidité du pouls dont la vitesse moyenne atteignait 93 à la minute, au lieu de 70. — La tension de Vadolescent confine à celle de l'adulte et peut être fixée entre 110 et 120 millimètres Hg pour la pression systolique, 75 et 70 milllimètres Hg pour la pression diastolique (méthode de RIVA-ROCCI et vibro-oscillatoire).
La pression artérielle s'élève-t-elle chez le vieillard ? Sujet très controversé. Si l'on calcule, comme l'ont fait patiemment certains auteurs, la moyenne des chiffres de tension aux différents âges, il est certain que l'on obtient un chiffre qui a une tendance à s'élever à chaque décade. WILDT, opérant sur 250 vieillards d'un asile, obtient une valeur moyenne de 150 millimètres Hg, au lieu de 120, et BOWES a fait, des constatations analogues. Mais il saute aux yeux que, par ce procédé, on fait plutôt la sommation des éventualités pathologiques hypertgnsives que le vieillard a rencontrées sur sa route, et dont la fréquence augmente naturellement avec l'âge, plutôt que l'on n'étudie vraiment l'influence de la vieillesse. Gela est si vrai qu'il n'est pas rare de rencontrer des individus très, âgés, avec une tension normale ou même inférieure à la normale. MOUTIER avait observé que la majorité des vieillards, hommes ou femmes, hospitalisés à la maison départementale de la Seine, « présentaient une pression normale ou au-dessous de la normale »; de même WILDT, rencontrant dans sa statistique quatre femmes de quatrevingt-dix ans, notait chez elles des pressions inférieures aux chiffres normaux. Le sujet demande donc de nouvelles études, car il importe de faire la part respective de la sénilité simple et de la pathologie de la vieillesse. Les constatations que j'ai pu faire me portent à croire que les sujets âgés, qui ont échappé à toute influence hypertensive, ont de la tendance à présenter une baisse
1 D'après KATZENSBERGER, on n'entendrait le plus souvent chez l'enfant que trois phases (sons d'intensité croissante, stationnaire et décroissante), parfois deux seulement. L'index diastolique était noté à l'extinction de tout bruit.
MODIFICATIONS PHYSIOLOGIQUES 335
légère de la pression, qui serait le pendant et la conséquence de cette involution cardiaque sénile que connaissent bien les anatomopathologistes. Quant à la pression diastolique, elle serait, d'après WILDT, plus basse chez le vieillard que chez l'adulte, par suite du trouble survenu dans l'élasticité artérielle ; la valeur de la pression variable se trouverait, de ce fait, augmentée.
2° Sèxé. — Il est de notion courante que, chez les enfants comme chez les adultes, la pression artérielle est un peu plus faible chez la femme que chez l'homme. La différence serait en moyenne de 5 à 10 millimétrés Hg.
3° Respiration. — D'une façon générale, et en accord avec les constatations des. physiologistes (MAREY, TIGERSTEDT), on peut dire que la pression artérielle s'abaisse dans l'inspiration et s'élève dans l'expiration. A l'état normal, dans la respiration calme et tranquille, cette dénivellation périodique de la pression est Vraiment inappréciable et l'on n'a pas à en tenir compte dans les mensurations ordinaires. Il n'en est pas de même dans la respiration gênée, telle qu'on la constate chez certains emphysémateux ou certains cardiaques dyspnéiques : une différence de 10 à 15 millimètres Hg pour la pression systolique, un peu moindre pour la pression diastolique, est communément notée entre les chiffres inspiratoires et expiratoires. Une même dénivellation peut se voir, à l'état physiologique, dans la respiration forcée et particulièrement, ample. POTAIN a noté, dans ces conditions, une différence de 2 centimètres Hg dans la temporale; de même, d'après ce dernier auteur, dans l'effort qui n'est qu'une expiration énergique et brusque, la glotte étant fermée, l'élévation de la pression pourrait aller jusqu'à 3 centimètres Hg 1.
Ces effets des mouvements respiratoires sur la pression artérielle, ne représentent qu'une résultante de l'action de facteurs multiples : influence du jeu du diaphragme sur la circulation abdominale, modifications apportées à la contraction cardiaque par les variations
1 DEADBORN (1916) cite un médecin, âgé de cinquante ans et d'une vigoureuse santé, qui, à la suite de périodes apnéiques très longtemps maintenues (deux minutes et demi), pouvait faire monter sa pression systolique de no à 230 millimètres Hg!
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de pression intra-thoracique et l'ampliation ou la réduction des lames pulmonaires, variations dans l'apport du sang veineux à l'oreillette droite et du sang artériel à l'oreillette gauche, fluctuations du rythme cardiaque qui s'accélère dans l'inspiration et se ralentit dans l'expiration, sans compter les variations vaso-motrices d'origine centrale résultant de l'intime association du centre vaso-moteur et du centre respiratoire 1.
Dans le type respiratoire de Cheyne-Stokes, la plupart des auteurs, depuis GUMPRECHT, NORRIS, SABRAZÈS, ont noté de l'hypotension au moment de la période d'apnée. Cette dépression pourrait atteindre 20 à 30 millimètres Hg et serait attribuable, pour JANEWAY, à des variations dans le tonus du centre vaso-moteur, synchrones à celles du centre respiratoire, et d'origine anémique. Vers la fin de la période d'apnée, d'après POLLOCK (1912), la pression artérielle remonterait : sous une influence asphyxique, et provoquerait de nouveau L'excitation du centre respiratoire qui caractérise la phase d'hyperpnée.
4° Digestion. — Rien n'est plus difficile que de fixer exactement l'influence de la digestion sur la tension artérielle, car, même en laissant de côté toute la série des cas pathologiques, il faudrait sans donte faire la part des diverses phases de l'acte digestif (inges1
(inges1 multiplicité de ces facteurs fait même entrevoir que le problème des
rapports entre les variations de pression et les mouvements respiratoires
pourrait bien être plus complexe qu'on a coutume de le dire.
Gomme l'a fait remarquer très justement LEWIS, les effets de l'inspiration : ou de l'expiration peuvent être très différents suivant le mécanisme producteur (respiration thoracique ou abdominale, artificielle). MAREY, en 1881, avait insisté sur ce point que, même chez l'homme, la respiration est capable de produire des effets inverses, suivant qu'elle est purement abdominale ou purement thoracique. C'est pour ne pas avoir tenu compte de cette distinction, dit LEWIS, que les différents auteurs sont parfois arrivés à des conclusions' très contradictoires. D'après cet auteur, chez l'homme, une profonde inspiration intercostale, non prolongée, produit une chute de la pression artérielle, alors qu'une profonde inspiration diaphragmatique, non prolongée, donne une élévation de cette pression par suite de l'accroissement de la pression abdominale; dans l'expiration, c'est l'effet inverse qui se produit. Lors d'une inspiration thoracique prolongée, la pression pourrait arriver à s'élever. Quant à la respiration artificielle, provoquée suivant le mode habituel, elle donne une élévation de la pression pendant l'inspiration et une chute pendant l'expiration.
FOLEY, COBLENTZ et SNYDER (1916) ont également insisté sur la variabilité des modifications de la pression artérielle, dans les phases respiratoires, chez les différents sujets.
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tion, digestion proprement dite, absorption), de la nature, des aliments ingérés, comme aussi de la variabilité des réactions vasomotrices
vasomotrices les différents sujets. Si l'on ajoute à cela que les oscillaltions de la tension sont forcément très minimes, on voit quelle prudence il faut apporter dans ses appréciations. Aussi ne s'étonnet-on
s'étonnet-on que JANEWAY, après avoir rapporté les constatations de différents auteurs, ait conclu qu'il était sage de suspendre tout jugement jusqu'à de plus amples recherches. Nous devons cependant citer, après les constatations déjà anciennes de POTAIN, les observations récentes de LOEPER qui comptent parmi les plus minutieuses
qui aient été faites sur ce sujet.
Pour POTAIN, « le plus habituellement, la pression artérielle s'abaisse à là suite du repas et pendant une partie de la période
digestive, en même temps que le pouls prend une amplitude plus grande et s'accélère un peu ... A la suite de repas un peu copieux où le vin a été pris en quantité notable, c'est la stimulation cardiaque qui semble l'emporter ; la pression tend alors à s'élever. L'abondance des repas, la nature des aliments, la tolérance gastrique et les dispositions individuelles ont, sur ces résultats, une grande influence. » Ayant expérimenté chez trois sujets normaux, soumis au même repas d'épreuve, et opérant à l'aide de l'oscillomètre de PACHON, LOEPER, en 1912, arrive aux conclusions suivantes. « La tension artérielle dans la digestion, écrit-il, à part quelques oscillations passagères sans grande valeur et sans régularité, subit trois variations principales : une élévation, tout d'abord, qui suit de très près
l'ingestion des aliments et que j'appellerai l'hypertension immédiate; une chute qui se produit un quart d'heure à trois quarts d'heure après et que j'appellerai l'hypotension secondaire ; enfin, après
quelques hésitations très variables chez un même sujet et dont on ne peut fixer la cause et le moment, une nouvelle élévation qui dépasse souvent de 2 à 3 centimètres Hg la normale et que j'appellerai hypertension tardive. » Après avoir varié les expériences, poursuivi ses recherches au cours de gastropathies diverses, LOEPER s'efforce de faire la part, dans ces modifications, des actes mécaniques ou sécrétoires
sécrétoires la digestion, ainsi que de l'absorption et des modifications sanguines quantitatives ou qualitatives. « L'hypertension initiale,
conclut-il, paraît attribuable à la seule distension de l'estomac ; il est donc assez naturel qu'elle soit d'autant plus marquée que la masse
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alimentaire est plus considérable. Aussi est-elle surtout évidente après l'ingestion de grandes' quantités de liquide et se maintient-elle plus ou moins longtemps, suivant la persistance de ce liquide dans l'estomac ou son évacuation dans l'intestin. » Elle est de. même exagérée par l'aérophagie, les ptoses diverses, la dilatation gastrique. « h'hypotension secondaire correspond à la mise en train de la sécrétion gastrique, à l'élaboration du travail chimique de l'estomac et au passage dans la circulation de l'hypotensine gastrique. On comprend
donc qu'elle soit plus forte avec les aliments qui excitent puissamment cette sécrétion, plus accentuée avec le sel, les viandes, plus faible avec le lait, très passagère avec l'eau et les pâtes, plus accusée aussi chez les anciens ulcéreux hyperchlorhydriques. L'hypertension secondaire répond à la distension intestinale, à la pléthore sanguine. Elle est proportionnelle à l'abondance de ces matériaux, à leur action irritante sur les vaisseaux, à la rapidité de leur élimination. Il était donc à prévoir que les aliments salés, l'alcool, etc., entraîneraient une forte hypertension secondaire et que l'insuffisance rénale la prolongerait plus longtemps. »
Le vomissement, d'après BROOKS et LOCKHARDT, s'accompagne quelquefois d'une période d'hypertension, mais plus fréquemment d'une énorme et soudaine chute de la pression artérielle avec inhiFIG.
inhiFIG. — Les trois phases de la, tension artérielle au cours de la digestion : hypertension immédiate, hypotension secondaire, hypertension tardive. (D'après LOEPER.)
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bition cardiaque, pouvant aller jusqu'à l'apparition de phénomènes lipothymiques ou syncopaux.
5° Menstruation. — Les variations de la pression artérielle pendant la période cataméniale ont été peu étudiées. Elles semblent dû reste minimes. D'après TSUJI, BOGDANOYICS, la pression monterait lentement, environ d'un centimètre, durant les journées précédant les époques, pour revenir assez rapidement à son taux normal dès le second jour de l'écoulement menstruel.
Depuis longtemps, de nombreux auteurs ont invoqué des modifications tensionnelles hypertensives pour expliquer les troubles variés de la ménopause. CULPERSTON (1916), qui est revenu récemment sur ce sujet, estime qu'il s'agit le plus souvent d'hypertension oscillante attribuable peut-être à une suractivité transitoire de l'hypophyse ou des surrénales ; les troubles vaso-moteurs (bouffées de chaleur, transpiration) seraient dus aux variations brusques de la tension.
6° Grossesse, Accouchement, Suites de couches — Que
devient la tension artérielle pendant la grossesse ? Deux opinions
sont en présence. — D'après les recherches anciennes, de VINAY, FELLNER, QUEIREL et RAYNAUD, BOUCHARD et BALTHAZARD, VAQUEZ et
NOBECOURT, PUECH, la pression artérielle resterait normale pendant la grossesse et, comme l'a dit VAQUEZ en 1906, « cet état serait incapable de déterminer une sorte d'hypertension physiologique ». — Cependant, les constatations plus récentes de MORRIS SLEMONS et GOLDSBOOUGH (1908), de BOGDANOVICS (1909), de HIRST (100 cas, 1910),
de LASGAN (1911), de NEWELL (450 cas, 1915), permettent de penser que l'on pourrait assister, durant la seconde moitié de la grossesse normale et surtout dans les derniers mois, à une légère poussée hypertensive, dont la cause devrait être cherchée soit dans la compression
de l'aorte abdominale par l'utérus gravide, soit dans la pléthore sanguine de la seconde moitié de la grossesse, soit encore dans l'adjonction du système vascillaire utéro-placentaire apportant un obstacle à la circulation. Au reste, cette hypertension des derniers mois serait toujours très minime, ne dépassant guère 1 centimètre Hg (122 millimètres: Hg, au lieu de la normales 12, pour HIRST; 125/74 millimètres. Hg, au lieu de 11,0/66, pour SLEMONS et GOLDSBOOUGH, avec
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l'appareil d'ERLANGER, et ne risquerait pas d'être confondue avec d'autres hypertensions pathologiques dont l'échelle de variations est beaucoup plus étendue.
Pendant le travail, tous les auteurs sont d'accord pour admettre une hypertension passagère. « La tension artérielle, dit VAQUEZ, s'élève, non pas progressivement ou d'une façon continue, mais par bonds, pour ainsi dire, au fur et à mesure que les contractions utérines se rapprochent et augmentent d'énergie. » Peu sensible au début du travail, alors que le col commence à se dilater, l'hyperension s'accentue surtout pendant la période d'expulsion, et atteint son maximum au moment de la sortie de la tête foetale (VAQUEZ et NOBÉCOURT, QUEIREL et RAYNAUD). Avec l'appareil de PUTAIN, la pression atteindrait à ce momemt 20 à 22 centimètres Hg. Ce serait là, en quelque sorte, une « hypertension d'effort » aggravée peut-être par la vaso-constriction des vaisseaux utérins et la pléthore abdominale momentanée. Le même phénomène se reproduirait pendant la délivrance ; « mais cette hypertension de la" délivrance est peu considérable et ne va pas jusqu'aux chiffres atteints pendant l'accouchement " (VAQUEZ).
L'état de la tension artérielle pendant les suites de touches a donné lieu aux mêmes divergences que pendant la grossesse. Pour BARANGER, CHAPON, FELLNER, QUEIREL et RAYNAUD, POULIOT, SLEMONS et GOLDSBOOUGH, il existerait une sorte d'hypertension post partum, peu élevée d'ailleurs, qui serait suivie d'un retour progressif à la normale vers le cinquième ou sixième jour et dont l'explication a été cherchée dans la rétraction de l'utérus ou la perméabilité amoindrie de ses vaisseaux. VAQUEZ, en 1906, s'est élevé contre cette manière de voir, et pour lui, « pas plus postparfum qu'ante partum, il n'existerait d'hypertension physiologique, propre à la grossesse ou aux suites de couches ». Pour cet auteur, abstraction faite des cas dans lesquels l'état de shock ou la spoliation sanguine abondante déterminent un abaissement momentané de la pression artérielle, cette tension reviendrait au taux normal immédiatement après l'accouchement ou en tout cas dès le lendemain. Notons que DOLGAN (1917) aurait noté une persistance un peu plus prolongée de l'hypertension artérielle post partum chez les mères qui allaitent leurs enfants que dans le cas contraire.
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7° Sommeil et nycthémère. — La tension artérielle, comme toutes les autres fonctions physiologiques (activité cérébrale, tonus musculaire, température, rythme cardiaque, etc.), est soumise à l'influence du nycthémère. La dépression qui se manifeste pendant le sommeil est une résultante, dans laquelle le repos, l'absence d'excitation psychique ont certainement leur part ; elle pourrait atteindre jusqu'à 4 et 5 centimètres Hg, d'après GOLDWATER, WEISS. Dans un cas bien suivi, JANEWAY a noté des différences de 2 centimètres Hg entre le maximum diurne et les pressions du soir et du matin. Chez le nouveau-né, BALARD a de même constaté une augmentation très nette de la pression maxima pendant l'état de. veille, la minima conservant pour cet auteur une valeur sensiblement constante. Etudiant moi-même les variations du rythme cardiaque et de la pression artérielle au cours du nycthémère, dans certaines névroses tachycardiques, j'ai pu noter dans un cas les écarts suivants : de 9 à 11 heures du matin, au moment du maximum tachycardique, tension 160-155/90, pouls 120; durant la nuit, entre 1 et 3 heures, tension 115/70, pouls 50. Il semble donc bien que le sommeil s'accompagne d'une chute très nette de la tension artérielle ; le sympathique s'endort, en quelque sorte, avec le sujet, et la dépression hypotensive n'est que le reflet de la suspension de son action vaso constritive et hypertonique.
Les auteurs qui ont étudié de plus près cette chute nocturne de la tension (BRUCH et FAYERWEATER, BROOKS et GARROL) s'accordent à dire qu'elle survient assez rapidement, dès les premières heures du sommeil, et que la pression se relève lentement pendant la seconde partie de la nuit pour atteindre son maximum pendant la journée. Dans la statistique de BROOKS et CAROLL, sur 30 hypotendus à pression moyenne de 100 millimètres Hg, la pression était tombée, au bout de deux heures de sommeil, de 16 millimètres, et le matin au réveil elle était déjà remontée de 10 millimètres ; chez 39 hypertendus ayant une pression moyenne de 204 millimètres Hg, la pression était tombée de 44 millimètres après deux heures de sommeil, et au moment du réveil la réascension était déjà de 22 millimètres. Ceci cadre bien avec ce que j'ai pu observer, en suivant les variations noctures du rythme cardiaque chez quelques tachycardiques. On voyait très nettement, chez eux, le rythme s'accélérer avant le réveil, à partir de 5 heures du matin, comme si le réveil du
L. GALLAVARDIN. 16
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système sympathique avait de la tendance à devancer celui des
centres psychiques.
8° Exercices musculaires, - Les modifications de la tension artérielle sous l'influence des exercices physiques ont fait l'objet de travaux intéressants. La tâche était difficile, car il s'agissait d'étudier les fluctuations de la pression lors d'exercices demandant parfois des efforts très disparates, suivant les individus; les mensurations ne pouvaient qu'exceptionnellement être pratiquées au moment de ces exercices, mais le plus souvent après ; et, de plus, il importait d'en suivre l'évolution pendant un certain temps. Il fallait enfin s'attendre, dans une question, aussi complexe, à se trouver aux prises avec des variations individuelles souvent déconcertantes. Cependant, de la lecture des différents travaux, se dégagent certaines conclusions assez solidement établies.
On admet généralement que, chez l'homme sain, un exercice léger ne modifie pas sensiblement la pression artérielle. Ce n'est que chez des individus déprimés, ou encore chez des sujets neurasthéniques, que l'équilibre peut être momentanément rompu et une hypertension passagère se manifester (BING, HASKOVEC, STURSBERG et SCHIILDT). Il y aurait même là, d'après ces auteurs, un moyen commode d'apprécier la fatigabilité des sujets.
Lors d'un exercice modéré, la tension artérielle a toujours de la tendance à s'élever : telle est la conclusion à laquelle arrivent presque tous les auteurs. « Un travail musculaire notable élève toujours la pression, écrivait POTAIN en 1902, pourvu qu'il soit modéré et peu prolongé. » Des constatations analogues ont été faites par ZADEK, MAXIMOWITCH, PUEDER, qui trouvèrent une élévation d'autant plusaccusée que le travail était plus intense (pouvant atteindre jusqu'à 50 millimètres Hg chez de jeunes sujets et disparaissant d'ordinaire au bout de vingt à trente minutes), comme par MORITZ, KORNEFLD, JELLINEK, JANEWAY, OTIS, etc. WILLIAMSON, chez de jeunes sujetsayant pris part à une course à pied ou ayant monté rapidement un escalier, trouva, pour la pression systolique, une élévation transitoire de, 19 à 30 millimètres Hg. MASING, en mesurant la pression, non pas. immédiatement après l'exercice, mais pendant la durée d'un travail musculaire exécuté avec un ou deux pieds, constata également une élévation très nette de la tension artérielle, avec abaissement rapide
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après la cessation, et retour progressif à la normale ; il remarqua aussi que, chez les individus âgés ou fatigués, cette hypertension avait de la peine à se maintenir, la pression commençant à s'abaisser avant la fin de l'exercice. Cette hypertension d'effort avait été notée par quelques physiologistes, au moyen de mensurations intra-artérielles directes; et si MAREY, chez un cheval, après une course de dix minutes, avait noté un abaissement de quelques millimètres de la pression carotidienne moyenne (108 à 102 millimètres Hg), TANGL et ZUNTZ (1898) rencontrèrent très uniformément chez le chien, après le travail, une élévation de la pression moyenne oscillant d'ordinaire entre 5 à 25 millimètres, parfois même beaucoup plus marquée.
Le résultat d'un exercice forcé est au contraire d'abaisser la tension. « L'exercice élève la pression, dit POTAIN, la fatigue l'abaisse L'effet d'un exercice violent est un abaissement immédiat de la tension artérielle, suivi d'un relèvement plus ou moins prompt ou tardif, suivant le degré de résistance du sujet. » KARRENSTEIN, sur 74 soldats soumis à une marche rapide d'une heure ou à un exercice de trois heures, nota presque toujours une chute de la tension Systolique. Cette chute de la pression dans les exercices forcés n'est pas primitive; mais succède toujours à une hypertension initiale ; hypertension initiale, comme l'a remarqué OTIS, qui atteint d'autant plus rapidement son maximum, et se trouvé d'autant moins accusée, que le sujet est plus fatigué ou se livre à un exercice qui dépasse davantage ses forces. La chute se produit avant la fin do l'effort, si bien qu'à la fin du travail la pression se trouve au-dessous de la normale. Plus la fatigue a été grande, plus l'effort a été épuisant, plus un temps de repos prolongé est nécessaire pour que la pression remonte à son chiffre initial 1 (OTIS, LOWSLEY).
L'influence de l'entraînement sur les variations de la pression dues à l'exercice est de première importance. MORITZ, MASING,
1 Tout ce que nous venons de dire a trait à la tension systolique. Les travaux sur les modifications de la tension diastolique sont moins nombreux. Il résulte cependant des constatations de MASTNG, JANEWAY, LOWSLEY, que le chiffre de tension diastolique, comme on pouvait s'y attendre, varie dans une échelle beaucoup plus restreinte que celui de, la tension systolique. Signalons aussi que, pour RAPPORT (1917), la réaction causée par l'effort physique sur la tension systolique serait toujours du même type, que l'effort soit modéré, moyen ou excessif; seule varierait la durée de la réaction.
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KORNFELD, MIDLETON avaient bien noté que l'élévation de la tension artérielle était d'autant plus accusée que la fatigue était plus, grande, et que la répétition d'un exercice, en arrivant à substituer, à des contractions musculaires voulues et mal réglées la succession harmonieuse de mouvements automatiques, avait pour résultat d'atténuer beaucoup cette hypertension d'effort. L'influence de la préoccupation psychique, de l'attention, d'une adaptation musculaire insuffisante, n'est donc pas douteuse. Chez des professionnels, l'élévation de la pression peut être à peine marquée, même après un travail considérable. Chez un athlète de trente-huit ans, champion du monde, GORDON ne nota que des variations minimes ( 115/8o, au lieu de 105/70, à la suite d'exercices pratiqués avec des massues et prolongés pendant plusieures heures consécutives ; des séances analogues eurent lieu pendant six jours consécutifs et, le dernier jour, la pression était retombée à 106 millimètres Hg moins d'une heure après la fin de l'exercice. Par contre, chez des joueurs de football qui n'avaient pas un entraînement suffisant, la pression systolique s'abaissait à la fin du jeu, de 135 à 120 et de 145 à 120 millimètres Hg. C'est sans doute dans ces différences d'entraînement, comme dans des variations de résistance individuelle, qu'il faut chercher l'explication des résultats, souvent discordants, relevés dans des circonstances analogues chez divers sujets. JELLINEK, sur 106 soldats soumis à la même marche, trouva une élévation de la pression chez 57, une baisse chez 19, pas de modifications chez 30. DEADBORN, étudiant les variations, de la pression à la suite d'exercices gymnastiques divers, chez des sujets entraînés, constata une élévation de pression dans 58 pour 100 des cas, une baisse de la tension dans 39 pour 100. POTAIN, expérimentant chez 10 élèves de l'Ecole de gymnastique de la Faisanderie, était arrivé à des . résultats tout aussi variables, ce qui lui faisait conclure : « Il n'y pas de rapport nécessaire et constant entre l'exercice musculaire et, une modification déterminée de la pression. Cette modification peut être nulle ; elle peut se produire dans un sens ou dans le sens contraire, suivant les sujets, suivant le degré de fatigue que l'exercice - détermine. » Le rapport entre le degré d'entraînement et les variations de la tension artérielle, sous l'influence de l'exercice, a paru assez constant à PACHON (1910) pour que cet auteur ait pu proposer d'établir, sur des bases sphygmomanométriques, les critères fonc-
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tionnels permettant de juger à tout instant de l'état d'entraînement d'un sujet à un exercice déterminé, ainsi que le dosage et le choix rationnels des exercices à ordonner dans l'éducation physique. D'après lui, on constate, sous l'influence de l'exercice, chez l'individu non entraîné, une baisse immédiate et simultanée des pressions maxima et minima. Chez l'individu insuffisamment entraîné, les pressions maxima et minima varient généralement dans le même . sens, mais présentent entre elles un écart plus considérable qu'à l'état normal. On note d'abord une augmentation quelquefois importante de ces pressions, suivie d'oscillations d'un champ d'étendue variable avec le degré d'entraînement, auxquelles fait suite une chute définitive traduisant l'affaiblissement cardiaque ; le retour aux valeurs normales, l'exercice terminé, est lent. Chez l'individu entraîné, au contraire, l'écart des pressions maxima et minima est moindre, leur champ d'oscillations très réduit, et les valeurs de travail, une lois établies, peuvent ne pas varier pendant le temps de l'exercice ; celui-ci terminé, le retour à la normale est relativement rapide.
Rapprochons ces données précédentes de ce que nous ont appris les belles recherches de CHAUVEAU et KAUFMANN sur la surabondance des circulations artérielles locales, au moment de la contraction musculaire. Il semble bien que ce que l'effort exige soit moins une , pression plus élevée, qu'une quantité plus grande de sang. — La réaction cardiaque idéale, dans l'effort, serait celle' qui, sans augmenter la pression intra-aortique, assurerait à l'arbre circulatoire et notamment aux vaisseaux des muscles en contraction un débit sanguin plus considérable. Cet ensemble se trouve réalisé chez l'individu normal, lors d'efforts minimes ; il persiste, lors d'exercice plus violents, chez les sujets entraînés. La répétition des mêmes actes, c'est-à-dire l'entraînement progressif et gradué à des exercices déterminés, façonne à la longue les masses musculaires, harmonise leur fonctionnement parallèle, règle le jeu des réactions vaso-dilatatrices de secours, sans avoir aucune raison de conduire a l'hypertension artérielle ou à l'hypertrophie cardiaque. POTAIN avait très justement remarqué que les vieux gymnastes présentaient une tension plutôt inférieure a la normale (13 centimètres Hg, au lieu de 15). DEADBORN, mesurant la pression chez une cinquantaine de sujets d'une école de gymnastique, particulièrement entraînés
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et âgés de près de trente ans, releva le chiffre moyen de 120 millimètres Hg qui peut être considéré comme une valeur absolument normale. —Au delà des limites de l'adaptation cardiaque parfaite, se manifeste une sorte d''hypertension de secours, qui apparaît d'autant plus vite que l'effort demandé est plus intense ou plus prolongé et le sujet moins entraîné. Déséquilibre léger et passager de la .circulation, qui trahit l'impuissance dans laquelle se trouve le coeur d'augmenter son débit, sans exhausser du même coup la pression artérielle. Grâce à ce stratagème, le coeur suffit du moins à sa tâche. -— Franchissons encore un échelon et demandons à ce même coeur un effort manifestement disproportionné à sa capacité de réserve, c'est une, hypotension de faiblesse qui va faire son apparition ; et avec elle, l'épuisement, l'anhélation, qui trahissent cette sorte d'insuffisance circulatoire aiguë et qui sont la preuve tangible que le coeur n'a pas été capable de servir convenablement les muscles. — En considérant sous cet angleles variations de la tension artérielle dans l'effort, bien dès contradictions apparentes s'évanouissent, surtout si l'on consent à faire une part suffisamment large à la variabilité des réactions individuelles et à la marge des erreurs d'appréciation 1.
1 Le fait que l'exercice physique détermine des variations de la pression artérielle dans un sens déterminé, chez les sujets normaux, a servi de point. de départ à toute une série de travaux se proposant de juger de la résistance du coeur, par l'étude de ses réactions tensionnelles à l'effort. Nouvelle épreuve fonctionnelle, qui vient s'ajouter à tant d'autres, pour essayer de soumettre . aune évaluation mathématique cette chose si insaisissable et qu'il y aurait tant d'intérêt à connaître : la force de réserve du coeur.
Parmi ces travaux, citons ceux de GRAUPNER, de JANOWSKI, etc., que l'on trouvera exposés dans l'ouvrage si complet de DE MEYER (de Bruxelles) et ceux plus récents de MARTINET. D'après cet auteur, les différents régimes circulatoires, normaux, insuffisants, hypersthéniques, seraient caractérisés par des réactions tensionnelles spéciales. Il est à remarquer que la courbe de l'asthénie myocardique (abaissement de la pression maxima et élévation de la minima) reproduit les traits sphygmomanométriques essentiels du déséquilibre circulatoire; il y aurait là, d'après MARTINET, comme une véritable épreuve d'hyposystolie provoquée et transitoire.
On a proposé aussi de juger de la puissance fonctionnelle du coeur par les variations de la tension survenant, non au moment de l'effort, mais lors d'une inspiration très profonde avec fixation en inspiration pendant vingt-cinq secondes (MOSLER). La pression ne se modifierait pas dans les coeurs sains ou fonctionnellement bons, s'élèverait dans les coeurs hypertrophiés et fonction-
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90 Influences nerveuses. — Leur conséquence assez uniforme est de faire monter la pression.
Les émotions doivent être placées au premier rang. L'appréhension, l'attente, une impressionnabilité excessive sont capables de provoquer une ascension momentanée de la tension. Aussi faut-il avoir grand soin de rassurer le malade avant de prendre la tension artérielle, et surtout de faire plusieurs mensurations succès - sives. Ces vagues hypertensives, en effet, se dissipent assez rapidement, au bout de quelques minutes, comme le spasme artériel dont nous avons vu plus haut la part importante dans l'hypertension initiale sphygmomanométrique. Tous les auteurs qui ont étudié cette élévation psychogène de la tension (GOLDWATER, GUMPRECHT, Eux. SCHRUMPF et ZABEL) sont unanimes à dire qu'elle est d'ordinaire plus marquée chez la femme, de même que chez les nerveux, les émotifs, les intellectuels. D'après ces derniers auteurs, elle porterait à peu près uniquement sur la tension systolique, au moins chez les sujets sains. On a même prétendu que des oscillations dé la tension diastolique, parallèles à celles de la pression Systolique, permettraient de penser à l'existence d'altérations artério-scléreuses amoindrissant l'élasticité et le tonus vasculaire normal !
Le travail intellectuel, la réflexion, l'attention, un simple calcul mental sont également capables de provoquer une hausse rapide de la tension. Aussi, est-ce une règle de ne pas continuer l'interrogatoire du malade pendant la mensuration et d'attendre avec patience le chiffre de tension systolique résiduelle. Une simple question, un mouvement du malade suffisent souvent, lorsque la chute de pression était très marquée, à déterminer une réascension de 10 à 15 millimètres Hg.
Il en est de même des excitations sensorielles ou sensilives. Un abaissement subit de la température extérieure, une lumière intense, un bruit désagréable, à plus forte raison une douleur vive et subite, peuvent provoquer un mouvement hypertensif passager, par vasoconstriction réflexe. JOSUE et PAILLARD ont montré qu'il suffisait de
nellement suffisants, s'abaisserait au contraire dans les coeurs à capacité fonctionnelle réduite.
Rappelons que, d'après RAPPORT (1917), la réaction causée par l'effort physique sur la tension systolique serait toujours du même type.
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l'application d'un morceau de glace au pli du coudé pour produire une élévation appréciable de la tension. L'irritation de la muqueuse nasale serait capable d'agir dans le même sens.
10° Influences diverses. — Tous les auteurs qui se sont occupés de tension ont signalé, chez certains sujets, d'un jour à l'autre ou même aux différentes heures de la journée, des variations parfois assez appréciables (HENSEN, GUMPRECHT, JANEWAY,, MIL-. LER, etc.). Il n'est pas toujours possible de faire la part, dans ces variations, des divers facteurs signalés plus haut. On conçoit qu'il serait périlleux de se laisser aller à la tentation de vouloir établir le bilan, par totalisations et soustractions, de leurs influences respectives; mieux vaut se résigner à concéder à ces fluctuations une certaine marge d'inconnu.
JOSUÉ et GODLEWSKI, en mettant en garde contre ces variations ont insisté sur l'utilité des examens répétés de la pression artérielle et concluent qu'un seul examen n'est pas suffisant pour apprécier l'état de cette tension. Les écarts, relevés par eux chez des sujets normaux ou hypertendus, atteignaient jusqu'à 2 à 3 centimètres et demi, d'un jour à l'autre, et parfois dans la même journée; il est vrai que ces auteurs opéraient avec l'oscillomètre de PACHON, susceptible de grossir la marge des variations de la tension systolique, et, de plus, il ne semble pas qu'ils aient pris soin de noter chaque fois le chiffre de tension résiduelle. DEADBORN, après avoir passé en revue toutes les conditions (au nombre de 24, d'après lui!) capables d'influencer le taux de la tension, conclut « que c'est seulement en répétant les mensurations chaque minute ou toutes les deux minutes pendant une demi-heure, plusieurs jours successivement, et en prenant soin, dans l'interprétation, d'éviter toutes les causes connues d'hypertension accidentelle, qu'on peut être assuré d'avoir une base exacte de mensuration ». Un tel luxe de précautions semble vraiment excessif!
Il est bon cependant d'attirer l'attention sur la baisse tensionnelle qui suit parfois le simple repos au lit, pendant les premiers jours de l'hospitalisation, surtout chez les individus précédemment surmenés (HENSEN, GUMPRECHT, PANCRAZIO, etc.). J'ai pu faire moi-, même assez souvent cette constatation: et il ne faut pas se hâter d'attribuer au régime ou à la médication ces chutes initiales de la
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pression. Je citerai, comme un des exemples les plus typiques, le cas d'un soldat, âgé d'environ quarante ans, très surmené par son séjour aux tranchées, et chez lequel une mensuration minutieuse, pratiquée quelques heures après son alitement à l'ambulance, donna le chiffre de 190-180/ 110, alors que durant les jours suivants, et cela sans variation notable du taux des pulsations, je ne pus jamais relever un chiffre supérieur à 150-145/90. Des variations aussi étendues sont absolument insolites et, le plus souvent, lés baisses tensionnelles attribuables au repos ou à l'hospitalisation ne dépassent guère 1 à 2 centimètre Hg.
II° Oscillations vaso-motrices spontanées. — En
recueillant chez l'animal des tracés de la pression artérielle pendant une période assez prolongée, on voit se dessiner sur le graphique des vagues de faible amplitude, mais de mouvement général assez large, qui indiquent bien que la pression artérielle ne reste pas toujours identique à elle-même. Si l'on donne aux variations systoliques et diastoliques, causées par les alternatives de contraction et de relâchement du ventricule, le nom d'oscillations de premier ordre, aux variations d'origine respiratoire le nom d'oscillations de deuxième ordre, on peut désigner sous le terme d'oscillations de troisième, ordre ces larges ondulations sur lesquelles les variations d'origine cardiaque ne s'inscrivent que comme des accidents et qui couvrent plusieurs périodes respiratoires (voir fig. 3).
Il semble bien que ce soit par erreur que l'on désigne communément ces ondulations sous le nom. d' « oscillations de TRAUBEHERING ». Ces auteurs, comme le font remarquer MORAT et DOYON, ont décrit, en 1860-69. des oscillations de la pression, isochrones avec la respiration et s'effectuant dans les limites d'un cycle respiratoire. On les observe sur le chien morphinisé ou curarisé, dont on a ouvert la poitrine et l'abdomen, coupé les phréniques et les vagues: si l'on suspend alors la respiration artificielle, qui entretient la vie de l'animal, la pression baisse pendant les efforts d'inspiration et monte pendant l'expiration. CARLO FOA a récemment montré que ces oscillations vaso-motrices, dont le rythme est semblable à celui de la respiration, sont supprimées par de fortes doses de chloral et par la section du bulbe ; la section des vagues supprime, de même, les légères inégalités périodiques du rythme
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cardiaque qui les accompagnent. Il est donc logique de voir en elles, comme le faisait FRÉDÉRICQ, l'effet d'une association des centrés vaso moteurs avec ceux de la respiration.
Les véritables oscillations vaso-motrices spontanées, embrassant plusieurs périodes respiratoires, reconnaissent sans doute une origine centrale. D'après KNOLL, elles correspondraient à des variations similaires dans la profondeur de la respiration et relèveraient de variations périodiques du tonus des centres respiratoire, et vaso-moteur. Se basant sur des travaux expérimentaux intéressauts, CUSHING (1901-1903) les attribue à de minimes variations de la pression intra-cranienne. Les vagues de pression haute correspondraient à un cerveau mieux irrigué, et s'accompagneraient d'hyperpnée, d'accélération du pouls ; les vagues de pression basse; à un cerveau anémié, et entraîneraient du ralentissement de la respiration et de la circulation. On entrevoit la parenté possible de ces oscillations vaso-motrices avec les phénomènes périodiques de CHEYNE-STOKES, sinon quant à leur signification, au moins quant à leur mode général de production 1.
12° Position du corps. — Il ne faut pas confondre l'influence de la position du corps (debout, assis, couché) sur la pression artérielle générale avec les modifications, dues à la pesanteur, qui peuvent se manifester, aux membres supérieurs ou inférieurs, lorsque se modifie leur situation respective par rapport au coeur, Dans le premier cas, que nous aurons seul en vue présentement, il s'agit d'une variation de la tension intra-aortique ; dans le second, sur lequelnous avons insisté plus haut, n'intervient que la simple addition ou soustraction de valeurs hydrauliques à la valeur dynamique initiale.
La majorité des auteurs admet que, dans la situation étendue, la pression artérielle a de la tendance à s'abaisser légèrement (5, à 10 millimètres Hg), les mensurations comparatives étant naturelle1
naturelle1 a décrit, en 1909, d'autres « oscillations périodiques dé la ; pression sanguine » obtenues, chez des chiens, à l'aide de médicaments cardiaques divers. Mais ces oscillations dépendent, en réalité, de troubles périodiques de l'activité cardiaque, relevant d'une conductibilité atrio-ventriculaire défectueuse et de l'apparition, à intervalles réguliers, d'intermittences ventriculaires.
MODIFICATIONS PHYSIOLOGIQUES 251
ment faites sur le bras, à la hauteur du coeur. Tel est l'avis d'EKGREN, COOK et BRIGGS, BRUSH et FAYERWEATHER, HILL, ERLANGER et HOOKER, JANEWAY, PRON, BERNTNARD SMITH. L'élévation légère de pression accompagnant la station verticale serait due à la vaso-constriction splanchnique, qui se produirait alors pour obvier à l'anémie cérébrale résultant de l'accumulation du sang dans les parties déclives. Cependant SEWAL, sur près de 70 sujets, a noté dans plus de, la moitié des cas (surtout chez des nerveux à paroi abdominale faible ou dès cardiaques décompensés) un abaissement de quelques millimètres dans la situation assise. De même, POTAIN, HENSEN, KARRENSTEIN admettent plutôt une élévation minime de la pression dans le décubitus horizontal, à moins que l'effort et le mouvement occasionnés par ces changements de position ne viennent contrebalancer ou annuler ces variations (POTAIN).
De ces discordances mêmes, on peut conclure, semble-t-il, que l'influence des changements de situation du corps sur la pression artérielle, si l'on a soin de pratiquer toujours les mensurations à la hauteur du coeur afin d'éliminer toute perturbation due à la pesan teur, est bien minime. Dans la pratique, elles ont d'autant moins d'importance que l'on est presque toujours amené à prendre la pression chez un individu donné dans la même position : au lit et en situation étendue, à l'hôpital ; assis et l'avant-bras sur une table, au cabinet. En tout cas, les différences ne sont pas telles que l'on soit autorisé à substituer une règle fixe aux commodités du moment.
13° Conditions extérieures. — L'appréciation de l'effet de la température ambiante sur la tension artérielle peut conduire à quelques résultats contradictoires. A côté de l'action directe sur les réseaux capillaires,il faut tenir compte des modifications vasomotrices réflexes, des variations concomitantes des rythmes respiratoire et circulatoire; et surtout du degré, de la brusquerie ou de la lenteur d'action, de la durée des variations thermiques. Il semble cependant que l'on puisse, dans les grandes lignes, s'en tenir à l'affirmation de POTAIN : « Une élévation très notable de la température extérieure entraîne habituellement un abaissement de la pression dans les artères, en même temps qu'une amplification très grande des pulsations ». Inversement, l'exposition au froid a de la tendance à faire monter la pression ; le fait a même été vérifié au
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cours d'affections fébriles diverses (tuberculose, pneumonie) chez des enfants. L'action des bains, qui touche de si près à celle de la température, sera envisagée avec les détails qu'elle comporte, plus loin, à propos des modifications thérapeutiques de la tension artérielle.
On ne peut songer à étudier, l'influence des variations de la pires-, sion atmosphérique sur la tension artérielle, à la suite d'ascensions pénibles mettant en jeu toutes sortes de facteurs. — C'est en suivant les modifications de cette tension en cloche pneumatique que l'on risque le moins de s'égarer. Et cependant, comme on va le voir, les expériences sont loin d'avoir donne des résultats absolument concordants. Lors d'abaissements de la pression, LAZARUS et SCHIRMUNSKI (1884) auraient constaté une chute tensionnelle de 25 à 35 millimètres Hg, pour une baisse pneumatique allant de 760 milimètres à 38o millimètres Hg, c'est-à-dire d'une demi-atmosphère ; alors que STAEHLIN (1909)..conclut que la pression sanguine maxima ou minima, pas plus que l'amplitude du pouls, ne sont sensiblement modifiées par la raréfaction de l'air (la pression était abaissée en une heure jusqu'à 420 millimètres Hg, c'est-à-dire à une pression inférieure à celle existant sur le Mont-Blanc). De même, l'élévation de la pression atmosphérique ne déterminerait que des variations assez minimes de la tension artérielle. POTAIN avait plutôt constaté une baisse de la pression (environ 2 centimètres Hg) pour une élévation de pression de 28 millimètres Hg, alors que CRILE, en 1903, estimait au contraire que l'air comprimé avait tendance à élever légèrement la pression chez les animaux, même après section de la moelle. Plus récemment, JAVAL a mesuré comparativement à l'air libre et dans l'air comprimé, à l'aide de roscillomètre de PACHON, la tension artérielle des ouvriers travaillant en caissons. Dans ses expériences, la surpression était en moyenne d'une atmosphère et, 17 fois sur 20, il put noter une augmentation de la tension maxima ; les différences étaient du reste très minimes, 10 à 20 millimètres Hg en général. — Les recherches faites aucours d'ascensions passives en ascenseur, en funiculaire, en ballon,, en aéroplane, montrent assez, par la diversité des résultats, que le facteur barométrique est loin d'être seul en jeu. A la suite d'ascensions en ballon à une hauteur de 300 mètres ou simplement à la tour Eiffel, POTAIN note une élévation de pression de 2 centi-
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mètres Hg, en moyenne, et arrive à la conclusion « qu'un changement rapide de la pression atmosphérique amène un changement de sens inverse de la pression artérielle dans des proportions telles que, d'ordinaire, pour un abaissement ou une élévation barométrique de 10 millimètres Hg, il se fait un changement de pression artérielle en sens inverse de 7 millimètres Hg (tout au moins lorsque la dénivellation ne varie que de 3 à 400 mètres) ». A la suite d'expériences en funiculaire de haute altitude, GUILLEMARD et RÉGNIER arrivent au contraire à cette conclusion qu'aucun changement de pression n'est à craindre, même du fait de la décompression résultant d'une ascension à 4. 000. En aéroplane, à une altitude modérée de 3 à 500 mètres, FERRY, GEMELLI ont noté, chez des passagers, une diminution de la maxima et de la minima; au-dessus, d'après FERRY, la maxima augmenterait lentement et progressivement pour devenir égale ou un peu supérieure au taux primitif. Il est à peine besoin d'insister sur les difficultés techniques que peuvent présenter de telles mensurations ! — Quant aux modifications de la pression notées chez des pilotes aviateurs, surtout au moment de l'atterrissage, on comprend que. la fatigue physique, un certain degré d'épuisement nerveux doivent intervenir pour une large part, à côté de l'accroissement barométrique rapide. Au retour d'un vol plané de plus de 2.000 mètres d'altitude, CROUZON a noté une légère élévation de la pression artérielle. FERRY signale diverses modifications au moment du vol et insiste surtout, après le vol et au moment de l'atterrissage, sur une hypotension artérielle maxima coïncidant avec une élévation de la tension minima, modifications d'autant plus accusées que l'ascension a été plus élevée et la descente plus rapide. Cette hypotension artérielle, avec réduction de la pression variable, serait capable de persister un certain temps et, par l'anémie cérébrale qu'elle entraîne, d'expliquer certaines manifestations du « mal des aviateurs » (somnolence, défaillances, vertiges, etc.). JOSUÉ admet de même que la pratique de l'aviation détermine un abaissement de la pression artérielle maxima, sans modification de la minima ; hypotension qui aurait du reste de la tendance à disparaître chez un pilote aguerri, quitte à reparaître au moment des périodes de surmenage. Cette hypotension de début ou de surmenage constituerait un élément important du syndrome, décrit par cet auteur,
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d' « asthénie des aviateurs » et considéré par lui comme la conséquence d'une insuffisance surrénale, Ajoutons enfin. qu' ETIENNE et LAMY ont noté, chez les aviateurs, un certain degré d'hypertrophie cardiaque, sorte d'effort d'adaptation nécessité par « les modifi-, cations de tension maxima et minima pendant le Vol, alternatifvement hyper pu hypotensives, se maintenant, ou s'accentuant pendant un temps notable après l'atterrissage ». Il est naturellement impossible de faire la part, dans toutes ces modifications tensionnelles ou cardio-vasculàires, de la raréfaction de l'air dans les milieux traversés ou des.circonstances diverses (tension nerveuse, efforts physiques, émotions, etc.) intervenant pendant, le vol. Il semble prudent de considérer l'hypotension artérielle de la période d'apprentissage ou d'efforts intensifs des aviateurs, plutôt comme une réaction banale de surmenage, que comme la conséquence directe d'un sport s'exerçant en milieu raréfié.
L'action des différents climats est encore plus difficile à analyser à cause de la multitude des facteurs qui entrent enjeu. Il semble, d'après MUSGRAVE et SISON, qu'une certaine hypotension soit plutôt la règle chez les sujets habitant sous les tropiques ; même constatation a été faite par CHAMBERLAIN, aux Philippines, au moins pendant la saison la plus chaude de l'année. Après un séjour prolongea une altitude moyenne ou élevée, plusieurs auteurs (SCHNEIDER et HEDBOM, STAUBLI, SIEBELT) ont constaté une légère baisse de la pression, mais il s'agissait le plus souvent de sujets hypertendus; et le repos, l'amélioration de l'état général suffisaient peut-être à expliquer ces modifications. On comprend aussi que, dans une station d'altitude élevée, l'exercice puisse provoquer des modifications excessives de la pression artérielle (élévation plus forte, retour plus lent à l'état normal) au moins chez les sujets non acclimatés (SCHNEIDER, CHÉLEY et SISCO).
De tout ce qui précède et du grand nombre des facteurs capables d'influencer, dans un sens ou dans l'autre, la pression artérielle, on pourrait conclure que la tâche du médecin désireux de suivre les variations de cette tension est bien ardue et repose sur des assises particulièrement mouvantes.
MODIFICATIONS PHYSIOLOGIQUES 255 .
La réalité est tout autre. Si l'on prend soin d'user d'une bonne méthode sphygmomanométrique, afin de réduire au minimum les cause d'erreur, si l'on s'astreint à attendre et à noter chaque fois le chiffre de tension résiduelle, et si l'on tient compte plutôt de l'ensemble des mensurations, qui auront été, faites pendant un laps' de temps déterminé, que de telle ou telle variation accidentelle, c'est l'impression d'une assez grande fixité qui se dégage des études sphygmomanométriques. Il n'est pas rare, à 5 ou 6 mois, à un an de distance, de retrouver chez tel malade exactement les mêmes chiffres, de tension systolique ou diastolique que ceux notés précédemment. Cela tient à ce que l'on est conduit, par la force même des choses, à prendre Ordinairement la tension chez les sujets dans des conditions à peu près équivalentes, à ce que ces variations d'origine accidentelle sont très minimes, à cette circonstance enfin que, si elles s'additionnent parfois,.elles peuvent tout aussi bien s'annuler.
La marge d'erreur ne dépasse pas ce que l'on observe dans les autres méthodes utilisées en clinique. Les fluctuations du pouls, sous l'influence de ces divers facteurs physiologiques, sont autrement étendues ; qui songerait cependant à contester l'importance de la numération des pulsations dans l'appréciation des divers états circulatoires ? La température, elle aussi, est influencée (sans parler des variations nycthémérales) par les repas, la fatigue physique, et pourtant il n'y a pas en clinique de guide plus sûr. Comme nous l'avons dit, il faut se défier des conclusions spécieuses, des interprétations trop subtiles; ne pas vouloir faire de la sphygmomanométrie au millimètre ; encore moins, et presque inconsciemment, exalter ou négliger l'importance de minimes variations suivant qu'elles cadrent ou ne cadrent pas avec le résultat attendu et les idées préconçues. Aux variations à longue portée, il faut imposer le contrôle du temps, et soumettre à l'épreuve d'examens répétés les modifications épisodiques.
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262 CLINIQUE SPHYGMOMANOMETRIQUE
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MODIFICATIONS GENERALES DE LA TENSION 263
SECTION II
MODIFICATIONS PATHOLOGIQUES DE LA TENSION ARTÉRIELLE
Ce chapitre forme la partie de beaucoup la plus importante des modifications de la tension artérielle. Il embrasse l'ensemble de toutes les variations de l'équilibre circulatoire pouvant apparaître, comme manifestation initiale ou secondaire, au cours des diverses affections. C'est vraiment là « Pathologie, de la circulation » dont il s'agit de suivre le fil sous l'écheveau compliqué des réactions morbides.
Un programme aussi vaste ne peut qu'être esquissé dans l'état actuel de nos connaissances, et il faudra encore bien des recherches pour en permettre la réalisation complète. Déjà, cependant, il nous semble que l'on peut faire mieux qu'un sec inventaire des modifications de la tension au cours des maladies. Des observations particulières, se dégagent certaines lois générales, certains ensembles, capables de servir de guide au médecin dans ses études sphygmomanométriques.
Nous mettrons tout d'abord en relief, dans une sorte d'étude synthétique, les faits les plus généraux; c'est ensuite avec plus de fruit qu'il nous sera possible d'aborder l'étude analytique des variations de la tension dans les diverses affections, en insistant sur.les particularités que nous n'aurons pu signaler dans lu première partie.
PREMIERE PARTIE ÉTUDE SYNTHETIQUE
L'étude d'ensemble des modifications pathologiques de la tension artérielle comprend au moins trois parties, d'importance du resté : très inégale. — La première, qui réunit à elle seule la presque totalité des faits connus, a trait aux modifications générales de la tension, telles qu'on les trouve réalisées, au sortir du coeur en quelque sorte, dans le réservoir aortique et les gros troncs artériels de la base; ce sont elles qui dominent de haut tout le régime circulatoire et leur étude nous retiendra longtemps. —- Mais cette tension intra-aortique peut ne pas se propager uniformément dans tout le territoire vasculaire, dont les divers départements conservent une certaine autonomie vaso-motrice ; il faudra donc compter, avec certaines variations régionales de la tension, plus faciles à soupçonner qu'à démontrer dans la profondeur du domaine viscéral, mais dont l'étude a pu être tentée au niveau des segments des différents membres. -— Enfin, dans un territoire vasculaire donné, on peut supposer que la dégradation locale de la pression, du centre à la périphérie, est capable de varier suivant certaines conditions ; nous en dirons quelques mots.
CHAPITRE PREMIER MODIFICATIONS GÉNÉRALES DE LA TENSION ARTÉRIELLE
C'est dans l'aorte, et même dans l'aorte ascendante directement, qu'il faudrait théoriquement plonger le manomètre pour se rendre;
MODIFICATIONS GÉNÉRALES DE LA TENSION 265
un compte exact des modifications générales de la tension artérielle; les chiffres seraient alors obtenus à la source, avant toute dégradation et en dehors de toute réaction des circulations locales. Pratiquement, l'humérale est l'artère la plus proche du coeur sur laquelle on puisse faire porter l'exploration sphygmomanométrique ; cette proximité, nous l'avons vu, est même une des raisons de la supériorité des appareils à compression brachiale, sur les appareils s'appliquant sur la radiale ou les artères digitales.
Une question préjudicielle ne s'en pose pas moins, qui est de savoir si l'on est vraiment en droit de conclure de la pression numérale à la pression intra-aortique et si la prétention de pouvoir juger, d'aussi loin, des modifications générales de la tension est justifiée. Les constatations des physiologistes sont, à ce point de vue, très rassurantes. C'est un fait universellement établi, depuis POISEUILLÉ, que la tension, dans les artères de diamètre moyen, ne diminue que très lentement avec l'éloignement du coeur. VOLKMANN, prenant, en même temps, la tension dans la carotide et dans la crurale, ne trouve qu'une différence d'un demi-centimètre.. De même, DAWSON (1900), faisant des mensurations dans le tronc innommé et dans l'humérale droite, trouve 160 millimètres Hg dans le premier vaisseau, 156 dans le second. C'est dire que la dénivellation doit être bien minime entre la pression intra-aortique et celle enregistrée au niveau de l'humérale.
Mais il n'y a pas que le facteur « éloignement » à considérer. Si l'humérale peut théoriquement être envisagée comme un piézomètre plongeant dans l'aorte et en traduisant fidèlement la pression,, il faut compter aussi avec l'interposition, entre le segment humeral exploré et l'aorte, d'une assez longue crosse artérielle (figurée par le tronc brachio-céphalique, la sous-clavière, Taxillaire, la partie supérieure de l'humérale) dont le diamètre, la résistance à la distension, l'élasticité peuvent varier singulièrement suivant les individus. N'y aurait-il pas là une nouvelle cause d'erreur, et d'autant plus inquiétante que les perturbations introduites de ce fait dans l'appréciation de la tension intra-aortique ne représenteraient pas une valeur fixe, mais seraient capables de varier notablement suivant l'état du système artériel?
Là encore, peu de craintes à avoir; au moins si l'on met hors de cause les rétrécissements artériels, sur lesquels nous reviendrons
266 CLINIQUE SPHYSMÔMÀNO METRIQUE
plus loin, et qui constituent un accident, pathologique nettement défini et, somme toute, assez rare. Récemment encore, MACWILLIAM, KESSON et MELVIN 1 ont démontré jusqu'à l'évidence qu'avec une tension aortique donnée l'indication de pression fournie par l'exploration de l'humérale ne variait en aucune façon suivant la qualité du vaisseau qui réunit l'humérale à l'aorte. Ces auteurs Ont fait dés expériences aussi nombreuses que concluantes, en interposant entre,un système générateur de pression intermittente et l'appareil explorateur plusieurs tubes de 30 centimètres de longueur, constitués soit par une carotide de mouton contractée ou relâchée, soit par un tube de verre de diamètre égal a celui de la carotide relâchée. La substitution de l'un de ces tubes à l'autre ne troublait en rien la transmission de l'onde systolique, qui se faisait aussi intégralement dans les trois cas. Il faut conclure de ceci que le tube artériel normal conduit si bien l'onde de pression, que l'accroissement de rigidité de ses parois se trouve impuissant à améliorer beaucoup cette transmission. Peu importe donc que la sous-clavière et l'axillaire soient ou non athéromateuses ;. le piézomètre artériel qui plonge dans l'aorte est, dans les deux cas, un indicateur aussi sûr2.
Maintenant que nous sommes certains de ne pas construire sur des bases mouvantes, il nous est loisible d'aborder l'étude des modifications générales de la tension artérielle. Pour être claire, cette étude devra comprendre deux parties. — Nous décrirons d'abord ce que l'on pourrait appeler les types circulatoires ; c'est-à-dire les états circulatoires, considérés en quelque sorte en eux-mêmes, au moment de l'exploration, à un point de vue presque purement physique, et tels qu'ils peuvent être définis par une simple formule, sphygmomanométrique. —- Il nous sera plus facile, à la suite, de
1 MACWILLIAM, KESSON et MELVIN, la Conduction de l'onde pulsatile et son importance dans la mensuration de la pression artérielle (Heart, 1913, IV, p. 393.)
2Ceci ne veut pas dire que les qualités d'élasticité ou de rigidité du système artériel n'aient aucune influence sur la pression sanguine. Il est évident, au contraire, que la pression intra-aortique elle-même variera beaucoup, suivant que l'élasticité artérielle, locale ou générale, permettra une distension plus facile du vaisseau ou un écoulement plus rapide du Sang à la périphérie. Mais, cette pression aortique ayant une valeur donnée, son exploration par l'intermédiaire d'un tube élastique ou non n'a pas d'importance appréciable, ce tube représentant une trop petite partie du système artériel.
TYPES CIRCULATOIRES 267
tracer l'histoire des diverses réactions tensionnelles, en signalant alors le passage d'un type circulatoire à l'autre et en insistant surtout sur l'évolution de ces variations de la préssion.
ARTICLE PREMIER TYPES CIRCULATOIRES
Il importe de ne pas se méprendre sur là signification à attacher aux estimations sphygmomanométriques
La circulation est chose compliquée et on ne connaît pas la circulation parce que l'on connaît la valeur exacte de la tension artérielle, A côté des gros troncs artériels dans lesquels on la mesure, il y a les artérioles, les capillaires, les veines, Dans ces gros canaux euxmêmes, il n'y a pas que la tension qui importe, mais encore la vitesse de la circulation, l'importance du débit. La pression artérielle peut être normale et la circulation très défectueuse si, par exemple, dans des artères sclérosées, une faible ondée ventriculaire coïncide avec un débit périphérique réduit.; par contre, avec une hypertension artérielle élevée, l'état circulatoire peut rester véritablement excellent, au moins fort longtemps,
Ce qu'indique la mesure de la tension dans l'humérale, et de ce fait dans l'éventail artériel qui s'échappe du coeur, c'est uniquement la pression qui règne dans le réservoir élastique d'où s'écoule le sang; c'est la hauteur de chute du torrent circulatoire, La donnée fournie est de tout point analogue à celle que procurerait une lecture manométrique dans l'ampoule intermédiaire d'une soufflerie de Richardson, ou encore dans le réservoir à air d'une pompe à incendie. On comprend que, dans ce dernier cas notamment, pour être fixé sur le rendement de l'appareil, il faudrait joindre aux constantes manométriques d'autres évaluations, concernant la capacité d'aspiration, la vitesse du liquidé dans les tubes, le débit au bout de la lance,
Dans l'impossibilité où nous sommes, chez l'homme, de mesurer la vitesse de la circulation et de jauger le débit ventriculaire, il
268 CLINIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
faut bien cependant nous contenter de ces données manométriques. Nous allons voir que, malgré leur imperfection, elles seront capables de nous conduire à une différenciation intéressante des types circulatoires. Mais, sur lequel des chiffres de tension, fournis par la sphygmomanométrie, devrons-nous asseoir cette différenciation?
a. Tension systolique. — Pendant longtemps, la tension systolique a servi de base unique aux estimations sphygmomanométriques ; la plupart des appareils ne pouvant fournir que cette valeur maxima (appareils dé POTAIN, RIVA-ROCCI, GAERTNER). C'est sur cette seule, estimation que réposait la distinction des malades en hypos tendus et hypertendus. Une telle façon de procéder constituait déjà un progrès capital dans l'examen clinique ; et, maintenant encore, un médecin qui ne disposerait que de ce moyen d'investigation pourrait encore en tirer grand profit, à la condition d'être prévenu de la possibilité de certaines interprétations défectueuses. Mais, si l'on veut serrer de près l'étude des types circulatoires, ce serait une 1 faute grossière que de se priver du secours apporté par l'évaluation du taux de la pression diastolique dans la compréhension exacte des phénomènes de la circulation. Nous ne pouvons en donner de meilleur exemple que celui rapporté en 1910 dans là première édition de cet ouvrage. « Nous avons en ce moment dans notre service, écrivions nous alors, trois malades à peu près du même âgé, qui, à ne considérer que leur pression systolique oscillant entre 15o et 160 millimètres Hg (au RIVA-ROCCI), peuvent être classés sous la rubrique uniforme d'hypertendus moyens. Mais quelle différence entre eux, si l'on considère le chiffre de pression diastolique ! Tandis que chez l'un d'entre eux, atteint de néphrite,banale, la pression diastolique marque 90 millimètres Hg, cette pression diastolique s'élève à 130 millimètres Hg chez un autre souffrant de néphrite subaiguë grave avec retentissement précoce et marqué sur le coeur droit, et s'abaisse à 55 millimètres Hg chez le troisième, soigné pour une insuffisance aortique d'origine syphilitique, délimitant ainsi des écarts extrêmes, entre la pression maxima et la pression minima, de 30 à 100 millimètres Hg! A côté de ces cas typiques, ajoutionsnous, où le diagnostic s'inscrit en quelque sorte sur le sphygmogramme absolu et peut se lire sur la simple énumération des chiffres de tension, il en est d'autres très nombreux où ces écarts, pour être
TYPES CIRCULATOIRES
269
moins marqués, n'en donnent pas moins des notions précieuses sur l'état de vacuité ou de réplétion du système artériel et par conséquent sur l'état de la circulation ». Et, de fait, il suffit de jeter les yeux sur la figure ci-dessous, pour se rendre compte qu'une même tension systolique peut couvrir des états circulatoires singulièrement
singulièrement et que, à elle seule, elle est impuissante à définir un type circulatoire.
b. Tension moyenne. — Dès qu'on eut trouvé le moyen de délimiter le taux de la pression minima, de nouveaux horizons s'ouvrirent. On ne. pouvait songer à utiliser uniquement le taux de la pression variable, mesuré par l'écart entre la pression systolique et la pression diastolique, qui eût conduit à des résultats trop incertains. Mais, du moins, pouvait-on nourrir l'ambition de connaître ce que les physiologistes appellent la pression moyenne, cette pression moyenne étant celle qui conditionne réellement la vitesse du courant sanguin continu dans les capillaires et que l'on mesure' dans les laboratoires en branchant un manomètre compensateur sur le trajet de l'artère explorée. Son évaluation se fait aisément en ajoutant à la pression minima la moitié de la pression variable,
FIC. 95. - Égalité du taux de la tension systolique dans des étais circulatoires
circulatoires différents. — Le premier sphygmogramme a trait à un
homme de trente ans, atteint de néphrite subaiguë avec insuffisance
cardiaque précoce; le second, à un sujet atteint de néphrite chronique
banale; le troisième, à un malade présentant une large insuffisance
aortique, avec hypertension modérée.
270 CLINIQUE SPIIYGMOMANOMÉTRIQUE
ou en prenant la moitié de la somme des tensions maxima ou
minima :
Pression moyenne
Cette, valeur n'est plus utilisée actuellement pour deux raisons, excellentes..—- Son évaluation exacte est loin d'être aussi sijmpleque pourrait le faire supposer la formule inscrite ci-dessus, comme l'a fait remarquer récemment FRANÇOIS-FRANCK. « Tout ce qu'on peut : dire actuellement, écrit cet auteur, c'est que, selon les données expérimentales d'ERLANGER et BRUSH, la pression moyenne se rapprocherait beaucoup plus de la pression minima que de la pression maxima et ne correspondrait jamais,. malgré la croyance contraire assez répandue, à la moyenne arithmétique de ces deux valeurs, ERLANGER et BRUSH adoptent, comme chiffre le plus correct, le tiers inférieur de l'écart entre les deux pressions, systolique et diastolique; par exemple, avec une maxima de 170 et une minima de 110, la pression moyenne serait de 130 millimètres. Au point de vue pratique) n'ayant pas mieux à indiquer, on peut accepter que la , moyenne correspond sensiblement au tiers inférieur de l'écart entre la maxima et la minima, selon la conclusion d'ERLANGER et BRUSH 1. » — Mais l'objection la plus grave est que, si la pression moyenne convenablement calculée est capable de donner certaines indications sur la circulation du sang dans le réseau capillaire, l'adoption de cette valeur comme base de classification des types circulatoires n'en conduirait pas moins à une extrême confusion, en négligeant systématiquement toutes les caractéristiques de la circu1
circu1 Cette évaluation approximative, ajoute FRANÇOIS-FRANCK, doit du reste varier notablement d'après mes propres recherches, soit sur des appareils : schématiques, soit sur les animaux avec deux manomètres à Hg inscrivant simultanément et en rapport avec le même vaisseau, l'un subissant les variations de la pression dans leur totalité, l'autre fonctionnant en compénsateur. On voit varier la ligne de pression médiane par rapport à celle qui relie les bases et les sommets des oscillations; la moyenne se rapproche tantôt de l'une, tantôt de l'autre, suivant que la pression s'élève ou s'abaisse, suivant que les impulsions sont fréquentes ou lentes, et les rapports de cette ligne avec les deux autres subissent un retard qui n'est pas constant. »
Il est à remarquer que ces expériences ont été faites avec un manomètre à mercure qui, en altérant la valeur réelle des pressions maxima et minima, a pu fausser, dans une certaine mesure, les résultats obtenus.
TYPES CIRCULATOIRES 271
lation artérielle. C'est ainsi que l'on verrait, comme le montre le tableau ci-dessous, des états circulatoires aussi différents que possible,
s'exprimer cependant par un même chiffre de tension moyenne, c. Tension' diastolique. —Lorsque, de nombreux auteurs (JOSUE, AMBLARD, MARTINET, LIAN, etc.) et nous-même eurent montré Importance de la détermination de là pression diastolique dans l'appréciation des états circulatoires, il se produisit, comme toujours dans l'histoire des doctrines pathologiques, une réaction exagérée en faveur de cette donnée nouvelle. PACHON, qui avait eu également le mérite d'attirer l'attention des médecins sur l'importance de la pression-minima, proposa, en 1913, de faire de cette tension minima « l'élément basai de classification des états artériels..., l'étalon sphygmomanométrique qui doit servir de base rationnelle à la fixation des états d'hypo et d'hypertension artérielles » ; la pression
FIG. 96. Egalité du taux de là, « 'tension moyenne » dans des affections
diverses. — Il s'agit de malades atteints respectivement d'insuffisance aortique, d'hypertension artérielle bien tolérée, de néphrite grave avec insuffisance cardiaque.
En calculant la tension moyenne; non plus d'après la moitié, mais d'après le tiers de la pression variable, il serait aisé de montrer la même équivalence de la pression moyenne, à 110 millimètres Hg par exemple, dans des cas radicalement distincts. Exemple insuffisance aortique large, 210/60 ; hypertension moyenne avec bradyeardie légère; 170/80; néphrite et insuffisance cardiaque, 130/100.
272 CLINIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
systolique devant seulement « servir d'élément utile certes, mais second,, pour établir les sous-groupes des états d'hypo ou d'hypertension, établis initialement sur la base de la pression minima ». Les arguments mis en avant par cet auteur, pour rabaisser l'importance de la pression systolique, sont loin d'avoir tous la même valeur. — Si c'est bien la pression minima qui règle l' effort initial du coeur au moment du début de l'évacuation ventriculaire, il n'en est pas moins vrai que l'effort total de l'organe est tenu de se modeler, pendant toute la durée de la contraction ventriculaire, sur le taux progressivement croissant de la pression artérielle ; le taux diastolique de la pression peut bien marquer le point de départ de l'effort cardiaque, mais c'est le taux systolique qui seul en indique le développement et la limite. — La pression maxima né représente, ajoute cet auteur, qu'un court moment de la. pression artérielle. C'est exact, mais l'estimation fournie par le chiffre de la pression minima, tout en indiquant le taux au dessous duquel la tension artérielle ne s'abaisse, jamais, ne correspond en réalité qu'à un moment tout aussi fugitif (le fond des vallées, dans les courbes de pression variable, étant à peu de choses près aussi aigu que peuvent l'être les sommets); et gagne-t-on beaucoup plus à choisir, ' comme base d'appréciation, une valeur minima dont on ignore l'accroissement, de préférence à une valeur maxima dont la décroissance est inconnue? — Il est exact aussi que la tension systolique est plus variable que la tension diastolique, ce qu'explique en partie son taux plus élevé. Il faut convenir toutefois que, chez les sujets en état d'équilibre circulatoire, ces variations sont assez, réduites si l'on substitue la méthode de RIVA-ROCCI à la méthode oscillatoire dans son appréciation et si l'on a soin d'attendre le chiffre résiduel. Pour ce qui est de ces véritables effondrements de la tension systolique, que l'on constate parfois au cours de certaines insuffisances cardiaques, leur valeur séméiologique est telle que l'on aurait mauvaise grâce à refuser à ces déficiences de lA pression maxima une importance égale à celle de la fixité relative de la tension minima, dans l'appréciation générale de l'état de la circulation. — Quant à prétendre « qu'une pression maxima élevée ne traduit pas nécessairement une hypertension réelle pathologique et peut être, chez un individu normal, seulement , l'expression simple de systoles vigoureuses d'un coeur énergique ou peu ménager
TYPES CIRCULATOIRES 273
de son travail », on ne voit qu'assez difficilement à quoi cela peut répondre, si l'on admet bien entendu que cette élévation de la tension systolique est réelle et n'est pas simplement due à une technique défectueuse.
Il est si peu vrai que le chiffre de pression minima soit en droit
de s'imposer « comme la base des données et des classifications sphygmomanométriques » que l'on peut faire à cette conception exactement les mêmes critiqués que celles adressées par PACHON à l'insuffisance dé la sphygmomanométrie systolique exclusive. « Un même chiffre dépression maxima (c'est l'expérience banale quotidienne), écrit-il, se rencontre dans des états cardio-vasculaires
L. GALLAVARDIN. 18
FIG. 97. — Egalité, du taux de la tension diastolique au cours d'états
circulatoires très différents. —Le premier tracé a trait à un homme
atteint d'aortite syphilitique avec insuffisance aortique et néphrite
hypértensive concomitante; le second, à un sujet présentant une hypertension artérielle solitaire, sans albuminurie, avec, tolérance parfaite; le troisième,à un malade atteint de néphrite subaiguë avec insuffisance cardiaque très grave.
274 CLINIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
très différents. » Or, il en est de même pour la pression minima. Deux exemples, comme nous l'écrivions en 1914, suffiront à le démontrer. Voici trois malades qui ont une tension diastolique de 70 millimètres Hg : or, le premier est un individu normal (126/70), cet autre présente une volumineuse insuffisance aortique avec légère néphrite concomitante (180/70), le troisième enfin se trouve être simplement un hypertendu latent et modéré avec bradycardie à 52 (160/70). Trois autres malades présentent une tension diastolique de 120 millimètres Hg, mais il s'agit dans le premier cas d'une insuffisance aortique syphilitique avec forte hypertension (270/120), dans le second cas, d'un hypertendu latent (220/120) quia peutêtre devant lui plusieurs années de tolérance parfaite, tandis que le troisième malade, atteint de néphrite, subaigue gravé avec fléchissement cardiaque (150/12o), est. condamné à mourir avant quelques semaines (fig. 97). Est-il besoin d'insister davantage pour montrer que, même en face de la pression minima, la tension maxima conserve tous ses droits ?
d. Les deux tensions. — Toutes ces considérations montrent combien il est oiseux d'opposer lés deux valeurs de la tension . artérielle, maxima et minima, l'une à l'autre ; comme d'exalter l'une . aux dépens de l'autre. En réalité, ce n'est ni sous l'influence de la tension systolique, ni sous celle de la tension diastolique que le sang circulé dans les artères, mais sous l'effet d'une tension sans cesse variable et intermédiaire à elles deux. Il faut donc revenir à
1 Le dénigrement de la tension systolique a été poussé plus loin encore par VÉBUT, en 1915. « En réalité, écrit-il, il ne saurait y avoir qu'une seule tension artérielle moyenne constante, avec des oscillations systolo-diastoliques négligeables et situées au niveau de Mn... Il y a bien un écart réel entre la tension systolique et la tension diastolique, mais cet écart est très faible et |ne dépasse guère normalement i centimètre Hg. » Pour lui, la tension systolique n'existerait jamais dans les vaisseaux; c'est un produit artificiel de la compression artérielle, cette compression « introduisant dans le système artériel une résistance telle qu'il n'en existe jamais dans la réalité de la dynamique circulatoire, puisqu'elle n'aboutit à rien moins qu'à supprimer, le cours du sang dans le vaisseau exploré ». Des idées analogues ont été soutenues par F. LÉVY (1919), sans que l'on puisse bien Comprendre comment ces auteurs ont été conduits à une semblable conception par la considération du tracé reproduit figure 56; le degré d'amplitude des oscillations de la colonne mercurielle pouvant dépendre de multiples facteurs, et notamment de la capacité du réservoir aérien interposé entre la paroi artérielle et du manomètre.
TYPES CIRCULATOIRES 275.
l'évidence et admettre que les deux tensions,_ maxima et minima, sont également indispensables à l'appréciation correcte de la circulation; et c'est sur ces deux chiffrés de tension que doit être basée toute classification des types circulatoires.
Dès lors, et puisque nous sommes dans l'obligation déconsidérer continuellement les deux chiffres de tension, la division qui nous paraît la plus naturelle est de distinguer, parmi les divers types circulatoires : 1° les types circulatoires normaux, dans lesquels les rapports ordinaires des tensions systolique et diastolique sont conservés; 2° les types circulatoires anormaux, dans lesquels ces rapports sont altérés. Nous verrons plus loin pourquoi cette base de classification nous semble devoir être préférée à celle qui ferait intervenir prématurément l'appréciation d'un état fonctionnel d'équilibre ou de déséquilibre circulatoire.
§ 1. TYPES CIRCULATOIRES NORMAUX TENSION NORMALE, HYPOTENSION SIMPLE, HYPERTENSION SIMPLE
a. Echelle lensionnelle. — Si l'on , relève les chiffres de tension chez un grand nombre d'individus, normaux ou atteints d'affections diverses, en veillant simplement à ce que ces sujets ne présentent pas de troubles fonctionnels circulatoires notables, la représentation graphique des valeurs obtenues figure une sorte d'échelle de tension, qui va nous fixer sur les rapports existant normalement entre les pressions systolique et diastolique (fig. 98).
Ce tableau schématique, qui est la reproduction de celui que nous avions figuré dans la première édition de cet ouvrage, nous, apprend: 1° que, dans l'ascension progressive de la pression artérielle, la tension systolique s'élève toujours proportionnellement, davantage que la tension diastolique ; 20 que, par suite, le taux de la pression variable augmente, d'une façon à peu près constante, avec le degré de l'hypertension artérielle.
L'explication de cette donnée sphygmomahométrique fondamentale est aisée à fournir. On pourrait se demander il est vrai
27 6 CLINIQUE SPHYGMOMANOMETRIQUE
si, au cours des divers processus hypertensifs, le coeur ne se serait pas progressivement accoutumé à projeter dans l'arbre aortique une ondée systolique plus volumineuse. Le fait est possible, mais il est
sans doute loin d'être général et, en tout cas, là ne doit pas être cherchée la cause principale du non-parallélisme des lignes de niveau maxima et minima. C'est dans le mode spécial de réaction élastique de la paroi artérielle que se trouve l'explication véritable ; et il est absolument prouvé, depuis les travaux de MAREY, que, même à ondée systolique égale, on assiste à là même prééminence d'ascension de la ligne de niveau systolique, au même accroissement de la pression variable.
Tous les auteurs qui se sont occupés de cette question, à la suite de MAREY (ROY, HÜETHLE, MACWILLIAM, STRASBURGER, .etc.) sont
FIG. 98. — Figure schématique destinée h montrer iaugmentation progressive de la pression variable, au fur et à mesure de l'élévation tensionnelle.
TYPES CIRCULATOIRES
277
arrivés à la même conclusion : la dilatabilité des parois de l'aorte diminue au fur et à mesure que s'élève la pression intérieure qu'elles supportent ; ou encore, comme l'exprimait MAREY, « la réaction élastique des parois de ce vaisseau croît plus vile que la pression intérieure à laquelle elles sont soumises 1 ». Il suffit, pour rendre parfaitement sensible cette loi de l'élasticité artérielle, de citer quelques chiffres obtenus par STRASBURGER, qui a expérimenté sur des aortes humaines à l'aide d'un procédé presque en tous points semblable à celui primitivement employé par MAREY (fine membrane de caoutchouc à l'intérieur de l'aorte, aorte placée dans une caisse remplie d'un liquide dont les variations de niveau permettent d'apprécier facilement les variations de volume du vaisseau). Le tableau suivant a trait aune aorte légèrement sclérosée d'un homme de cinquante ans. Dans une première expérience, on injecte chaque fois 4 centimètres cubes de liquide et l'on note les différentes tensions développées à l'intérieur du vaisseau ; dans une seconde
expérience, on augmenté progressivement la pression, de 20 millimètrês Hg en 20 millimètres Hg, en notant chaque fois les variations de volume du vaisseau ou, ce qui revient au même, la quantité de
liquide injectée.
VOLUME PRESSION DIFFÉRENCE PRESSION VOLUME DIFFERENCE
0cc 40mmHg 40mmHg 0cc 0cc
4 50 10mmHg 60 8,5 8,5
8 61 11 80 14,4 5,9
12 73 12 100 18,0 4,2
16 87 14 120 22,0 3,4
20 106 19 140 24,5 2,5
24 133 26 160 26,8 2,3
28 170 37 180 28,7 1,9
32 218 48 200 30,4 1,7
36 270 52 220 32,0 1,6
240 33,3 1,4
des deux tableaux nous montrent aussi clairement que possible : qu'une même quantité de liquide introduite dans l'aorte
1 Si l'on reporte sur un graphique, avec ordonnées et abcisses, les résultats obtenus dans les diverses expériences, on obtient toujours une courbe nettement concave et non une ligne droite, comme cela se produirait si la réaction
278 CLINIQUE SPHYGMOMANOMETRIQUE
produit une variation de tension d'autant plus forte que le point de départ de la pression, est plus élevé 2° qu'une même variation de tension correspond à des quantités de. liquide injecté d'autant plus faibles que la pression initiale, est plus élevée.
b. Types tensionnels normaux. - Il suffit, en quelque sorte, de découper des tranches dans l'échelle de pression que nous avons
figurée plus haut, pour isoler les différents types circulatoires normaux. —La tension artérielle normale, mesurée pour la pression, systolique avec la méthode de RIVA-ROCCI et pour la pression diastolique à l'aide de la méthode oscillatoire ou de ses équivalents, peut être fixée, comme nous l'avons vu plus haut, autour de 120 millimètres Hg pour la tension maxima et de 75 millimètres Hg environ pour la pression minima. Autour de ces chiffres, il existe quelques; variations individuelles légères : on admet, cependant, que 130 millimètres Hg est une tension systolique plutôt forte, et 100 millimètres
élastique et la pression intérieure variaient parallèlement. Le seul point en litige, disons-le pour être complet, consiste à savoir si la plus grande dilatabilité artérielle correspond exactement au point le plus inférieur de la courbe, comme le croient la plupart des auteurs, ou un peu au-dessus, en un point correspondant au chiffre de la plus basse pression normale (ROT, ZWAARDEMACKER) ou un peu inférieur à cette pression (STRASBURGER).
FIG. 99. — Tension artérielle normale.
TYPÉS CIRCULATOIRES 379
Hg une tension nettement faible. 4. — L'hypotension artérielle simple comprend tous les chiffres inférieurs à 100 millimètres Hg.
Son échelle est assez réduite et l'on voit bien rarement, si ce n'est dans la période preagonique, la tension systolique s'abaisser au dessous de 70 à 80 millimètres Hg. — Dans l'hypertension artérielle,
1 La hauteur de la pression variable normale dépend évidemment beaucoup de la méthode employée. Elle serait d'environ, un quart de la pression systoligue pour STRASBURGER, SAHLI, FELLNER, LAUDER BRUNTON, de 25 à 40 millimètre Hg pour JANEWAY, de 25 à 30 millimètres Hg pour EICHBERG, OLIVER, de 40 millimètres Hg pour GOODMANN et HOWEL par la méthode auscultatoire, de 50 pour 100 de la pression diastolique pour STONE. MELVIN et MURRAY, qui rapportent ces chiffres, ont trouvé ehez cinquante-neuf sujets, sains et jeunes, une moyenne de 46 millimètres Hg (RIVA-ROCCI-auscultatoire), soit 41 pour 100 de la moyenne systolique et 67 pour 100 de la moyenne diastolique.
FIG. 100. — Sphygmogrammes absolus de tension artérielle normale, de très grande hypertension et d'hypotension artérielle. - Qn voit que le taux de l'hypertension artérielle peut dépasser de beaucoup le double du taux de la tension artérielle normale et le triple de celui de certaines Hypotensions.
280 CLINIQUE SPHYGMOÎIANOMÉTRIQUE
les variations manométriques autrement étendues, parcourent une gamme de plus de 15 centimètres Hg pour la pression systolique ! Le tableau ci-dessous objective l'importance de ces variations; en même temps qu'il montre l'élévation plus lente de la pression minima et l'augmentation progressive de la pression variable. Pour la comrnodité
de la terminologie, on désigne d'ordinaire sous le nom d'hypertension modérée les cas situés entre 130 et 160 millimètres Hg, d'hypertension moyenne ceux compris entre 160 et 200 millimètres Hg, d'hypertension forte ceux oscillant entre 200 et 240 millimètres Hg d'hypertension très forte ceux qui se trouvent entre 240 et 270 millimètres Hg. Au dessus, il s'agit de cas absolument exceptionnels; et s'il est possible de noter parfois des hypertensions énormes à 290 et
FIG. 101. — Figure schématique montrant l'étendue des variations hypertensives — Cette échelle, si l'on prend comme base la tension systolique, s'étend de 130 à 300 millimètres Hg. Pour la commodité de la description et du langage clinique, on peut établir dans cette échelle des coupures artificielles correspondant aux hypertensions modérée et moyenne, aux grandes et très grandes hypertensions. Les chiffres d'hypertension énorme (entre 270 et 3oo millimètres Hg) ne sont constatés que très exceptionnellement.
TYPES CIRCULATOIRES 281
peut-être 300 millimètres Hg, je n'ai jamais vu, pour mon compte, ce chiffre être dépassé.
C. Rapports systolo-diastoliques normaux. — A quels signés reconnaître que deux chiffres de tension donnés sont dans un rapport normal ? Avec un peu d'habitude des mensurations sphygmomanométriques,
sphygmomanométriques, expressions fractionnelles normales arrivent a se fixer dans la mémoire ; et l'on arrive à voir de suite si les chiffres trouvés oscillent autour des rapports normaux ou sont de type franchement anormal. Comme points de repère pouvant servir à se rappeler le mode d'ascension des deux tensions, je citerai lés chiffres suivants :
80/50 120/75 160/90 200/110 250/140 280/160 tels qu'on les obtient avec la méthode RIVA-ROCCI, pour la pression
FIG 102 — Série de formules tensionnelles, correspondant à des types circulatoires normaux, c'est-à-dire relevées chez des sujets normalement tendus, hypo ou hypertendus, mais ne présentant pas de troubles notables de l'équilibre cardio-vasculàire. — Les notations sphygmomanômétriques inscrites au bas du tableau peuvent servir de points de repère assez aisés à retenir et pouvant faciliter l'appréciation rapide d'une formule sphygmomanométrique quelconque. On voit que ces formules tensionnelles montrent un chiffre dé tension diastolique qui représente la moitié de la tension systolique, plus 10 millimètres Hg dans la zone inférieure ou moyenne, plus 15 ou 20 millimètres Hg dans la zone supérieure.
282 CLINIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
systolique, et avec la méthode oscillatoire ou ses équivalents pour la pression diastolique.
Si l'on hésite, on pourra utiliser le moyen proposé par LIAN qui consiste, pour trouver le chiffre de tension minima correspondant. normalement à un chiffre donné de tension maxima, à ajouter une valeur fixe de 1 ou de 2 à la moitié de la tension maxima. La formule
donne assez exactement le taux normal de la pression-diastolique, surtout pour les états hypotensifs ou les hypertendus moyens. Dans les fortes hypertensions LIAN conseille d'ajouter le chiffre 2 à la place de 1 :
Il est encore possible, comme l'a proposé JOSUÉ dès 1908, de calculer sous forme de « coefficient cardio-artériel» le rapport systolodiastolique, afin dé se rendre compte dans chaque cas si ce rapport reste normal. Revenant sur ce sujet, en 1913, et adoptant comme normaux (à l'oscillomètre de PACHON) les chiffres de 160 millimètres Hg pour la tension systolique et 100 millimètres Hg pour la tension diastolique, il fixe la valeur du coefficient normal à 1,6 :
En utilisant les méthodes citées plus haut et en fixant à 120/75 millimètres Hg la valeur normale de la tension artérielle, le coefficient cardio-artériel se maintient de même aux environs de 1,6. On comprend que, suivant le mode d'altération du rapport normal, ce coefficient variera dans un sens ou dans l'autre 1.
1 D'après VÉRUT, qui a fait ses mensurations à l'aide de l'appareil de PACHON, le coefficient cardio-artériel « eusystolique », c'est-à-dire correspondant à l'état d'équilibre circulatoire, serait chez lés enfants de 1,50 et chez les adultes de 1,70. Mais ce coefficient varierait au fur et à mesure de l'ascension de la pression : pour une pression minima qui monte de 10 à 15 millimètres Hg, le coefficient s'élèverait de 1,80 à 2,20.
TYPES CIRCULATOIRES 283
§2. TYPES CIRCULATOIRES ANOMAUX
HYPOTENSION DIASTOLIQUE ET HYPERTENSION DIASTOLIQUE
Ici, le rapport normal entre les deux chiffres de tension se trouve altéré. Le déséquilibre peut relever de la variation insolite de chacune de ces deux valeurs ; le taux de la pression systolique, comme celui de la pression diastolique, pouvant se trouver placé trop haut ou trop bas, par rapport à l'autre supposé normal. Là description de ces quatre variétés, sans compter les sous-variétés réalisées par la combinaison des quatre types initiaux, sera peut-être faite plus tard. Pour l'instant, une telle différenciation paraît prématurée. Afin d'éviter des interprétations subtiles et trop souvent incertaines, il nous semble préférable 4e procéder, plus- simplement.
Une formule de tension étant donnée, nous Considérerons uniquement le taux de la tension-diastolique par rapport au chiffré de la tension systolique supposé normal. Suivant que cette pression, drastolique se trouvera au dessous ou au dessus du taux qu'elle devrait occuper, nous aurons affaire à une hypotension diastolique ou à une hypertension diastolique. Les types circulatoires anormaux seront ainsi réduits au nombre de deux.
Une telle classification a l'avantage d'embrasser tous les cas anormaux et de permettre de ranger immédiatement chacun d'eux dans une catégorie déterminée. Si, partant d'une constatation brutale, elle s'expose à grouper sous le même vocable'des troubles circulatoires peut-être disparates, il faut voir là moins l'effet d'une véritable confusion, que la nécessité d'un groupement provisoire immédiat où l'analyse clinique et pathogénique pourra toujours puiser. Un premier stade terminologique, basé sur la simple formule mathématique de la tension, n'interdit nullement des distinctions ultérieures à base physio-pathologique.
1° Hypotension diastolique. — Parmi les faits qui se singularisent par une chute anormale de la. pression , diastolique, nous allons voir le taux du rythme cardiaque introduire une première
284 CLINIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUÉ
distinction entre ce que l'on peut appeler les pseudo-hypotensions
diastoliques et l'hypotension diastolique vraie.
A. PSEUDO-HYPOTENSION DIASTOLIQUE PAR BRADYCARDIE. -—L'abaissèment
-—L'abaissèment de la pression diastolique peut tenir à une circonstance très simple, le ralentissement des battements du coeur. La diastole s'allongeant, le temps d'écoulement à la périphérie de l'ondée sanguine projetée dans l'arbre circulatoire augmente; et la tension diastolique s'abaisse d'autant.
Cette hypotension diastolique par bradycardie se remarque au
maximum dans les pouls très ralentis du block total, autour de 30; elle reste encore très appréciable lorsque le rythme ventriculairê automatique oscille autour de 40 (fîg. 104). Au cours du bradycardies sinusales de taux plus modéré, j'ai souvent noté des fractions analogues aux suivantes : 180/80, pouls Si, 160/70, pouls 44.
L'influence du ralentissement du coeur sur la chute de la pression
FIG. 103. — Pseudo-hypotension diastolique par bradycardie.— Il s'agit, dans le premier sphygmogramme, d'un sujet hypertendu avec bradycardie banale à 52 ; dans le second, d'un malade atteint de block total avec rythme ventriculaire automatique à 36. La tension diastolique, qui, chez un hypertendu à 200 millimètres Hg, présentant un pouls entre 70 et 80, eût oscillé autour de 110 millimètres Hg, s'abaisse à 85 millimètres dans le premier cas, à 60 millimètres dans le second.
TYPES CIRCULATOIRES 285
artérielle est encore plus frappante lorsqu'elle peut être constatée
sur le même sujet, à quelques minutes de distance. J'ai pu observer
un malade, atteint de pseudo-bradycardie par rythme couplé, qui présentait un pouls tantôt à 10-4, tantôt à 52, pendant une série de
FIG. 104.— Pseudo-hypotension diastolique dans la maladie de STOKESADAMS avec block total. — L'hypotension diastolique due à la bradycardie est rendue encore plus évidente par la coexistence d'hypertension artérielle. La partie rayée longitudinalement, qui suit chaque graphique,montre approximativement le taux de l'excédent de chute diastolique attribuable au ralentissement du pouls.
FIG. 105. -— Variations tensionnelles dues aux modifications de frèquence
frèquence pouls. — On voit, dans ce tracé, le rythme normal à 104 à la minute succéder à une crise de bradysphygmie à 52. Durant la
période bradysphygmique, la tension était de 140/65, la chute diastolique plus profonde, qui apparaît du reste sur le tracé, étant due au
faible volume de l'onde extra-systolique et à la longue durée du repos compensateur ; pendant les périodes de rythme normal, on notait 120/80.
286 CLINIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
pulsations : à 104, la tension du pouls était de 120/80, à 52 de 140/65. Il suffit également d'accélérer le pouls par l'atropine pour voir la chute diastolique se modifier très légèrement : tel un malade qui, avec un pouls à 78, avait 120/70 et, avec un pouls à 104, quelques minutes après l'injection, 115/75. On comprend donc combien il est indispensable, si l'on veut juger sainement des rapports de tension, de toujours noter, à côté de la formule sphygmomanométrique, le chiffre du pouls. A côté des cas extrêmes que nous avons signales. plus haut et dont l'interprétation est aisée, il y a des cas limites. D'une façon générale, il faudra se montrer d'autant moins difficile, pour admettre une véritable hypotension diastolique, que le pouls sera plus rapide. Un même chiffre de 160/80 pourra être considéré comme normal, avec un pouls à 6o-65 ; alors qu'il sera l'expression d'une hypotension diastolique minime, mais indubitable, avec un pouls à 120 l.
La véritable différence entré la pseudo-hypotension diastolique et l'hypotension diastolique vraie, comme je l'ai montré en 1911, consiste dans ce fait que, avec une chute diastolique également accusée dans les deux cas, la modification de la pente diastolique ne se manifeste que dans le second. Voici deux malades présentant un même chiffre de tension 200/85 : le premier est un hypertendu
1 Malgré l'influence indéniable du ralentissement du rythme cardiaque sur l'abaissement de la pression diastolique, il faudrait bien se garder de conclure, à une relation mathématique fixe entre ces deux facteurs et établir un rapport de proportionnalité entre l'allongement de la diastole et l'abaissement de la pression minima. Les variations sont toujours moindres qu'elles ne le seraient dans un système de tubes inertes, car il faut compter avec l'adaptation incessante créée par les réactions vaso-motrices. Si l'on ne voit guère de pouls très ralentis sans chute diastolique profonde, il est commun, au contraire, de rencontrer des chutes diastoliques presque normales avec une accélération du pouls autour de 120, notamment dans les tachycardies nerveuses ou thyroïdiennes.
Pour éliminer d'une façon plus précise l'erreur due au ralentissement ou à l'accélération du pouls, on pourrait, comme nous l'avions tenté en 1911, constituer non pas un tableau, mais une série de tableaux analogues, Valables pour chaque chiffre du pouls ou tout au moins chaque dizaine : 60, 70, 80, 90, 100, etc. Mais la complication serait bien grande, et il semble que l'on soit autorisé à se servir d'un seul et unique tableau, en faisant la part approximative de l'accélération ou du ralentissement du rythme cardiaque. C'est ainsi que le rapport de 160/90, normal pour un pouls entre 75 et 100, deviendrait un peu anormal avec un pouls à 60 ou à 120.
TYPES CIRCULATOIRES 287
simple, avec pouls ralenti à 52, le second, un malade atteint de néphro-aotite avec pouls accéléré à 110. La chutte diastolique est la même, mais la pente est bien différente : il suffit de jeter les yeux sur les sphygmogrammes ci-dessous pour s'en rendre compte.
Ce n'est donc pas la profondeur de la chute, mais l'exagération de la pente qui fait la véritable hypotension diastolique.
B. HYPOTENSION DIASTOLIQUE VRAIE. - Elle se constate cliniquement dans trois circonstances : 1° dans l'insuffisance aortique : 2° plus rarement, en dehors de toute insuffisance aortique; 3° plus exceptionnellement encore, dans certains anévrystnes artérioso-veineux.. Dans tous Ces cas, nous la verrons s'accompagner de troubles circulatoires particuliers.
FIG. 106. — L'hypotension diastolique vraie dépend non de la profondeur de la chute, mais de l'exagération de la pente diastolique de la tension. — Dans ces deux sphygmogrammes, la profondeur de la chute diastolique est la même (200/86); mais la pente diastolique est très différente, comme le montre le troisième graphique où les ligues supérieures des sphygmogrammes ont été seules conservées. Dans le premier cas, il y a pseudo-hypotension. diastolique (chez un bradycardique hypertendu, sans insuffisance aortique, sans double souffle crural); dans le second cas, il existe une hypotension diastolique vraie (avec insuffisance aortique et double souffle de DUROZIEZ).
288 CLINIQUE SPHYGMOMANOMETRlQUE
A. Hypotension diastolique de l'insuffisance aortique. —— Cette forme a été signalée de longue date et une anomalie aussi saillante devait retenir l'attention de tous les auteurs qui pratiquaient systématiquement la mesure des deux tensions. En France, JOSUÉ est le premier qui, en 1908., ait attiré l'attention sur elle. Son explication se trouve dans la fuite sigmoïdienne. Le système artériel se vide par les deux bouts ; comment la pente diastolique ne s'exagérerait-elle pas!
Gomme exemples d'hypotension diastolique de l'insuffisance aortique, je citerai ceux reproduits dans le tableau ci-contre, choisis pour plus de simplicité parmi des malades ayant une fréquence modérée du pouls, entre 90 ou 100. Dans toutes ces formules, le seul fait caractéristique est la chute anormale de la tension diastolique, par rapport à la tension systolique ; mais il est évident que l'on peut voir toutes les variétés dans le degré d' élévation de la tension systolique, comme dans la profondeur de la dépression mi-, nima. — L'hypertension systolique dépend d'occasions pathologiques accessoires, qui peuvent se trouver réalisées, ou au contraire faire complètement défaut, au cours des insuffisances sigmoïdiennes. Une grosse hypertension systolique a évidemment plus de chance de se rencontrer dans les insuffisances aortiques d'origine artérielle (par suite de la coexistence fréquente de lésions rénales) que dans les insuffisances aortiques d'origine rhumatismale (AMBLARD, LIAN, etc.). Mais il n'y a là rien d'absolu ; l'hypertension systolique pouvant faire défaut complètement dans certaines insuffisances aortiques syphilitiques, alors qu'elle sera présente dans quelques lésions endocar- ; diques compliquées de processus hypertensifs. — Le taux de la pression minima dépend à la fois du degré d'hypertension systolique concomitante et de la largeur du pertuis sigmoïdien livrant passage, à l'ondée rétrograde. — LIAN qui a étudié la fréquence respective de. toutes ces combinaisons, dans 36 cas d'insuffisance aortique, a constaté que la pression maxima était élevée dans les 2/3 des cas, normale dans I/3, et que la minima n'était presque jamais supérieure à la normale (1 cas sur 36). Il conclut également que « la recherche des valeurs respectives de Mx et de Mn n'a pas l'importance constante qu'il était classique de lui attribuer dans le diagnostic différentiel entre la maladie de HOGDSON et la maladie de CORRIGAN ». De fait, dans la statistique de cet auteur, sur 16 sujets atteints d'insuffisance aortique d'origine artérielle, 8 avaient une pression arté-
TYPES CIRCULATOIRES .289
rielle ne permettant pas de les différencier d'une maladie de CORRIGAN, la tension systolique étant normale ou ne présentant qu'une élévation insuffisante. Une statistique personnelle étendue, portant sur
70 cas d'insuffisance aortique syphilitique et que nous relaterons plus loin, confirme ces données.
Il semble que l'on ait quelque propension à exagérer l'importance de la valeur séméiologique de l'hypotension diastolique, dans le diagnostic de l'insuffisance aortique. — Ce type sphygmomanomëtrique n'est pas un signe constant de l'insuffisance sigmoïdiénne. Il a d'autant plus de tendance à s'effacer, ou même à disparaître, que la veine fluide rétrograde est plus fine et que le peu d'élévation de la tension systolique, en diminuant l'étendue de la pression variable, rend moins sensibles les variations respectives de Mx et
L. GALLAVARDIN. 19
FIG. 107. — Hypotension diastolique dans l'insuffisance aortique. — Les trois sphygmogrammes ont trait à des sujets atteints de large insuffisance aortique et chez lesquels la rapidité du pouls oscillait entre 9° et 100. On voit la tension diastolique, qui d'après le chiffre de pression systolique eût dû s'abaisser seulement à 140, 110 et 90 millimètres. Hg, descendre jusqu'à 95, 70 et 40 millimètres Hg.
290 CLINIQUE SPHYGMOMANOMETRIQUE
Mn. Il est assez commun, en effe, de constater l'absence de toute hypotension diastolique appréciable, dans certains coeurs
rhumatismaux où prédominent les signes de lésion mitrale simple ou double 1, comme dans nombre d'insuffisances aortiquès légères
1 Sur trente-six cas d'insuffisance aortique, LIAN a noté quatre fois l'absence d'hypotension diastolique; trois fois il exislaitdes lésions mitrales associées.
FIG. 108, — Exemples d'insuffisances aortiques sans hypotension diastolique.
Tracé I. — Homme de trente-deux ans. Aortite syphilitique (accident primitif à vingt ans), avec angine de poitrine vraie et léger souffle diastolique d'insuffisance aortique.
Tracé II. — Homme de quarante-neuf ans. Insuffisance aortique syphilitique très mal compensée (dyspnée continue avec exacerbations nocturnes, tachycardie constante à 130, etc.).
Tracé III. — Homme de vingt-huit ans, — Insuffisance aortique légère, constatée depuis l'âge de seize ans, d'origine indéterminée (ni rhumatisme, ni syphilis).
Tracé IV. — Homme de cinquante et un ans. Aortite syphilitique avec légère insuffisance aortique. Syndrome d'insuffisance ventriculaire gauche avec dyspnée d'effort, accès d'oedème pulmonaire nocturne.
Tracé V. — Femme de quarante-six ans. Insuffisance aortique extrêmement légère, d'origine probablement spécifique. Dyspnée d'effort et accès angineux.
Dans tous ces cas, il n'existait pas de signes périphériques d'insuffisance aortique, pas de pouls de CORRIGAN et notamment pas de doublé souffle de DUROZIEZ.
TYPES CIRCULATOIRES 291
d'origine artérielle. Dans tous ces cas, c'est l'auscultation attentive qui renseigne en dernier ressort, et non l'exploration artérielle. Il faut ausculter avec la hantise du souffle- diastolique, placer le stéthoscope à gauche du sternum, dans la région/ parasternale inférieure et presque au niveau de l'appendice, appuyer l'instrument ou, mieux encore, prendre le sujet à bras le Corps en appliquant fortement l'oreille contre la poitrine, le prier d'arrêter sa respiration dans l'expiration, suspendre soi-même son souffle, et localiser son attention sur le début de la diastole afin de renforcer l'acuité auditive à ce moment-là. Bien souvent cette auscultation, aussi laborieuse pour le médecin que pour le malade, permettra de déceler un très léger souffle accroché au deuxième bruit, alors que d'autres examens étaient restés négatifs ; et. l'on n'hésitera pas alors à affirmer l'insuffisance aortique, même en l'absence de toute hypotension diastolique 1. —- Cette hypotension diastolique n'est pas davantage un signe caractéristique de Finsuffisancé sigmoïdienne, puisqu'elle peut exister, comme nous allons le voir, en dehors dé toute insuffisance aortique. On voit donc le danger qu'il y aurait à vouloir établir une équation rigoureuse entre ce type sphygmomanométrique et l'existence du reflux sigmoïdien. Je ferai cependant une exception pour les fortes hypotensions diastoliques coïncidant avec une grosse hypertension systolique (exemples: 240/85, 260/100, etc.) que je n'ai jamais rencontrées, jusqu'à présent, que dans les aortites syphilitiques, avec insuffisance sigmoïdienne et néphrite chronique concomitante de même nature (néphro-aortites syphilitiques), et que je considère comme absolument caractéristiques de cette affection. — Il semble plus conforme à la vérité de;
1 BRET (1919) a tenté de s'appuyer sur l'absence d'hypotension diastolique, coïncidant avec certains souffles diastoliques aortiques, pour défendre la nature fonctionnelle de telles insuffisances. Il nous paraît plus légitime d'admettre qu'il s'agit là simplement d'insuffisances aortiques minima, l'exiguïté de la veine fluide rétrograde ne permettant en aucune façon de préjuger de la cause véritable du reflux et ne pouvant être d'aucun poids dans la démonstration de l'insuffisance aortique fonctionnelle; Bien plus, il est probable que toutes les insuffisances aortiques volumineuses, qui s'accompagnent ultérieurement d'hypotension diastolique notoire, passent à leur début par ce stade initial d' «insuffisances minima sans hypotension diastolique»; ce qui n'exclut pas la possibilité, pour certaines lésions sigmôïdiennes légères et torpides, de né pas dépasser ce stade.
292 CLINIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
dire que l'hypotension diastolique, dans l'insuffisance aortique, est un signe toujours intéressant et parfois utile. Lorsque la lésion né fait pas de doute, il peut être considéré comme superflu; cependant il confirme encore le diagnostic, au même titre que tous les autres signes périphériques de cette affection. De plus, il est capable de donner quelques indications sur la largeur du pertuis sigmoïdien. Dans certaines insuffisances aortiquès d'origine artérielle, on est parfois étonné de rencontrer d'énormes hypotensions diastoliques avec des souffles brefs et de timbré bas, que l'on éprouve une certaine difficulté à entendre ou à localiser; il est probable que, dans ces cas, c'est l'énormité de l'hiatus intervalvulaire qui enlève au souffle une partie de son caractère musical et de sa durée. D'autres fois (et tous ceux qui sont familiarisés avec la pratique sphygmomanométrique ont nombre de ces cas à leur passif, ou plutôt à leur actif) c'est la constatation inopinée d'une hypotension diastolique qui appelle de nouveau l'attention sur l'orifice aortique et permet de. découvrir le souffle ténu, dont nous parlions plus haut, et qui avait y passé inaperçu à une première auscultation. —Mais il n'en reste pas moins vrai que cette hypotension diastolique n'est jamais un signe suffisant de l'insuffisance aortique, dont il est sage de n'affirmer l'existence qu'en présence du souffle diastolique dûment constaté. Nous ne croyons même pas,, comme l'a prétendu LIÀN, que " la connaissance des valeurs respectives de Mx et de Mn puisse apporter les meilleurs arguments en faveur du diagnostic d'insuffisance aortique, dans les cas exceptionnels où le souffle diastolique fait défaut, et où l'on rencontre l'ensemble des autres signes cardiaques ainsi que des signes artériels de cette affection ». Ceux qu'intéresse la question des insuffisances aortiques sans souffle agiront sagement en choisissant un autre critérium que celui-là. Car, d'une part, une insuffisance aortique assez fine pour ne donner lieu à aucun souffle aurait également beaucoup de chances de ne donner naissance à aucune hypotension diastolique appréciable ; et, d'autre part, l'existence incontestée d'hypotensions diastoliques, parfois accentuées, sans insuffisance aortique, lui enlève toute portée dans un diagnostic aussi hasardeux. En résumé, l'existence d'une hypotension diastolique isolée ne permet pas plus de penser à une insuffisance aortique sans souffle, que l'absence de cette même. hypotension diastolique, après constatation d'un souffle diastolique
TYPES CIRCULATOIRES 293
indubitable, n'autorise à mettre en doute le diagnostic d'insuffisance aortique 1.
b. Hypotension diastolique sans insuffisance aortique. — C'est en 1911 que j'ai signalé l'existence d'une hypotension diastolique vraie moyennement accusée, bien que cependant très nette, en dehors
de toute insuffisance aortique. En quelques mois, j'en avais réuni huit cas, ce qui prouvait bien qu'il ne s'agissait pas là défaits exception1
exception1 n'a pas manqué d'attribuer un rôle, sinon providentiel, tout au moins favorable à cette hypotension diastolique de l'insuffisance aortique. « Si au point de vue cardiaque, écrit VÉRUT, il est toujours ennuyeux d'avoir une insuffisance aortique, au point de vue artériel, si l'on devient un scléreux, c'est bel et bien une circonstance heureuse, car il y a là une soupape de sûreté qui pallie à la menace la plus brutale et la plus irrémédiable de la sclérose capillo-rénale. » Ne serait-il pas plus juste d'admettre que, dans l'insuffisance aortique compliquée de sclérose rénale, c'est précisément la déficience précoce et anormale de la pression diastolique qui contraint la tension systolique à se hausser à un taux, qu'elle n'eût sans doute pas atteint sans cela, afin de réaliser une pression moyenne; suffisante pour parer aux nouveaux besoins circulatoires.
FIG. 109. Hypotension diastolique en dehors de l'insuffisance aortique. - Ce tableau réunit neuf exemples d'hypotension diastolique chez des sujets ne présentant aucun souffle d'insuffisance aortique; ces exemples ont été choisis à dessein dans toute l'étendue de la gamme hyperténsive. Il est à remarquer que, chez tous ces sujets, l'auscultation de la fémorale permettait d'entendre un double souffle de DUROZIEZ.
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nels, Durant ces dernières années, j'ai pu en observer de nombreux faits nouveaux et j'en reproduis dans le tableau ci-dessus quelques exemples, choisis à, dessein dans toute la gamme de l'échelle tensionnelle.
Chez tous ces sujets, il n'existait pas d'insuffisance aortique ; l'auscultation la plus minutieuse restait négative et, chez plusieurs d'entre eux,l'intégrité des sigmoïdes fut vérifiée à l'autopsie. C'est donc du côté du système artériel qu'il faut chercher l'explication de cette singularité sphygmomanométrique. J'avoue n'avoir pu préciser encore le déterminisme exact de ce phénomène, qui reconnaît salis douté plusieurs causes capables de l'engendrer.
Théoriquement. on peut invoquer, pour, expliquer cette altéra-.: tion de la formule tensionnelle, une perméabilité périphérique, exagérée ou certaines modifications de l'élasticité artérielle, - Si l'on conçoit assez difficilement ce à quoi pourrait répondre une exagération de, la perméabilité périphérique généralisée à tout le système artériel,on comprend mieux la possibilité d'une exagération localisée de cette perméabilité. Il peut se faire, en-effet, qu'unefois établi, dans le réservoir aortique et les gros troncs qui s'endégagent, un chiffre donné et à peu près uniforme, de tension maxima, tous les départements vasculaires n'offrent pas, à l'écoulement du sang les mêmes facilités. Chez certains sujets, par exemple, le sang s'engouffrerait plus aisément dans le territoire des vaisseaux abdominaux que dans les gros troncs artériels des membres, et la tension aurait une tendance à s'abaisser plus rapidement dans la partie moyenne de la colonne aortique qu'à ses extrémités. D'où, appel du sang des deux extrémités de cette colonne vers le centre (la pression tendant à s'équilibrer constamment) et, de. remous en remous, propagation de l'hypotension diastolique jusque dans les grosses artères des membres où le sphygmomanomètre peut la mettre en évidence. — La seconde explication, qui repose sur des modifications de l'élasticité artérielle, paraît plus plausible encore, et se trouve sans doute applicable à la majorité des cas. Supposons des parois artérielles résistantes, difficilement extensibles. Une quantité de sang donnée, en pénétrant à l'intérieur des gros troncs vasculaires, déterminera une élévation de tension, considérable, qui redeviendra sensible, sous forme de chute diastolique profonde, lorsque l'élasticité de la paroi assurera le départ de
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cette même quantité de liquide. Toutes choses égales d'ailleurs, c'est-à-dire pour une même quantité de liquide évacuée du système artériel dans une même unité de temps, il est certain qu'à une paroi
artérielle anormalement résistante correspondra une chute diastolique plus profonde. Un tel trouble de l'élasticité artérielle, comme, l'hyperperméabilité précédemment envisagée, pourra se trouver généralisé à tout le système artériel ou prédominer dans certains territoires. Si une telle interprétation se trouvait vérifiée dans la suite, il il y aurait une opposition très nette, à établir entre l'hypoFig.
l'hypoFig. Apparition du type d'hypotension diastolique au Cours de certains états hypertensifs assez rapidement progressifs. — Dans le premier graphique, il s'agit d'une femme de soixante-dix ans, présentant une hypertension artérielle avec troubles fonctionnels modérés; on voit, en huit ans, la tension systolique s'élever de 55 millimètres Hg, alors que la tension diastolique ne monte que de ip millimètres. Le second tracé a trait à un homme de cinquante-deux ans chez lequel la tolérance de l'hypertension était parfaite; la tension systolique s'était élévée en huit ans de 90 millimètres Hg, alors que la tension minima n'ascensionnait que de 3o millimètres. Chez ces deux malades, on ne put jamais mettre en évidence, malgré l'hypotension diastolique accentuéé, aucun double souffle crural (voir note de la page 3o4).
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tension diastolique de l'insuffisance ; aortique et cette hypotension; diastolique sans insuffisance aortique; la première résultant d'une chute anormale de la pression diastolique, alors que la seconde ne relèverait que d'une élévation excessive de la tension systolique. Du même coup, se trouverait là un moyen précieux pour déceler, dans la multitude des états hypertensifs, ceux qui reconnaissent comme facteur adjuvant, sinon unique, la sclérose pariétale, des gros troncs artériels.
Il est difficile de tirer, de l'examen des malades présentant cette hypotension diastolique solitaire, des arguments précis en faveur de cette interprétation. Il s'agit le plus souvent, d'hypertendus ordinaires. Si les uns présentent un pouls ample et bondissant, des artères radiales et humérales particulièrement larges, les autres ne montrent aucune particularité objective saillante. J'ai noté dans, un cas l'existence d'un anévrysme de l'aorte; chez les autres sujets, il n'existait aucun signe radioscopique de, cette affection. En faveur d'une résistance anormale de la paroi artérielle à la distension, je note cette particularité que ce type d'hypotension diastotolique m'a paru se réaliser avec une assez grande fréquence chez les hypertendus dont la tension s'élevait rapidement : soit que la paroi vasculaire n'ait pas eu le temps de s'assouplir, de se dilater, de lâcher en quelque sorte, devant la crue tensionnelle rapide, soit que sa transformation scléreuse constitue le principal facteur de cette élévation tensionnelle (fig, 110). J'ajoute que dans les coeurs rapides et éréthiques, et même chez quelques bacillaires ou fébricitants hypotendus, il n'est pas rare de rencontrer un pouls très bondissant avec une pression diastolique légèrement abaissée.
c. Hypotension diastolique des anévrysmes artérioso-veineux. — Elle est de connaissance récente et a été signalée pour la première fois par CAZAMIAN, en 1917. Dans un cas d'anévrysme artériosoveineux traumatique des vaisseaux fémoraux profonds, cet auteur a vu la fuite sanguine occasionnée par le « court-circuit artériel » donner, jusque dans la radiale, une hypotension diastolique considérable : 220/80 millimètres Hg (au PACHON). Au niveau des vaisseaux malléolaires du côté sain, la pression était de 220/75, alors qu'elle n'atteignait que 15o/6o du côté malade. Après l'intervention, la pression tomba dans la radiale à 165/90. Comme le. montre le
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tracé ci-joint, dans un cas d'anévrysme artérioso-veineux de l'iliaque externe que j'ai pu examiner avec LERICHE, on pouvait constater même hypotension diastolique et même disparition après l'intervention. Il est évident que cette hypotension diastolique des anévrysmes artérioso-veineux doit être d'autant plus accusée que la lésion siège sur des vaisseaux plus volumineux, que l'orifice de communication est plus large et que l'exploration se rapproche
davantage de la lésion. Elle doit se produire au maximum dans lés anévrysmes aortiques ouverts spontanément dans la veine cave. Elle peut rester localisée, ou tout au moins ne pas se propager jusqu'à l'humérale, dans certains anévrysmes éloignés. Chez un blessé atteint d'anévrysme artérioso-veineux du creux poplité, que j'ai pu examiner grâce à l'obligeance du Dr DUPONT, la tension humérale n'était pas de type nettement anormal : 120/70. Mais on remarquait que le pulsatilité de la pédieuse était très exagérée du côté malade ; il y avait là comme une sorte de pouls de CORRIGAN local, correspondant à "l'insuffisancepoplitéé » du membre malade.
FIG. III.- Hypotension diastolique dans un cas d'anévrysme artériosoveineux de l'iliaque externe, et disparition après l'intervention.
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Une conséquence remarquable de cette rupture survende dans l'équilibre tensionnel consiste dans son retentissement sur le fonctionnement cardiaque. Cette particularité a été bien mise en évidence dans la belle observation de CAZAMIAN). Un an après le début de la lésion, le malade présentait des signes de défaillance cardiaque (agrandissement de l'aire cardiaque, refoulement de la pointe, dyspnée, douleurs angineuses) qui disparurent immédiatement après ; l'intervention. Aussi l'auteur conclut-il très justement que, dans les ; communications artério-veineuses des gros vaisseaux, le pronostic doit être envisagé non seulement en fonction de la lésion locale, mais encore au point de vue des conséquences toujours possibles sur le fonctionnement du coeur; et que l'apparition d'une scène ; subasystolique constitue, non une contre-indication, mais une double indication opératoire, MAKINS, étudiant la même année (1917) le retentissement des lésions artérielles traumatiques sur la circulation générale fut pareillement frappé du développement de ces symptômes de dilatation cardiaque avec subasystolie dans les communications artério-veineuses. Dans l'observation de LERICHE (1919) le malade était en subasystolie au moment de l'intervention, et les symptômes disparurent de façon remarquable dans les quelques jours qui suivirent. L'asystolie peut être presque aiguë et entraîner la mort en moins de trois mois.-dans le cas d'anévrysme aortico-cave (ROCHER, 1919).
On ne saurait imaginer de plus belle démonstration de la réalité de certaines asystolies de cause périphérique ; et il est singulier de voir de telles déroutes circulatoires succéder à une simple altération, de la formulé tensionnelle de cause éloignée. Il y a là quelque chose d'étrange. Le coeur ne peut être impressionné par la lésion périphérique que par l'intermédiaire de l'hypotension diastolique qui en est la conséquence ; et l'on doit se demander pourquoi une telle hypotension diastolique, si bien, tolérée — et pendant si- longtemps - dans une insuffisance aortique, s'accompagne si rapidement de , troubles d'insuffisance circulatoire dans le cas de communication artério-veineuse. Sans doute, la rapidité d'installation, du trouble, tensionnel est-elle pour quelque chose dans cette compensation défectueuse et, à ce titre, on pourrait établir un rapprochement entre les insuffisances aortiques traumatiques, d'allure sévère comme on le sait, et ces courts-circuits artérioso-veineux. Mais la princi-
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pale raison, croyons-nous, n'est pas là. Mis en présence, d'une hypotension diastolique, le coeur, pour.maintenir dans; l'arbre artériel une même tension moyenne ou simplement pour restaurer la tension systolique normale, doit envoyer dans l'aorte une ondée sanguine plus abondante. Or il existera cet égard, une différence capitale entre l'hypotension diastolique de rinsuffisance aortique et celle de la communication artério-veineuse. Dans le premier cas, le ventricule gauche, qui a recueilli tout le sang qui s'est échappé du système artériel, a immédiatement « de quoi boucherie trou » si l'on nous permet cette expression; ce ventricule, par sa plasticité et un degré modéré de dilatation hypertrophique, suffit à rétablir un équilibre circulatoire suffisant. Dans l'anévrysme artérioso-veineux, ce même ventricule gauche ne dispose d'aucune réserve sanguine supplémentaire pour restituer à l'arbre artériel la quantité de sang dont il a été frustré; il est nécessaire que l'appoint soif réalisé par l'intermédiaire du coeur droit et de la circulation pulmonaire. Au lieu de la simple adaptation de la plus plastique de toutes les cavités cardiaques, on assistera donc à un véritable bouleversement de toute la circulation cardio-pulmonaire. C'est très probablement à cette circonstance qu'il faut attribuer la dilatation cardiaque rapide et l'installation de la gêne de la circulation 1.
1 II serait intéressant de rechercher l'existence de l'hypotension diastolique dans les cas de persistance du canal artériel. Toutes les conditions, (le production de ce phénomène se trouvent réalisées ; à cela près que la fuite sanguine, au lieu de se produire dans la cavité ventriculaire ou dans une veine, où la pression est à peu près nulle, s'effectue dans le système de l'artère pulmonaire où la pression est seulement moindre que dans le système aortique. WALCKER a noté, comme signes, de cette malformation le pouls capillaire et le pouls de CORRIGAN, surtout quand le bras est dans une situation élevée; mais je ne crois pas que la possibilité de cette hypotension diastolique dans cette affection ait été signalée.
Un fait que j'ai récemment pu observer, avec mon interne M. LAMY, semble cependant justifier cette hypothèse. Il s'agissait d'un jeune homme de vingtsept ans, ne se plaignant d'aucun symptôme fonctionnel de cardiopathie, et qui présentait à la partie interne du IIe et du IIIe espace intercostal gauches, et se propageant un peu tout autour, un souffle étrange, légèrement musical, continu, avec renforcement systolique; pendant l'expiration se manifestaient une exagération du renforcement systolique et, à la palpation, un léger frémissement. Ce souffle offrait tous les caractères d'un souffle de communication artérioso-veineuse. En présence d'un signe aussi anormal et de l'absence de tout symptôme fonctionnel ou radioscopiqqu d'anévrysme aortique, on était vraiment autorisé à émettre l'hypothèse de la persistance
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d. Symptômes circulatoires de l'hypotension diastolique. - Lorsque l'on parcourt les divers traités de pathologie cardiaque, on est un peu étonné de la place envahissante que prennent, d'éditions en éditions, les « signes périphériques » de l'insuffisance aortique ; il y a là comme une marée montante, à laquelle chacun veut 1 apporter son tribut.
On connaissait de longue date le pouls bondissant et défaillant (pouls de CORRIGAN), la danse des artères, le pouls capillaire sousunguéal ou observé au niveau d'une tache vaso-motrice ; à cette triade, on a ajouté dans ces dernières années, le pouls amygdalocarotidien (HUCHARD), le pouls de la luette (MERKLEN),le pouls rétinien, etc., etc.
En réalité, il ny a qu'un signe périphérique de l'insuffisance aortique: l'hypotension diastolique. Cette modification circulatoire est la seule que puissent provoquer la béance anormale du plancher sigmoïdien et le reflux sanguin ventriculaire qui en est-la conséquence. Il suffit d'un peu de réflexion pour comprendre que c'est d'elle que dépendent, sans exception, tous les signes périphériques signalés plus haut 1. On pourra en allonger encore la liste, mais on ne saurait se méprendre sur leur importance, puisqu'il ne s'agit là que de sous-signes de l'hypotension diastolique. Lorsque l'on a pris l'habitude de vérifier par la sphygmomanométrie l'existence et le degré de cette hypotension diastolique chez les malades atteints d'insuffisance aortique, on ne tarde pas à être convaincu de la vanité
du canal artériel. Or, la tension mesurée avec soin à l'humérale était de 125/55, p. 72 ; en même temps que cette hypotension diastolique. accentuée, on constatait une pulsalilité artérielle exagérée et un pouls de CORRIGAN, Il est à remarquer que, malgré une hypotension diastolique aussi manifeste que dans certains anévrysmes artérioso-veineux, ce trouble circulatoire ne s'accompagnait d'aucun retentissement cardiaque fâcheux; peut-être parce que la fuite sanguine, s'effectuant directement dans les vaisseaux pulmonaires,, c'est-à-dire bien près du coeur gauche, n'entraînait aucun surmenage compensateur des cavités droites et se rapprochait autant que faire se peut des conditions circulatoires réalisées dans l'insuffisance aortique.
1 II y aurait peut-être lieu de tenir compte aussi d'une brusquerie particulière de la systole ventriculaire, dans l'insuffisance aortique; mais cette brusquerie n'existe sans doute que dans la mesure où elle se trouve nécessitée par un remplissage plus complet du système aortique, rendu lui-même indispensable par la fuite sigmoïdienne et l'hypotension diastolique qui en résulte.
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de leur inventaire. Qu'il y ait ou non un certain degré d'hypotension diastolique chez un de ces sujets, il peut y avoir quelque intérêt à le savoir; mais est-il bien nécessaire de détailler toutes les modifications régionales de la pulsatilité artérielle que cette hypotension diastolique peut à son tour engendrer ! La recherche dé l'hypotension diastolique devient donc, en quelque sorte, le baromètre de la séméiologie périphérique de cette affection. Les signes périphériques seront tous présents, au grand complet, lorsque l'hypotension diastolique sera très accusée ; ils se trouveront réduits de nombre ou estompés, en cas d'hypotension diastolique minime ; ils feront totalement défaut lorsque, du fait de circonstances diverses (coexistence de lésions mitrales, étroitesse du pertuis sigmoïdien, etc.), ce trouble circulatoire n'aura pu s'établir. On comprend également que leur constatation soit la règle dans le cas d'hypotension diastolique accentuée, en dehors de toute insuffisance aortique.
Rien ne me paraît plus propre à illustrer cette relation des signes périphériques de l'insuffisance aortique et de l'hypotension diastolique, que l'histoire de cet autre signe périphérique que j'ai volontairement passé sous silence jusqu'à présent, le double souffle crural de DUROZIEZ.
Comme je me suis efforcé de l'établir en 1911, l'hypotension diastolique suffit pleinement à expliquer la production de ce double souffle. « Le stéthoscope, écrivais-je alors, divise l'artère fémorale en deux segments, l'un périphérique, l'autre central. Si la circulation est normale, la tension s'abaisse à peu près parallèlement, durant la phase diastolique, dans l'un et dans l'autre segment; et la circulation continue à se faire lentement, du centre à la périphérie, sous le stéthoscope, sans produire aucun souffle. Supposons, au contraire, qu'il existe dans le segment central une hypotension diastolique vraie ; que l'exagération de la pente de la tension relève d'une insuffisance aortique, d'un trouble de l'élasticité artérielle, ou de toute autre cause. Que va-t-il se produire? La chute diastolique ne sera plus, de côté et d'autre du point comprimé, ni égale, ni parallèle; la tension s'abaissera plus rapidement dans le segment central et, à un certain moment, l'excédent de pression dans le segment périphérique déterminera un léger reflux du sang sous le stéthoscope, qui donnera naissance au second souffle artériel. La cause immédiate du double souffle de DUROZIEZ se trouve donc dans
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la discordance de la chute diastolique de la tension, dans le bout central et dans le bout périphérique de la fémorale comprimée; le second souffle étant lui-même d'autant plus précoce ou plus intense,
que cet écart s'établira plus vite et se trouvera plus considérable. On s'explique, dès lors, qu'on ait pu faire apparaître ou rendre ce double souffle plus sensible par la compression de la fémorale au-dessous du stéthoscope (LANNOIS), l'application d'une bande d'ESMARCH sur la cuisse (CHATIN) ; car, dans ces cas, si l'on n'augmente
FIG. 112. — Mode de production du double souffle crural de DUROZIEZ. — La pression du stéthoscope divise l'artère fémorale en deux segments : un segment central qui participe aux conditions de la circulation aortique générale; un segment périphérique en rapport avec les vaisseaux du membre inférieur. Dans le cas. d'hypotension diastolique (par insuffisance aortique par exemple), la chute tensionnelle s'effectue différemment dans le bout central où le vice valvulaire se fait sentir(26o/8o) et dans le bout périphérique où l'écoulement sanguin reste normal (260/140). A travers l'hiatus rétréci s'établit donc, par suite de l'inégalité de pression un reflux sanguin rétrograde et centripète qui, succédant au flux systolique centrifuge, donne naissance au double souffle artériel.
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pas l'hypotension diastolique dans le bout central, on la diminue dans le bout périphérique qu'on empêche de se vider. »
De ce mécanisme de production peut se déduire presque intégralement la valeur séméiologique de ce double souffle. — On comprend tout d'abord qu'il soit symptomatique, non pas de l'insuffisance aortique en général, mais de certaines insuffisances aor tiques seulement. On le perçoit dans cette affection, lorsque l'hypotension diastolique est manifeste! Il fait défaut, par contre, toutes les fois que ce trouble circulatoire manque ou n'est qu'ébauché; le phénomène demandant, pour se produire, une certaine pente diastolique qui n'est pas toujours réalisée. Dans les insuffisances aortiques rhumatismales associées à des lésions mitrales (où il est connu que le double souffle crural fait le plus souvent défaut), lia tension, systolique est peu élevée, la chute diastolique moins profonde et moins raide; le taux des pressions et leur dénivellation, dans les deux segments de la fémorale, ne sont plus alors suffisants pour produire un reflux ou, tout au moins, un souffle. J'ai pu constater fréquemment l'absence de ce signe dans des endocardites mitroaortiques, avec des pressions de 1oo/55, pouls 80, 115/45, pouls 90, etc. — Il est de même facile de saisir que ce double souffle puisse se produire en dehors de toute insuffisance aortique, pourvu que la chuté diastolique acquière une pente suffisante. L'existence du double souffle crural chez certains athéromateux hypertendus, en dehors de toute insuffisance aortique, est connue de longue date, mais n'avait pas encore à ma connaissance reçu d'explication valable. Or, j'ai pu constater d'une façon très nette ses rapports avec l'hypotension diastolique vraie. En effet, sur les huit cas d'hypotension diastolique vraie, en dehors de toute insuffisance aortique, que je signalais dans mon travail dé 1911, j'avais noté sept fois l'existence du double souffle crural, c'est-à-dire d'une façon presque constante. — Enfin, cette intime liaison entre le souffle de DUROZIEZ et l'hypotension diastolique vraie explique encore que ce signe, comme je l'ai également fait remarquer, soit toujours absent dans,les pseudo-hypotensions diastoliques par bradycardie. Je citais le cas de deux malades ayant un abaissement très net de la tension diastolique., 15o/oo, 205/90, causé par un pouls ralenti autour de 56-58, et chez lesquels, même en jouant longuement du stéthoscope, il était impossible de percevoir aucun double souffle.
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Dans ces cas, comme dans ceux plus caractéristiques encore du STOKES-ADAMS que j'ai pu observer par la suite, la chute diastolique était plus profonde, mais la pente diastolique n'était ni sensiblement augmentée, ni surtout différente dans les deux segments du vaisseau comprimé. Or, ce qui importe dans la production du double soufflé de DUROZIEZ, c'est uniquement l'exagération de cette pente diastolique de la tension 1.
Ainsi le double souffle de DUKOZIEZ devient indicateur, non d'une lésion orificielle donnée 1 ou d'un certain état du système artériel, mais d'un état circulatoire très précis : baisse plus rapide de la pression diastolique dans le bout central de l'artère comprimée que dans le bout périphérique. Il appartiendra aux recherches ultérieures de fixer la valeur séméiologique de son apparition en dehors de toute insuffisance aortique, comme aussi la cause de son absence dans quelques cas où l'hypotension diastolique est cependant indéniable 2.
1 Je dois dire cependant que, dans la genèse du DUROZIEZ, la notion dé., l'hypotension diastolique, si elle explique beaucoup de choses, n'explique pas tout et qu'il faut sans doute compter avec d'autres facteurs inconnus, En recherchant systématiquement ce double souffle, chez de très nombreux malades, j'ai pu rencontrer deux sujets chez lesquels le double souffle était très net, sans insuffisance aortique et sans aucune hypotension diastolique appréciable : la tension était, en effet, de 135/70, pouls 8o, dans le premier cas; de 175/115; pouls 84, dans le second Peut-être, ces faits prouvent-ils simplement que l'exploration de la pression sanguineau niveau de l'artère huméraie ne donne pas, dans tous les cas, l'image exacte des variations de la tension au niveau delà fémorale. Il n'est pas impossible, pour des raisons que l'on ne peut encore préciser, qu'il puisse exister des hypotensions diastoliques. prédominantes ou même appréciables exclusivement au niveau des artères de la partie inférieure du corps. BRET a signalé un cas d'insuffisance aortique, avec DUROZIEZ facile à mettre en évidence, sans hypotension, appréciable à l'humérale et j'ai observé également un fait analogue.
2 Ces cas d'hypotension diastolique vraie, et parfois accusée, sans DUROZIEZ, sont exceptionnels. C'est surtout dans les cas d'hypertension artérielle assez rapidement progressive, bien que souvent parfaitement tolérée, que nous les ; avons rencontrés. Parmi les cas les plus typiques, nous citerons ceux représentes dans le graphique de la ligure 110.
Peut-être la notion de la présence ou de l'absence du double souffle de.. DUROZIEZ, au cours des hypotensions diastoliques sans insuffisance aortique, servira-t-elle plus tard à approfondir la pathogénie dé ce trouble circulatoire. Nous avons vu plus haut que de telles hypotensions diastoliques pouvaient reconnaître, comme cause première, un défaut d'élasticité ou plutôt de dilatabilité de la paroi artérielle (une ondée ventriculaire donnée provoquant une hypertension systolique relative, suivie d'une chute plus profonde). L'absence
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2° Hypertension diastolique. —- Cet état circulatoire est l'opposé du précédent. Le taux de la tension diastolique, au lieu d'être inférieur à celui que comporterait celui de la pression systolique, est au contraire plus élevé ; l'écart, représenté par la pression variable, se réduisant d'autant. On peut donc lui conserver le nom d'hypertension diastolique, que je proposais de: lui donner il y a près de dix ans, en essayant d'individualiser Ce type circulatoire si particulier.
a. Conditions de production. —- D'une façon générale, l'hypertension diastolique peut apparaître dans tous les cas où se manifeste l'affaiblissement myocardique ou un encombrement anormal de la circulation veineuse. Pas n'est besoin de dire que c'est très progressivement que s'installe cette adultération de la formule sphygmomanométrique, au fur et à mesure que les troubles cardiovasculaires deviennent assez accusés pour rendre évidente la modification du type circulatoire. Cliniquement, on la constate surtout dans trois circonstances.
a. C'est certainement dans les néphrites subaiguës graves, avec dilatation cardiaque précoce, que cette formule tensionnelle anormale s'observe avec le plus d'évidence.
Chacun connaît ce type clinique. Il s'agit de sujets ordinairement jeunes, entre vingt-cinq et quarante ans (plus souvent peut-être des hommes que des femmes), qui entrent, à l'hôpital pour des symptômes de néphrite subaiguë d'origine indéterminée. Le début de l'affection ne remonte pas au delà de quelques semaines ou de quelques mois, et les symptômes sont au complet. Les urines sont peu abondantes, un peu troubles, parfois hématuriques, contenant un gros disque d'albumine et des cylindres granuleux; au coeur, on constate, avec des battements rapides et parfaitement réguliers,
de double souffle crural, en montrant que la chute tensionnelle s'effectue tout aussi rapidement dans le bout périphérique que dans le bout central de l'artère, témoignerait d'un trouble généralisé à tout le système artériel. La présence du double souffle, en indiquant que c'est seulement dans le segment central de l'artère que se produit l'excès de chute diastolique, innocenterait le système artériel périphérique et permettrait de conclure à un trouble localisé ou tout au moins prédominant au niveau des gros troncs artériels abdominaux ou thoraciques, que ce trouble consiste en un défaut d'élasticité des parois vasculaires ou dans la présence d'une fuite circulatoire anormale dans le territoire des branches volumineuses s'échappant de l'aorte abdominale.
L GALLAVARDIN. 20
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un galop tout à fait net; souvent un coup d'anasarque ou d'oedème pulmonaire, avec essoufflement plus ou moins intense, vient cornpléter le tableau. Mais-bien tôt la scène change: le foie se distend progressivement, les jugulaires se gonflent et s'animent de battements, les urines foncent et deviennent plus rares, la cyanose des lèvres et des extrémités s'installe, en même temps qu'au coeur on surprend tous les signes d'une dilatation accentuée des cavités droites , et gauches, avec souffle mitro-tricuspidien fonctionnel barrant la poitrine de l'appendice à l'aisselle et se substituant (où parfois: se juxtaposant simplement) au galop primitif. De rénal pur, le malade est devenu un cardiectasique et un cardioplégique ; si bien que c'est alternativement aux diurétiques et aux cardio-toniques qu'il faut recourir pour évacuer les oedèmes et calmer la dyspnée.
Or, j'ai toujours constaté dans ces cas une hypertension diastolique manifeste. Je rappelle, comme très caractéristiques, les chiffres trouvés chez trois malades qui me servirent à individualiser ce type de tension. Chez le premier d'entre eux, au cours d'une néphrite qui évolua en moins d'un an, je relevai les chiffres suivants ; 16o/13o, pouls à 120; 160/120, pouls à 108; 140/120, pouls à 100; 135/1o5, pouls à 128. Un second malade, âgé de trente-trois ans, qui mourut après huit mois de maladie, présentait, avec 120 au pouls, des tensions de 170/120, I6O/I3O, 140/120. Chez un troisième malade enfin, j'ai noté, au cours d'innombrables mensurations de tension faites durant plusieurs mois, la même hypertension diastolique : 175/140, 170/145, 170/135, avec un pouls à 120, 165/135, 160/ 13o, avec un pouls entre 100 et 110. Tous ces chiffres cadrent parfaitement avec ceux que j'ai obtenus, au cours de ces dernières années, dans des circonstances similaires. -
Dans tous ces faits, comme on le voit, il ne s'agit pas seulement de nuances, mais d'un écart, énorme; puisqu'avec une tension systolique oscillant autour de 160 millimètres Hg, la pression diastolique, au lieu de s'abaisser à 90, comme c'eût été la règle, se maintenait à 120, 13o ou même 135! J'ajoute que la mensuration de cette pression minima peut être très délicate. On se trouvera bien, dans les cas litigieux, de faire appel à plusieurs méthodes et de les soumettre à un contrôle mutuel. La vibrance numérale est souvent -, très amortie et pourrait conduire, si l'on n'y prenait garde, à admettre une hypertension diastolique encore plus accusée.
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/3. A la période avancée des néphrites chroniques, alors qu'apparaissent les signes manifestes de fléchissement cardiaque, il est commun de voir la formule sphygmomanométrique s'orienter progressivement vers ce type d'hypertension diastolique. Parmi les chiffres obtenus chez cette catégorie de malades, je citerai comme exemples : 140/105, 160/120, 220/140, 225/165, 230/170, avec un pouls à 120; 140/90, 180/130, 180/120, avec un pouls autour
degé, etc., etc. Je figurerai quelques-unes de ces formules anormales à propos delà phase de défaillance des hypertendus. y. Cette hypertension diastolique peut être constatée, enfin, à un degré leger, dans toutes les affections s'accompagnant d'une dilatation hypertrophique des cavités droites avec gêne de la circulation veineuse. C'est ainsi qu'on peut voir le faux de la pression minima s'élever légèrement dans les cardiopathies valvulaires avancées, asystoliques ou subasystoliques ; au, moins, lorsque la persistance
FIG. 113. -Hypertension diastolique. — Le premier sphygmogramme a
trait à un grand hypertendu, défaillant avec subasystolie, pouls alternant,
alternant, pouls à 110, etc. ; les deux autres à de jeunes malades
(trente et trente-cinq ans), atteints de néphrite subaiguë grave avec
fléchissement cardiaque précoce et pouls à 120. Le taux de la tension
diastolique atteint dans ces trois sphygmogrammes 150, 130, 120 millimètres
millimètres alors qu'avec le taux de tension systolique correspondant,
il eût dû s'abaisser à 110, 90, 80 millimètres Hg, s'il se fût agi de
types circulatoires normaux.
308 CLINIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
d'un pouls régulier permet de mesurer facilement cette tension. De même, dans la tuberculose fibreuse avec dilatation des cavités ; droites, parfois chez de grands emphysémateux avec cyanose facile, il est possible de relever des chiffres de tension comme, 130/90, 14O/95 (avec un pouls autour de 100), dans lesquels la tension diastolique est manifestement à 1 à 2 centimètres Hg au-dessus du niveau qu'elle devrait occuper normalement. Dans ces dernières circonstances, l'hypertension minima ne présente jamais le degré qu'il est commun de lui voir atteindre dans les néphrites subaiguës: dont nous avons parlé plus haut ou même dans les néphrites chroniques,.
b. Caractères du pouls dans l'hypertension diastolique. .—Dans les néphrites aiguës graves, le trouble de la tension est tellement net, tellement tranché, qu'il devient possible à la, simple palpation du pouls et avant toute mensuration de pression, de soupçonner l'hypertension diastolique.
En palpant attentivement la radiale avec deux ou trois doigts, en explorant de la même façon l'humérale, à la partie inférieure et interne du bras tout contre l'humérus, en faisant rouler le vaisseau sous le doigt entre la peau et les plans profonds, on a l'impression d'un cylindre artériel gonflé, turgide, mais presque dépourvu de battements; il semble qu'il s'agisse d'une grosse veine distendue par le sang. Ce n'est que si l'on presse le doigt davantage et que l'on immobilise l'artère en l'écrasant contre les plans sous-jacents que l'on perçoit quelques battements mous, dont le peu d'amplitude s'explique aisément, si l'on songe que la pression variable qui, avec une tension systolique de 160 millimètres Hg, devrait être de ■ 70 millimètres Hg, s'est abaissée à 3o ou 25 millimètres. Ce peu d'expansion artérielle, joint à la sensation de l'artère gonflée de sang, qu'il faut immobiliser et, déprimer pour en sentir les battements, donne l'impression d'un pouls pâteux que l'on peut opposer au pouls bondissant et défaillant de l'insuffisance aortique.
A ces signes fournis par le pouls, et qui ne sont naturellement qu'ébauchés quand le degré d'hypertension diastolique est peu accentué, viennent s'adjoindre d'autres modifications objectives de la circulation (gonflement des jugulaires, tuméfaction du foie, congestions viscérales diverses, etc.), qui toutes traduisent l'affaiblissement cardiaque et l'engorgement vasculaire.
c. Interprétation et signification de l'hypertension diastolique.— Y
TYPES CIRCULATOIRES 309
On peut tout d'abord se demander s'il s'agit bien, dans tous ces cas, d'hypertension diastolique véritable et non plutôt d'une fausse hypertension diastolique, faisant pendant à la ^pseudo-hypotension diastolique signalée plus haut. Il est à'remarquer, en effet, que le pouls, lors du fléchissement cardiaque, a toujours de la tendance à. s'accélérer et que, dans les néphrites subaiguës graves notamment, il oscille d'ordinaire autour de 120. Dès lors, ne serait-ce pas simplement la tachycardie qui, par le raccourcissement de la diastole et la brièveté du temps d'écoulement du sang, maintiendrait la tension diastolique à un niveau élevé? Ne s'agirait-il pas, en d'autres termes, d'une simple hypertension tachy diastolique, opposable à l'hypotension bradydiastolique des coeurs ralentis ? Je ne le crois pas et je pense que, si l'accélération contribue à accuser l'hypertension diastolique, elle n'en est pas le facteur le plus important ; là encore, il n'y a pas seulement réduction de la chute, mais bien réellement diminution de la pente de la tension. En effet, dans la période d'amélioration relative, après administration de la digitale par exemple, le pouls peut s'abaisser au-dessous de 100, et cependant l'hypertension diastolique se maintenir, malgré l'atténuation des troubles circulatoires. J'ai pu noter chez-le premier des malades cités plus haut, avec un pouls à 96, les chiffres de 140/120 ; et chez le troisième, ceux de 170/110, avec un pouls à 96, et de 180/120 avec un pouls à 84. La contre-épreuve peut se faire, et d'une façon plus probante encore, en comparant la pente de la tension chez ces malades et chez des hypertendus moyens à 160, avec une tachycardie à 120, mais ne présentant pas de troubles circulatoires appréciables. On peut être amené à faire cette constatation au cours de certaines néphrites ; c'est ainsi que chez une jeune femme de trente-trois ans, atteinte concomitamment de néphrite subaiguë et de néoplasme du col utérin, et chez laquelle les symptômes fonctionnels de néphrite disparurent progressivement et complètement devant l'envahissement de la cachexie, j'ai pu constater les chiffres de 15o/95, c'est à-dire une chute diastolique très peu diminuée, avec un pouls à 120. Il y a, enfin, toute une catégorie de malades qui présentent communément une hypertension systolique modérée à 160 millimètres Hg et une tachycardie atteignant ou dépassant 120 ; ce sont ceux atteints de goitre exophtalmique, de maladie de BASEDOW fruste ou de simples névroses tachycar-
310 CLINIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
diques. Il est .très remarquable de voir que, chez tous ces sujets, létaux de la tension diastolique oscille autour du chiffre (normal pour cette pression systolique) de 90 ou 95 millimètres Hg; et,que l'hypertension diastolique, si elle se manifeste, est presque inappréciable et, en tout cas, nullement comparable aux exemples fournis; plus haut. La conclusion qui s'impose est que, s'il faut toujours
tenir un certain compte du degré d'accélération du coeur dans l'appréciation d'une formule d'hypertension diastolique et admettre d'autant plus aisément ce trouble circulatoire que Je pouls est moins accéléré, la véritable hypertension diastolique n'en reste pas, moins foncièrement indépendante de la tachycardie et relève indubitablement de conditions circulatoires anormales.
Etant donné que la tachycardie n'est pas seule en cause, la première idée qui se présente à l'esprit, pour expliquer la réduction de la chute diastolique dans les cas que je viens d'étudier, est d'invoquer la dilatation des cavités droites et la gêne de la circulation veineuse. S'il est vrai que la vague systolique indique comment l'artère se
FIG. 114.— Type circulatoire normal et type d'hypertension diastolique, chez deux sujets présentant un rythme cardiaque semblablement accéléré, à 120. — Il s'agit, dans le premier sphygmogramme, d'un malade atteint dé tachycardie basedowienne; dans le second, d'un , sujet présentant un état asystolique grave 6u déclin d'une néphrite subaiguë. Les différences si marquées de chute diastolique, dans ces deux cas où le taux tachycardique est identique, prouvent bien que là véritable cause des états d'hypertension diastolique ne réside pas dans là seule accélération du coeur avec raccourcissement de la diastole.
TYPES CIRCULATOIRES 311
remplit et la chute diastolique comment elle se vide, on peut se demander si la pression diastolique ne reste pas élevée du fait de la pénétration difficile du sang dans un système capillaire et veineux déjà gorgé de liquide. Il s'agirait ainsi d'une hypertension diastolique par obstacle veineux ; le Courant sanguin qui vide les artères venant, en quelque sorte, buter contre un plan résistant qui empêche la tension de s'abaisser. Une telle explication est plausible, et probablement juste dans une certaine mesure. Mais elle ne suffit pas à rendre compte de l' hypertension diastolique si accusée, observée au cours des néphrites aiguës et chroniques avec fléchissement cardiaque. Une certaine Irypertension minima peut bien se dessiner, comme nous l'avons dit, lorsque la gêne de la circulation, des cavités droites est très accentuée, dans les cas de phtisie fibreuse ou de rétrécissement mitral par exemple ; mais elle est toujours très faible, Je citerai, comme exemple, un cas de rétrécissement mitral très serré, avec pouls absolument régulier, autour de 120 jusqu'à la mort, et avec une tension de 110/75. Ce peu d'intensité de l'hypertension diastolique dans les cardiopathies valvulaires et,la phtisie fibreuse, où la gène de la circulation veineuse est cependant extrême, son apparition chez Certains hypertendus défaillants où là dilatation des cavités droites est souvent fort tardive montrent bien qu'il faut invoquer un autre facteur pour expliquer le développement de ce trouble circulatoire si singulier. Nul doute que ce ne soit dans l'insuffisance myocardique qu'il faille chercher la véritable explication de la très grande majorité des cas d'hypertension diastolique observés en clinique. - Cela est évident pour les néphrites chroniques, arrivées à une phase avancée de leur évolution; et nous verrons plus loin qu'il est fréquent d'assister chez ces malades à la baisse progressive de la tension systolique, ail fut et à mesure que s'installent les signes d'insuffisance ventriculaire gauche. Le taux de la tension diastolique reste fixe puisqu'au niveau du rein, Ou à la périphérie, persistent les mêmes raisons qui avaient nécessité son élévation. Mais, sur cette base inchangée de pression constante, le coeur est désormais impuissant à dresser la vague élevée de pression variable, indispensable au bon équilibre circulatoire. Les crêtes systoliques s'affaissent progressivement, jusqu'au jour où le ventricule, égrenant ses dernières systoles ne sera même plus assez vigoureux pour soulever le
312 CLINIQUE SPHYGMOMANOMETRIQUE
plancher sigmoïdien sur lequel pèse tout le poids de la tension minima. — Dans les néphrites subaiguës, bien qu'un ne puisse
assister à la chute progressive de la tension maxima, l'hypertension diastolique reconnaît une origine similaire. La lésion rénale intense, grave, exigerait sans doute, pour être compensée un certain temps, une très forte tension. Mais cette lésion s'est constituée rapiFIG.
rapiFIG. — Installation progressive du type d'hypertension diastolique dans les derniers mois de l'évolution d'une néphrite chronique hypertensive. — Homme de cinquante-trois ans. Néphrite chronique typique, avec galop, grosse hypertension, volumineuse hypertrophie cardiaque (poids du coeur, 58o grammes à l'autopsie). Au cours de la phase de défaillance cardiaque terminale, on voit la tension systolique s'abaisser progressivement et régulièrement, alors que la tension diastolique reste presque immuable.En quelques mois, le type circulatoire, d'abord normal, accuse de plus en plus le type d'hypertension diastolique. Pouls régulier, à 120-13o, pendant toute la durée de la maladie. Il est évident que ce type d'hypertension diastolique n'est pas créé par une élévation anormale de la tension minima, mais par une déficience progressive de la tension systolique. Le diagramme en clair, qui surmonte ce même graphique dans la partie droite de la figure, montre à la fois l'étendue de la chute de la tension systolique et le taux auquel se fût maintenue cette tension maxima si le type circulatoire fût resté normal.
TYPES CIRCULATOIRES 313
dement, en quelques semaines; et le coeur, surmené, n'ayant ni le temps, ni la force, de façonner une hypertrophie concentrique régulière, s'est laissé dilater prématurément. Incapable de fournir l'énorme effort que le rein réclame, il ne peut donner qu'une hypertension systolique modérée, oscillant en général entre 15o et 170 millimètres Hg, s'abaissant, dans les derniers jours, jusqu'à
14o ou i3o millimètres Hg. Toutefois, si le coeur a failli à la tâche, cela n'a pas empêché l'organisme, si fertile en ressources toutes les fois qu'il s'agit de concourir par des réactions associées à un acte de défense, de pousser la pression minima jusqu'au niveau élevé,
FIG. 116. — Hypertension diastolique au cours d'une néphrite subaiguë . grave. - Homme âgé de trente trois Fins. Saturnisme ancien. Néphrite subaiguë de cause indéterminée, avec hypertrophie cardiaque, tachycardie régulière permanente à 120, galop. Signes accusés de défaillance Cardiaque avec cyanose, gros foie, turgescence des jugulaires et souffle tricuspidien fonctionnel intermittent; évolution, rapide en un an. Le type d'hypertension diastolique est très net. Le diagramme en clairfiguré dans la partie supérieure du tracé montre approximativement le taux de tension systolique qui correspondrait, dans un type circulatoire normal, aux tensions diastoliques relevées chez ce malade. Lors de deux périodes d'amélioration, sous l'influence de fortes doses de théobromine; on note un abaissement notable de la tension minima sans variation sensible de la pression maxima.
314 CLINIQUE SPHYGMOMANOMÉTRlQUE
au dessous duquel la circulation rénale eût été sans toute difficilement utilisable pour la sécrétion urinaire. Le sang ne s'écoulant que lentement pendant là diastole, du fait de la stase veineuse commençante, de la tachycardie, probablement aussi, d'un spasme vaso-moteur généralisé, on assiste à l'ascension progressive de la;
pression constante. Si cette interprétation est exacte, l'hypertension diastolique des néphrites subaiguës graves, oscillant d'ordinaire autour de 16O/13O pour un pouls à 120, doit être envisagée comme une hypertension artérielle considérable, décapitée en quelque sorte de son maximum systolique ; pour trouver, en effet, une tension systolique correspondant à cette pression minima de 13o, c'est autour de 280 OU de 240 millimètres Hg qu'il faudrait chercher. — Dans les deux Cas, il s'agit plus en réalité d'une hypotension .
FIG. 115. — Sphygmogramme objectivant l'interprétation des états d'hypertension diastolique par « hypotension systolique relative ». — Comme le montre le troisième graphique, le type d'hypertension diastolique doit être considéré comme une hypertension artérielle élevée, décapitée de son maximum systolique (même malade que celui de la figure 114).
TYPES CIRCULATOIRES 315
systolique relative, par déficience myocardique et insuffisance ventriculaire gauche, que de véritable hypertension diastolique. La seule différence entre ces deux types d'hypertension diastolique secondaire et primitive est que, dans le premier cas, l'hyper tension systolique n'a pu être maintenue à son taux antérieur, tandis que dans le second, cette hypertension systolique n'a même pu être édifiée.
Quoi qu'il en soit de cette interprétation, la chose importante et certaine, sur laquelle j'ai à maintes reprises, attiré, l'attention dans ces dernières années, c'est qu' « il faut juger de la gravité de ces néphrites, subaiguës ou chroniques, par la hauteur de la tension diastolique et non par celle de la tension systolique, dont le niveau relativement peu élevé ne sert qu'à démontrer l'impuissance cardiaque dans la lutte entreprise pour secourir le rein dangereusement lésé ».
Les notions que nous venons de développer sur les types circulatoires vont nous permettre dé prendre une idée plus exacte de l'importance respective de la mensuration des pressions maxima et minima dans la pratique courante.
La mensuration des deux tensions, nous ne cesserons de le répéter, est toujours intéressante, souvent utile, et doit être faite toutes les fois qu'on le peut. Sans elle, il est vraiment impossible de se livrer à une étude attentive et un peu poussée des phénomènes circulatoires. Cela n'est pas en discussion. Il n'est pas douteux cependant que le secours apporté par la mensuration de là tension minimine varie singulièrement suivant les cas.
Chez des sujets à tension systolique normale ou oscillant autour de la normale et ne présentant aucun trouble fonctionnel circulatoire, la fixation précise et systématique du taux de la pression diastolique n'a qu'une importance relative. Dans de tels cas, le médecin se trouve souvent excusable de ne pas perdre son temps à fixer à quelques millimètres près le niveau de cette tension minima. Remarque d'autant plus importante, que c'est en général chez ces sujets à tension normale ou subnormale que la mensuration de la tension diastolique par la méthode vibro-auscultatoire Ou oscillatoire est parfois délicate. A un demi ou à un centimètre Hg près, ce chiffre
316 CLINIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
de tension peut se déduire du chiffre systolique ; et la constatation d'écarts un peu plus accusés ne présenterait qu'une signification assez indécise.
Dans les insuffisances aortiques, la mesure de la tension diastolique est plus utile, la profondeur de la chute tensionnelle pouvant renseigner sur l'importance de l'ondée sanguine rétrogradé. Cependant l'intensité des signes périphériques, les caractères du s ouffle et le degré de l'hypertrophie cardiaque, l'appréciation de la sévérité ou de la bénignité de la scène clinique, sont capables de suppléer, dans une assez large mesure à lai mensuration sphygmomanométrique. Plus importants sont les faits dans lesquels la constatation imprévue d'une hypotension diastolique met sur la voie de l'insuffisance.
Le type circulatoire des hypertendus latents est le plus souvent normal, et l'on ne commettrait pas une grande faute en négligeant, dans quelques cas, la mesure de la tension minima. Pratiquée systématiquement, cette mesure permet cependant de mettre en évidence, chez certains de ces sujets, deux particularités intéressantes. Dans le premier cas, l'existence d'un type d'hypotension diastolique plus ou moins caractérisé, dont la signification a été discutée plus haut, autorise peut-être une certaine atténuation pronostique. Dans le second, beaucoup plus exceptionnel, la présence d'un certain degré d'hypertension diastolique, précédant tout symptôme fonctionnel, peut permettre de prévoir le fléchissement cardiaque prochain.
C'est certainement chez les hypertendus troublés et, d'une façon plus générale, dans toutes les cardiopathies non valvulaires à la phase d'insuffisance myocardique, que la mesure de la pression minima apparaît le plus indispensable. Nous avons vu à quelles singulières méprises on s'exposerait, en conjecturant du degré de gravité de certaines néphrites d'après la seule notion du taux peu élevé de la tension systolique. Sans doute, ici encore, la mensuration de la tension diastolique n'est pas le seul moyen d'éviter cette grossière erreur d'interprétation. Il s'agit presque toujours de néphrites graves. Dans la forme subaiguë, le malade est en pleine asystolie ; dans les formes plus chroniques, si l'état est souvent moins alarmant, l'hypertrophie du coeur, le galop, l'essoufflement, les accès d'oedème pulmonaire nocturnes, ne laissent vraiment guère
TYPES CIRCULATOIRES 317
de doute sur la sévérité de l'affection. Et, il faudrait avoir, l'esprit singulièrement faussé par une médecine mathématique, pour prétendre, en s'appuyant uniquement sur la mensuration d'un seul chiffre de tension, nier la gravité d'un état que le malade crie par tous ses pores. Personne n'ignore que certaines néphrites aiguës urémigènes, certaines artérites graves avec foyers oblitérants disséminés, des myocardites chroniques arrivées à leur dernier stade, un grand nombre d'angines de poitrine vraies, des aortites sévères peuvent ne s'accompagner d'aucune modification de la tension, pas plus diastolique que systolique ; il est donc loisible de se rappeler qu'à la période avancée des néphrites le taux de la tension systolique n'est plus un indicateur infaillible. Mais, après avoir confessé loyalement que la constatation de ces états d'hypertension diastolique ne lait bien souvent qu'expliquer et confirmer une impression clinique plutôt qu'elle n'est véritablement indispensable pour l'établir, on nous accordera que, dans de nombreux cas aux contours cliniques plus indécis, la mesure de la tension diastolique assure au diagnostic ou au pronostic une orientation et une précision qu'on eût difficilement obtenues du simple examen clinique, et que le médecin aurait mauvaise grâce à se priver d'un moyen d'investigation aussi précieux.
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ARTICLE II , .
RÉACTIONS TENSIONNELLES
Les modifications de la pression artérielle, qu'il s'agisse d'hypotension ou d'hypertension; sont de deux sortes. — Les unes sont permanentes. Elles représentent un équilibre circulatoire nouveau et stable, nécessité par des altérations artérielles ou viscérales anciennes, maintenu par une adaptation cardiaque fixe. :— Les autres sont transitoires. Ce sont des réactions passagères, empruntant aux actions nerveuses leurs qualités de soudaineté d'apparition et de fugacité ; leur cause doit être cherchée; moins dans des modifications structurales, que dans le jeu mobile des excitations ou inhibitions vaso-motrices.
Entre ces deux sortes, de modifications, que l'on serait tenté de
320 CLINIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
classer, suivant le dualisme nosographique habituel, en organiques et fonctionnelles, la barrière n'est pas aussi tranchée qu'on pourrait le croire. A l'origine, les réactions devenues les plus permanentes n'ont sans doute été que transitoires; c'est la continuité ou la répétition des stimulations anormales qui ont créé à la longue le nouvel équilibre à orientation fixe. La fonction a modelé l'organe; un appareil cardio-vasculaire, plus puissant ou plus réduit, s'est progressivement substitué à l'ancien. Outre cette parenté originelle, ces deux modes de réaction se juxtaposent et s'intriquent sans cesse. Pour ne prendre qu'un exemple, les hypertensions: permanentes se doublent presque à chaque instant de fluctuations surar joutées, à prédominance hypo ou hypertensive, dont la répétition va modifier insensiblement l'intensité ou même le type de la réaction primitive ; si bien que l'on a souvent quelque peine à s'orienter, au cours de notations sphygmomanométriques successives, L'observation un peu prolongée du malade permet seule de faire la part, sinon des modifications organiques ou fonctionnelles (prêtent tion trop risquée dans l'état actuel de nos connaissances), tout au moins du caractère permanent ou transitoire de ces variations. Cette dernière distinction est la seule qu'il soit utile de maintenir en clinique, pour laisser filtrer un peu de clarté sous la frondaison touffue des réactions tensionnelles. On ne perdra pas de vue qu'elle n'a rien de radical et qu'il doit persister, entre ces deux ordres dé phénomènes, la même parenté qu'entre le moellon et l'édifice.
1. MODIFICATIONS PERMANENTES DE LA TENSION
Elles sont, à la fois, les plus communes et les plus faciles à étudier. Leur stabilité rend aisée leur observation; leur permanence, autorise à rechercher leurs causes dans des altérations du coeur, des modifications vasculaires ou viscérales, toujours plus facilement démontrables que de simples perturbations vaso-motrices. Nous étudierons, dans des chapitres séparés, l'hypertension artérielle permanente et l'hypotension artérielle permanente.
HYPERTENSION ARTÉRIELLE PERMANENTE 321
I. - HYPERTENSION ARTERIELLE PERMANENTE
On ne saurait trouver, dans toute la série des troubles tensionnels, de forme plus commune et dont la connaissance importe davantage. Le médecin la rencontre à chaque pas. Ce trouble circulatoire, dont on chercherait, vainement la description dans les Traités de Médecine datant de quelque dix ou vingt ans, se trouve en réalité être à la base d'états pathologiques innombrables.
Non qu'il s'agisse d'une entité nosographique définie, de cause toujours identique et ressortissant à un substratum anatomique fixe; ce qui fait, au contraires l'intérêt de ce trouble circulatoire, c'est qu'au lieu d'être une maladie, au cadre forcément restreint, il représente un mode de réaction de l'organisme malade, dont le domaine est infiniment plus vaste.
La différence entre cette hypertension artérielle permanente et les hypertensions transitoires, dont nous ferons l'histoire plus loin, se trouve dans la coexistence d'un certain degré d'hypertrophie cardiaque, qui en constitue comme la doublure anatomique. Cette hypertension permanente apparaît donc comme une fonction nouvelle, greffée sur la tension artérielle physiologique, et que le supplément de substance myocardique implanté dans le coeur primitif a pour mission de maintenir.
A. DESCRIPTION CLINIQUE GÉNÉRALE ET PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUE
Nous présenterons d'abord l'histoire générale de cette réaction hyper tensive, en laissant volontairement dans l'ombre le problème de ses origines. Qu'il nous suffise pour l'instant de savoir qu'à côté des albuminuriques nets, des brightiques notoires, il faudra compter, parmi les hypertendus que nous allons passer en revue, nombre de sujets qui ne présenteront, pendant un temps plus ou moins long, aucun stigmate évident d'altération rénale.
L, GALLAVAVARDIN. 21
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a. Forme commune de l'hypertension artérielle.
Présentent cette forme, les malades qui parcourent le cycle complet de la réaction hypertensive. Comme à la plupart des affections qui intéressent l'appareil cardio-vasculaire, on peut lui décrire trois phases : une phase latente, une phase troublée et une phase de défaillance.
I° Phase latente. — Rien n'est plus frappant, pour celui qui n'est pas familiarisé avec les surprises que réserve l'exploration sphygmomanométrique systématique, que le spectacle de ces « hypertendus latents » Voici dès sujets qui viennent consulter pour des malaises sans importance, d'autres auprès desquels le médecin est appelé pour une affection intercurrente banale, d'autres encore qui se soumettent à la formalité de l'examen, médical au moment de passer un contrat d'assurance ou avant une opéraration chirurgicale. Il ne s'agit pas de malades; et cependant, au cours de l'épreuve tensionnelle, l'aiguille, au lieu de s'arrêter autour des chiffres normaux de 120-130 millimètres Hg, monte à 160-170, plus haut encore à 200, pour ne se fixer souvent qu'à 220, 240 millimètres Hg ou même un peu au delà, c'est-à-dire à un chiffre qui est exactement le double de la tension artérielle normale ! La surprise du médecin, l'insistance qu'il met à interroger les sujets, n'ont d'égale que la netteté de leurs dénégations Et, en effet, ce ne sont pas des malades; ce sont simplement des « hypertendus ».
Une telle latence symptomatique n'est pas une exception. Elle constitue presque la règle', tout au moins à une certaine période de l'hypertension artérielle ; et elle peut être absolue. — Il n'existe vraiment aucun symptôme fonctionnel. Pas de vertiges, pas de céphalées, pas le moindre de ces petits signes du brightisme dont la vertu diagnostique a été si vantée. Il est vraiment étrange de voir ces sujets, dont la circulation est cependant si troublée, ne ressentir aucun phénomène anormal du côté du coeur, n'accuser aucune palpitation, ne présenter aucune dyspnée. C'est en vain
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qu'on les presse,de questions pour leur faire avouer tout au moins
un peu d'essoufflement d'effort (ce réactif si sensible, dés troubles circulatoires), lors de la marche rapide ou de l'ascension d'un
FIG. 1 18. — Exemples d'hypertension artérielle considérable, atteignant
ou dépassant le double de la tension normale, sans essoufflement.
Tracé I — Femme de 59 ans. Hypertension, artérielle à 210/115, pouls 62 (ce qui explique la chute diastolique un peu basse). Pas d'albumine. Se plaint' seulement de vertiges et de symptômes oculaires dus à des lésions de chorio-rétinite. Aucun essoufflement lors des efforts
Tracé II. — Homme de 87 ans. Excellente santé apparenté, sauf quelques manifestations rhumatismales pour lesquelles il vient consulter. Albuminurie légère. N'éprouve aucun essoufflement.
Tracé III. — Homme de 57 ans. L'hypertension artérielle a été.reconnue accidentellement lors d'un examen médical précédant une intervention. Pas d'albumine à de très nombreux examens pratiqués en série. Etat fonctionnel, parfait. Il n'existe aucun essoufflement anormal, même dans la marche rapide ou l'ascension des escaliers.
Tracé IV. - Femme de 59 ans. Vient consulter uniquement pour des névralgies brachiales. Interrogée longuement sur les symptômes fonctionnels, affirme « qu'elle n'est pas, plus essoufflée qu'il y a dix ans » et n'éprouve aucune anhélation dans la marche, les ascensions ou les efforts.
Trace V. — Homme de 59 ans. Hypertension artérielle considérable avec albuminurie légère. Se plaint uniquement de vertiges et de maux de tête violents, surtout dans la matinée. Ne ressent aucun essoufflement dans les efforts ou lors, de l'ascension des escaliers.
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escalier par exemple. Mais non; les hommes vaquent sans peine à leurs occupations professionnelles; les,femmes font leur ménagé, leurs courses, leurs visites, sans la moindre gêne. Ni les uns, ni les autres n'ont rien; et c'est à leur tour de commencer a s'étonner d'une enquête portant sur des symptômes qui leur sont aussi étrangers. — Ces sujets ne présentent bien souvent,, non plus, aucun signe physique cardio-vasculaire anormal. Le pouls est parfaitement régulier, sans aucune accélération, ou avec une fréquence modérée de 80 à 90 pulsations à la minute. L'auscultation du coeur est absolument négative, sans galop ni souffle, très souvent sans accentuation particulière du 2e bruit, à la base 1. Sans doute, il existe un certain degré d'hypertrophie cardiaque; mais, cliniquement, les signes en sont infiniment plus difficiles à mettre en évidence : que l'élévation de la tension artérielle, de constatation si simple. Quels sont, en effet, les signes de l'hypertrophie ventriculaire
L'importance qu'a conservée, dans l'esprit de nombreux médecins, l'accentuation du deuxième bruit aortique, est loin d'être toujours justifiée. Cette accentuation fait souvent défaut dans des cas de grosse hypertension, alors que d'autres circonstances peuvent lui donner naissance (altération des valvules, anémie, etc.) Je citerai, à cet égard, une statistique de JANEWAYqui, sur 389 cas d'hypertension, n'a trouvé aucune accentuation dans 105 cas, une accentuation légère dans 78 cas, modérée dans 163 cas, et marquée dans 43 cas seulement.
Il en est de même de l' « altération artério-scléreuse des"artères », à laquelle on aurait bien tort de vouloir se fier pour porter le diagnostic d'hypertension. Sur 402 cas d'hypertension artérielle, JANEWAY n'a rencontré aucune altération appréciable dans. 182 cas (près de la moitié), des altérations légères dans (61 cas, modérées dans 115 cas, et marquées dans 44 cas seulement.
Le « signe de la temporale » ne mérite pas non plus le succès qu'il est en voie de conquérir dans le public extra-médical. L' hypertension artérielle et les troubles de la trophicité artérielle sont deux choses distinctes. Si l'on ne peut refuser à l'hypertension le pouvoir d'aggraver la dilatation et l'allongement (parlant les sinuosités) d'une temporale peu résistante, on est souvent à même de constater une tension strictement normale chez des individus qu'inquiète l'allure serpentine de leurs vaisseaux temporaux. La meilleure preuve que les sinuosités temporales ne suffisent pas à préjuger de l'état de la tension intra-artérielle se trouve dans la différence que l'on note parfois à l'inspection des deux tempes : une temporale se trouvant très sinueuse et large, alors que l'autre a conservé son aspect normal. Cela dit, et si les temporales sinueuses ne sont pas, à elles seules, la signature d'une hypertension artérielle, il n'en est pas moins vrai que des temporales très flexueuses. larges, animées de forts battements, sont une assez forte présomption en faveur de l'existence d'un état hypertensif.
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gauche? L'abaissement ou la projection en dehors du choc cardiaque? Mais on ne sent pas toujours le choc de la pointe, même dans le décubitus latéral gauche; et il. faut que le coeur ait déjà presque doublé de volume pour que ce choc saute, du IVe ou du Ve espace, dans le VIe. L'examen radioscopique lui-même ne fournit que des renseignements insuffisants ou de perception délicate.Tant qu'il s'agit d' hypertrophie localisée au ventricule gauche, et surtout d'hypertrophie concentrique, sans aucune dilatation, on est étonné de voir le peu de modification de l'ombre cardiaque. C'est à peine si l' on perçoit un léger bombement du bord gauche du coeur, correspondant à l'augmentation de la masse charnue de la base et de la partie moyenne du ventricule; souvent même, lorsque l'hypertension est peu accusée, ce n'est que sur les tracés orthodiagraphiques que l'on met en évidence la minime augmentation de l'aire cardiaque avec allongement du demi-diamètre transversal gauche. On comprend le peu d'importance de ces signes radioscopiques lorsque l'on songe à la facilité avec laquelle on obtient en une ou deux minutes, sans appareillage compliqué, le chiffre de la tension artérielle qui renseigne exactement sur une valeur beaucoup plus utile que celle du volume du coeur, je veux dire sur son rendement!
Mais, dira-t-on, la lésion rénale, qui chez ces hypertendus latents est si souvent la cause de l'hypertension, doit sans doute pouvoir êté mite.en évidence dès ce moment-là? C'est encore une erreur; et il arrive de ne pouvoir déceler chez ces malades aucun sym - ptômer d'origine rénale. Si l'albumine existe, sous forme de léger
nuage ou en quantité notable, lorsque le brightisme est indubitablement à la tête de la réaction hypertensive, il est très souvent
impossible d'en percevoir aucune trace chez un grand nombre de ces hypertendus latents; et cela, non à un seul examen, mais à des
exmens pratiqués en série, sur les urines du matin et du soir, par les méthodes les plus sensibles, et chez des sujets présentant parfois une hypertension dépassant 240 ou 250 millimètres Hg ! La recherche de l' albumine, lorsqu'il s'agit d'apprécier d'état du rein, peut passer pour une réaction grossière; et l'on doit se demander si une investigation plus minutieuse,, utilisant les multiples épreuves que l'analyse fonctionnelle moderne du rein a mises à notre portée, n'arriverait pas à déceler chez ces malades paradoxaux quelque trouble
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de l'élimination urinaire. Là encore, il n'en est rien. Nombre de ces hypertendus latents ne montrent aucune modification de la,filtration urinaire, lors de ces épreuves diverses. Il n'y a pas de rétention chlorurée, la perméabilité au bleu est conservée, le dosage, de l'urée dans le sang révèle des chiffres normaux, comme j'ai pu le constater maintes fois à la suite de bien d'autres auteurs. La constante d'AMBARD, qui est un moyen très délicat de mettre en évidence le trouble de la sécrétion rénale, en calculant dans des circonstances bien déterminées le rapport entre les chiffres d'urée trouvés dans le sang et dans l'urine, ne donne pas davantage de résultats; WIDAL, WEILL et LAUDAT (1912), AUBERTIN et PARVU (1912), LIAN et CHABANIER (1913), CHARLES et NOEL FLESSINGER (1913), ont démontré que nombre de ces hypertendus latents, avec ou sans albuminurie, peuvent présenter un coefficient uréo-sécrétoire absolument normal. L'épreuve de la polyurie expérimentale, qui a pour but de découvrir les moindres variations dans le rythme des éliminations aqueuses urinaires, reste également négative; et FINCK, VAQUEZ et COTTET (1913-1914) ont montré qu'il pouvait n'exister, chez ces malades, ni opsiurie (retard du maximum d'élimination qui, de la période digestive, est reporté à la période de jeûne), ni oligurie orthostatique ou polyurie clinostatique (retard dans le. début et prolongation dans la durée de l'élimination dans la station debout), ni nycturie (qui est la conséquence de ces deux troubles). Il faut donc admettre, comme le disent LIAN et CHABANIER, qu' « il existe de nombreux cas où une hypertension artérielle permanente, même considérable, peut, ne s'accompagner d'aucun trouble fonctionnel rénal, décelable par les méthodes actuelles d'investigation. »
Il est impossible d'évaluer la durée de cette phase latente de l'hypertension artérielle. Le plus ordinairement, l'hypertension est découverte alors qu'elle est déjà très accusée ; on ne peut donc conjecturer à quelle époque on doit en faire remonter le début. D'autres fois, le médecin assiste bien au début, mais l'évolution ascendante et progressive est tellement lente que la suite des observations est rendue difficile; bien souvent, c'est le malade qui est destiné à survivre à son médecin. C'est dans la clientèle de ville qu'il faudra chercher la solution de cet important problème, l'hôpital étant surtout le refuge des hypertendus défaillants. Il est
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probable que, dans nombre de cas, deux générations de médecins ne seront pas de trop pour embrasser le cycle complet d'une évolution aussi étendue. Rien ne nous dit que, dans certaines formes particulièrement torpides tout au moins, cette évolution ne puisse
pas comprendre une, deux dizaines d'années ou peut-être davantage. Il arrive qu'on puisse suivre durant huit ou dix ans des hypertendus latents, à peu près fixés autour de 200 ou 220 millimètres Hg; il n'est pas irrationnel d'admettre que, chez ces sujets, âgés à ce moment de cinquante-cinq ou soixante ans par exemple, c'est bien longtemps auparavant, peut-être à quarante ou quaranteFIG.
quaranteFIG. — Hypertension artérielle élevée, avec albuminurie, à peu près stationnaire et parfaitement tolérée pendant près de dix ans. - Jeune femme de 3o ans. Albuminurie légère et permanente, reconnue accidentellement en 1909 à l'occasion d'une fausse couche. Hypertension artérielle s'étant maintenue à un taux élevé pendant tout le temps de l'observation, avec quelques oscillations et une tendance à peine marquée à' la progression. Absence constante de symptômes fonctionnels, et notamment de tout essoufflement d'effort, durant le cours" de l'évolution. Décès par la grippe en 1918.
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cinq ans, qu'à pu s'amorcer sournoisement, puis progresser lentement, le processus morbide qui a parcouru l'échelle de pression qui s'étend entre 120 et 200 millimètres Hg.
Durant cette longue période, l'hypertendu est moins un malade, qu'un sujet dont l'organisme est soumis à un régime circulatoire et à un équilibre liquidien différents de ceux existant à l'état physiologique. Faisons abstraction de la lésion initiale, rénale ou autre, qui a nécessité ce nouvel état de choses. Tout se résume en une hypertension artérielle avec hypertrophie ventriculaire
FIG 120.- — Hypertension artérielle solitaire, d'une tolérance parfaite, bien qu'assez rapidement progressive. — Homme de 52 ans. Hypertension artérielle reconnue accidentellement Etiologie impossible à préciser (ni écarts alimentaires, ni maladie infectieuse, pas de syphilis). Tolérance parfaite; pas la moindre dyspnée d'effort. Pas trace d'albumine à de très nombreux examens pratiqués en série, matin et soir, pendant plusieurs jours. Malgré un régime alimentaire très sévère et de nombreux essais thérapeutiques, la progression.de l'hypertension s'effectue assez rapidement (de 180/100 à 270/130 en cinq ans). A remarquer le type d'hypotension diastolique (sans insuffisance aortique) qui tend à s'installer.
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gauche1, Le sujet est comparable à un individu qui, au lieu d'un coeur normal, posséderait « un gros moteur ». Toutes les fonctions s'accomplissent avec la même souplesse et la même régularité, l'aspect extérieur est florissant. Il faut la curiosité médicale et l'investigation sphygmomanométrique pour découvrir que déjà le fruit est piqué, que ce gros moteur (qui ne fournit au total qu'un rendement ordinaire) n'est là que pour dissimuler la tare secrète qui, dans l'intimité des tissus ou des appareils excréteurs, poursuit sans trêve son travail souterrain,
N'est-ce pas la façon la plus naturelle d'expliquer la latence si remarquable, et parfois si prolongée, de l'hypertension artérielle? Dans tout ce qui touche a l'interprétation des modifications de la tension, l'idée qui semblé le guide le plus sûr est qu'il ne faut voir dans ces modifications ni un fait primitif, ni une réaction folle et déréglée de l'organisme, mais un phénomène de compensation. Le coeur n'est pas un cheval qui s'emballe, mais Un cheval qui tire. Si le ventricule gauche maintient dans le système artériel une tension élevée, c'est très certainement, que cette tension lui est demandée par les exigences de certains organes, notamment par le rein si prompt à s'encrasser ; et qu'en serviteur docile le coeur se surmène, s'hypertrophie, et finalement meurt au service des organes dont il est chargé d'assurer l'irrigation. Prenons l'exemple de l'hypertension permanente par néphrite chronique latente. Tout se passe comme si l'adultération progressive des appareils glomérulo-tubulaires exigeait, pour suffire à la dépuration urinaire quotidienne, une pression plus élevée du sang circulant dans le rein. Or, rien n'est souple, rien n'est docile comme l'appareil cardio-vasculaire dont la
1 On dit parfois, et l'on trouve souvent écrit que, dans le coeur de TRAUBE, l'hypertrophie, bien que nettement prédominante au niveau du ventricule gauche, envahit toujours les cavités droites et qu'ainsi le coeur se trouve « généralement hypertrophié ». Cela est vrai lorsque le sujet a éprouvé pendant plusieurs mois ou plusieurs années de la dyspnée, lorsque le coeur droit a dû lutter contre des congestions pulmonaires oedémateuses à répétition et s'est progressivement laissé dilater et hypertrophier ; cela est absolument inexact lorsque le malade n'est pas sorti de la phase latente de son hypertension artérielle.
Je pourrais relater plusieurs autopsies de grands hypertendus latents, avec des tensions oscillant entre 200 et 250 millimètres Hg, emportés par des accidents cérébraux ou des affections intercurrentes, et chez lesquels l'hypertrophie demeurait strictement localisée à la masse ventriculaire gauche.
330 CLINIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
fonction, à chaque moment et dans la mesure du possible, est de se modeler sur les besoins de l'organisme. Aussi voit-on, au fur et à ■ mesure que le filtre s'encrasse et par un admirable mécanisme de régulation, la tension artérielle s'élever progressivement, en même ' temps que le coeur, pour suffire à ce travail supplémentaire, s'hypertrophie et voit son poids passer de 300 à 600 grammes, ou même davantage, —pour qu'en fin de compte le nouvel équilibre liquidien puisse incessamment compenser la lésion du filtre rénal. On comprend maintenant que les sujets puissent n'éprouver, pendant longtemps, aucun symptôme fonctionnel et même, pas d'essouffle- - ment. Lorsque l'essoufflement survient, comme je l'ai écrit à maintes reprises, « ce n'est pas parce que le coeur est gros, mais parce qu'il ne peut plus grossir assez, ou assez vite ; ou encore parce que la lésion rénale a revêtu un caractère ou un degré qui ne sont plus' susceptibles d'être exactement compensés par une simple élévation de la pression,sanguine ».
Rien, mieux que cet aperçu physio-pathologique, n'est capable de démontrer l'importance pratique de la sphygmomanométrie. Pour combattre la maladie, le médecin doit connaître les ruses de son ennemi. Or, l'organisme est trop bien fait. Lorsque s'implante dans son sein cette épine irritative qui aboutira plus tard au brightisme avéré, à la défaillance cardiaque incurable, à l'hémorragie cérébrale (par une filiation aussi sûre que celle qui, du chancre primitif, conduit à la paralysie générale ou au tabes), aucun cri d'alarme n'est jeté, aucune douleur, aucun trouble ne se manifestent. Parant au plus pressé, s'adaptant à son mal, mettant en oeuvre ses ressources infinies et sa merveilleuse plasticité, l'organisme réussit à tout masquer — jusqu'à la faillite. S'il est exact que le médecin ne voit trop souvent que le terme ultime des maladies, cela n'est jamais plus vrai que dans le cas présent. N'est-il pas dérisoire d'être consulté par de tels malades pour des troubles dyspnéiques graves, d'être appelé auprès d'eux à l'occasion d'une hémorragie cérébrale par exemple, quand ce n'est pas pour signer le certificat de décès ! Le mal est là depuis des mois, des années ; pour le reconnaître, il eût suffi de mesurer la tension artérielle, ce qui demande moins de temps que de prendre une température. Malgré cela, les écarts de régime, les fautes d'hygiène ont continué, et la coupe a débordé avant même que l'on se fût aperçu qu'elle se remplissait.
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Et cependant, si le traitement peut encore faire quelque chose pour retarder l'échéance fatale, lorsque la tension artérielle est arrivée à un chiffre très élevé, que n'eût-il pu faire au début, lorsque les troubles ne faisaient que s'amorcer. Comprend-on maintenant l'intérêt qu'il y a à dépister, non les grosses hypertensions, mais les hypertensions commençantes et modérées que le doigt est à coup sûr incapable de déceler. Et n'est-ce pas faire de.la bonne hygiène, de la saine médecine, que de chercher à s'attaquer au mal à son début, d'avoir pour objectif de dévoiler la maladie avant qu'elle ne soit incurable; de ne pas attendre, en un mot, pour faire, un diagnostic, que l'on ne puisse plus faire de traitement 1.
2° Phase troublée. — Si l'hypertension artérielle est un phénomène compensateur, cela ne veut pas dire qu'elle soit sans inconvénient, ni sans danger. Elle n'est pas non plus le paravent capable de masquer indéfiniment les troubles multiples occasionnés par une dépuration urinaire insuffisante. D'autre part, si certains malades versent presque brusquement de la phase latente de l'hypertension artérielle dans la phase de défaillance circulatoire confirmée, le plus grand nombre s'achemine progressivement vers cette ultime terminaison.
1 C'est cette phase de début des processus hypertensifs qu'HUCHARD avait proposé de désigner sous le nom de présclérose. « J'ai dit, j'ai contribué à prouver que l'hypertension artérielle précède et prépare les lésions de l'artério-seléroge... Cette hypertension est un des symptômes de la période que j'ai étudiée et à laquelle j'ai donné le nom de présclérose... La notion de la présclérose a une grande importance puisqu'elle permet de considérer, au double point de vue. clinique et thérapeutique,deux phases distinctes dans l'évolution de l' artério-sclérose : l'une curable, avec des lésions absolument latentes ou plutôt sans, lisions; comme je persiste à le croire; l'autre, incurable ou peu curable, celle de l'artério-sclérose confirmée, avec des lésions véritables qui se traduisent alors par des symptômes très caractéristiques, des accidents.divers et nombreux. » (HUCHARD, Journal des Praticiens, 1907.) Il nous semblé.qu'une telle désignation ne peut être conservée, qu'à la condition d'y chercher, moins la preuve d'une dualité nosologique réelle ou la démonstration d'une certaine filiation des accidents, que la simple distinction clinique de la phase de début et de la phase avancée du processus hypertensif. Rien ne prouve, en effet, qu'il y ait dans l'évolution de ce processus deux phases de nature distincte. Tout «porte à croire, au contraire, que c'est seulement par leur degré que s'opposent ces phases, ultime et de début, d'une réaction morbide qui reste sans doute identique a elle-même durant tout le temps de son évolution.
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Il y a donc place, entre ces deux bornes extrêmes, pour une phase intermédiaire, dans laquelle peuvent être groupées nombre de manifestations capables de survenir, chez les hypertendus, avant la période de défaillance cardiaque confirmée. Leur importance est , d'autant plus grande que c'est d'ordinaire à leur propos que les' sujets demandent un avis médical, et qu'elles peuvent être l'occasion d'un diagnostic précoce. Bien entendu, l'origine de ces manifestations est loin d'être univoque. Parmi: les troubles nerveux, cardiaques, respiratoires ou autres, que nous allons rapidement passer en revue, il faut voir soit l'effet direct et mécanique de l'hypertension vasculaire, soit le résultat de l'action nocive de produits de rétention rénale; tantôt encore l'indice d'un premier: fléchissement de la résistance myocardique, ou une perturbation passagère due à une bouffée d'hypertension paroxystique greffée sur le vieux fond d'hypertension permanente ; parfois, enfin, la conséquence de lésions artério-scléreuses plus ou moins généralisées. .
Parmi les troubles nerveux, on peut signaler, à la suite de nombreux auteurs (VAQUEZ, JOSUÉ, FOY, etc.), quelques modifications intellectuelles caractérisées par de l'inaptitude au travail, de l'amnésie passagère, une irritabilité excessive, une émotivité exagérée. Une certaine dépression physique surajoutée aurait pu, dans quelques cas, faire penser à l'existence d'un état neurasthénique (neurasthénie artério-scléreuse). La céphalée est un symptôme assez commun, surtout à une phase avancée. Parfois banale, frontale ou occipitale, d'autres fois pulsatile, elle survient spontanément ou à la suite d'un travail pénible. Cette céphalée des hypertendus revêt souvent des caractères particuliers, qui ont été bien mis en évidence par JANEWAY : « La céphalée, écrit cet auteur, apparaît au réveil ou tient le patient éveillé durant les premières heures du jour, présente son maximum d'intensité avant le lever et disparaît, soit immédiatement après le déjeuner, soit dans le courant de la matinée pour réapparaître avec les mêmes caractères chaque jour, pendant une très longue période. L'intensité de la douleur et sa localisation varient quelque peu; dans les cas les plus sévères, elle ressemble à celle d'une forte migraine et s'accompagne parfois de nausées et de vomissements ». Plus récemment, RÉNON a bien , individualisé cette « céphalée matinale continue des hypertendus » et a insisté sur sa plus grande fréquence chez les hommes, sa
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marché continue et progressive, la véritable intoxication médicamenteuse à laquelle elle arrivait à donner lieu, les malades essayant de la calmer à tout prix « à coups de cachets ». J'ai vu cette céphalée des hypertendus constituer le seul symptôme d'états hypertensifs avancés et évoluer par crises de huit à dix jours : matinale et tolérable les premiers jours, elle devenait bientôt atroce et continue, s'accompagnant d'un état nauséeux constant, d'un peu de raideur de la nuque, empêchant tout sommeil, pour décroître les derniers jours et affecter la forme rémittente du début. Dans un de ces cas, la ponction lombaire n'apporta aucune amélioration, alors que la saignée parut soulager d'autres malades. Ces crises céphalalgiquées évoluent d'ordinaire chez des sujets qui présentent une albuminurie plus ou moins abondante, un certain degré de rétention uréique dans le sang Il est probable qu'elles relèvent au moins autant de manifestations urémiques qu'hypertensives,et leur pronostic semble devoir être considéré comme sévère. L' insomnie est également fréquente ; et le sommeil se montre souvent entrecoupé de cauchemars pénibles, L' aphasie transitoire ou à rechutes, de même que certaines parésies passagères ont été notées, sans qu'il soit possible de dire s' il s'agit simplement de spasmes vasculaires ou de processus lésionnels limités et réparables. En revanche, les accidents convulsifs n'ont guère été décrits que dans l'urémie confirmée ou dans les crises hypertensives paroxystiques que nous étudierons plus loin au cours de l'éclampsie, du saturnisme, etc. J'ai cependant observé, chez un grand hypertendu dont le taux tensionnel oscilla pendant plusieurs mois entre 280 et 295 millimètres Hg, des crises convulsives suivies d'agitation, puis de torpeur, d'une durée totale de dix à quinze minutes, ne s'accompagnant d'aucun reliquat paralytique et survenant au nombre de huit à dix en un an. Le sujet, non syphilitique, était un albuminurique léger, nullement dyspnéique, continuait à vaquer à ses occupations, et venait consulter uniquement pour ces crises. Est-on autorisé, dans de tels cas, à innocenter complètement le facteur hypertension, au profit du facteur toxique? Une complication toujours possible des états d'hypertension artérielle, à n'importe quelle période de leur évolution, et l'une des plus graves, est l'hémiplégie. C'est bien souvent elle qui ouvre la scène clinique et qui conduit le médecin à reconnaître le trouble circulatoire remon-
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tant à plusieurs années en arrière. On aurait tort de croire qu'elle relève toujours d'une hémorragie cérébrale. L'analyse des symptômes et l'évolution clinique, comme les constatations anatomiques ultérieures, montrent fréquemment l'existence d'un ramollissement cortical par thrombose artérielle. Lorsqu'il existe un raptus hémorragique central, l'hypertension n'est pas le seul facteur en cause et il faut compter avec les altérations artériolaires concomitantes (artérites et anévrysmes miliaires).
Les troubles sensoriels ne sont pas rares. La fréquence des hémorragies rétiniennes est bien connue à une période avancée des états hypertensifs d'origine rénale. On a signalé aussi des faits d'amaurose ou d'amblyopie transitoires, d'hémianopsie passagère dont la pathogénie est loin d'être fixée. En revanche, la relation,' en apparence si naturelle, entre le glaucome et l'hypertension artérielle n'est nullement prouvée. Du.côté de l'ouïe, on a enregistré des bruits subjectifs variés (bourdonnements, sifflements, bruits de source, etc.), des surdités passagères.
Parmi tous ces phénomènes nerveux, ce sont les vertiges qui m'ont paru le symptôme d'alarme de beaucoup le plus commun. Il s'agit rarement d'un état vertigineux constant. Le plus ordinairement, les sensations gyratoires apparaissent lors du passage brusque de la situation horizontale ou assise à la situation verticale, au réveil lorsque le malade s'asseoit, sur son lit, ou encore lorsqu'il se relève après avoir ramassé un objet à terre. J'ai été frappé, chez les hypertendus venant consulter pour des vertiges, de la fréquence du début brusque des accidents. Il suffit d'être prévenu pour aller presque à coup sûr, par l'interrogatoire, à la découverte de cet « ictus vertigineux initial ». Les sujets ne présentaient rien d'anormal, lorsque subitement, et presque toujours le matin, ils furent pris d'un grand accès vertigineux, accompagné d'instabilité et parfois d'état nauséeux. C'est à dater de cet incident que les vertiges se sont reproduits d'une façon tenace, avec une tendance à s'atténuer progressivement, mais laissant les malades dans un état d'angoisse et d'appréhension presque continuel. Une telle brusquerie d'installation permet de penser à l'existence d'un petit raptus hémorragique au niveau de l'appareil vestibulaire ou des centres ponto-cérébelleux.
Du côté du coeur, la dyspnée d'effort est la manifestation la plus
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saillante. Ce sera bientôt le symptôme dont le malade se plaindra le plus vivement; sa banalité, sa signification reconnue nous dispensent d'y insister. Il peut arriver aussi qu'en pleine période de tolérance le sujet soit pris à l'improviste, le plus souvent pendant la nuit, plus rarement l'après-midi, d'un accès d'oedème aigu du poumon, d'une durée de quelques heures à peine, mais absolument caractéristique. Ce qu'il y a de plus curieux; c'est que, s'il arrive que la dyspnée d'effort s'installe à partir de ce moment-là pour ne plus céder, on peut voir des cas où tout rentre dans l'ordre. Si bien que le sujet n'attache aucune importance à cet incident qu'il qualifie d'accès d'asthme ou de simple congestion; alors qu'il s'agit en réalité du premier son de cloche, annonciateur des futures catastrophes, Les palpitations sont fréquentes à cette période, soit au moment des efforts, soit la nuit lorsque le sujet repose du côté gauche. Même au repos, il est fréquent de constater un certain degré d'accélération cardiaque, le pouls oscillant communément entre 80 et 100. Nombre d'auteurs avaient attiré l'attention sur ce fait, comme premier signe de la néphrite interstitielle ou de l'artériosclérose (BOUVERET) ; et LIAN a insisté de nouveau, à plusieurs reprises, sur la valeur séméiologique de cette « tachycardie des hypertendus ». Elle n'est cependant pas la règle absolue et il n'est pas très exceptionnel de rencontrer des hypertendus, entrés nettement dans la période troublée, et dont le pouls continue à osciller autour de 60 ou 70. Nous reviendrons sur ce point, lorsque nous étudierons plus en détail les rapports entre la rapidité du rythme cardiaque et les variations dé la tension artérielle. Il arrive communément que les malades se plaignent avec insistance de sensations cardiaques anormales, à la description desquelles le médecin un peu averti n'a pas de peine à reconnaître l'existence d'intermittences extra-systoliques, mais en a davantage à convaincre les sujets de leur peu d'importance pronostique. Plus souvent encore, c'est à l'examen du pouls ou du coeur que le médecin découvre ces intermittences, dont le porteur ne s'était jamais douté. Quant aux accès de tachycardie paroxystique, aux phénomènes angineux; il semble qu'il s'agisse là plutôt de complications que de symptômes des états d'hypertension artérielle. Ajoutons qu'à cette période troublée l'examen du coeur peut ne rien révéler de plus qu'au cours de la phase latente. Cependant, si les phénomènes dyspnéiques
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sont accusés, et surtout si les accès d'oedème pulmonaire se sont répétés; il est bien rare que le premier bruit ait conservé sa pureté et n'ait pas pris l'allure galopante si caractéristique du fléchissement cardiaque.
Les troubles vaso- moteurs sont fréquents chez certains hypertendus. Ce sont ceux qui, ont été décrits avec un grand luxe de détails comme « petits signes du brightisme » ou « de l'artériosclérose » : crampes musculaires, cryesthésie, phénomène du doigt mort, engourdissement nocturne des mains, etc. Ils sont de peu de secours dans le diagnostic. Il est rare que le malade s'en plaigne spontanément et il faut un interrogatoire assez poussé pour lui en arracher l'aveu. D'autre part, il est commun de les rencontrer, tous au complet, dans d'autres circonstances, notamment chez les femmes atteintes de phénomènes de névrose cardiaque, sans hypertension notable. Le facies n'a pas non plus l'importance qu'on a voulu lui attacher. On voit des hypertendus au cou large, aux pommettes enluminées, au visage rubicond et comme chauffé au rouge sombre, en un mot avec tous les attributs du facies apoplectique. Mais certainement plus nombreux sont ceux qui se présentent avec un teint pâle et jaunâtre, des traits tirés et amaigris, et chez lesquels les temporales sinueuses et animées de larges battements, les yeux un peu saillants et rendus brillants par une goutte d'oedème sous-conjonctival évoquent immédiatement l'idée de troubles circulatoires sérieux; si bien qu'instinctivement les doigts vont à la recherche de la radiale pour peser sur l'artère et se rendre un compte approximatif de l'état de la tension sanguine.
Parmi les hémorragies, le purpura est rarement observé, de même que les suffusions au niveau des muqueuses internes. Il est plus commun de noter, au réveil, la tache rouge vif d'une hémorragie sous-conjonctivale; et il n'est pas rare que ce phénomène se reproduise à plusieurs reprises chez le même individu. Les épistaxis sont fréquentes et ont aussi de la tendance à se répéter chez les mêmes sujets. Lorsqu'elles sont abondantes et nécessitent des tamponnements pénibles, elles ne s'arrêtent d'ordinaire qu'après huit à dix jours d'alertes ; et l'on est frappé de l'altération durable de l'état général, en même temps que de l'appréhension, que cet épisode ■laisse souvent derrière lui. On a bien l'impression que leur cause est plus profonde qu'une simple perturbation dans l'hémodyna-
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inique et que des modifications importantes de la coagulation du sang doivent entrer en jeu. Nous avons parlé plus haut des. hémorragies cérébrales, des hémorragies rétiniennes. Signalons encore ces syndromes méningés caractérisés , par de la céphalée accusée, de la raideur de la nuque, de la rachialgie, que VAQUEZ et ESMEIN ont attribués à de minimes hémorragies méningées, décelables par la ponction lombaire (épistaxis..méningées).
Les troubles urinaires sont peu importants, et consistent surtout, dans la polyurie et une pollakiurie nocturne incommode. Quant à l'albuminurie, elle apparaît souvent, même chez ceux, qui n'en avaient pas à la période précédente.
Les troubles gastro-intestinaux, caractérisés par des digestions pénibles, des flatulences, ne sont probablement pas sous l'influence directe de l'hypertension et s'observent de préférence, chez les aortiques.
Comme modification de l'état général. JANEWAY a insisté sur l'amaigrissement continu et progressif, que l'on constaterait chez certains sujets, et dont la signification pronostique serait assez mauvaise.
3° Phase de défaillance — C'est l'histoire de la faillite d'une fonction de compensation. Du fait de lésions initiales diverges, il s'est greffé dans la paroi du ventricule gauche un nouveau coeur, chargé de doubler, de tripler presque la tension artérielle. Comme toute fonction normale, cette fonction de secours a ses limites ; et l'on ne peut s'étonner de voir un jour le fléchissement myocardique succéder au surmenage myocardique.
Même, en limitant la description aux cas non compliqués — c'està-dire à ceux dans lesquels l'épuisement, cardiaque reste à la première place et semble conduire presque à lui seul à la terminaison fatale — le tableau de ces « hypertendus défaillants » n'est pas facile à dresser, par suite de l'extrême intrication des manifestations morbides.
Autour du syndrome d'insuffisance ventriculaire gauche qui forme le noyau et comme le pivot de l'ensemble clinique, viennent en effet se grouper des signes de réaction des cavités droites du coeur, des symptômes manifestes d'insuffisance rénale. C'est faire oeuvre utile que de commencer par dissocier ces divers
L. GALLAVARDIN.
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éléments, quitte à montrer par la suite comment, de la variété de: leurs combinaisons, naît l'infinie multiplicité des types cliniques journellement rencontrés.
A. SYMPTÔMES D'INSUFFISANCE VENTRICULAIRE GAUCHE. -— Le champ du syndrome d'insuffisance ventriculaire gauche, que les travaux de VAQUEZ, de LIAN, ont si fortement contribué à. individualiser, est plus vaste que celui de la phase défaillante de l'hypertension artérielle permanente. Ce syndrome se manifeste, en dehors de toute réaction hypertensive notable, dans toutes les affections qui, direc- : tement ou indirectement, peuvent intéresser cette cavité: myocardites ventriculaires gauches autonomes, lésions coronariennes avec infarctus myocardiques, états angineux organiques, aortites syphilitiques avec retentissement cardiaque précoce et, beaucoup plus exceptionnellement, au cours de quelques cardiopathies valvulaires endocardiques. Cependant, on aurait peine à trouver une affection qui, mieux que cette hypertension artérielle dont nous faisons l'histoire, offre de ses signes fonctionnels, cardiaques, artériels, un tableau plus saisissant.
a. Les troubles fonctionnels se résument dans la gêne de la respiration. Mais ce symptôme banal revêt ici des caractères presque spécifiques.
La dyspnée d'effort est ce qu'elle était dans la période précédente, à l'intensité près; ce qu'elle est dans toutes les affections cardiaques. Il n'y a pas à y insister.
La véritable caractéristique de l'insuffisance ventriculaire gauche des hypertendus se trouve dans l'apparition d'une dyspnée paroxystique liée à l'existence de poussées d'oedème pulmonaire aigu ou subaigu. Sans nous arrêter, pour l'instant, aux modifications de la tension artérielle qui conditionnent ou accompagnent le développement de cet oedème aigu du poumon 1, nous ne saurions trop insister sur la véritable équation clinique existant entre ces accès d'oedème pulmonaire et le fléchissement ventriculaire gauche. La soudaineté d'apparition, l'intensité d'emblée alarmante de la
1 Voir plus loin, dans la partie analytique de cet ouvrage, l'histoire de ces modifications tensionnelles et la pathogénie de l'oedème aigu du poumon.
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dyspnée, qui contraste avec la tranquillité sereine des heures précédentes, la violence des phénomènes alvéolaires exsudatifs, tout cela forme un ensemble inimitable, que seul est capable de provoquer le brusque lâchage du ventricule gauche. Il existe, du reste, toute une gamme de ces congestions pulmonaires' oedémateuses, qu'on appelait autrefois « actives » pour les opposer à la torpidité des congestions « passives » des cardiopathies banales; cette gamme reflète les divers degrés de défaillance myoçardique. — Chacun connaît la scène dramatique de l'oedème pulmonaire aigu ou suraigu dont la description a été faite si souvent. Tout y est caractéristique : le début soudain ou rapidement progressif, la marée montante de crépitations pulmonaires humides (pures de toutes les sibilances qui encombrent la poitrine de l'asthmatique), l'expectoration mousseuse et rosée abondante, l'aspect angoissé du malade submergé par un flot invisible et qui, s'il est habitué à de telles alertes, implore le médecin dû regard et tend silencieusement son bras pour la saignée. — Les paroxysmes de pseudo-asthme nocturne, dus à une sorte d'oedème subaigu, sont tout aussi caractéristiques. Ils surviennent presque chaque nuit, quelques instants après le coucher ou après une ou deux heures de sommeil, forçant les malades à s'asseoir sur leur lit ou à se lever. L'expectoration peut faire totalement défaut, car seules les grandes exsudations oedémateuses débordent en quelque sorte jusqu'au larynx ; mais un coup d'oreille aux deux bases pulmonaires saisit sur le fait l'inondation intra-alvéolaire. — A un degré moindre, je serais tenté de considérer comme une sorte d'équivalent de cet oedème pulmonaire ces accès de toux quinteuse et - presque incessante, qui tourmentent pendant des nuits entières certains de ces malades, sans expectoration appréciable et avec une simple couronne de râles fixes, très limités aux deux bases. On a l'impression que, dans ces cas, le processus congestif ne va pas jusqu'à l'exsudation et se borne à produire une irritation des muqueuses respiratoires laryngo-bronchiques. — Je signalerai enfin un oedème pulmonaire d'effort, si l'on me permet cette expression, qui apparaît chez certains de ces malades lors d'un effort inaccoutumé, d'une marche trop rapide, et vient doubler, l'essouflement. Les sujets une fois arrêtés, la dyspnée ne cède pas, s'accuse même parfois; et ils rejettent dans des secousses de toux deux ou trois crachats mousseux et rosés, qui laissent sur leur mouchoir des
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taches saumonées. Ce phénomène est commun, chez certainsangineux graves, mais je l'ai vu survenir chez de simples hypertendus défaillants sans aucun syndrome douloureux précordial ou angoissant.
La dyspnée continue peut s'installer les derniers temps ; mais, à ce moment, comme nous le verrons, dans un instant, sont entrés en ligne décompte d'autres facteurs, morbides associés,
On trouve parfois décrits, dans le cadre de l'insuffisance ventriculaire gauche, des phénomènes douloureux précordiaux variant depuis la simple gêne thoracique jusqu'à l'accès angineux classique, Peu de faits sont mieux établis que la fréquence de cette association de phénomènes angineux et des divers degrés d'insuffisance ventriculaire gauche. Il est incontestable cependant que la plupart des malades atteints d'hypertension artérielle, permanente parcourent toutes les phases de la défaillance cardiaque, sans jamais présenter aucune douleur angineuse véritable. On est donc autorisé à voir dans l'apparition de ces manifestations angineuses, moins un symptôme, qu'une complication dont l'étude sera repoussée plus loin.
b. Les signes cardiaques de l'insuffisance ventriculaire gauche des hypertendus relèvent tous de la dilatation ventriculaire, qui fait suite au stade d'hypertrophie concentrique.
Après avoir lutté, la musculature cède et se laisse.progressivement distendre. Aussi, est-ce surtout à cette phase que le choc de la pointe se déplace en bas et en dehors, jusque, dans le VIe ou le VIIe espace, et soulève largement la paume de la main dans le décubitus gauche. L'examen radioscopique met en évidence une. augmentation souvent énorme de l'ombre cardiaque, le bord,gauche du coeur et son pôle inférieur arrondi venant parfois prendre contact avec la paroi thoracique latérale et isoler presque complètement le sinus.
A l'auscultation, les trois signes suivants forment un ensemble assez caractéristique — La tachycardie est de règle.Dans les cas graves, le rythme ne tarde pas à se fixer autour de 120, ne dépassant ce chiffre que dans les derniers mois ou les derniers jours. Il s'agit d'une tachycardie régulière, au moins, dans les cas typiques que nous envisageons ici. Les seuls accidents perceptibles sont des
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extra-systoles d'origine ventriculaire, qui viennent de temps à autre interrompre la régulante du rythme sinusal. — Le bruit de galop est d'ordinaire d'une extrême netteté a cette periode; sa valeur seméiologique est trop connue pour que nous y insistions. Disons cependant que c'est a tort que l'on a considéré parfois, ce bruit de galop comme un signe d'hy pertension. En réalité le galop n'a rien à fane avec le taux de la tension arterielle. Il est commun de noter son absence dans d'énormes hypertensions bien tolérées, comme de le percevoir avec une extrême netteté dans certaines dilatations hypertrophiques du coeur avec hypotension artérielle. Si l'on voulait a toute force lui attribuer une signification sphygmo-manométrique, c'est plutôt comme un signe de « défaillance tensionnelle » qu'il faudrait l' interpréter. Ainsi s'explique qu'il apparaisse fréquemment chez les hypertendus : un coeur surmené ayant plus dé raison qu'un autre de devenir défaillant Notons aussi que dans certains cas d' insuffisance ventriculaire gauche, il est possible de le voir. précéder de quelque temps l' eclosion des phénomènes fonctionnels - Un signe important de la dilatation ventriculaire est l'apparition d' un souffle d'insuffisance mitrale fonctionnelle. Cette insuffisance fonctionnelle est due a l'éloignement des piliers, qui bride les tendons et s'oppose à la coaptation exacte des bords valvulaires, plus qu'à la dilatation de l'anneau. Le souffle qui apparaît alors a la pointe est systolique, en jet de vapeur, et peut simuler complètement un souffle mitral organique ; a cela près qu il est d'ordinaire intermittent (apparaissant lorsque le malade va mal, s'atténuant ou disparaissant lors des phases d'améioration), que sa propagation en dehors dépasse assez rarement la ligne axillaire postérieure et qu il n'est jamais accompagné de frémissement sensible à la main Ce souffle peut faire défaut jusqu'à la fin chez certains hypertendus défaillants, le galop restant le seul signe perceptible Il apparaît d'autres fois d'une façon assez précoce et se superpose alors au galop, qui s'atténue mais ne disparaît pas pour cela Dans l'ensemble, il est moins precoce dans le coeur de TRAUBE avec tachycardie régulière, que dans les grosses dilatations hypertrophiques du coeur, avec arythmie complète et hypertension modérée Il* faut savon aussi qu'il peut devenir permanent, lorsque la dilatation ventriculaire est considérable et irréductible. Tout se passe alors comme si le ventricule, semblable à une vessie de
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prostatique, ne se vidait qu'incomplètement à chaque systole,, conservant une sorte de bas-fond dû à la distension fixe de ses parois. Toutes ces particularités sont importantes à.connaître ; et l'erreur qui consiste à prendre ce souffle fonctionnel, surtout lorsqu'il est intense et presque permanent, pour un souffle d'insuffisance mitrale organique, est l'une des plus fréquemment commises en clinique.
c. Les signes artériels, que l'insuffisance ventriculaire gauche fait apparaître chez les hypertendus défaillants, et sur lesquels il ne semble pas que l'on ait suffisamment insisté, sont au nombre de deux : l'alternance du pouls et la baisse de la tension systolique avec tendance à réaliser ce type d'hypertension diastolique que nous avons étudié dans les pages précédentes.
a. Le pouls alternant n'est pas un trouble rythmique, au sens propre du mot. Les pulsations artérielles se succèdent avec leur
régularité habituelle : seule varie la force des pulsations qui, au lieu d'être uniforme, devient régulièrement alternante. Ce rythme particulier est en effet caractérisé par la succession de contractions cardiaques équidistantes, mais alternativement fortes et faibles. Il y a donc alternance de force, sans altération de rythme des pulsations. Ces caractères sont bien mis en évidence dans les tracés
FIG. 121. — Pouls alternant. — Le tracé sphygmographique supérieur montre l'alternance régulière de pulsations fortes et faibles. Sur le tracé inférieur, recueilli en grande vitesse, on voit que la pulsation faible est un peu plus rapprochée de la pulsation forte qui la suit, que de celle qui la précède; il ne peut donc s'agir d'une pulsation extrasystolique. Repère chronométrique au 1/5 de seconde.
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ci-joints. La pulsation faible est située au milieu de l'intervalle qui sépare deux pulsations fortes (se trouvant même un peu plus rapprochée de la forte qui la suit, du fait de sa propagation plus
lente dans le système artériel, que de la forte qui la précède) ; alors que, dans le pouls bigéminé extra-systolique on dans le pouls pseudo-alternant par extra-systoles retardées, la petite pulsation, toujours prématurée, est sensiblement plus proche de la forte qui la précède que de celle qui la suit (fig. 125).
FIG. 122. — Degrés divers d'alternance du pouls. — Tracés sphygmographiques recueillis chez des hypertendus défaillants, avec syndrome l'insuffisance ventriculaire gauche. L'alternance, légère et à peine
sensible au doigt dans le tracé supérieur, est plus nette dans les deuxième et troisième tracés, très accusée dans les deux derniers.
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Il est impossible d'imaginer une altération: rythmique plus simple. Il n'y en a cependant pas dont la connaissance importé davantage au médecin et dont la signification soit mieux établie. Toutes les autres arythmies, sans exception, ne décèlent que le trouble de l'horlogerie cardiaque. Leur étude est intéressante. Elle permet de localiser le siège exact de l'épine irritative, du grain de sable, qui vient troubler le mécanisme rythmique ; et quelques-une d'entre elles
ne sont pas sans danger. Mais aucune n'est capable de nous donner un renseignement précis sur la valeur contractile du myocarde, ce qui en définitive est la chose la plus importante à connaître. Avec le pouls alternant, il en va autrement. Il ne s'agit plus ici d'un simple trouble d'excitabilité ou de conductibilité, mais d'une atteinte directe du pouvoir contractile du coeur. La masse myocardique est normalement commandée, les excitations lui parviennent en temps voulu; mais elle réagit mollement, incomplètement, inégalement,
FIG. 123. - Figuration schématique de la pathogénie de l'alternance ventriculaire. — A, tracé des contractions auriculaires normales; V, tracé des contractions ventriculaires alternantes, telles que les donne le pouls artériel.
Le tracé inférieur représente, non les couches myocardique, mais divers lots de fibres musculaires constituant l'ensemble du myocarde ventriculaire : F-S, fibres saines, récupérant leur excitabilité périodique dans les conditions normales et se contractant à chaque excitation auriculaire; FM, fibres malades, se trouvant encore en période réfractaire au moment (x) où leur parvient la première excitation auriculaire et ne se contractant que toutes lès deux contractions de l'oreillette. Les parties quadrillées indiquent la somme des fibres myocardiques qui se contractent lors des pulsations ventriculaires fortes ou faibles.
On remarque que, même durant les contractions ventriculaires fortes, il y a des fibres qui ne se contractent pas, et que c'est seulement à l'inégale repartition des fibres malades dans deux systoles consécutives qu'est due l'alternance du pouls.
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et l'alternance de ses contractions trahit son insuffisance. HERING a établi que la cause première du trouble alternant devait être recherchée dans ce fait que certaines fibres cardiaques, fatiguées et en prolongation de leur période refractaire, ne se contractaient plus que toutes les deux pulsations, au lieu de réagir à chaque incitation transmise par l'oreillette. C'est a la présence de ces fibres myocardiques épuisées ou, plus exactement, a leur inégal groupement dans deux systoles consécutives, comme j'ai essayé de le mettre en évidence dans le schéma ci-dessus, qu'est due l'alternance de force des contractons ventriculaires. Quel merveilleux trouble rythmique que celui qui va permettre au clinicien, par la simple exploration de la radiale, d' affirmer l'existence au sein des couches myocardiques de fibres déficitaires, et de diagnostiquer la défaillance cardiaque chez l'hypertendu aussi clairement, aussi nettement que pourrait le réaliser le physiologiste par la plus subtile investigation in vivo! Malgré qu'il s agisse la d'un signe des plus simples, que sa perception ne demande ni instrumentation compliquée, ni analyse coûteuse, mais seulement comme nous allons le voir un tact un peu exercé, il faut craindre que sa diffusion ne soit assez longue à se faire dans le public médical. Dès maintenant, cependant, nous pouvons affirmer que son importance est extrême dans la catégorie de malades dont nous nous occupons; sa valeur égale celle du (dosage de l'urée dans le sang et surpasse infiniment celle des analyses d'urine les plus savantes.
Deux raisons, jusqu'à ces toutes dernières années, se sont opposées à la vulgarisation de ce signe précieux : une réputation de rareté et la croyance que son diagnostic ne pouvait être fait qu'à l'aide de tracés sphygmographiques. — Cette réputation de rareté était simplement due à' ce qu'au début, comme pour tout signe nouveau, l'attention n'était retenue que par les formes les plus accusées, les cas légers échappant à l'examen et restent dans l'ombre. C'est ce qui explique que, mon attention ayant été attirée sur ce point, j'aie pu depuis 191 1 (après l'interruption de quatre ans de guerre et en ne comptant que les laits dans lesquels a. pu être réalise l'enregistrement graphique) en réunir près de 100 cas, dont 40 ont été publies au début de 1914 dans la thèse de GRCVIER;alors que la plupart des auteurs,n'en signalaient que quelques unités. Au lieu d'être exceptionnel, je crois fermement qu'il s'agit là d'un
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des troubles rythmiques les plus communs, et qu'il n'y a peut-être; pas d'hypertendu défaillant qui ne le présente à un moment ou l'autre de son évolution. — Il n'est pas douteux que la découverte et l'étude de cette forme, d'arythmie n'ont pu se faire que grâce aux tracés sphygmographiques. Mais, si un contrôlé précis est indispensable pour individualiser une nouvelle forme d'arythmie ; et des relevés graphiques nécessaires pour mettre en évidence toutes ses particularités, de telles exigences ne sauraient être de mise dans la reconnaissance journalière de ce signe. Comme je l'écrivais en 1912, « il est possible de faire au doigt le diagnostic du pouls alternant et il y a intérêt à libérer cette forme d'arythmie d'un joug sphygmographique ou cardiographique par trop exclusif, Je ne conteste pas que, dans des cas difficiles, seules ces méthodes' puissent donner la certitude ; mais j'estime que ce serait payer cette certitude bien cher, que de faire de la connaissance de cette forme d'arythmie le privilège de quelques élus et de priver la clinique courante d'un signe pronostique aussi important. » S'il en était autrement, la valeur séméiologique de ce signe pourrait presque être passée sous silence ; car comment demander raisonnablement que le médecin praticien, qui doit tout savoir et tout faire, soit encore dans l'obligation de recueillir des tracés sphygmographiques !
Comment donc faire, à la simple palpation, le diagnostic du pouls alternant ?
S'il s'agit d'une alternance forte, il n'y a vraiment aucune difficulté. Il suffit de palper avec attention la radiale, avec plusieurs doigts bien appliqués sur l'artère, pour être frappé de la succession régulière de pulsations alternativement fortes et faibles. Pour plus de sûreté, on poursuivra l'exploration un certain temps, afin de s'assurer de la régularité du pouls qui est une condition indispensable de la perception du phénomène. On se rappellera aussi que la véritable alternance ne change jamais de sens, en dehors d'accidents extra-systoliques, et que la succession de pulsations fortes et faibles se poursuit avec une régularité indéfectible, sans que jamais deux pulsations faibles ou fortes se succèdent immédiatement (à moins, je le répète, de la présence d'extra-systoles émaillant le champ de l'alternance et que l'on apprendra bien vite à reconnaître). La confusion ne serait guère possible qu'avec
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certains faits de pseudo-alternance respiratoire ou avec, le pouls
pseudo-alternant. On peut voir exceptionnellement; chez des
sujets très dyspnéiques, dont le rythme respiratoire est juste à la moitié du rythme cardiaque, l'inspiration produire régulièrement. une dépression très appréciable de l'une des pulsations radiales. Mais, dans ce cas, il est bien rare que l'alternance conserve sa régularité sans présenter de-ci de-là une succession de deux pulsations fortes ou
faibles; et surtout, il suffit de provoquer l'arrêt respiratoire pendant une ou deux secondes pour restaurer l'égalité des pulsations. — La -Confusion avec de pouls pseudo-alternant est plus commune. Dans
certains pouls bigéminés, les extra-systoles sont tellement retardées qu'elles se manifestent à peu près à intervalle égal, entre deux pulsations fortes. L'erreur pourra cependant être.évitée, en prolongeant l'examen ou en le répétant après une légère pause. Le biféminisme pseudo-alternant procède en effet par crises plus ou moins courtes ; et il faudra se méfier de ces lambeaux rythmiques
où l'alternance paraît énorme, pour s'évanouir quelques instants après. Au reste si, dans des cas très rares, le doute ne pouvait être levé, l'indécision n'aurait sans doute pas grande importance ; car j'ai montré, avec GRAVIER, que le retard extrême des extra-systoles dans le bigémihisme semblait bien, lui aussi, être un signe d'épuisement myocardique. Quant au pouls bigéminé banal,avec pulsation extra-systolique très rapprochée de la pulsation forte, les couplés rythmiques se dessinent trop nettement, soit à l'auscultation du
FIG. 124. - Pseudo-alternance du pouls d'origine respiratoire. — Tracé radial recueilli chez un jeune homme de vingt ans, granulique, avec un pouls à 120 et un rythme respiratoire autour de 6o par minute. Bien que làa première partie du tracé rappelle exactement l'image d'un pouls alternant vrai, il s'agit d'une pseudo-alternance respiratoire, par dépression inspiratoire d'une pulsation sur deux. L'arrêt respiratoire restaure la régularité d'amplitude des pulsations et, de plus, on voit vers la fin du tracé le sens de l'alternance se modifier sans production d'extra-systoles.
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coeur, soit à la palpation du pouls, pour permettre la confusion
avecl'alternancevéritable.
Mais ces alternances accusées sont l'exception, et ce qu'il importe surtout de reconnaître, ce sont les alternances légères, que le doigt peut avoir une certaine difficulté à percevoir et que le sphygmographe enregistre malaisément; ou encore les alternances minimales, qu'il test absolument impossible d'enregistrer et devant desquelles le doigt peut rester hésitant. Lorsqu'il existe des extra systoles, la
FIG. 125. — Pouls alternant vrai et pouls pseudo-alternant. — Le tracé supérieur est celui d'un pouls alternant vrai; sur le trace en grande vitesse immédiatement sous-jacent (avec repère chronométrique au 1/50 de seconde), la petite pulsation se montre nettement plus rapprochée de la forte qui la suit que de la forte qui la précède. -C'est le contraire qui se voit, dans le tracé inférieur de faux pouls alternant par bigéminisme retardé; la pulsation faible, qui est une pulsation extra-systolique, se trouvant plus rapprochée de la pulsation forte qui la précède que de celle qui la suit.
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difficulté peut être tournée. On sait, en effet, que ces accidents ont; chaque fois pour conséquence de renforcer considérablement, l'alternance, ou de la faire apparaître si elle était inappréciable. En
épiant donc les pulsations qui suivent immédiatement l'extracontraction, on verra s'il n'est pas possible de percevoir parmi elles
deux ou trois couples nettement alternants. En l'absence d'extrasystoles, il est encore possible de donner plus de netteté aux sensations, tactiles, et de grossir, en quelque sorte, ces alternances
FIG. 126. — Renforcement post-extrasystolique de l'alternance.
FIG. 127.- Alternance postextrasystolique. — Sur le tracé sphygmographique supérieur, on voit l'alternance s'installer après l'extrasystole e-s. Le tracé inférieur est encore un exemple d'alternance post-extrasystolique ; l'extrasystole, invisible sur le tracé artériel : (PH), recueilli sur l'humérale à l'aide d'une manchette brachiale, l'est très nettement sur le tracé jugulaire (P.J).
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que de doigt simplement appliqué sur la radiale ne. parvient pas à affirmer, — Parmi les moyens proposés, un des plus,simples et des plus pratiques, parce qu'il ne demande aucune instrumentation, est celui que j'ai signalé, avec GRAVIER, sous le nom de palpation bimanuelle humero-radiale. Comme le montre la figure ci-dessous les doigts d'une main explorent attentivement la radiale, .tandis que ceux de l'autre main, qui sont allés à la recherche, de la partie inférieure
inférieure l'humérale à la face antéro-interne du bras, compriment progressivement ce vaisseau en se réglant sur les sensations perçues à la radiale. S'il existe de l'alternance, même très légère, les doigts qui palpent cette dernière artère ne tardent pas à percevoir une inégalité de plus en plus nette des pulsations, au fur et à mesure que diminue leur amplitude ; en augmentant un peu la compression humérale, on parvient à obtenir assez facilement un dédoublement des pulsations radiales par extinction des pulsations faibles. Les tracés reproduits ci-contre objectivent très nettement cette alternance bimanuelle, qui aurait pu passer complètement inaperçue à la palpation radiale simple et même à l'enregistrement graphique ordinaire. — Si les sensations paraissent douteuses et si, comme c'est le cas ordinaire à l'hôpital, deux observateurs sont présents, il est facile de les contrôler par l'épreuve du rythme. Celui qui est chargé du contrôle, en prenant le pouls d'un côté ou en faisant lui-même l'épreuve de la compression bimanuelle huméro-radiale, adopte le
FIG. 128. — Palpation bimanuelle, destinée à mettre en évidence les alternances légères du pouls.
HYPERTENSION ARTÉRIELLE PERMANENTE 351
rythme des pulsations (forte, faible, forte, faible, etc.) que lui transmet lé premier observateur, et le poursuit mentalement sur la suite des pulsations ; pendant ce temps, cet observateur prend et lâche successivement le bras, plusieurs fois de suite, en redonnant
chaque fois le rythme (forte, faible, forte, faible, etc.) à haute voix ou) si le rythme est rapide, en accentuant simplement la pulsation forte (forte..., .forte, ., etc.).. Si l'alternance existe réellement (et naturellement, en l'absence d'extra systoles susceptibles de modifier le sens de l'alternance), la concordance doit se vérifier chaque fois, et cela au cours de dix, vingt épreuves consécutives. On arrive par ce
FIG. 129. -Mise en évidence d'alternances du pouls, légères ou latentes, par la palpation bimanuelle.— Les deux tracés supérieurs ont
été recueillis dans la même, séance chez une malade hypertendue à
220 millimètres Hg. Le premier tracé, qui est un tracé sphygmographique
sphygmographique montre une alternance légère, douteuse par place. Le
second est un tracé radial, recueilli lors de la compression digitale de
l'humérale; on voit l'alternance devenir beaucoup plus nette et la
pulsation faible disparaître parfois complètement.
Dans le tracé inférieur, le tracé est également recueilli sur la radiale et la croix blanche montre le moment où l'on commence à comprimer
l'humérale avec le doigt; l'alternance qui était invisible sur la première partie du tracé devient évidente par la suite, du fait de l'extrême
atténuation ou de la disparition des pulsations faibles.
Dans ces deux figures, le tracé recueilli lors de la compression digitale de l'humérale ne fait qu'objectiver les sensations perçues par le doigt explorateur de la radiale, dans la compression bimanuelle huméroradiale.
huméroradiale.
352. CLINIQUE SPHYGOMANOMÉTRIQUE
procédé à mettre en évidence des alternances bimanuelles rythmées, vraiment minimales, qu'aucun autre procédé n'eût révélées. - La compression digitale de l'humérale peut être remplacée par la compression pneumatique à l'aide de la manchette brachiale qui sert à prendre la tension, comme cela avait été proposé anciennement par REHBERG. En maintenant la pression vers l'extrême niveau de la pression systolique, on peut arriver à effacer une pulsation
sur deux et, comme le montre le tracé ci-contre, à rendre évidente' une alternance douteuse. Lorsqu'il s'agit d'une alternance accusée, on peut de cette façon mesurer la dénivellation de pression systolique des pulsations fortes et faibles qui, dans des cas extrêmes, peut atteindre 25 à 3o millimètres Hg ! — Même différence tensionnelle peut être notée, pour la pression diastolique, entre les pulsations fortes et faibles. J'avais bien souvent remarqué qu'à un certain niveaumanométrique la vibrance humérale se dédoublait et ne se percevait qu'après les pulsations faibles, par suite de la chute plus profonde de la tension diastolique à ce moment-là. En employant la méthode auscultatoire, BARD a récemment attiré l'attention sur l'alternance des ions artériels indicateurs de la pression diastolique, comme moyen de diagnostic des cas d'alternance.
La perception au doigt de l'alternance du pouls, comme tout se
FIG. 130. — Palpation bimanuelle rythmée, destinée à mettre en évidence les alternances minimales du pouls.
HYPERTENSION ARTÉRIELLE PERMANENTE 353
qui a trait aux sensations tactiles, demande évidemment une certaine habitude; mais j'ai été frappé de voir combien l'éducation se faisait vite. Pour peu que l'on soit un peu exercé, le sphygmographe
sphygmographe absolument inutile. Il n'arrive jamais qu'un tracé sphygmographique dévoile une alternance insoupçonnée ; alors qu'il est extrêmement commun de ne pouvoir parvenir à. enregistrer, à l'aide de cet appareil, une alternance que le doigt et surtout l'exploration bimanuelle avaient; révélée. Ce qui fait la valeur du tracé sphygmographique, c'est qu'il constitue la preuve écrite, le
L. GALLAVARDIN. 23
FIG. 131. - Alternance légère, rendue évidente par la compression pnematique de l'humérale, — Série de tracés sphygmographiques recueillis,dans une même séance, sur la radiale, avec manchette branchiale sur l'humérale. Le premier tracé représente un tracé sphygmographique simple, avec pression nulle dans la manchette; l'alternance est très peu marquée, douteuse au doigt. Les trois tracés sous-jacents montrent la modification du pouls radial (sans interposition d'extrasystoles), lors d'une compression croissante dans la manchette: l'alternance s'accuse de plus en plus, et, sur le dernier tracé, apparaît le dédoublement des pulsations radiales, par extinction des pulsations faibles".
354 CLINIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
document irréfutable, de rigueur dans toute étude scientifiqhe ; mais il est aussi superflu qu'inutile dans la constatation, courante' de ce signe. Le rôle du médecin cardiologue ne saurait être de prétendre imposer aux autres médecins les difficultés d'une technique spéciale, sous le prétexte que cette technique a pu lui être indispensable à lui-même ; mais plutôt de chercher les moyens de les en dispenser. S'il est nécessaire qu'il prenne beaucoup de tracés, c'est
surtout pour apprendre aux autres à pouvoir s'en passer. Ce que je dis ici, à propos de l'alternance, pourrait facilement être étendu à la plupart des autres arythmies.
Le pronostic de l'alternance est toujours sérieux. Il y a quelques années, la constatation d'un pouls alternant était considérée comme un arrêt de mort ; et, effectivement, la survie ne dépassait guère quelques mois, un an, au maximum deux années. Ceci reste encore vrai des alternances très accusées. Mais, au fur et à mesure que s'est élargi le champ de ce trouble rythmique et que l'on a appris à déceler les formes légères ou latentes, l'avenir des alternants s'est heureusement un peu éclairci. Il faut attendre, pour élucider
FIG. 132. — Signes sphygmomanométriques de l'alternance du pouls — Pour peu que l'alternance soit un peu accusée, il est facile d'amener la tension de la manchette à un taux tel (146 millimètres Hg dans la figure ci-dessus), que seules les pulsations fortes soient transmises à la radiale et que les pulsations.faibles se trouvent éteintes. De même, en maintenant la pression de la manchette à un point intermédiaire entre la tension diastolique des pulsations fortes et faibles (90 millimètres Hg), il est aisé de provoquer un dédoublement des pulsations humérales vibrantes (alternance vibratoire) et des tons artériels retentissants (alternance auscultatoire). Gomme le montre le diagramme placé au bas de la figure, c'est seulement toutes les deux pulsations, au moment de la pulsation forte, que se produisent les phénomènes, tactiles ou auditifs, caractéristiques du décollapsus artériel.
HYPERTENSION ARTÉRIELLE PERMANENTE 355
ce point,la publication d'observations ou de statistiques auxquelles
seul le temps.peut donner de la valeur. Je puis dire cependant que,
parmi les observations que j'ai recueillies pendant ces six ou sept
dernières années, certaines montrent une évolution prolongée de
quatre ou cinq ans, ou même davantage, que l'on n'eût pas osé
envisager autrefois. —
Quoiqu'il en soit, que ce trouble soit vraiment l'expression d'une déchéance cardiaque irrémédiable ou simplement l'indice d'une défaillance commençante, son importance dans l'étude de l'hypertension artérielle demeure au premier plan et justifie les longs développements que nous venons de lui donner. Apparaissant à la suite de cette longue phase latente que l'hypertendu avait victorieusement traversée, grâce à son hypertrophie cardiaque compensatrice, il annonce manifestement le déclin. A ce titre, il a le droit d'être considéré comme un des signes.les plus précis de l'insuffisance ventriculaire gauche des hypertendus défaillants.
fi. Une autre conséquence fréquente de cette insuffisance ventriculaire gauche est la baisse de la tension systolique, avec tendance au type d'hypertension diastolique; c'est là le. deuxième signe que relève l'exploration du système artériel périphérique.
Il n'est pas rare de saisir sur le fait cette modification de la formule sphygmomanométrique, que j'ai signalée dès 1911 chez les hypertendus défaillants. Voici une femme de 66 ans atteinte de néphrite chronique à la période troublée, avec anasarque, oedème pulmonaire, etc. ; la pression qui était de 180/100, quelques jours auparavant, tombe à 120/90 pour remonter ensuite à 175, 180 dans une période d'amélioration plus stable. Voici un homme de 55 ans qui, à son entrée dans mon service, présentait une tension de 225 /1 25, pouls 120 ; au moment où s'installent les signes d'insuffisance cardiaque et l'oedème pulmonaire, la pression s'abaisse à 175/120, pour remonter autour de 200 dans la phase d'amélioration. Il serait facile de multiplier de tels exemples. Mais, le plus ordinairement, à moins que l'on ne puisse suivre assidûment les malades pendant longtemps ou que l'on assiste à une défaillance brusque, on n'a pas l'occasion d'enregistrer la baisse progressive de la tension systolique. L'altération de la formule sphygmomanométrique et la constatation du type d'hypertension diastolique ont alors l'avantage précieux de permettre de reconstituer la scène, et de lire, sous le faible chiffre de
356 CLINIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
pression systolique, toutes les étapes.de l'affaiblissement du; ventricule gauche. S'il y a des malades dont la tension systoliqus s'abaisse
parce qu'ils s'améliorent, il y en a d'autres dont la pression systolique diminue parce qu'ils s'aggravent. C'est dans la modification du type tensionnel qu'il faut chercher la clef de cette apparente
FIG. 133. — Hypertension diastolique de la phase terminale des néphrites chroniques. — Dans ces deux graphiques, les traite verticaux supérieurs figurent le niveau auquel la tension systolique eût dû se maintenir si le type circulatoire était demeuré normal; ils mesurent par conséquent la profondeur de la chute de cette tension maxima.
Tracé I. — Homme de 53 ans. Néphrite chronique typique avec galop, grosse hypertension, volumineuse hypertrophie cardiaque (poids du coeur à l'autopsie, 580 grammes). Au cours de la phase de défaillance cardiaque terminale, on voit la tension systolique s'abaisser progressivement et régulièrement, alors que la tension diastolique reste presque immuable. En quelques mois, le type circulatoire, d'abord normal, accuse de plus en plus le type d'hypertension diastolique. Pouls régulier, entre 120 et 130, pendant toute la durée de l'observation.
Tracé II. — Néphrite chronique classique, avec grosse hypertension artérielle, galop, tachycardie régulière autour de 120, accès d'oedème pulmonaire, défaillance cardiaque progressive, etc. (poids du coeur à l'autopsie, 65o grammes). Au moment où l'on voit le malade pour la première fois, vers le début de la période troublée, le type d'hypertension diastolique. se dessine déjà et ne fait que s'accentuer durant l'année qui suit.
HYPERTENSION ARTÉRIELLE PERMANENTE 357
contradiction. L'importance de cette modification a du reste été notée par tous les auteurs qui se sont occupés des troubles circulatoires ultimes chez, les : hypertendus (JOSUÉ,. AMBLARD, MARTINET, FINK, LIAN, DEHON. et HEITZ, CASTAIGNE et HEITZ, PORTOCALIS, VÉRUT, etc.).Pourne citer que,l'appréciation de deux d'entre eux, c'est
avec raison que MARTINET a écrit : « Tout abaissement de la tension
maxima qui s'accompagne d'élévation de la tension minima est
l'indice d'un fléchissement du myocarde ; il est funeste » ; et LIAN :
« Si là minima est relativement plus élevée que la maxima, c'est un
indice certain d'insuffisance cardiaque. »
Il est à peine besoin de souligner le rapport intime existant entre Ces deux signes artériels de l'insuffisance ventriculaire gauche, alternance du pouls, et baisse progressive de la tension systolique avec réalisation du type d'hypertension diastolique. Le second dépend, du
FIG. 134. — Exemples de types d'hypertension diastolique, à divers degrés de l'échelle tensionnelle, constatés chez des sujets atteints de néphrite chronique, à la période de défaillance cardiaque.— Ces exemples ont été choisis chez des malades présentant de l'alternance du pouls enregistrable. (La partie claire superposée à chaque diagramme montré le niveau approximatif qu'eût atteint la tension systolique, si le type circulatoire fût resté normal.)
358 CLINIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
premier ; ou, plus exactement, tous deux ne sont que la conséquence
de l'affaiblissement myocardique et de l'existence, de plus en plus
FIG. 135. — Les signes physiques de l'insuffisance ventriculaire gauche (hypertension diastolique, galop, alternance du pouls) peuvent, dans quelques cas exceptionnels, précéder l'essoufflement. — Le diagramme rayé longitudinalement et surmontant chaque graphique figure dans chaque cas le taux approximatif de tension systolique qui correspondrait, dans des types circulatoires normaux, au niveau de la tension diastolique.
Tracé I. — Homme de 64 ans. Aurait eu vers l'âge de trente-cinq ans quelques accidents angineux légers (?). Excellente santé depuis. L'hypertension diastolique est certaine, surtout, si l'on considère que le pouls bat seulement à 68. On constate de plus un léger galop, une alternance du pouls facilement enregistrable au sphygmographe (alternance post-extrasystolique). Malgré ces symptômes indéniables d'insuffisance ventriculaire gauche, le sujet ne présente pas le moindre essoufflement dans les efforts et a pu faire ces derniers jours six à sept heures de chasse en montagne, sans éprouver la moindre anhélation. Mort subite un an après l'examen.
Tracé II. — Homme de 64 ans. Hypertension artérielle avec traces d'albumine. Tachycardie persistante autour de 110-120. Léger galop au coeur. L'hypertension diastolique est nette. Malgré cela, l'essoufflement est absolument nul, même dans l'ascension de côtes très raides. Mort un an après l'examen.
Tracé III. — Homme, 57 ans. Vient consulter pour quelques douleurs rhumatismales. Présente un gros coeur avec pointe dans le VIe espace. Hypertension diastolique et alternance légère du pouls (perçue au doigt, mais non enregistrée). Pas trace de dyspnée d'effort. Mort deux mois après l'examen.
HYPERTENSION ARTÉRIELLE PERMANENTE 359
nombreuses dans la masse ventriculaire, de fibres incapables de se contracter régulièrement. Dès lors, la tension systolique s'abaisse progressivement; alors que la tension diastolique, dont le taux est réglé par la hauteur des résistances périphériques, a plutôt' tendance à s'élever du fait de la gêne croissante de la circulation veineuse.
Ce serait bien mal connaître la complexité des phénomènes tensionnels, que de s'attendre à retrouver ces modifications, cepenpendant si caractéristiques, chez tous les hypertendus en voie d'aggravation. On les constate chez un grand nombre de malades, surtout chez ceux présentant/ isolé où prédominant, le syndrome d'insuffisance ventriculaire gauche. D'autres fois au contraire, c'est une élévation de la tension ou plutôt des deux tensions que l'on est amené à enregistrer, au moment des périodes d'aggravation ; peutêtre du fait de crises hypertensives surajoutées. Parfois aussi, les tensions restent à peu près stationnaires, soit que réellement l'équilibre soit peu troublé ou que des actions inverses arrivent à se compenser ; parfois encore les deux tensions semblent s'abaisser presque parallèlement. Enfin, on rencontre quelques asystoliques à gros coeur, à tension systolique initialement basse et alternance nette, chez lesquels il est impossible de mettre en évidence le type d'hypertension diastolique; nous reviendrons plus loin sur ces faits. En clinique, il y a tout au plus des évolutions tensionnelles à réalisation fréquente ; il n'y a pas de lois sphygmomanométriques absolues.
B. SYMPTÔMES DUS A LA RÉACTION DES CAVITÉS DROITES. — Pendant que s'égrenaient tous ces signes de défaillance ventriculaire gauche et que se déroulait la série des épisodes dyspnéiques, il y a un organe qui enregistrait tous les coups et y parait dans là mesure du possible, c'est le coeur droit. En bon associé du ventricule gauche, c'est lui qui chaque fois donnait le coup de main utile, fournissait la poussée nécessaire pour laver le champ pulmonaire'; et, finalement, il a subi le contre-coup de ses efforts répétés. Le ventricule droit s'est hypertrophié en amont du ventricule gauche défaillant, comme jadis ce ventricule gauche s'était hypertrophié en amont du rein insuffisant ; et c'est à ce moment, mais à ce moment seulement, qu'apparaît cette hypertrophie cardiaque généralisée, bien que prédominante à gauche, si souvent constatée aux autopsies. Au fond, là comme
360 CLINIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
dans les cardiopathies valvulaires, c'est toujours le poumon qui est le champ de bataille ; les troubles de la circulation pulmonaire repré-; sentent constamment le chaînon intermédiaire entre le coeur gauche et le coeur droit. La seule différence consiste dans ce fait que, dans les lésions valvulaires gauches et surtout dans les lésions mitrales, la stase circulatoire pulmonaire s'établit chroniquement, passivement, au delà du barrage valvulaire, tandis qu'elle survient épisodi-■ quement, par à-coups de défaillance myocardique, dans les hypertrophies ventriculaires gauches primitives.
On prévoit quelles modifications et additions cette participation des cavités droites peut apporter au tableau clinique. Le malade qui s'était déjà « mitralisé», suivant l'heureuse expression de HUCHARD, par l'apparition du souffle d'insuffisance mitrale fonctionnelle, évolué de plus en plus vers l'asystolie banale. Au coeur, l'insuffisance tricuspidienne ne tarde pas à s'installer ; et l'on trouve alors; barrant transversalement la poitrine et s'étendant de l'appendice xiphoïde à l'aisselle, un gros souffle systolique, que l'on pourrait appeler mitro-tricuspidien, et derrière lequel s'estompe de plus en plus le galop primitif. En même temps, se dessine le cortège habituel de stase veineuse et de congestions viscérales : les jugulaires apparaissent distendues et animées de battements, la congestion passive et chronique des bases pulmonaires se substitue progressivement aux poussées fluxionnaires de jadis, le foie, qui déjà depuis quelque-temps subissait le contre-coup des troubles circulatoires, dépasse maintenant de 4 à 5 travers de doigts les fausses côtes (gros foie dur des hypertendus de CASTAIGNE et HEITZ), l'oedème des membres inférieurs remonte rapidement jusqu'aux cuisses et au tronc, s'accompagnant parfois d'épanchements dans les séreuses. C'est l'asystolie des hypertendus (PORTOCALIS), que l'élévation de la tension artérielle arrive parfois seule à faire distinguer de l'asystolie banale. Il arrive cependant que les urines, malgré la congestion rénale passive, mettent un certain temps à prendre les caractères des urines car-, diaques. Au lieu d'être d'emblée foncées, hautes en couleur, riches en urates, avec un disque d'albumine facilement diffusible, elles restent longtemps pâles, avec un mince anneau blanchâtre à l'acide azotique et, au dessus, un nuage presque imperceptible d'urates, Cette particularité peut être importante à connaître au point de vue diagnostique.
HYPERTENSION ARTERIELLE PERMANENTE 361
C. SYMPTÔMES RÉNAUX ASSOCIÉS.— Le rein, qui s'était si longtemps abrité derrière le rempart circulatoire, réapparaît dans ces heures de détresse. Ce n'est pas sans inconvénients que son imperméabilité progressive a peu à peu fait monter la teneur du sang en urée, comme celle des liquides de l'organisme en chlorures. Quelque
latents qu'aient pu être pendant longtemps les symptômes de cette insuffisance rénale, l'échéance est venue. Elle est due soit à une aggravation de l'état rénal fonctionnel par une chasse artérielle insuffisante, soit à l'évolution naturelle des lésions rénales antérieures, soit enfin à de nouvelles poussées inflammatoires venant compliquer, parfois même conditionner, la défaillance circulatoire. C'est alors qu'on voit survenir les multiples conséquences des rétentions chlorurée ou azotée, oedèmes, Cheyne-Stokes, insomnie, etc., etc., tous symptômes sur lesquels les diurétiques rénaux ont une influence si manifeste. C'est l'adjonction de tous ces symptômes qui transforme
progressivement les hypertendus latents, puis défaillants, en cardiorénaux ; expression un peu indécise et irritante au point de vue pathogénique, mais dont la réalité clinique demeure éternellement vraie.
De la prédominance, du mode d'association ou de succession des différents syndromes que nous.venons de passer en revue (insuffisance ventriculaire gauche, réaction des cavités droites, insuffisance rénale), dépend la physionomie particulière de chaque hypertendu défaillant. Au cours de certaines néphrites graves, les symptômes rénaux domineront dès le début. Dans le mode de participation des cavités droites et gauches du coeur, il existe des nuances infinies. Certains malades présenteront presque à l'état de pureté le syndrome d'insuffisance ventriculaire gauche, si bien.que la mort surviendra avant toute réaction du coeur droit. D'autres fois, au contraire, la défaillance gauche est tellement progressive, la dyspnée d'effort et l'infiltration oedémateuse des bases suivent de si près, que la réaction de ces cavités droites se développera en quelque sorte dans l'ombre de l'hypertrophie gauche ; on voit alors, à la période de défaillance, les deux coeurs céder en même temps et la scène d'insuffisance ventriculaire gauche comme noyée dans le tableau asystolique général l. Il suffit d'une expérience médicale de
1 Très exceptionnellement —j'ai observé le fait chez un homme de soixante
362 CLINIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
quelques années pour se rendre compte des variations que la nature peut inscrire sur le thème fondamental de la défaillance du coeur gauche, du coeur droit et du rein. Simples variations d'ailleurs, car l'aboutissant est le même. Arrive toujours un moment où l'orga-, nisme, lassé d'être l'arène souffrante où se livrent de si durs combats, sent faiblir ses forces réactionnelles et glissé lentement dans cet état d'irrémédiable déchéance et de cachexie cardio-artérielle, lamentable avant-coureur de la mort.
b. Formes anormales de l'hypertension artérielle.
En dehors de ces variantes symptomatiques, l'hypertension artérielle permanente peut présenter des anomalies d'évolution qui troublent profondément son cycle habituel. A côté de la forme commune dont nous venons de présenter la description, il y a lieu de distinguer des formes incomplètes, interrompues et compliquées.
I° Formes incomplètes. —Elles tiennent, soit à l'absence, soit à une apparition anormalement précoce de la période de défaillance ; cette dernière particularité équivalant, en fait, à la suppression de la phase de tolérance.
A. ABSENCE DE PHASE DE DÉFAILLANCE. — C'est le cas de ces hypertensions légères ou esquissées, assez communes, et dont la signification n'est guère connue. Il est fréquent de voir des sujets, d'âge moyen ou avancé, ayant une tension « à la limite supérieure » pourrait on dire, entre 130 et 150 ou 160 millimètres Hg. Qu'il s'agisse là d'hypertension, cela n'est pas douteux, car bien souvent ces chiffres ne constituent que le premier stade d'une réaction de plus grande envergure. Mais, d'autres fois, tout semble se borner là; et, s'il y a processus pathologique, il faut avouer qu'il est remarans,
remarans, depuis l'âge de vingt-cinq ans d'une albuminurie par néphrite torpide, et fortement hypertendu — le syndrome d'insuffisance ventriculaire gauche s'estompe complètement et le malade, qui a eu la vie d'un dyspnéique banal, offre sur le tard l'aspect d'un asystolique avec volumineuse dilatation hypertrophique des cavités droiles. On a tout à fait l'impression d'un mitral; mais le barrage, au lieu d'être à la valvule, est au coeur gauche et au rein.
HYPERTENSION ARTÉRIELLE PERMANENTE 363
quablement bénin et que sa tolérance peut être indéfinie-. — La même tolérance peut se voir dans des hypertensions plus élevées, à 170, 180 millimètres Hg ou davantage, mais qui restent stationnaires, en plateau, pendant de nombreuses années, comme si les lésions primitives qui ont amorcé le processus' se fussent arrêtées dans leur évolution et maintenues à un taux fixe. — Signalons aussi ces hypertensions très lentement progressives, nullement éteintes, mais ayant débuté à un âge avancé et évoluant si sourdement que le sujet arrive à la fin de sa vie, du fait de la sénilité ou des mille et une occasions pathologiques que chacun rencontre sur sa route, sans jamais être sorti de la phase latente de ses troubles circulatoires.
L'absence de tout fléchissement peut encore tenir à une véritable régression du processus hypertensif. — Même en dehors des baisses passagères de tension dues à la disparition de poussées hypertensives transitoires, on peut assister, soit spontanément, soit sous l'influence d'une diététique longtemps prolongée, à une amélioration authentique des états d'hypertension artérielle, peut-être même à une guérison dans des cas particulièrement légers. Il va sans dire que ce qui s'améliore, ce qui guérit dans ces cas, ce n'est pas l'hypertension, mais la lésion primitive qui la nécessitait. Lorsque le rein est en cause, cette régression de la tension s'observe de préférence dans les néphrites aiguës ou subaiguës, dont' chacun connaît l'évolution possible vers la guérison. Mais pourquoi vouloir réserver aux seules formes aiguës le monopole de cette évolution favorable? Pourquoi ne pas admettre que, aidée du temps, la, suppression des causes nocives ne puisse enrayer, et finalement faire régresser dans une certaine mesure, quelques-unes de ces adultérations rénales sourdes et latentes qui sont à la base de tant d'hypertensions permanentes ? La masse myocardique est infiniment plastique ; la réduction progressive dès éléments contractiles devenus inutiles ne saurait être plus malaisée que leur multiplication, dans le cas contraire. — Cette plasticité est bien mise en évidence dans des faits que j'ai souvent observés et qui témoignent d'une véritable involution hypertensive. C'est une loi de pathologie générale que les réactions d'un organisme sont proportionnées à sa résistance. Son application au cas particulier de la réaction hypertensive est chose facile. On sait qu'un organisme jeune et vigoureux présente des réactions plus franches, une marge de défense plus
364 CLINIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
étendue, qu'un organisme usé et affaibli. C'est chez de tels sujets surtout que l'on constate les grosses hypertrophiés cardiaques compensatrices; et c'est à ce point de vue que l'on a pu dire qu'il fallait être bien portant pour faire un très gros- coeur. Cette capacité de résistance, nécessaire pour l'édification d'un gros coeur et d'une tension artérielle élevée, n'est pas moins indispensable à leur maintien. Aussi faut-il s'attendre, en dehors de toute amélioration des lésions causales, à voir la tension artérielle s'abaisser lorsque
fléchira l'état général, Dans les cas exceptionnels où la tuberculose évolue sur un état hypertensif modéré, on voit, comme, je l'ai montré, la tension artérielle s'abaisser progressivement ; il est même curieux de constater que ces baisses de tension s'effectuent par le mécanisme" de l'alternance, bien qu'il ne se manifeste aucun signe d'insuffisance
FIG. 136. — Amélioration, progressive d'un état hypertensif. — Homme de 56 ans. Spécificité à ving-t-trois ans. Hémiplégie droite légère, récente, et état hypertensif avec un peu d'essoufflement et quelques râles aux bases. Albuminurie constatée seulement en 1914. Probablement sous l'influence du traitement spécifique, institué et poursuivi pendant longtemps (injections de biodure de Hg), on assiste pendant deux ans à la régression progressive de l'hypertension et à la disparition des symptômes fonctionnels.
HYPERTENSION ARTÉRIELLE PERMANENTE
365
myocardique. Lorsque le cancer se greffe chez des hypertendus, la même baisse tensionnelle se manifeste, toujours sans symptôme de déséquilibre circulatoire. Ce que font les cachexies tuberculeuse ou cancéreuse, il est bien probable que cette autre cachexie, la
sénilité, est capable de le réaliser. On connaît l'involution normale de ces coeurs de vieillards, dont le poids s'abaisse progressivement à 230, 200,180 grammes même; il n'est pas déraisonnable de penser que l'appareil circulatoire de certains hypertendus âgés et particulièrement torpides n'échappe pas à ce métabolisme régressif. Cette évolution hypertensive des vieillards doit être trop lente
FIG. 187. — Involution tensionnelle causée par l'évolution de lésions de tuberculose pulmonaire chez des hypertendus. Tracé I. — Homme de 53 ans, présentant une tuberculose pulmonaire fibro-caséeuse extensive banale, fébrile, ayant évolué en un an et demi. Hypertension artérielle concomitante à 170 millimètres Hg, avec régression graduelle jusqu'à 110 millimètres Hg. Aucun symptôme d'insuffisance cardiaque; alternance bimanuelle rythmée, non enregistrable. A l'autopsie, lésions tuberculeuses bilatérales et avancées; hypertrophie cardiaque (425 grammes), portant à la fois sur les cavités droites et gauches. Tracé II. — Homme de 42 ans. Tuberculose pulmonaire à forme cachectisante et à évolution assez rapide (10 mois). Hypertension artérielle concomitante à 185 millimètres Hg (tension résiduelle), par néphrite chronique latente sans albuminurie, et s'étant abaissée, parallèlement à l'évolution des lésions, jusqu'à 130 millimètres Hg (les chiffres de tension diastolique n'ont pas été inscrits sur l'observation de ce malade). Pas de symptômes d'insuffisance cardiaque; alternance du pouls enregistrée. A l'autopsie, lésions pulmonaires intenses, bilatérales; reins gros et blancs. Le coeur présente un ventricule gauche très.hypertrophié et pèse 525 grammes.
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pour que sa constatation soit aisée. Elle expliquerait du moins la rareté frappante des scènes asystoliques dans l'extrême vieillesse, alors que toutes les réactions s'émoussent, et que la faiblesse des assaillants comme des défenseurs ne leur permet plus de mimer une lutte circulatoire aussi tragique.
B. ABSENCE DE PHASE DE TOLÉRANCE. — Ici, c'est tout le. contraire. La période de tolérance, que nous avons vu persister indéfiniment dans les formes précédentes, n'a même pas la faculté de s'établir.
Pour que la compensation circulatoire de lésions rénales soit ; efficace, il faut que leur progression soit assez lente pour permettre à la réaction hypertensive d'entrer en jeu. Ici, comme partout, rien ne remplace le temps. Et il faut du temps, pour qu'au sein du myocarde l'édification de nouveaux éléments contractiles vienne au secours du surmenage fonctionnel des fibres préexistantes, pour que l'ascension tensionnelle de secours qui va s'improviser se transforme progressivement en un équilibre stable. Si les lésions rénales sont trop aiguës ou leurs, exigences circulatoires excessives, si la plasticité cardiaque est insuffisante, cet équilibre ne sera jamais atteint. Au lieu de cette symbiose pathologique harmonieuse entre les altérations rénales et la compensation hypertensive, qui donnait l'impression d'une seconde nature, nous aurons d'emblée un état disharmonique dans lequel le coeur apparaîtra toujours boitant et toujours en retard, incapable de se livrer à l'entraînement hypertensif que le rein exigerait de lui.
Que va-t-il se produire alors ? La tension diastolique augmentera, passivement en quelque sorte, sous l'influence de l'accroissement des résistances périphériques et de la difficulté de l'écoulement du sang dans la diastole. Du fait de l'insuffisance cardiaque, la tension systolique ne pourra s'élever proportionnellement assez haut pour maintenir une chasse circulatoire normale, et automatiquement va prendre naissance cet engorgement du système artériel caractéristique des états d'hypertension diastolique. C'est dans les néphrites subaiguës graves, avec dilatation cardiaque précoce, que tout cet ensemble se trouve réalisé. Le tableau que nous en avons fait plus haut, lors de notre description du type d'hypertension diastolique, nous dispense d'y revenir. On comprend maintenant la différence qui existe entre cette hypertension diastolique primitive,
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qui tient à ce que la tension systolique n'a jamais pu s'élever suffisamment, et les hypertensions diastoliques secondaires, marquant le déclin des vieilles hypertensions artérielles et dans lesquelles la tension systolique, longtemps suffisante, a finalement cédé. Dans cette forme d'hypertension, il n'y a pas de période de tolérance; les sujets entrent d'emblée dans la phase d'insuffisance
ventriculaire gauche ou même dans la phase asystolique, la dilatation des cavités droites suivant de près celles du coeur gauche. Immédiatement à la suite, prennent place ces cas d'hypertension artérielle relativement modérée, dans lesquels les accès d'oedème pulmonaire aigu, survenant d'une façon anormalement précoce, témoignent d'une résistance cardiaque singulièrement fragile.
2° Formes interrompues. — Parmi les incidents dépendant de l'état hypertensif et pouvant interrompre son évolution, trois
FIG. 138. — Hypertension diastolique primitive. — Les deux premiers sphygmogrammes proviennent de malades jeunes (trente et trente cinq ans), atteints de néphrite subaiguë avec défaillance cardiaque précoce; le troisième d'un sujet atteint de néphrite coexistant avec un rétrécissement mitral. Chez ces malades, qui furent suivis dès le début de leur néphrite, on ne constata jamais de tension systolique supérieure à celle notée dans les sphygmogrammes et en rapport avec le taux de la tension diastolique. On peut donc admettre dans ces cas que le type d'hypertension diastolique, installé primitivement, n'est pas dû à la chute, mais à l'absence de développement de l'hypertension systolique.
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surtout sont à redouter. - L'hémorragie cérébrale est toujours à craindre, et l'on connaît de longue date ses. relations étroites avec l'hypertrophie cardiaque. C'est de préférence chez les grands; hypertendus que se rencontrent. les gros foyers hémorragiques, avec inondation ventriculaire, mort rapide. — L' urémie, de forme convulsive ou comateuse, à: évolution lente ou rapide, compliquée ou non d'infiltrations oedémateuses (suivant que prédominent les rétentions chlorurées ou azotées), anticipe fréquemment sur la phase de défaillance cardiaque et interrompt parfois un état hypertensif à peine fléchissant. — Quant à la mort subite, elle n'est pas très commune (6 cas seulement sur 184, dans la statistique de JANEWAY) ; sans doute est-elle davantage le fait de lésions concomitantes qu'une conséquence directe de l'hypertension artérielle.
Assez souvent, des affections intercurrentes aiguës, au premier rang desquelles se place la pneumonie, causent la mort des: hypertendus. Il est bien difficile de dire dans quelle mesure l'hypertension aggrave la marche de ces affections, et il est probable qu'il faut faire jouer un grand rôle à la tendance antérieure au fléchissement cardiaque. On est étonné, en effet, de voir d'assez grands hypertendus latents, à 220 ou 230 millimètres Hg, ne présenter aucun trouble circulatoire anormal au cours de pneumonies lobaires étendues. Pendant l'évolution de la pneumonie, la tension artérielle s'abaisse toujours très sensiblement; dans un cas, terminé il est vrai par la mort, j'ai vu la tension systolique tomber en un ou deux jours de 220 à 130 millimètres Hg!
3° Formes compliquées. — Les complications peuvent tenir à la présence d'autres affections cardiaques ou à l'évolution parallèle d'un diabète. Ces deux éventualités ne sont pas de simples coïncidences ; entre elles et l'état hypertensif, existent des liens étiologiques et cliniques certains.
A. CARDIOPATHIES ASSOCIÉES A L'HYPERTENSION ARTÉRIELLE. — Cette association est commune; mais elle groupe deux séries de faits bien distincts. Dans le premier cas, la cardiopathie vient compliquer une hypertension artérielle antérieure, ou tout au moins évoluer de pair avec elle. Dans le second, plus rarement réalisé, il s'agit de lésions
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valvulaires déjà anciennes et le processus hypertensif ne fait que se greffer sur un coeur malade.
a. Hypertension artérielle et affections cardiaques diverses. — Parmi les affections cardiaques capables de compliquer l'évolution du processus hypertensif, il faut citer l'aortite syphilitique, l'angine de poitrine, des lésions de myocardite chronique ou même d'endocardite chronique, des troubles rythmiques divers.
x. Lésions aortiques.- — L'association de lésions artérielles, et en particulier de lésions aortiques, avec l'hypertension artérielle est connue de longue date. Il n'y a même pas très longtemps que l'on attribuait à la diminution d'élasticité ou à la rigidité des parois, relevant de ces lésions, un rôle pathogénique prédominant dans la production de l'hypertension. Actuellement, on tend plutôt à innocenter les altérations athéromateuses ou les calcifications étendues des grosses artères, et à incriminer de préférence les artérites et les aortites en évolution, à allure inflammatoire plus franche.
Parmi ces dernières, c'est surtout l'aortite syphilitique dont l'association avec l'hypertension artérielle est le plus souvent constatée. La superposition d'un processus hypertensif à l'aortite spécifique n'est nullement obligatoire; et, pour ma part, j'ai souvent eu l'occasion d'observer des aortites syphilitiques manifestes, compliquées d'insuffisance aortique, d'angine de poitrine pu d'anévrysme, dans lesquelles il n'existait aucune élévation de la pression artérielle. Le fait mérite d'être souligné. Il prouve que l'hypertension, lorsqu'elle existe, dépend moins des lésions de l'aorte que d'autres lésions associées et, au premier chef, d'altérations rénales dont la fréquence au cours des aortites syphilitiques a été depuis longtemps démontrée. Cliniquement, la coexistence de l'hypertension artérielle permanente et de l'aortite syphilitique se présenté dans deux circonstances différentes, de difficultés diagnostiques très inégales.
Le diagnostic de cette association morbide est aisé lorsque l'aortite syphilitique se laisse déceler par un stigmate certain. — C'est le cas notamment pour ces faits d' insuffisance aortique d'origine artérielle, avec grosse hypertension, que chaque médecin rencontre si communément. Depuis ces vingt dernières années, et surtout depuis les beaux travaux de notre regretté maître R. TRIPIER, on sait que les insuffisances aortiques qui se développent en L. GALLAVARDIN. 24
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dehors de toute influence rhumatismale, chez des sujets âgés d'ordinaire de plus de quarante ans, et auxquelles on assignait de tout temps une origine artérielle, ne sont pas le fait de lésions athéromateuses banales. Presque toujours, peut-on dire, elles relèvent de la propagation aux valvules sigmoïdes d'une aortite syphilitique, dont les plaques gélatiniformes, en envahissant les commissures valvulaires, soudent et rétractent les bords des sigmoïdes et empêchent leur affrontement exact pendant la diastole. La relation de cette insuffisance aortique artérielle avec la syphilis est une des découvertes les plus importantes de la cardiopathologie de ces vingt dernières années; elle est aussi évidente que celle du tabes ou de la paralysie générale avec la vérole. Dans de tels cas, c'est presque avec la certitude de les rencontrer qu'il faut procéder à la recherche minutieuse des antécédents. Si les résultats de l'interrogatoire sont négatifs, l'exploration minutieuse des organes génitaux, chez l'homme, décèlera souvent la trace cicatricielle de l'accident primitif; et l'examen complet révélera fréquemment d'autres stigmates qui ne permettront pas de mettre en doute l'origine spécifique (inégalité pupillaire ou signe d'ARGYLL ROBERTSON, leucoplasie linguale, tabes incipiens avec abolition des réflexes rotuliens, etc.). Dans les cas litigieux, la réaction de WASSERMANN pourra rendre de réels services. C'est chez ces malades que se montre, comme nous l'avons dit plus haut, cette formule sphygmomanométrique si spéciale, avec grosse hypertension systolique et forte hypotension diastolique (ex. : 240/80, 260/100, etc.), que l'on peut considérer comme caractéristique de ces « néphro-aortites syphilitiques avec insuffisance aortique. » — Ce même. diagnostic de" néphro aortite syphilitique pourra être porté avec la même certitude lorsque un examen complet, chez un individu atteint d'hypertension artérielle, aura permis de découvrir un anévrysme aortique, cette lésion étant une signature tout aussi certaine de l'aortite spécifique. — Il devra encore être soupçonné si le sujet présente des signes d'angine de poitrine vraie, d'effort; mais on se gardera de l'affirmer d'emblée, car, pour fréquente que soit l'étiologie spécifique dans les états angineux, il est absolument certain que la pathogénie de l'angor vrai dépasse de beaucoup le cercle de l'infection syphilitique et que nombre d'angines qui tuent (près de 5o pour 100 peut-être) n'ont rien à voir avec cette infection.
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Les difficultés diagnostiques peuvent être presque insurmontables dans les cas de néphro-aortites syphilitiques larvées, dans lesquels aucun symptôme d'alarme (ni insuffisance sigmoïdienne, ni ectasie aortique, ni angor) n'attire l'attention sur la possibilité
d' une aortite syphilitique associée à l'hypertension. De tels sujets sont fatalement considérés comme des hypertendus vulgaires. Et ce-' pendant, la syphilis est là, les spirochètes rampent dans l'épaisseur
dés parois aortiques comme le ver sous l'écorce, et c'est sous son aile sinistre que se déroule tout l'ensemble du processus morbide. Je
pourrais citer de nombreux exemples de malades d'hôpital, que je
FIG. 139— Types tensionnels avec forte hypertension systolique et hypotension diastolique accentuée, pouvant être considérés comme caractéristiques de la néphro-aortite syphilitique avec insuffisance
aortique.— Cela est vrai surtout des deux premiers sphygmogrammes ; la formule de type moins accentué, représentée par le troisième sphygmogramme, pouvant très exceptionnellement se rencontrer en
dehors de l'aortite syphilitique, par exemple, dans certaines insuffisances aortiques, d'origine rhumatismale ou autre, compliquées d'états hypertensifs.
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considérais comme de simples hypertendus défaillants, avec le cortège banal d'albuminurie, de poussées pulmonaires oedémateuses, de faiblesse ventriculaire gauche, et chez lesquels l'autopsie seule, en me montrant la coexistence d'une aortite syphilitique manifeste, devait m'ouvrir les yeux sur la véritable nature de l'affection. Que l'on songe un instant à ces hypertensions artérielles avec insuffisance aortique des sujets âgés, dans lesquelles on fait, presque en se jouant, le diagnostic de néphro-aortite syphilitique ; que l'on réfléchisse à ce fait que, dans nombre de cas analogues, c'est en somme un simple accident, le hasard d'une propagation sigmoïdienne, une plaque gélatiniforme mal placée à l'embouchure des coronaires, un îlot de méso-aortite particulièrement térébrante, qui permettent de porter le diagnostic ; et l'on ne pourra moins faire que d'être effrayé des erreurs d'interprétation que l'on côtoie journellement ! La possibilité de la vérole devient une obsession en présence de nombre de sujets. Il faut éviter de voir la syphilis partout, mais on comprend l'intérêt thérapeutique qu'il y a à la soupçonner là où elle peut se trouver; c'est-à-dire dans certains faits d'hypertension permanente que l'on ne sait à quelle cause rattacher, qui ne font pas leur preuve en quelque sorte, ou encore dans quelques états hypertensifs modérés, d'apparition relativement précoce, avec accès épisodiques d'oedème pulmonaire (séparés par des mois, quelquefois une ou deux années, de bien-être parfait) et évoluant plus tard vers l'insuffisance ventriculaire gauche confirmée.
/3. Accidents angineux. -— Les relations de l'hypertension artérielle avec les accidents angineux demandent à être examinés de près.
L'angine de poitrine vraie, par lésion des coronaires, se traduisant par des accès douloureux d'effort, est une maladie qui n'a rien à voir avec l'hypertension artérielle. Il est extrêmement commun de voir cette affection évoluer, jusqu'à la mort, sans aucune élévation stable de la pression artérielle. Cela dit, un malade, qui pour toute autre cause présente de l'hypertension artérielle, peut cependant constituer des lésions coronariennes et faire de l'angine de poitrine. La possibilité de cette association morbide doit d'autant moins surprendre, que les causes nocives productrices des lésions rénales hypertensives sont parfaitement capables de toucher parallèlement les coronaires ou l'aorte ascendante. Le fait peut se voir
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dans certaines néphro-aortites syphilitiques, avec extension des plaques gélatiniformes ,à l'embouchure,des coronaires, ou dans d'autres processus artéritiques. Une telle association, hypertensive et angineuse,est connue depuis longtemps; et tous les auteurs ont insisté sur cette particularité que, au fur et à mesure que se dessinent et s'accusent les signes de défaillance cardiaque, les accès angineux ont de la tendance à disparaître. Mais il ne s'agit ici que de la coïncidence de deux syndromes morbides, et l'hypertension artérielle ne saurait être accusée, dans ces cas, de produire l'angor.
Y a-t-il davantage ? La dilatation du ventricule gauche peut-elle; sans lésions coronariennes ou aortiques associées, donner naissance, comme l'ont soutenu certains auteurs (MERKLEN, VAQUEZ, LIAN, etc.), à un véritable syndrome angineux; et doit-on admettre l'existence d'une angine de poitrine par insuffisance ventriculaire gauche, chez les hypertendus défaillants? Le problème se présente comme assez complexe et il ne semble pas qu'il ait été résolu par des argu ments décisifs. Un fait est certain, c'est que de très nombreux hypertendus défaillants, comme je l'ai dit plus haut, parcourent tous les stades de l'insuffisance ventriculaire gauche la plus caractérisée, avec accès d'oedème pulmonaire, souffle d'insuffisance mitrale fonctionnelle, pouls alternant, sans jamais présenter le plus léger accès angineux, la moindre gêne douloureuse précordiale. Loin d'être l'exception, le fait est presque la règle. Il est certain, d'autre part, que l'on voit survenir, chez quelques-uns de ces malades un syndrome angineux indéniable. Il ne s'agit pas seulement d'une sensation pénible de poids au niveau de la région précordiale, d'accès douloureux traînants à apparition nocturne, mais de véritables accès d'effort. Il me semble exister cependant, entré ces accès angineux d'effort des hypertendus défaillants et ceux de l'angine de poitrine banale, quelques nuances symptomatiques appréciables. Cette dernière affection est primitivement et souvent exclusivement douloureuse; les malades sont obligés de s'arrêter, non à cause de l'essoufflement, mais uniquement à cause de la douleur thoracique violente qui les étreint, les paralyse, les cloue sur place : « Si je forçais, je tomberais », disent-ils tous. Mais, à ce moment, il n'existe d'ordinaire aucun essoufflement véritable. Chez les hypertendus défaillants, il en va tout autrement. Comme chez les angineux banaux, la douleur précordiale est nettement
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provoquée par les efforts et surtout parla marche; elle offre les mêmes caractères, les mêmes irradiations, la même intensité, Mais, au lieu d'apparaître primitivement, elle marche en quelque sorte dans l'ombre de l'essoufflement, survenant et s' accroissant avec lui. Il semble aussi que ces accès, à la fois dyspnéiques et douloureux, lorsqu'ils se prolongent un peu, s'accompagnent plus facilement d'expectoration oedémateuse rosée que les accès simples. S'agit-il là simplement de particularités symptomatiques d'une angine de poitrine coronarienne banale, évoluant sur un coeur dilaté; ou d'un syndrome angineux spécial à la dilatation ventriculaire gauche ? Seules des constatations anatomiques précises, en démontrant l'absence complète de lésions coronariennes, permettraient de trancher le débat.
Au total, les accidents angineux des hypertendus se montrent beaucoup plus fréquemment chez l'homme que chez la femme, ainsi que le fait remarquer JANEWAY. Ils sont aussi plus graves: chez l'homme; dans la statistique de cet auteur, tous les cas de mort à la suite d'angor chez ses hypertendus (10 sur 212 morts) ont trait à des hommes. La mort par angor est du reste loin d'être fatale, chez tous les sujets qui ont présenté des symptômes angineux plus ou moins caractérisés. Toujours d'après JANEWAY, l'apparition de symptômes angineux chez des hypertendus ne doit pas faire redouter la mort par angor dans plus du tiers des cas (10 sur 35, dans sa statistique).
y. Lésions myacardiques ou endocardiques. — Bien que le myocarde des hypertendus soit souvent remarquablement sain, il n'est pas à l'abri des altérations qui peuvent atteindre le muscle cardiaque normal. Peut-être même s'y trouve-t-il prédisposée, à cause de son perpétuel surmenage, du voisinage fréquent de lésions d'aortite, de la nature même du processus hypertrophique qui, pour certains anatomo-pathologistes, ne serait pas très éloigné des. réactions inflammatoires extrêmement atténuées (R. TRIPIER).
Il faut mettre à part les plaques fibreuses plus ou moins étendues, situées d'ordinaire au niveau du tiers inférieur de la paroi ventriculaire gauche antérieure, et représentatives de cicatrices d'anciens infarctus. Il s'agit moins là de lésions myocardiques autonomes, que de symptômes ischémiques éloignés d une oblitération coronarienne, que l'ouverture et le cathétérisme attentif de la coronaire
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antérieure ou de ses branches ne manquent pas de révéler.— Très communes sont les lésions de myocardite chronique, indépendantes d'oblitérations de grosses branches vasculaires , qu'il s'agisse de rnyocardite interstitielle primitive (BARD et PHILIPPE), de sclérose dystrophique avec prédominance à la périphérie de territoires vascilaires dépendant d'artérioles atteintes d'endartérite (HIPPOLYTE MARTIN, HUCHARD), ou de sclérose inflammatoire à prédominance péri-artériolaire. Ces altérations interstitielles peuvent survenir dans tous les coeurs rénaux, du fait d'artérites concomitantes ou de processus infectieux surajoutés; mais elles sont particulièrement communes, comme je l'ai montré avec CHARVET, chez les sujets atteints d'aortite syphilitique. Très souvent, elles sont appréciables à l'oeil nu, pour peu que l'on se donne la peine de découper en fines lanières le myocarde ventriculaire et d'inspecter soigneusement chaque tranche. D'autres fois, et surtout dans le cas de sclérose réticulaire enveloppant comme d'une maille chaque fibre musculaire hypertrophiée, elles ne sont appréciables qu'à l'examen microscopique. —Plus rarement, de préférence chez des sujets jeunes atteints dé néphrite à évolution assez rapide, on peut rencontrer dans Le myocarde ventriculaire de gros foyers de myocardite subaiguë, à allure inflammatoire, et qui se trouvent sans doute sous l'influence de l'infection primitive.
S'il est facile de constater toutes ces lésions, il est plus difficile de préciser leur part de responsabilité dans l'établissement des symptômes de défaillance cardiaque constatés pendant la vie. Il n'est pas douteux que certaines d'entre elles, très étendues cependant, restent à peu près latentes et ne sont découvertes que par hasard à l'autopsie (il en est ainsi, notamment, de nombreuses plaques fibreuses post-infarctoïdes) ; alors que d'autres, plus diffuses et plus inflammatoires sans doute, sont mal tolérées, Ce n'est vraisemblablement pas dans les lésions interstitielles du myocarde qu'il faut chercher la cause anatomique principale du fléchissement du coeur. L'état des fibres qui restent est au moins aussi important à considérer que L'évaluation approximative de celles que la sclérose a pu étouffer; puisqu'en définitive c'est sur elles seules que repose le rendement fonctionnel du coeur. Avec une technique appropriée, il est aisé de détailler et de décrire complaisamment les altérations de ces fibres myocardiques : infiltration pigmentaire, hyperplasmie, multi-
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plication et gigantisme nucléaires, dissociation segmentaire, altérations de la striation, dégénérescence graisseuse, etc. Mais comment fixer leur importance respective ? Heureusement, dans l'appréciation de la valeur contractile du myocarde, L'exploration physio-pathologique prime l'examen microscopique de toute la distance qui sépare la vie de la mort. La simple palpation du pouls, par la perception du phénomène de l'alternance, est capable de déceler la déchéance contractile des fibres myocardiques de façon beaucoup plus précise que les techniques cytologiques les plus perfectionnées, auxquelles échapperont sans doute longtemps encore les troubles nutritifs ou les insuffisances métaboliques qui conditionnent le fléchissement cardiaque.
Des lésions d'endocardite aiguë ne viennent que très rarement se greffer sur le coeur des hypertendus; à cause de l'âge avancé des sujets. En revanche, on note fréquemment, à l'autopsie de ces coeurs, un épaississement général de l'endocarde et, au niveau des deux valves mitrales, une sorte d'endocardite chronique spontanée, c'està-dire ne paraissant pas consécutive à d'anciennes poussées aiguës ; elle se traduit par un aspect jaunâtre de la surface valvulaire, un épaississement marqué des bords qui apparaissent comme ourlés et godronnés, sans modification de leur souplesse. Ces lésions n'ont qu'un intérêt anatomique. Dans certains cas cependant, elles semblent faciliter la production de ces souffles d'insuffisance mitrale fonctionnelle, développés sous l'influence de la dilatation cardiaque (insuffisance semi-fonctionnelle de BERGÉ ou organico-fonctionnelle).
S. Troubles rythmiques. — La règle, chez les hypertendus, est que le rythme cardiaque conserve sa régularité jusqu'à la fin. Au fur et à mesure que s'accentuent les troubles circulatoires, le pouls s'accélère, oscillant d'ordinaire entre 100 et 120 battements à la minute ; mais le rythme reste imperturbablement accroché au sinus, et les excitations suivent dans le coeur la marche ordinaire. La persistance de ce rythme normal n'empêche pas qu'il puisse être fréquemment émaillé d'accidents extra-systoliques ou même passagèrement interrompu par des accès de tachycardie paroxystique.
L'arythmie extra-systolique est commune chez les hypertendus ; si commune que l'on n'y attache qu'une importance minime. JANEWAY l'aurait notée seulement 26 fois, sur 458 malades : proportion qui doit s'accroître singulièrement si l'on répète les examens
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chez lemême, sujet. Si l'on pouvait suivre chaque malade suffisamment longtemps, on verrait peut-être qu'il n'y en a pas qui en
soit complètement exempt. C'est surtout au début du processus hypertensif que ces accidents sont ressentis subjectivement par les malades ; il n'est pas rare qu'ils soient l'occasion d'une première
FIG. 140. Divers types d'arythmie extra-systolique pouvant coïncider
avec des états d'hypertension artérielle. — Il s'agit, dans tous ces tracés sphygmographiques, d'extra-systoles ventriculaires. — Tracé I, intermittence simple avec extra-systole non perçue au pouls; Trace //, succession régulière d'intermittences, réalisant une bradysphygmie par rythme couplé; Tracé III, pouls bigéminé; Tracé IV, pouls trigéminé; Tracé V, pouls tri et quadrigéminé.
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consultation. Plus tard, les sensations s'émoussent; et il est très commun de rencontrer, chez quelques-uns d'entre eux, des rythmes tri ou quadri-couplés, sans qu'ils s'en soient rendu compte. Il s'agit presque toujours d'extra-systoles ventriculaires, dont on peut localiser le lieu de production en différents points de la masse ventriculaire, suivant l'aspect du tracé électrocardiographique. Il est remarquable de voir, chez le même malade, le même type d'accident se maintenir pendant plusieurs années. Les extra-systoles auriculaires ne sont pas absolument spéciales aux lésions valvulaires avec dilatation auriculaire prédominante, dont le type est le rétrécissement mitral. En auscultant las malades avec soin, et surtout en recueillant des tracés, électriques, j'ai été frappé de leur fréquence relative chez certains hypertendus ; comme les extra-systoles ventriculaires, elles peuvent donner lieu à un rythme couplé 1. Je rappelle que.la présence d'extra-systoles, chez les hypertendus défaillants, est une circonstance favorable pour déceler plus facilement le phénomène de l'alternance; sur les tracés sphygmographiques, l'alternance minimale, que l'on ne parvenait pas à enregistrer, devient évidente dans les couples qui suivent l'extra-systole (alternance post-extrasystolique)
Les accès de tachycardie paroxystique ne sont pas une rareté au cours de l'hypertension artérielle, JANEWAY cite la proportion de 6 cas sur 458. Mais, là encore, un interrogatoire soigneux et dirigé spécialement dans ce sens eût sans doute donné des chiffres plus élevés. Pour ma part, j'ai observé toutes les variétés rythmiques. La tachycardie paroxystique banale, d'origine atrio-ventriculaire, est la forme de beaucoup la plus commune, Dans la plupart des cas, on a l'impression qu'il s'agit d'accès de tachycardie ayant apparu au cours d'une hypertension artérielle, plutôt que d'hypertension greffée chez d'anciens tachycardiques ; en un mot, il ne semble pas que la maladie de BOUVERET prédispose, par elle-même, au processus hypertensif. Les courts, paroxysmes tachycardiques, par extra-systoles auriculaires massées, sont exceptionnels et affectent une allure très spér ciale 2. Ceux qui relèvent de la succession régulière d'extra-systoles
Voir tracés in Archives des maladies du coeur, mars 1914.
2 Les accès durent de quelques secondes à une minute au maximum; ils peuvent s'accompagner parfois d'accidents vertigineux ou syncopaux (voir tracés in Archives des maladies du coeur, mars 1914.
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ventriculaires sont plus rares encore ; je ne les ai observés que, chez deux malades, à.l'aide de tracés électriques, et toujours dans les derniers jours de la maladie. Chez le premier d'entre eux, il s'agissait de courts accès d'une minute à une minute et demie; chez le second, je pus constater le fait étrange d'une tachycardie à 140 pulsations, continue durant les quatre dernières journées, et que les tracés, électrocardiographiques me montrèrent constituée, par une sérié; ininterrompue d'extra-systoles ventriculaires.
Il peut arriver que des troubles de la conductibilité, sous forme de
block partiel ou de block total, coexistent avec un état d'hypertension
artérielle. La fréquence des lésions aortiques ou myocardiques, en expliquant l'atteinte possible de la région hisienne, permet de comprendre cette association de la maladie de STOKES-ADAMS avec
FIG. 141.—Coexistence fréquente d'hypertension artérielle permanente chez les sujets atteints de maladie de STOKES-ADAMS. — Chez ces cinq malades, âgés respectivement de cinquante-trois, soixante-six, soixantedouze, quatre-vingts et soixante-sept ans, et présentant un pouls lent par dissociation auriculo-ventriculaire, totale, on constate l'existence d'états hypertensifs de degrés divers. Les tracés mettent également en évidence l'abaissement insolite de là tension diastolique dû au
ralentissement du pouls.
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l'hypertension artérielle. JANEWAY a relevé 2 cas de heartblock, dans sa statistique portant sur 458 hypertendus. J'en possède moi-, même un assez grand nombre d'observations, mais il m'est impossible d'établir la fréquence approximative de Cette complication dans l'hypertension artérielle permanente. Il est évident; que nombre
de ces malades, observés à cause de leurs troubles rythmiques, n'eussent pas été soumis à un examen spécial s'ils fussent demeurés de simples hypertendus, une statistique proportionnelle se trouverait donc faussée de ce fait. Il serait plus intéressant d'établir la proportion d'hypertendus que l'on rencontre chez les sujets atteints de maladie de STOKES ADAMS ou de troubles divers de la conductibilité. Cette association morbide doit être fréquente et, personnellement, je l'ai notée dans près de la moitié des cas. Une chose
FIG. 142. — Coexistence d'hypertension artérielle et de block total. — Homme de 50 ans. Néphrite chronique avec hypertension artérielle élevée (230 millimètres Hg pour la tension systolique). Le tracé supérieur, recueilli sur la radiale, montre le ralentissement du pouls à 32 Le tracé inférieur, recueilli sur le choc de la pointe du coeur (un jour où le coeur était encore un peu plus ralenti), montre que le ralentissement du pouls est bien dû à un block total, les contractions auriculaires (a), au nombre d'environ 90 par minute s'inscrivant dans l'intervalle des contractions ventriculaires ; les petites croix indiquent l'emplacement des contractions auriculaires qui n'ont pu s'inscrire sur le tracé, par suite de leur coïncidence avec la contraction ventriculaire. Chez ce malade, qui était un grand hypertendu troublé avec block total, les contractions auriculaires étaient très nettement perceptibles à l'oreille.
HYPERTENSION ARTÉRIELLE PERMANENTE. 381
importante à savoir est que ces hypertendus tolèrent à merveille le rythme d'automatie ventriculaire, fixé autour de 3o à 35 pulsations, à la minute. A l'appui de cette assertion, je puis citer le cas d'assez nombreux malades âgés de soixante à quatre-vingts ans, grands hypertendus à 220 ou 150 millimètres Hg, et qui, malgré l'existence
d'un block total aux environs de 30 pulsations à la minute, ne sortirent jamais, durant les années où j'ai pu les observer, de la phase de tolérance parfaite.
Une complication rythmique beaucoup plus commune des états hypertensifs est l'arythmie complète par fibrillation auriculaire. On sait, depuis les beaux travaux de LEWIS, que l'arythmie complète, le pulsus -irregularis perpetuus comme on l'appelait autrefois, ne relève pas de lésions ventriculaires, ainsi qu'on avait tendance à le croire ; mais simplement de ce fait que les oreillettes, au lieu de présenter une contraction totale 70 à. 80 fois par minute, sont «en fibrillation », c'est-à-dire dans un état de contractions parcellaires, au nombre de 350 à 500 par minute. L'arythmie complète du ventricule il est que la conséquence directe de la fibrillation auriculaire ; elle la suit comme l'ombre suit le corps. Lorsque le médecin constatera à la palpation du pouls cette forme d'arythmie si commune, il faut, s'il veut penser physiologiquement, que ce soit chez lui
FIG. 143. —- Coexistence d'hypertension artérielle et de maladie de STOKES-ADAMS avec block total. — Femme de 66 ans, atteinte de pouls lent permanent avec accidents vertigineux et syncopaux. Sur le tracé, recueilli en 1911 (PH, pouls humeral, PJ, pouls jugulaire), les ventricules battent 32 fois, et les oreillettes 90 fois à la minute. Malgré une néphrite chronique concomitante avec hypertension artérielle élevée et progressive (210/70 en 1911, 235/80 en 1916), la malade survécut plusieurs années avec un minimum de symptômes fonctionnels et mourut dans une syncope au milieu de 1917.
382 CLINIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
un réflexe de lire, sous l'arythmie du ventricule, une simple déviation rythmique auriculaire ; au lieu de se laisser égarer, comme par le passé, vers les idées de « myocardite ventriculaire » ou de « défaillance cardiaque». Je m'explique difficilement que JANEWAY n'ait relevé cette forme d'arythmie que 10 fois, sur un total de plus de 450 hypertendus; c'est-à-dire seulement dans 2 pour 100 des cas ! Il me semble au contraire que cette association d'arythmie complète et d'hypertension artérielle est une des plus fréquemment rencontrées
et, d'après ce que j'ai pu observer, les linéaments principaux de ce type clinique sont faciles à tracer. — Il s'agit presque toujours d'hypertension artérielle modérée. Les chiffres de tension systolique obtenus par l'extinction des plus fortes pulsations 1 oscillent le plus ordinairement entre 160 et 180 millimètres Hg. On peut voir, très exceptionnellement, la tension s'élever jusqu'à 220, 240 millimètres Hg ; mais on ne rencontre pour ainsi dire jamais ces hypertensions énormes, à 260, 270 millimètres Hg, que l'on note parfois-dans les hypertensions avec conservation du rythme sinusal. Ce fait est à la
1 Ce procédé est le seul pratique pour apprécier la tension systolique dans l'arythmie complète; voir plus haut (p. 65) les procédés proposés pour arriver à une appréciation plus exacte de la tension syslolique moyenne.
FIG. 144. — Coexistence de néphrite hypertensive et de maladie de STOKES-ADAMS avec block partiel — Homme de 72 ans. A présenté durant ces six dernières années d'assez nombreux accidents vertigineux et syncopaux. Au moment de l'examen, le pouls était à 40, et le tracé veineux montrait un block partiel 2/1, deux contractions de l'oreillette (a) correspondant à une contraction du ventricule (c); l'ondulation v est masquée par la seconde contraction auriculaire. Ce sujet présentait, de plus, une néphrite chronique avec hypertension artérielle élevée (240/90) et assez bien tolérée.
HYPERTENSION ARTÉRIELLE PERMANENTE
383
FIG. 145.— Hypertension artérielle avec arythmie complète. — Le tracé supérieur est un tracé sphygmographique simple, avec pulsations inéquidistantes et inéquipotentielles. —- Le tracé moyen représente à la fois un tracé artériel recueilli sur l'humorale (PH) et un trace jugulaire (PJ). Sur.le tracé veineux, on constate l'absence de toute ondulation a, la contraction de l'oreillette faisant constamment défaut; seules existent les ondulations c et v qui traduisent le début et la fin de la contraction ventriculaire. Les ondes ascendantes marquées st sont des ondes de stase, attribuables à la réplétion progressive de l'oreillette droite et des jugulaires à la fin de la diastole. Ce tracé veineux est remarquable par ce fait que les fibrillations auriculaires (f, f, f) ont pu être enregistrées très nettement lors de pauses diastoliques
diastoliques peu prolongées. — Le tracé inférieur est la reproduction
d'un tracé électrique recueilli chez un sujet présentant une arythmie
complète particulièrement lente; l'ondulation P, qui normalement est
l'indice de la contraction de l'oreillette, fait également défaut et les
fibrillations auriculaires (f, f) s'inscrivent entre les contractions ventriculaires (RT).
384 CLINIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
fois frappant et suggestif. Il serait intéressant en effet de savoir, dans ces cas de coexistence de fibrillation auriculaire et d'hypertension, dans quelle mesure la substitution du rythme nouveau au rythme normal est capable de modifier l'évolution de la réaction hypertensive ou de limiter l'effort compensateur myocardique 1. La rareté des chiffres de pression-systolique très élevés, dans ces faits, donne à penser que le ventricule en arythmie complète présente une certaine incapacité à se prêter à un entraînement hypertensif excessif. On ne saurait invoquer, en tout cas, de différence évolutive originelle, dans les divers états hypertensifs, suivant qu'ils sont destinés ou non à se compliquer ultérieurement de fibrillation de l'oreillette, — Malgré cela, la tolérance de l'affection est en général assez prolongée2. Ces malades nous ont paru supporter leur hypertension à peu près aussi bien que les sujets en rythme régulier. Il nous a été possible de suivre certains d'entre eux plusieurs années, sans troubles marqués de défaillance cardiaque; ce qui prouve que, si le coeur en arythmie complète n'est pas capable des prouesses d'un coeur régulier, cette déviation rythmique n'est pas suffisante à elle
1 Le problème est presque insoluble puisqu'on ne peut, au même moment, et chez le même sujet, prendre la tension en rythme sinusal et en arythmie complète. Dans deux cas, cependant, où j'ai pu observer, chez un même malade et à quelques mois seulement de distance, la substitution d'un de ces deux rythmes à l'autre, j'ai toujours constaté une tension systolique plus basse (même pour les plus fortes pulsations) dans l'arythmie complète que dans le rythme régulier.
Obs. I. Femme de 63 ans : 29 octobre 1913, rythme régulier à 90, tension 170/90; 3 février 1914, arythmie complète à 120, tension systolique 130; 11 mai 1914, arythmie complète à 92, tension systolique 150.
Obs. II. Homme de 55 ans : 7 septembre 1913, arythmie complète à 140-150, tension systolique 140; en novembre et décembre 1913, pouls régulier à 84 (après traitement spécifique, chez ce malade qui était un syphilitique), tension 160-150/85.
Malgré le sens constant de ces modifications, il est impossible de dire si la minime baisse tensionnelle, qui accompagne l'instauration de l'arythmie complète, est l'effet de la simple modification rythmique ou la résultante des troubles fonctionnels qui conditionnent et accompagnent son installation.
2 A ce point de vue, notre impression serait plus favorable que celle de VAQUEZ, qui écrivait en 1913 : « Si l'on est amené à constater avec l'arythmie perpétuelle une élévation anormale de la pression, le pronostic est grave et l'on peut affirmer que la survie ne se prolongera pas au delà de quelques mois ». (Rapport sur l'Insuffisance cardiaque, Congrès de Londres, 1913, p. 183).
HYPERTENSION ARTÉRIELLE PERMANENTE 385
seule pour compromettre gravement sa résistance. — Une troisième caractéristique, stéthoscopique celle-là, est l'absence constante du galop et, semble t-il, l'apparition plus précoce du souffle d'insuffisance mitrale fonctionnelle. L'absence du galop, dans les coeurs atteints . d'arythmie complète, est un fait sur lequel j'ai appelé l'attention en 1912 et auquel je ne connais aucune exception. Il s'explique par l'absence de la contraction de l'oreillette ; et je ne crois pas qu'il y ait de meilleure preuve pour démontrer.que le galop est bien, directement ou indirectement, sous l'influence de la contraction de cette cavité. Quant au souffle d'insuffisance mitrale fonctionnelle, je ne sais pour quelle raison il apparaît plus aisément chez ces malades que chez ceux restant en rythmé régulier. Il est commun d'observer de grands hypertendus, avec troublés circulatoires accentués, mais en rythme normal, offrant à l'auscultation du coeur un simple galop, sans souffle à la pointe. Le fait est plus exceptionnel chez les hypertendus troublés avec arythmie complète; parfois même, le souffle s'installe à demeure, s'atténuant à peine dans les périodes d'amélioration. Il va sans dire que l'existence de ce trouble rythmique s'oppose à' la perception du phénomène de l'alternance. — Comme particularité anatomique, j'ajoute qu'à l'autopsie de tels malades, on ne rencontre guère cette hypertrophie strictement localisée au ventricule gauche, dont; nous avons signalé L'existence chez les hypertendus latents ; l'hypertrophie est d'ordinaire plus diffuse et répartie à peu près également sur les cavités droites et gauches. — L'interprétation de ce syndrome clinique, caractérisépar l'association d'une hypertension artérielle modérée et d'une arythmie complète, est très obscure. Sans doute fâut-ii attribuer la fibrillation auriculaire à un peu de sclérose disséminée de l'oreillette droite, entravant la conduction sino-auriculaire ou provoquant des contractions parcellaires dans la musculature de cette cavité. Bien que l'albuminurie fasse longtemps défaut, L'hypertension peut être mise sur le compte de lésions rénales plus ou moins latentes. On a cependant l'impression que ces cas cliniques représentent quelque chose de plus complexe qu'une hypertension artérielle banale, simplement compliquée ou limitée par un trouble rythmique. Mais, après avoir posé chez ces malades le diagnostic d' « arythmie complète avec hypertension artérielle modérée », le médecin, faute de "procédés d'investigation, se trouve dans une L. GALLAVARDIN. 25
386 CLINIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
impasse, et n'avance pas dans la connaissance de cette affection qui exercera longtemps encore la sagacité des cliniciens et des anatomo-pathologistes.
b. Coexistence d'hypertension artérielle et d'endocardite chronique.— Dans cette seconde catégorie de faits, c'est l'hypertension artérielle qui vient se greffer sur un coeur atteint précédemment d'endocardite chronique. Les lésions cardiaques ne sont pas consécutives à l'état hypertensif; elles lui sont antérieures. On ne voit: pas, en effet, pour quelle raison des malades atteints autrefois d'endocardite rhumatismale seraient à l'abri du processus hypertensif, ni pourquoi le coeur valvulaire, tout comme le coeur sain, ne pourrait se doubler d'un coeur rénal.
Nous laisserons dans l'ombre, pour l'instant, certaines élévations de la tension artérielle, assez communes chez les cardiaques valvulaires, mais dans lesquelles le rôle de la cardiopathie endocardique apparaît encore comme primitif : à savoir l'hypertension asystolique développée, sous l'influence de la gêne circulatoire, chez des cardiaques troublés, et ces hypertensions modérées des mitraux en rapport possible avec des lésions infarctoïdes du rein.
Seuls, les faits authentiques de coexistence d'endocardite chronique ancienne et d'hypertension artérielle permanente, dans lesquels la tension artérielle est susceptible de s'élever aux taux de 180, 200, 220 millimètres Hg, tout comme chez d'autres malades, nous retiendront ici. Ayant étudié longuement de tels cas, en 1914, à l'aide d'observations cliniques et anatomiques, je ne puis mieux faire que de reproduire ici les conclusions auxquelles j'étais arrivé :
1° La coexistence d'hypertension artérielle permanente et de cardiopathies valvulaires peut s'observer indifféremment dans les lésions mitrales ou aortiques, mais survient presque toujours dans des lésions légères et bien tolérées ; car il faut un coeur résistant pour se prêter à l'entraînement hypertensif.
20 Cliniquement, ces malades évoluent plutôt comme des hypertendus et des rénaux, que comme des valvulaires; et la présence d'une minine endocardite ancienne ne semble pas aggraver sensiblement la scène morbide.
3° Cette association morbide est capable de créer de réelles difficultés diagnostiques, les souffles perçus chez les hypertendus pou-
HYPERTENSION ARTÉRIELLE PERMANENTE
387
Trace I. — Homme de 45 ans. Insnffisance aortique d'origine rhumatismale, longtemps bien tolérée. Coexistence d'un état hypertensif
avec albuminurie, oedème pulmonaire, etc.
Trace II. -Homme de 52 ans. Insuffisance mitrale d'origine rhumatismale,
rhumatismale, à près de trente ans et très, bien tolérée. Evolution parallèle d'une hypertension artérielle permanente, sans albuminurie, également assez bien tolérée.
Tracé III. - Homme de 51 ans. insuffisance mitrale ancienne rhumatismale.
rhumatismale. permanente concomitante, bien tolérée.
Tracé. IV. — Homme de 32 ans. Lésion mitrale double ancienne, d'origine rhumatismale (avec frémissement présystolique et systolique). Evolution d'une néphrite subaiguë, avec urines pâles et fortement albumineuses; nombreux accès d'oedème pulmonaire, mort. A l'autopsie, coeur; 500 grammes, insuffisance mitrale et rétrécissement mitral très serré; petits reins blancs atrophiques (80 et 100 grammes), avec capsules adhérentes et surface très granuleuse. Tracé V.- Homme de 40 ans. Insuffisance mitrale d'origine rhumatismale
rhumatismale frémissement systolique. Hypertension artérielle concomitante.
Tracé VI.- Homme de 51 ans. Insuffisance mitrale organique, d'origine rhumatismale, remontant à l'âge de vingt-huit ans et bien, tolérée. A quarante-cinq, ans, début d'un syndrome d'insuffisance ventriculaire gauche avec accès d'oedème pulmonaire nocturnes, alternance légère, etc. Pas d'albuminurie.
Tracé VII. — Homme de 43 ans. Rhumatisme articulaire aigu à ving-huit ans. Lésion mitro-aortique consécutive (insuffisance aortique et insuffisance mitrale), bien tolérée. Pas de syphilis. Développement
Développement d'une hypertension artérielle rapidement progressive, sans albuminurie, avec signes d'insuffisance ventriculaire gauche.
Tracé VIII. — Femme de 32 ans. Endocardite mitro-aortique ancienne bien tolérée, d'origine indéterminée. Néphrite subaiguë progressive avec albuminurie et hypertension ayant évolué en un an. A l'autopsie, coeur, 730 grammes; lésions très nettes d'endocardite mitrale ancienne, Lésions intenses de néphrite subaiguë diffuse;
FIG. 146. — Coexistence d'endocardite chronique ancienne et d'hypertension artérielle permanente.
388 CLINIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
vant donner lieu à plusieurs erreurs. — Il faut bien se. garder d'admettre à la légère la coexistence d'une lésion mitrale organique et d'un état hypertensif, toutes les fois que l'on constatera chez un hypertendu troublé un souffle mitral systolique, même intense et à propagation axillaire étendue ; on sait, en effet, qu'il s'agit le plus souvent d'un souffle d'insuffisance fonctionnelle par dilatation ventriculaire gauche. —- Pour cette même raison, il est assez facile de méconnaître l' endocardite chronique, car le souffle d'insuffisance mitrale chez un hypertendu est plus volontiers interprété comme un souffle fonctionnel, à moins que ses caractères n'imposent la notion d'organicité ; et, d'autre part, les signes de rétrécissement mitral sont presque toujours très larvés, du fait du caractère peu accusé de la sténose ou de l'hypertrophie cardiaque concomitante. Le souffle d'insuffisance aortique, lorsqu'il existe, est un argument précieux en faveur de l'organicité du souffle mitral systolique. — Une erreur plus grave, par ses conséquences thérapeutiques, est de se baser sur le souffle d'insuffisance aortique, chez un hypertendu, pour admettre indûment une néphro-aortite syphilitique. La présence d'une lésion mitrale organique concomitante, la notion d'antécédents rhumatismaux, l'absence de spécificité, et surtout la constatation bien antérieure du souffle aortique permettront, dans de nombreux cas, d'éviter cette erreur.
B. DIABÈTE ASSOCIÉ A L'HYPERTENSION ARTÉRIELLE . — Un des grands étonnements du lecteur, qui se reporterait à l'ouvrage initiateur de POTAIN sur la « Tension artérielle à l'état normal et pathologique », serait de lire que les deux maladies qui s'accompagnent des plus grandes élévations de la pression artérielle sont là néphrite chronique et le diabète 1.
On n'admet pas actuellement que le diabète soit, par lui-même, capable de produire l'hypertension. Il est simplement probable que
1 POTAIN garde, du reste, une extrême prudence dans l'interprétation de cette coexistence. « Pour le diabète, des notations m'ont donné, à l'hôpital, une moyenne de 22, 5, chiffre supérieur même à celui des brightiques... Mais les documents me manquent, pour déterminer quelle est, chez le diabétique, la part qu'il faut faire, pour expliquer cette hypertension, à l'artériosclérose et à la néphrite interstitielle qui lui est souvent associée; pour décider si elle appartient à la glycémie elle-même, ou aux causes qui l'ont fait naître » (p. 168 et 169).
HYPERTENSION ARTÉRIELLE PERMANENTE 389
le diabète, pour des raisons encore mal élucidées, se trouve fréquemment associé aux processus hypertehsifs. Une des preuves invoquées par JANEWAY, ELLIOT, pour nier toute relation, causale directe entre ces deux affections, est l'absence constante de réaction hypertensive au cours du diabète juvénile terminé par coma.
Qu'il y ait entre le diabète et les états hypertensifs plus qu'une simple relation de coïncidence, cela ne peut faire de doute; car il est difficile de ne pas être frappé de la fréquence de cette association morbide. Dans la statistique de JANEWAY, elle est relevée dans plus de 7 pour cent des cas (36 cas sur 458), et le même auteur, sur 220 diabétiques, a rencontré 50 hypertendus. Nous-même l'avons observée très communément. D'ordinaire, le diabète se présente relativement bénin ; si bien que, cliniquement, la glycosurie se place nettement au second plan, derrière le processus hypertensif. La chose est importante au point de vue du traitement, surtout lorsqu'il s'agira de fixer la diététique alimentaire, dont les règles fondamentales sont presque opposées dans ces deux sortes d'affections. Il est exceptionnel que les symptômes diabétiques ou l'abondance de la glycosurie imposent un régime antidiabétique strict; presque toujours, c'est le régime rénal sur lequel il importe d'insister lors de la phase latente, et à plus forte raison s'il existe déjà des signes de défaillance circulatoire.
Comment interpréter cette association morbide ? Faut-il admettre que lé diabète, chez les individus un peu avancés en âge, prédispose aux altérations artérielles ou rénales ? Si l'hypertension est primitive, doit-on invoquer quelque influence de l'hypertension ou des lésions artério-scléreuses sur l'appareil glycoso-régulateur ? Ou encore, la même cause serait-elle capable d'engendrer et le diabète et l'hypertension ? Disons simplement que cette dernière hypothèse a été envisagée. On sait que l'adrénaline augmente la pression artérielle, en même temps qu'elle accroît la quantité relative du sucre dans le sang. HAGELBERG en 1912, FARINI en 1913, en recherchant la teneur du sang en sucre chez les hypertendus, ont noté une hyperglycémie très appréciable dans les néphrites chroniques avec hypertension, et même au cours de l'hypertension dite essentielle. Ils ont noté, de plus, que l'épreuve de la glycosurie alimentaire amenait dans ces différents cas une augmentation très sensible de la teneur du sérum en sucre; alors que normalement cette augmentation serait infime.
390 CLINIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
c. Evolution générale et pronostic.
La longue description clinique que nous venons de présenter, la variété des formes envisagées, laissent prévoir que le raccourci de l'évolution générale des états d'hypertension artérielle ne saurait être tenté.qu'à l'aide de statistiques importantes de malades observés pendant un laps de temps suffisant, c'est-à-dire pendant de très longues années. Jusqu'à présent, nous ne connaissons, comme statistique digne d'être citée, que celle de JANEWAY, publiée en 1913, et empruntée à sa clientèle personnelle ou à celle de son père.
Sur un total de 7.872 malades, JANEWAY compte 870 hypertendus au-dessus de 160 millimètres Hg. Parmi ces 870 hypertendus, il en élimine près de la moitié (qui lui semblent plutôt ressortir à des poussées d'hypertension temporaire) et il retient 458 cas d'hypertension artérielle permanente. En neuf ans, sur ces hypertendus au dessus de 160 millimètres Hg, il constate que 212 sont morts et que 246 restent vivants. A ce propos, il fait tout d'abord remarquer que les hommes meurent plus que les femmes, dans la proportion de 20 pour 100 en plus; l'hypertension semblerait donc présenter une plus longue durée chez la femme que chez l'homme. La cause de la mort a pu être précisée chez 184 malades, parmi les 212 décès. Le tableau suivant donne les résultats obtenus :
Insuffisance cardiaque progressive. 60 cas, soit: 32,6 pour 100 Urémie convulsive. comateuse où
progressive 46 — 25 —
Apoplexie 29 — 16 —
Angine de poitrine ..... 10
OEdème du poumon 7
Anémie progressive 3
Péricardite 1
Affections aiguës intercurrentes . 13
Causes accidentelles 9
Mort subite 6
184 cas.
HYPERTENSION ARTERIELLE PERMANENTE 391
Tracé I. — Homme de 62 ans. Néphrite chronique hypertensive, avec
albuminurie, galop, souffle mitral fonctionnel. Malgré le taux élevé de la tension, le malade n'a commencé à ressentir un peu d'essoufflement que depuis trois mois.
TracéII. — Homme de 60 ans. Néphrite chronique hypertensive, avec albuminurie, galop, souffle mitral fonctionnel. Malgré le niveau très élevé de la tension, le sujet affirme n'avoir jamais éprouvé aucun
essoufflement d'effort avant ces trois derniers mois.
Tracé III.— Homme de 42 ans. Processus hypertensif sans doute
ancien, car à l'âge de trente-trois ans le malade a présenté une légère hémiplégie. Pas d'albuminurie. Pas de syphilis. Au premier examen, on constate un galop, et un peu d'essoufflement. Mobilisé en 1914, le sujet a pu faire campagne pendant cinq mois, sans trop de peine, : puis fut réformé. Revu en juillet 1916 : albuminurie à plusieurs examens récents, pas de galop, essoufflement modéré. En 1917, l'état fonctionnel se maintint assez satisfaisant et le malade mourut d'hémorragie cérébrale au milieu de l'année. Voilà donc un sujet qui présente une survie de quatre ans,avec un état fonctionnel assez satisfaisant, après la constatation d'une hypertension à 260/155! Tracé IV.— Homme de 57 ans. Néphrite chronique, avec albuminurie et énorme hypertension artérielle. Durant toute l'année où il fut observé, le sujet n'accusa jamais le moindre essoufflement d'effort.
Il se plaignait seulement de céphalées ciolentes avec état nauséeux (pas de soulagement par la ponction lombaire). Ce ne fut qu'en août 1913 que la dyspnée d'effort apparut assez brusquement et fut suivie à bref délai d'accès d'oedème pulmonaire à répétition. Mort au début de 1914, au milieu de phénomènes cardio-urémiques.
FIG. 147. — Exemples d'hypertension, artérielle très élevée, avec tolérance prolongée.
392 CLINIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE/
De cette statistique, il résulte que la terminaison par insuffisance cardiaque progressive (décrite plus haut dans la «forme commune ») est bien la plus fréquente et comprend à elle seule le
tiers des cas. A ce propos, JANEWAY fait remarquer qu'elle survient de préférence chez les sujets qui ont une pression plutôt inférieure à la moyenne générale, et de préférence chez ceux qui ont éprouvé comme premiers symptômes de l'oppression ou des signes de faiblesse cardiaque. A la suite, prennent place les terminaisons par
FIG. 148. — Hypertension artérielle solitaire, à peu près stationnaire pendant dix ans. — Homme de 41 ans. Hypertension artérielle décelée à l'occasion d'épistaxis abondantes. Comme seuls symptômes, le malade présenta des épistaxis à répétition, quelques vertiges. Aucun signe d'insuffisance cardiaque; pas le moindre essoufflement, même lors d'efforts physiques très pénibles. Jamais d'albuminurie à d'innombrables examens effectués d'après les techniques les plus perfectionnées. Hémiplégie droite en 1919. Etiologie impos-. sible à préciser. Jamais de maladies infectieuses, ni alcoolisme, ni syphilis; goitre léger. — A remarquer la persistance de l'hypertension, malgré toutes les tentatives thérapeutiques ou la diététique la plus sévère (régime lacté, presque absolu de 1910 à 1913, lacto-végétarien par la suite).
HYPERTENSION ARTÉRIELLE PERMANENTE
393
urémie ou par accidents cérébraux, qui forment un groupe important ; en dernier Lieu, diverses complications qui se chiffrent seulement par quelques unités.
De telles statistiques, peuvent-elles nous renseigner sur la durée probable de la survie, d'après le chiffre de l'hypertension ? Difficilement,
Difficilement, les causes d'erreur sont trop nombreuses. Il est évident qu'une telle statistique porte de préférence sur les hypertendus troubles ; car ce sont eux surtout qui vont consulter, et non les hypertendus latents. De plus, pour un chiffre de tension donné, pour les tensions relativement basses par exemple, il est non moins évident que les sujets recourent d'autant plus au médecin qu'il s'agit d'affections plus graves. Pour donner une idée des interprétations erronées auxquelles on s'exposerait en procédant ainsi, il suffit de noter,que, dans le tableau publié par JANEWAY (p. 13), on voit que»
FIG. 149. —Etat hypertensif de longue durée au cours d'une aortite spécifique. — Homme de 57 ans. Aortite spécifique avec albuminurie légère intermittente. Au début de l'observation, le malade était-en période troublée avec dyspnée d'effort très marquée. Amélioration progressive sous l'influence du régime et du traitement spécifique
spécifique de bi-iodure). Lors des derniers examens, le sujet ne se plaignait d'aucun essoufflement d'effort; quelques menaces angineuses légères.
394 CLINIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
sur 4 malades de 1 65 à 170 millimètres Hg de pression, un mourut la première année et les 3 autres la deuxième; alors que, sur 4 autres grands hypertendus de 295 à 300 millimètres Hg, le premier mourut la première année, le second la deuxième, un autre la cinquième, le dernier la septième année. Faut-il conclure que les
hypertensions de 170 sont plus graves que celles de 300? N'est-il pas évident au contraire que les malades qui sont venus consulter avec une hypertension relativement faible ne l'ont fait que parce qu'ils éprouvaient, dès ce moment, des troubles très sérieux. Là conclusion qui s'impose est qu'il est absolument impossible de porter un pronostic de durée d'après le seul taux de l'hypertension. Tout est affaire d'espèce. En présence d'un sujet présentant par exemple
FIG. 150. — Etat hypertensif troublé, de longue durée. — Femme de 57 ans. Néphrite chronique albuminurique, avec hypertension artérielle élevée. Thyroïdisme concomitant. Dès le début de l'observation, la malade était en période troublée (dyspnée d'effort, oedème des bases pulmonaires, etc.) Sous l'influence du traitement et du régime, l'état s'améliore beaucoup, la dyspnée disparaît presque complètement; état stationnaire pendant ces dernières années.
HYPERTENSION ARTÉRIELLE PERMANENTE 395
une tension systolique de 250 millimètres Hg, c'est tout au plus si l'on peut dire qu' à ce moment le pronostic est moins favorable que lorsque cette tension marquait seulement 200 millimètres Hg; ce qui est évidemment un truisme. Mais ce pronostic pourra encore être
infiniment meilleur que celui que l'on serait autorisé à porter chez un autre malade, ne présentant qu'une tension de 160 millimètres Hg et des signes indéniables de défaillance cardiaque. Ce qui importe en effet, au point de vue vital, nous n'avons cessé de le dire dans les pages précédentes, ce n'est pas tant le degré de l'hypertension artérielle (qui en elle-même, doit être considérée comme une
FIG. 151. — Etat hypertensif troublé, de longue durée. — Femme de 54 ans. Néphrite chronique albuminurique, avec troubles fonctionnels remontant à. 1906. Dès le début des premières mensurations sphygmomanométriques, la malade paraissait dans un état très sérieux, avec dyspnée d'effort accentuée, oedème des deux bases pulmonaires, etc. Amélioration considérable par le régime et le traitement; puis état stationnaire avec alternatives de périodes bonnes et médiocres, se maintenant encore en juin 1919 (dix ans après la constatation des premiers troubles). Léger diabète concomitant.
396 CLINIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
réaction de défense) que la nature et l'intensité des lésions causales, leur possibilité d'être ou non compensées par une simple élévation de la pression, la résistance du coeur, c'est-à-dire son aptitude à
maintenir ou à augmenter le secours déjà prêté; sans compter l'âge, la résistance générale du sujet, les lésions concomitantes, etc.. Nous sommes pleinement d'accord avec JANEWAY, lorsqu'il écrit : « Il ne semble pas qu'aucune conclusion pronostique exacte puisse être déduite de la hauteur de la pression. J'ai été confirmé dans cette opinion par certains cas individuels dans lesquels des pressions extrêmement élevées furent tolérées pendant six ans et plus, alors que d'autres malades, avec des pressions inférieures, mouraient dans un intervalle de temps bien moindre... Je considère
FIG. 152. — Etat hypertensif de longue durée. — Femme de 64 ans. Hypertension artérielle solitaire, sans albuminurie à plusieurs examens. Depuis 1909 environ, essoufflement d'effort modéré et, dans les dernières années, quelques sensations angineuses venant doubler l'essoufflement. Au point de vue circulatoire, l'état reste à peu près stationnaire au cours de ces dernières années. A remarquer l'hypotension diastolique très nette, sans aucune insuffisance aortique, sans double souffle de DUROZIEZ.
HYPERTENSION ARTÉRIELLE PERMANENTE 397
l'élévation de la pression comme un facteur d'importance secondaire pour déterminer la durée de la survie. » La notion qui se dégagé de l'observation prolongée de malades atteints d'hypertension artérielle est qu'il s'agit d'une affection au très long cours, dans laquelle la progression est la règle, mais l'immobilisation rela
tive ou même une certaine régression ne sont pas impossibles. Bien que le danger soit certain, tout va si lentement chez quelques malades, tout est si bien toléré, que l'on a l'impression que c'est chez eux presque une manière de vivre. Que ceci soit une consolation pour L'immense phalange des hypertendus latents ou même troublés 1.
1 Lorsque l'hypertendu est sorti de sa phase de latence, sa survie peut, en effet, être encore très prolongée. JANEWAY, calculant cette survie dans une statistique globale, à dater du premier symptôme, arrive aux résultats suivants : une moitié meurt en' 5 ans, un quart vit encore de 5 à 10 ans, le dernier quart présente une survie supérieure à 10 ans. Personnellement, j'ai pu observer de nombreux cas d'hypertension troublée de très longue durée, comme en témoignent les graphiques reproduits au cours de ces pages.
FIG. 153. —Evolution, de l'hypertension au cours d'une néphrite subaiguë ayant parcouru son évolution en cinq ans. — Femme de 40 ans. Néphrite subaiguë, d'origine indéterminée. Début en 1908. Albuminurie constante, galop précoce, dyspnée d'effort; pouls entre 70 et 80. Mort au début de 1914, après aggravation progressive et déroulement des symptômes classiques de l'insuffisance rénale avec rétention chlorurée et azotée.
398 CLINIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
Si l'on tenait absolument à prendre, comme base d'appréciation pronostique, le niveau de la tension, il serait certainement préférable de choisir le chiffre de tension diastolique de préférence à celui de la tension systolique (en dehors bien entendu des cas d'insuffisance aortique). On éviterait ainsi de nombreuses erreurs d'interprétation ; et tous ces cas de baisse de la tension systolique, par affaiblissement cardiaque, que nous avons étudiés plus haut, conserveraient au moins leur véritable rang dans l'échelle manométrique. Mais, là encore, il faut se défier de conclusions, trop mathématiques. D'après LIAN, le pronostic serait toujours grave quand la pression minima dépasse 13 à 14, souvent mortel à brève échéance quand elle dépasse 15 centimètres Hg, avec cette réserve que le pronostic serait moins sévère quand elle est abaissée par le traitement. En réalité, un malade qui à une pression diastolique très élevée est certainement un grand hypertendu, même si la pression systolique n'a pas subi une hausse correspondante; mais un grand hypertendu n'est pas forcément incapable de présenter une très longue survie. La modalité du processus hypertensif importe plus que son degré. A tension diastolique égale, la gravité clinique peut différer singulièrement ; et un hypertendu à 260/140 millimètres Hg par exemple, mais en équilibre circulatoire, pourra vivre encore plusieurs années, alors qu'un autre ne présentant que 160 ou 1 50/120 millimètres Hg (comme cela se voit dans les néphrites avec hypertension diastolique) se trouvera dans un état indubitablement plus précaire. DEHON et HEITZ ont cité des cas de survie de plus de deux ans avec des tensions diastoliques atteignant 160 millimètres Hg et ils concluent très justement « qu'ériger en principe que tout malade dont la pression diastolique dépasse 13 à 14 est menacé de mort dans un avenir prochain, c'est commettre une exagération indiscutable ». En réalité, si l'on voulait s'attacher à tirer de la seule formule sphygmomanométrique un pronostic raisonné, il est évident pour nous que ce n'est ni au taux de la tension systolique, ni au taux de la tension diastolique qu'il faudrait avoir recours, mais au degré d'hypertension diastolique observé dans chaque cas. Une telle appréciation ne saurait être suffisante à elle seule, car elle ne ferait entrer en ligne de compte que l'évaluation du facteur circulatoire, alors que tant d'autres sont en jeu; elle aurait du moins pour avantage de substituer à la constatation
HYPERTENSION ARTÉRIELLE PERMANENTE 399
du surmenage du coeur l'évaluation de sa résistance, et d'opposer, à l'estimation de l'effort qui lui est demandé, la mesure de celui qu'il est impuissant à fournir 1.
Si l'idée dominante qu'il importe de garder de l'hypertension artérielle permanente est qu'il s'agit d'une affection compatible avec une survie longtemps et parfois indéfiniment prolongée, il n'en est pas moins vrai qu'elle constitue le signe indéniable d'un état pathologique et que ses risques sont réels. Qu'on oppose un groupe d'hypertendus à un groupe d'autres individus, choisis dans des conditions analogues, mais sans hypertension ; il est certain que la moyenne de la survie sera très notablement écourtée dans le premier. On a peine à comprendre qu'en France les Compagnies d'assurance sur la vie ne se soient pas encore souciées d'exiger des mensurations sphygmomanométriques, lors de la visite médicale de leurs futurs clients. Une telle négligence paraîtra, dans dix ou vingt ans, tout aussi invraisemblable que pourrait l'être l'omission de l'examen des urines, auquel elles attachent cependant une telle importance ; et l'on reste confondu en songeant au nombre d'individus manifestement et gravement tarés, qu'elle acceptent journellement et presque volontairement dans leur sein, aux côtés d'individus parfaitement sains condamnés à payer une sorte dé surprime à cause d'eux.
Plus avisées,; certaines Compagnies américaines, sous l'influence des. travaux de JANEWAY, FISHER, FAUGHT, GOEPP, commencent à exiger cette garantie si facile. La statistique suivante, rapportée par FISHER en 19152, montre quels en peuvent être les avantages. La mesure de la tension artérielle, à l'aide de la méthode de RIVA-ROCCI, fut exigée lors de l'examen médical préliminaire par la « Northwestern Mutual Life ». Cette Compagnie adoptait la règle suivante : éliminer a priori tout sujet dont la tension est, de façon permanente, supérieure de plus de 15 millimètres Hg à la tension moyenne de son âge. Les pressions systoliques
1. Le secours pronostique apporté par la constatation d'un type d'hypertension diastolique est particulièrement,précieux dans les cas, très exceptionnels il est vrai, où cette altération du type circulatoire précède tous les symptômes fonctionnels de la défaillance ventriculaire gauche. Voir à ce sujet les tracés très instructifs de la figure 135.
2 Travail analysé par MARTINET dans la Presse médicale du 4 novembre 1915.
400 CLINIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
moyennes avaient été établies, comme suit, par l'examen de
19.339 sujets :
15 à 20 ans . . . 119 millimètres Hg
26 à 3o — . . . ....123 . —-
41 à 45 —- . . . . - 128 —
51 à 55 — . . . . . . 132 —
56 à 60 — . . . . 134 —
De ce fait elle avait, en mai 1915, écarté 405 sujets de moins de quarante-ans, 1 .036 de quarante à soixante ans. Les quelques chiffres suivants, portant sur des contrats passés durant la période de 1907 à 1910, suffiront à montrer l'importance de mesures de cette sorte en matière d'assurance. — De 1907 à 1910, cette Compagnie accepta 2.661 contrats de sujets de quarante à soixante ans, avec une tension systolique moyenne de 442 millimètres Hg. En août 1913, ce groupé avait fourni 83 décès seulement, c'est-à-dire que la mortalité réelle n'avait été que de 49 pour 100 de la mortalité prévue par les tables actuelles corrigées (83 au lieu de 172). — Pendant cette même période 1907-1910, 525 polices furent contractées par des associés de tout âge ayant une tension systolique moyenne de 452 millimètres Hg. Ce groupe avait fourni, le 1er août 1913, 33 décès, alors que le taux de mortalité calculé d'après les tables des actuaires donnait 42 décès ; le taux de mortalité réelle fut donc, au taux de mortalité prévue, dans la proportion de 77 pour 100. On refusa 1.970 contrats à des sujets de tout âge ayant une tension systolique moyenne de 161 millimètres Hg. Autant qu'il put être vérifié, 83 de ces sujets succombèrent au lieu de 67 prévus par les tables des actuaires. Le taux de mortalité réel fut donc, au taux de mortalité prévue, dans la proportion de 121 pour 100. Si l'on pousse plus loin l'analyse, on voit que ce groupe des refusés se subdivise en deux sous groupes : le premier qui comprend 1.082 sujets avec une pression moyenne de 159 millimètres et sans tare évidente; le second, qui réunit 888 sujets avec une pression moyenne de 164 millimètres, et chez lesquels on notait de l'artério- sclérose, des souffles cardiaques, de l'hypertrophie cardiaque, de l'albuminurie, de la glycosurie, des cylindres urinaires,etc. Or, alors que ce dernier sous-groupe fournit 43 décès au lieu des 32 prévus, soit une proportion de 132 pour 100, le premier, ne com
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prenant en quelque sorte que des hypertendus latents, donna encore 40 décès, au lieu des 34 prévus, soit 115 pour 106,
Poids du coeur et tension artérielle. — Tout ce qui précède indique suffisamment que l'on ne saurait concevoir aucun parallélisme entre lé poids du coeur et le taux de la tension artérielle.
On comprend que des vices valvulaires soient capables d'occasionner des dilatations cardiaques, de volumineuses hypertrophies compensatrices, sans que le rendement tensionnel soit en rien augmenté.
Même en limitant la question, comme dans le tableau ci-dessous, aux coeurs sans lésions valvulaires, prélevés chez des sujets ayant succombé à des troubles cardio-vasculaires ou rénaux, nombreux sont les facteurs qui interviennent pour rompre tout parallélisme entre le poids du coeur et le chiffre de tension. — La surcharge adipeuse, éminemment variable chez les sujets, est une première cause d'erreur. — Les lésions myocardiques scléreuses, qui nécessitent souvent des remaniements myocardiques sensibles à la balance, sans profit pour la tension, en sont une seconde. — Un troisième facteur, des plus importants, est le degré variable de réaction des cavités droites. Cette dilatation hypertrophique du coeur droit influe beaucoup sur le poids de l'organe, alors que seule l'hypertrophie de la masse ventriculaire gauche se trouve capable de modifier la tension. C'est ainsi qu'on peut voir deux coeurs de poids très différents, 650 grammes et 380 grammes par exemple (correspondant : le premier à un hypertendu absolument latent ayant succombé à une hémorragie cérébrale; le second, à un hypertendu arrivé, après de longues années de dyspnée d'effort et d'accès d'oedème pulmonaire, au terme de la résistance du coeur droit), se rencontrer chez des sujets ayant présenté pendant leur vie un même chiffre de tension de 220/110 millimètres Hg. — C'est pour cette cause, sans doute, que les coeurs en arythmie complète, dans lesquels la réaction des cavités droites est en général plus précoce et plus constante, présentent très souvent un poids supérieur à celui que le chiffre de tension eût été en droit de faire prévoir — Il faut compter encore avec le fléchissement tensionnel que l'on est si souvent à même de constater chez un hypertendu donné, au cours des derniers mois de sa défaillance cardiaque, et alors que le poids du coeur ne doit certainement guère varier. Au moins pour la tension systolique, les chutes progressives de 50 à 60 millimètres Hg ou même davantage sont communes. Suivant que l'on prendra la valeur tensionnelle initiale ou son résidu ultime, le rapport avec le poids du coeur sera tout différent. — En dernier lieu, intervient la question de la relativité de l'hypertrophie cardiaque. Le chiffre brut de pesée ne saurait donner une idée exacte de l'existence ou du degré de la réaction hypertrophique du coeur. Il importe de tenir compte du sexe, de l'âge, de l'état de la nutrition, et même du genre de vie plus ou moins sédentaire du sujet. Le poids moyen du coeur est de 280 grammes environ chez un adulte. Mais, chez des femmes âgées, cachectiques, depuis longtemps confinées à la chambre ou au lit, il est commun de rencontrer des coeurs de 180 à 220 grammes. On admet donc avec raison que, chez ces mêmes sujets, des coeurs de 250, 280, 300 grammes, surtout si l'on constate une prédominance nette de la musculature du ventricule gauche, doivent être considérés comme hypertrophiés. C'est ce qui explique qu'il soit possible de noter une hypertension artérielle permanente notable, chez des malades dont le poids du L. GALLAVARDIN. 26
402
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FIG. 154. — Absence de parallélisme entre le taux de la tension artérielle et le poids du coeur. — Superposition graphique de l'état tensionnel et du poids du coeur chez une quarantaine de sujets atteints de troubles cardio-vasculaires, sans lésions valvulaires (néphrites subaiguës et chroniques, aortites syphilitiques, myocardites chroniques, etc.). Afin d'atténuer tes erreurs dues à la baisse progressive de la tension, sous l'influence de la défaillance cardiaque, ce sont les valeurs sphygmomanométriques les plus élevées, à la condition qu'elles aient été suffisamment stables,qui ont été inscrites. Les cas d'arythmie complète sont reconnaissables à cette particularité que seule la tension systolique a été marquée, la pression diastolique restant imprécise.
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cceur à l'autopsie ne dépasse pas 300 grammes. A vrai dire, je n'ai jamais constaté ce fait que chez des femmes âgées, de soixante-dix à quatre-vingts ans. Sans avoir pu faire de constatations sphygmomanométriques précises, j'avais déjà noté, en 1906, un coeur de 250 grammes à l'autopsie d'une femme de soixante-dix ans atteinte de néphrite chronique, et chez laquelle il existait
une hémorragie capsulaire au niveau des deux hémisphères et une volumineuse hémorragie cérébelleuse qui avait entraîné la mort; l'hypertension artérielle devait être bien probable dans un tel cas. Elle fut prouvée dans les trois faits suivants, qui arrivent en tête du tableau statistique ci-contre. Premier cas : femme de soixante-dix-huit ans, néphrite avec hématuries à répétition; trois mois avant la mort, on note à deux reprises une tension systolique de 200 millimètres Hg; à l'autopsie, le coeur pèse 230 grammes. Deuxième cas : femme de soixante-dix ans, morte d'hémorragie cérébrale, tension 170/100; poids du coeur, 260 grammes. Troisième cas femme de soixante et onze ans morte d'hémorragie cérébrale; trois mois et deux mois avant la mort, la
FIG.155. - Absence de parallélisme entre l'élévation de la tension artérielle le volume du coeur. — Pour des coeurs à peu près aussi volumineux l'un que l'autre à l'examen radioscopique, on trouve dans
le premier cas (néphrite chronïque) une tension systolique de 250 millimètres Hg, alors que cette, tension n'est dans le second cas (insuffisance
(insuffisance syphilitique) que dé 145 millimètres Hg.
404 CLINIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
tension artérielle relevée avait été de 185/100; à l'autopsie, néphrite atrophique bilatérale très marquée, coeur 280 grammes.
Cette impuissance du chiffre de tension à nous renseigner sur le poids du coeur démontre moins l'infériorité, que la supériorité de la méthode sphygmomanométrique. Chaque mode d'exploration a son utilité. La localisation du choc de la pointe, la percussion précordiale, l'examen radioscopique nous renseignent sur le volume du coeur (dilatation ou hypertrophie); sans que ce. volume ait souvent aucun rapport avec le chiffre de tension constaté (fig. 155). La sphygmomanométrie, qui est une exploration véritablement fonctionnelle, met en lumière une donnée autrement précieuse, le rendement du coeur.
B. ÉTIOLOGIE ET PATHOGÉNIE.
Quelle est la cause de l'hypertension, artérielle permanente et par quel mécanisme.s'établit-elle ? On est loin de le savoir exactement. Là, comme dans presque tous les domaines de la pathologie, les certitudes étiologiques retardent beaucoup sur les aperçus cliniques. La description du tabes, de l'anévrysme de l'aorte a précédé de longtemps la connaissance de leur nature syphilitique ; il est probable que le problème des origines de l'hypertension artérielle n'est pas près d'être solutionné. .
Ce problème n'est du resté pas aussi simple que dans les exemples précités. A une lésion fixe peut correspondre une cause définie. En présence d'une réaction organique générale, d'un mode de défense aussi libéralement employé que le processus hypertensif, il faut s'attendre à voir se multiplier et s'intriquer les relations causales. Nous aurons maintes fois l'occasion de nous en apercevoir au cours de l'étude étiologique et pathogénique de ce syndrome.
1.° Les deux variétés d'hypertension artérielle permanente : hypertension artérielle par néphrite, hypertension artérielle solitaire. — Exceptionnelle dans l'enfance, l'hypertension artérielle augmente de fréquence avec l' âge. Dans la statistique de JANEWAY, 80 à 90 pour 100 des cas trouvent place entre quarante et soixante-dix ans. En dehors des néphrites confirmées, et dans des cas exceptionnels, on peut rencontrer des hypertensions artérielles précoces, ou même des hypertensions artérielles juvéniles dont la signification est loin d'être précisée (fig. 156 et 157). — Si l'on en croit le même auteur, cette affection serait
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notablement' plus commune chez l' homme que chez la femme (67 pour 100 d'hommes, contre 33 pour 100 de femmes, sur 458 cas), et les pressions très élevées, 280 millimètres Hg et au dessus, seraient peut-être plus fréquemment relevées et plus longtemps tolérées chez la femme que chez l'homme. — Le problème de l'hérédité, depuis
longtemps posé au sujet de l'hémorragie cérébrale, qui n'est en somme qu'une manifestation de l'hypertension artérielle, mériterait d'être étudie à l'aide de documents précis. On ne voit pas pourquoi la fragilité clés épithéliums rénaux, la vulnérabilité du tissu conjonctif ou des parois artérielles, ne se transmettraient pas aussi facilement que certaines tares nerveuses ou la prédisposition tuberculeuse, Mais l'extrême fréquence des états hypertensif s, leur appaFIG.
appaFIG. — Hypertension artérielle solitaire précoce.
Tracé I.- Homme de 39 ans. Hypertension artérielle très élevée : 240-230/110, pouls, 88. Pas de lésion cardiaque valvulaire. Pas d'albuminurie. Dyspnée d'effort assez accentuée depuis un an, s'accompagnant d'un peu de gêne précordiale. Aucune maladie antérieure. Pas de syphilis, d'alcoolisme ou de tabagisme. Tracé II. -Homme de 42 ans. Hypertension artérielle moyenne, avec chute assez accentuée après quelques jours de repos complet à l'hôpital (210-200/115 et 190-170/105). Dyspnée d'effort remontant à quelques mois. Pas de maladies antérieures. Pas de syphilis. Quelques excès alcooliques et tabagiques. Sur quinze examens d'urine effectués en série, matin et soir, pendant une semaine, on note une fois
des « traces minimes » d'albumine.
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rition tardive.(et par suite la difficulté d'en affirmer l'existences chez les ascendants sur le simple interrogatoire des malades.) n'autorisent pour L'instant que des impressions. De nombreuses statistiques,
statistiques, par plusieurs générations médicales dans un avenir où la pratique sphygmomanométrique sera devenue courante, seront encore nécessaires pour leur substituer une certitude.
La distinction fondamentale, qui résulte de l'enquête étiologique conduite auprès des sujets hypertendus, est la suivante : chez certains
FIG. 157. — Hypertension artérielle juvénile.
Tracé I. — Jeune homme de 21 ans. Hypertension assez élevée : 190-175/95. Aucune lésion cardiaque valvulaire. Pas d'albumine. Ne présente aucun essoufflement anormal. Le sujet est un tachycardique; mais le taux de la tachycardie (entre 70 et 85 sur une courbe rythmique recueillie pendant une semaine, matin et soir, après une demi-heure de repos dans la situation horizontale) ne suffit.pas à expliquer l'élévation tensionnelle. j
Tracé II. — Jeune homme de 22 ans. Hypertension artérielle élevée 210-190/100, pouls, 110. Dyspnée d'effort assez marquée depuis un an environ. Pas d'albuminurie à plusieurs examens. Il s'agit aussi d'un tachycardique; mais, là encore, le taux de la tachycardie, qui sur une courbe rythmique recueillie dans les conditions habituelles pendant trois semaines et au repos complet ne dépasse pas 80 à 90, necadre pas avec le degré de l'hypertension.
Tracé III. — Jeune homme de 23 ans. Pas: de lésion cardiaque organique. Dyspnée d'effort remontant à l'âge de quatorze ans. Pas d'albuminurie à plusieurs examens espaces. Hypertension assez accusée (180-170 pour la tension systolique à trois examens pratiqués à un an de distance) et non expliquée par le taux modéré de la tachycardie (entre 70 et 80 au repos complet). A noter que, lors du troisième examen, après quelques jours de repos complet à l'hôpital, la tension tombe à 160-155/85.
HYPERTENSION ARTÉRIELLE PERMANENTE 407
d'entre eux, l'hypertension artérielle apparaît nettement comme la conséquence d'une néphrite; chez d'autres, elle semble évoluer primitivement et, au. moins apparemment, en dehors de toute altération rénale.
A. HYPERTENSION ARTÉRIELLE PAR NÉPHRITE; - Sa connaissance est de date ancienne. Depuis les premiers travaux de RICHARD BRIGHT en 1827, c'est-à-dire depuis près d'un siècle; la relation entre les lésions des reins et l'hypertrophie du coeur, l'apparition; de symptômes circulatoires chez les malades atteints de néphrite constituent une des pierres angulaires de la médecine clinique. La sphygmomanométrie n'a fait qu'apporter une méthode de mesure à des troubles connus depuis longtemps.
Nous verrons plus loin que certaines altérations rénales localisées, certaines néphrites même, peuvent évoluer sans modification de la tension artérielle ; la réaction hypertensive ne saurait donc être considérée comme la preuve nécessaire d'une atteinte rénale organique. Il faut bien convenir, cependant, que l'élévation de la tension artérielle est presque la règle dans les lésions diffuses des reins. Elle, peut apparaître dans toutes les variétés de néphrites, aiguës, subaigués et chroniques : mais c'est surtout dans la néphrite chronique qu'elle atteint les taux élevés dont nous avons parlé plus haut, Dans tous ces cas. l'adultération rénale se traduit par des signes certains, albuminurie constante ou intermittente, cylindrurie, troubles des éliminations urinaires, oedèmes ou symptômes fonctionnels divers, etc. ; et l'origine rénale de l'hypertension ne peut faire de doute.
En revanche, la cause première de la néphrite reste souvent obscure. — Cela est déjà vrai pour les néphrites aiguës ou subaiguës ; exception faite des néphrites scarlatineuses ou de celles consécutives à d'autres maladies infectieuses bien caractérisées. Si l'on veut être sincère, il faut bien convenir que là très grande majorité des néphrites aiguës rencontrées en clinique sont d'origine absolument indéterminée. On a l'impression que les sujets ont fait une néphrite, comme tant d'autres font une angine," une infection broncho-pulmonaire, une poussée de tuberculose à un sommet ; et l' allure manifestement primitive de la manifestation rénale défie toute étiquette étiologique. — Mais combien tout cela est plus frappant pour les néphrites chroniques hypertensives ! II est facile, dans les traités didactiques,
408 CLINIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE.
d'énumérer complaisamment toutes les infections, intoxications, auto-intoxications, qui peuvent conduire au mal de Bright. Après un étalage aussi copieux, il semble qu'il n'y ait plus de place pour l'inconnu. Et cependant, c'est cet inconnu que l'on rencontre: à chaque pas en clinique. Combien de brightiques hypertendus, chez lesquels L'interrogatoire le plus minutieux ne permet pas de mettre le doigt sur la cause morbide ! Pour quelques faits où cette cause est évidente (saturnisme chronique, néphrite infectieuse ancienne), combien où l'incertitude reste complète ! C'est se leurrer, chez ces malades, que de parler vaguement d'arthritisme, d'artério-sclérose, d'alcoolisme, d'intoxications diverses, voire même d'auto-intoxications intestinales, comme si un amoncellement de causes douteuses pouvait acquérir la vertu d'une cause efficiente. Chacune de ces néphrites chroniques hypertensives, dont meurent tant de sujets, reconnaît sans doute une cause précise; et le plus souvent, cette cause, nous ne la connaissons pas. Le temps est loin encore, où l'on pourra mettre le poinçon étiologique sur chaque brightique hypertendu.
0n commence à voir la place importante qu'il faut réserver, dans l'étiologie de ces néphrites hypertensives, à la syphilis. L'extrême fréquence de la néphrite chronique hypertensive au cours de l'aortite syphilitique est une notion courante. Il serait puéril de prétendre que les plaques gélatiniformes, l'ectasie aortique concomitante sont des lésions spécifiques, et que la néphrite est d'ordre banal. N'est-il pas évident au contraire que tout est syphilitique, la néphrite comme l'aortite ; et n'est-il pas légitime de désigner cette association morbide si commune sous le nom de « néphro-aortite syphilitique » ? Or, comme nous l'écrivions en 1913, on ne voit pas pourquoi cette néphrite hypertensive, faisant cavalier seul en quelque sorte, ne pourrait pas survenir en dehors de toute aortite et se présenter comme unique manifestation de la vérole. Le martyrologe de la syphilis n'est pas épuisé. Dans ces dernières années, Le système nerveux, L'appareil cardio-aortique ont reçu leur part. Peut-être sera-ce bientôt le tour du rein. La fréquence de la syphilis chez les hypertendus a été relevée également par STOLL (1915), par AMBLABD, qui « sur 100 malades hypertendus âgés de trente à soixante-cinq ans a noté 78 fois une syphilis ancienne ; syphilis avouée dans un certain nombre de cas, ignorée ou cachée dans d'autres, mais sur la réalité de laquelle l'interrogatoire des malades, complété par la réaction de
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WASSERMANN, ne laissait aucun doute ». Une pareille fréquence est loin d'être atteinte dans d'autres statistiques; aussi eût-il été intéressant de détailler le pourcentage de cette étiologie spécifique par affections (néphro-aortite, néphrite chronique banale, hypertension artérielle isolée), comme aussi de préciser le nombre de cas où le diagnostic dut être basé sur la simple réaction de WASSERMANN, dont la valeur peut n'être pas appréciée de même par tous. Plus récemment, MERKLEN et HEUYER ont publié un cas de néphrite chronique hypertensive syphilitique chez un homme de trente-cinq /ans. Si j'ajoute que nombre d'auteurs, qui ont recueilli des statistiques de réactions de WASSERMANN au cours des différentes maladies, ont été frappés de la fréquence des réactions positives dans les néphrites chroniques hypertensives, on se rend compte qu'il existe un courant très net pour incriminer la syphilis dans le développement de certaines d'entre elles.
Il faut cependant se garder d'exagérer et, de ce qu'on est conduit à assigner légitimement à certains cas de brightisme une origine spécifique, conclure que l'on soit en droit de songer à cette infection dans tous les cas où l'étiologie d'une néphrite chronique restera obscure. A côté d'elle, il y a place pour de nombreuses infections banales, qui auront pu passer inaperçues et amorcer à bas bruit l'adultération rénale. La tuberculose elle-même peut donner naissance à la néphrite hypertensive. J'ai publié avec REBATTU, en 1909, l'histoire de deux brightiques typiques, avec hypertension artérielle, mort par hémorragie cérébrale ou phénomènes urémiques, et chez lesquels l'autopsie démontra l'existence d'une tuberculose rénale fermée, bilatérale, avec gros foyers caséeux enkystés. Chez ces malades, il est clair que le brightisme ne reconnaissait pas comme cause ces noyaux caséeux, mais la néphrite diffuse intercalaire, histologiquement banale et cependant de nature tuberculeuse. Il est parfaitement logique d'admettre qu'un foyer tuberculeux éloigné (adénopathies torpides, ostéite ancienne, phtisie fibreuse, etc.) puisse pror voquer à distance/ par imprégnation toxinique, une néphrite hypertensive (LANDOUZY et BERNARD, DEVIC et RIEUX, LEDOUX etc.). De même que pour le brightisme syphilitique, rien n'autorise à enfermer le brightisme tuberculeux dans le cercle' étroit de lésions rénales histologiquement spécifiques.
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B. HYPERTENSION ARTÉRIELLE SOLITAIRE. — C'est un fait, et un fait fréquent, que certains hypertendus ne présentent aucun signe apparent de lésion rénale, L 'absence d'albumine, dans la statistique de JANEWAY, a été notée 38 fois sur 212 malades décédés, 127 fois chez 246 sujets encore vivants. De tels chiffres ne peuvent donner qu'une idée incomplète de la fréquence de l'albuminurie chez les hypertendus; car il faut compter avec les albuminuries, intermittentes, et aussi avec les techniques diverses (certaines parvenant à mettre en évidence des traces d'albumine là où d'autres n'en révélaient pas). Aussi les observations seront-elles d'autant plus probantes qu'elles auront été plus longtemps prolongées, et les examens plus multipliés. A ce titre, je pourrais citer plusieurs observations personnelles dhypertension artérielle moyenne, forte ou très forte, dans lesquelles des analyses d'urine (effectuées dans les urines du matin et du soir, pendant plusieurs jours de suite, à plusieurs reprises différentes, par les procédés les plus précis) n'ont jamais révélé la moindre trace d'albumine. L'absence de tout cylindre, même hyalin, peut être notée également. C'est le cas ordinaire, lorsque le malade n'a pas d'albumine ; cependant, sur 165 sujets n'ayant pas d'albumine, JANEWAY a pu mettre en évidence quelques cylindres dans 49 cas. Non seulement, chez ces hypertendus solitaires, il peut, comme nous l'avons vu, n'exister aucun oedème ou autre signe de néphrite, mais l'exploration fonctionnelle des reins la plus minutieuse reste souvent négative. Il est à remarquer que cette absence de signes de néphrite ne se voit pas uniquement dans des cas d'hypertension modérée, mais dans de nombreux faits où la tension dépasse 200 millimètres Hg. JANEWAY estime qu'environ 10 à 15 pour 100 des grands hypertendus ne présentent aucun stigmate de brightisme. Deux interprétations ont été données de ces hypertensions artérielles solitaires, dites encore primitives ou essentielles. a. Suivant la première, toutes ces hypertensions solitaires relèveraient d'une néphrite latente. Il serait facile d'en trouver le germe chez de nombreux auteurs, notamment chez POTAIN. Mais nul ne l'a énoncée plus nettement, ni mieux défendue, qu'AMBARD qui a écrit en 1906 : « Toutes les hypertensions permanentes sont d'origine rénale. »
Cette interprétation est fort séduisante; elle s'impose presque à tous ceux qui sont convaincus de la prééminence du facteur rénal
HYPERTENSION ARTÉRIELLE PERMANENTE 411
dans la pathogénie de l'hypertension. Elle est même facile à défendre, à condition que l'on veuille bien admettre qu'il y a des lésions rénales à évolution extrêmement lente et torpide, que l'insuffisance rénale peut mettre dix, quinze, vingt ans, avant de devenir manifeste, et surtout que l'absence d'albuminurie ne suffit pas à éliminer l'hypothèse de lésions du rein. Chacun sait que cette albuminurie est un signe infidèle, inconstant, et en tout cas tardif, de l'atteinte de cet organe. Peut-être est-ce à la lésion d'une partie très limitée de l'appareil glomérulo-tubulaire que correspond La filtration d'une faible quantité de substances protéiques ; pourquoi ne pas admettre que cette portion puisse rester indemne, alors que les autres sont atteintes ? Toutes les épreuves d'exploration rénale peuvent rester négatives, avons-nous nous dit plus haut ; mais, là encore, ne se trouve aucun argument décisif contre l'existence de minimes lésions du rein. Il suffit d'admettre que ces lésions sont de celles susceptibles d'être complètement compensées par une élévation de la tension artérielle (néphrite hypertensive de WIDAL); et l'on n'est pas autorisé à conclure, de l'intégrité fonctionnelle, à l'intégrité anatomique. De plus, nos épreuves d'exploration des fonctions rénales sont encore bien imparfaites ; peut-être une investigation plus minutieuse ou plus longtemps prolongée parviendrait-elle à mettre en lumière quelque trouble de l'élimination 1. Un dernier argument peut être tiré de l'analogie clinique presque absolue, que présentent ces hypertendus solitaires avec certains hypertendus latents albumi1
albumi1 Affirmer que le rein n'est pas en cause, écrivent AMBARD et BEAUJARD, si l'on ne trouve pas d'albumine dans les urines, si l'on ne constate pas d'oedème, si le bilan des chlorures paraît normal, nous semble une erreur doctrinale... Aussi, pour notre part, n'admettons-nous pas qu'on puisse parler, d'une hypertension permanente sans néphrite si, dans les cas où la néphrite n'est pas apparente, il n'a été institué une double épreuve de déchloruration, pour les malades soumis antérieurement à un régime ordinaire, ou de chloruration pour ceux qui étaient au régime déchloruré, et si cette épreuve n'a pas été suivie, avec bilan chloruré et posée du malade, pendant un mois au moins : à une affection latente et chronique, il faut appliquer une investigalion minutieuse et prolongée... La chloruration de l'organisme et la déchloruration constituent donc un moyen très simple de démontrer d'une façon presque expérimentale les rapports de la tension avec les lésions rénales... Ce sont ces néphrites, toujours méconnues si on ne les recherche pas soigneusement, qui expliquent pour nous la conception d'hypertension primitive de certains auteurs et en particulier l'hypertension de la présclérose de HUCHARD ».
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nuriques 1 ; et surtout de leur évolution, presque fatale vers la néphrite confirmée. Quel est en effet l'hypertendu au long cours qui ne présente pas, à un moment donné, des signes de sclérose rénale ; qui ne marche pas d'une manière régulière, à pas lents ou rapides, vers l'insuffisance rénale ? Cela ressort de presque toutes les statistiques. Au fur et à mesure que la tension s'élève et que l'état s'aggrave, on voit les signes de néphrite faire leur apparition. Dans la statistique de JANEWAY, sur 130 malades à 200 millimètres Hg et au-dessus, 13 pour 100 n'avaient pas de signes évidents de néphrite; chez ceux qui atteignaient ou dépassaient 230 millimètres (89 cas), cette proportion n'était plus que de 5 pour 100. FISCHER, sur 550 malades présentant une pression constamment supérieure à 140 millimètres Hg, en compte 62 pour ,100 chez lesquels il existait incontestablement une lésion rénale, 15 pour 100 où l'existence d'une pareille lésion était vraisemblable, 23 pour 100 où rien dans le tableau clinique ne permettait de soupçonner aucune affection du rein. Sur 300 de ces malades, en ne tenant compte que de ceux dont la pression se montra constamment au-dessus de 160 millimètres Hg, la proportion de lésions rénales certaines s'élevait à 80 pour 100, probables à 16 pour 100, alors que le chiffre des cas dans lesquels on ne pouvait soupçonner aucune altération s'abaissait à 4 pour 100 seulement,
b. D'après la seconde interprétation, l'hypertension artérielle permanente pourrait s'établir en dehors de toute lésion rénale. A l'appui de cette opinion, on invoque tout d'abord l'apparente intégrité fonctionnelle du rein, observée pendant de longues années. « Il m'est difficile d'admettre une néphrite chronique, écrit JANEWAY, quand des examens répétés montrent une urine quantitativement et qualitativement normale. » Réserve d'autant plus compréhensible, que même les constatations anatomiques sont loin de lever tous les doutes. En effet, le médecin qui irait à l'autopsie de malades hypertendus avec la certitude qu'il va découvrir, d'em1
d'em1 de nombreux cas de néphro-aortite syphilitique notamment, il est vraiment impossible de noter aucune différence entre les sujets qui présententde l'albumine et ceux, non moins hypertendus, qui n'en montrent pas trace. Comment songer qu'il puisse s'agir là de deux affections différentes, et n'estil pas évident que l'on a affaire dans les deux cas à la même maladie? D'autant que ceux qui n'ont pas d'albumine en présentent presque tous plus tard.
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blée et uniformément dans les lésions du rein, la cause évidente dé tout le mal s'exposerait à bien des mécomptes. Au lieu du petit rein contracté qu'il s'attend à rencontrer, ce sont parfois des reins d'apparence presque normale qu'il trouve et examine anxieusement afin d'y découvrir la cause initiale des accidents cliniques. Assez souvent, même en l'absence de petits reins granuleux, les signés de néphrite sont faciles à mettre en évidence, même macroscopiquement. Il s'agit, par exemple, de gros reins rouges, nettement plus volumineux que des reins sains, plus fermes aussi et plus résistants à la coupe ; bien que le contour ait conservé toute sa régularité et qu'il n'y ait presque pas d'adhérence dé la capsule, la présence de quelques petits kystes microscopiques sous-capsulaires, un aspect un peu vermoulu de la surface, quelque chose d'un peu bigarré sur la coupe de la substance corticale ne laissent pas de doute sur l'existence de la néphrite. Mais, d'autres fois, les lésions sont tellement minimes qu'on se demande si elles ne sont pas consécutives à l'hypertension, le rein se présentant à peu près comme un rein cardiaque ; si bien qu'on laissé à l'examen microscopique le soin de décider de l'existence des lésions rénales primitives. A toutes ces raisons cliniques et anatomiques, il faut ajouter la répugnance légitime qu'éprouvent d'excellents esprits à enfermer dans, le cercle étroit des seules lésions rénales la genèse d'un processus réactionnel aussi général que celui de l'hypertension artérielle, et à négliger systématiquement les troubles localisés à d'autres départements vasculaires ou intéressant l'ensemble de l'arbre artériel et artériolaire.
Revenant à la conception dé l'artério-capillary-fibrosis de GULL et SUTTON (1872), de nombreux auteurs invoquent, comme facteur d'hypertension permanente, des lésions d'artériosclérose généralisée. On aurait affaire, en quelque sorte, à une. maladie du système artériel ; et le coeur gauche s'hypertrophierait, au devant du barrage périphérique, comme le coeur droit dans certaines affections pulmonaires chroniques. Le rein pourrait être envahi secondairement, mais à l'origine l'affection serait plutôt artériolaire que rénale. Les récents travaux de JOSUÉ, JORES, ASCHOFF, sur le processus intime des altérations artério-scléreuses, ont donné un regain d'actualité à cette interprétation. Personne ne nie l'extrême fréquence de ces lésions; mais ce qu'on ne connaît qu'imparfaitement, c'est la mesure
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dans laquelle elles sont capables à elles seules d'élever la tension artérielle. La coexistence presque constante d'adultérations parallèles du rein obscurcit singulièrement le problème, et beaucoup d'auteurs (récemment encore J. LEE, O. SCHEEL) sont portés à rechercher dans ces lésions concomitantes la cause réelle de l'élévation de la pression. Les cas d'artério-sclérose étendue sans élévation et même avec abaissement de la pression artérielle sont nombreux et incontestés (DUNIN, ETIENNE et PARISOT, KREHL, FERRANNIN et CIUFFI, DEVOTO, J. TEISSIER, etc.); et il semble bien que le trouble hémodynamique hypertensif ait d'autres racines que les simples modifications de la trophicité artérielle. Ce non-parallélisme des altérations artério-scléreuses et du processus hypertensif est tel que CLIFFORD-ALBUTT (1915) conclut nettement à une dualité complète entre ces deux affections, auxquelles il donne deux notas distincts : l'hyperpiésie, état morbide caractérisé par l'hypertension, en dehors de toutes altérations artérielles ou rénales primitives',; et l' artériosclérose véritable, à localisation artérielle ou rénale, qui relève d'altérations séniles des parois vasculaires ( decrescent arteriosclerosis).
Maints histologistes, notamment notre regretté maître R. TRIPIER 1, BRAULT, n'admettent guère l'existence de l'artério-sclérose généralisée, envisagée comme maladie générale des artérioles, mais : seulement celle d'artérites localisées. On pourrait donc se demander si l'hypertension ne serait pas capable de s'établir à la suite de lésions artério-scléreuses localisées, affectant le territoire vasculaire de certains organes, le rein excepté. En France, J. TEISSIER, s'est fait le défenseur de cette idée et a montré l'importance, dans le développement de l'hypertension, des déterminations scléro-vasculaires localisées aux organes de la région abdominale (artério-sclérose des vaisseaux de l'estomac et de l'intestin, de l'aorte sousdiaphragmatique), ou encore au système artériel encéphalique, à-, l'aorte thoracique et aux coronaires. Les altérations des artères de
1 D'après R. TRIPIER, on pourrait expliquer plus simplement les manifestations multiples rangées sous la rubrique de l'artério-sclérose, en admettant « qu'un ou plusieurs organes, simultanément ou successivement, peuvent, être le siège d'inflammations aiguës ou chroniques, sous l'influence de causes infectieuses, toxiques ou traumatiques, toujours par des lésions vasculaires initiales sur des points variables, mais non préalablement généralisées".
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l'estomac et de l'intestin notamment, c'est-à-dire d'un des départements vasculaires les plus importants de l'économie, ont été incriminées par toute une série d'auteurs. Le mode d'action de ces artérites localisées a été bien expliqué par H. FRENCH. A l'état normal, d'après cet auteur, lorsque pour une cause quelconque un viscère vient à réclamer plus de sang, les artérioles se dilatent (par réflexe vaso-moteur) ; en même temps, celles des autres viscères et des membres se contractent d'une manière compensatrice. Il en résulte que l'action cardiaque rie se trouve pas sensiblement modifiée. Si, du fait de lésions artério-scléreuses, les artérioles d'un viscère sont devenues incapables de se dilater, la seule ressource qui restera à l'organisme pour assurer à ce viscère une irrigation suffisante sera l'accroissement de la puissance cardiaque ; les autres viscères recevront dès lors, sans nécessité, une quantité de sang accrue, avec augmentation de la pression artérielle générale. Cette hypertension se manifestera, par exemple, pendant la digestion, s'il existe de l'artério-sclérose des artères de l'estomac ou de l'intestin ; et, par suite de la répétition incessante de ces modifications de pression, le coeur ne tardera pas à s'hypertrophier et à créer un état d'hypertension permanente. Ainsi le manque de variabilité dans le calibre des différentes artérioles (splanchniques ou périphériques) serait la cause principale de l'hypertension artérielle. D'après HASEBROEK (1910), le coeur s'hypertrophierait et là tension augmenterait pour suppléer aux mouvements actifs d'expansion et de contraction, que les artères présenteraient normalement, d'une façon synchrone à la systole et à la diastole cardiaques. Lorsque les artères d'un organe se trouvent lésées et que son fonctionnement augmente, le coeur central, n'étant plus aidé par le « coeur périphérique » suivant ,l'heureuse expression de HUCHARD, serait soumis à un véritable surménage et finalement s'hypertrophierait. Suivant une troisième hypothèse, le facteur le premier en daté serait un spasme artériolaire généralisé. " L'hypertension artérielle, dit HUCHARD, est la cause, non l'effet de l'artério-sclérose ; elle précède pendant un temps plus ou moins long l'évolution de diverses maladies (cardiopathies et néphrite interstitielle), lesquelles sont elles-mêmes sous la dépendance de la sclérose vasculaire. » Ce spasme se développerait, pour cet auteur, sous l'influence de poisons alimentaires en circulation ou de toxines élaborées par l'organisme;
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Dans cette phase de « pré-sclérose », il n'existerait pas encore de lésions artérielles appréciables ou du moins irrémédiables, et l'hypertension serait capable de disparaître sous l'influence de moyens hygiéniques,et thérapeutiques appropriés. La même opinion a été adoptée par RUSSEL (1907) qui incrimine un « hypertonus » artériel généralisé, dont le point de départ serait dans une excitation des centres vaso-constricteurs médullaires ou dans une action directe des substances nocives circulant dans le sang (toxines résorbées par l'intestin, purines alimentaires ou d'origine animale, intoxication alcoolique, etc.). Elle a été défendue anciennement par SENHOUSE KIRKES, TRAUBE; plus récemment par VAQUEZ, PAL. D'après cette théorie, et dans de nombreux cas, l'hypertension serait fonctionnelle avant d'être lésionnelle. « Nous croyons, écrit VAQUEZ, que l'hypertension est primitive, indépendante, au moins à son début, de toute lésion organique, et qu'elle est due à un trouble fonctionnel des organes régulateurs dé la pression artérielle »
Depuis ces quinzes dernières années, sous l'influence de VAQUEZ, de JOSUÉ, et de nombreux auteurs dont nous examinerons plus loin les travaux, un nouveau facteur est entré en jeu pour expliquer ces hypertensions artérielles permanentes, en dehors de toute lésion de néphrite : l' hyperplasie surrénale. Parmi les premières observations signalées, nous citerons celle de WIDAL et BOIDIN (1905) où, à l'autopsie d'une malade très hypertendue et athéromateuse, on trouve des surrénales en hyperfonction avec des reins absolument sains ; des faits de GAILLARD (1907) où, avec une hypertension marquée et une grosse hypertrophie cardiaque, on retrouve la même hyperplasie surrénale, sans lésions rénales notables; une observation de PARISOT, où l'hypertension artérielle fut mise sur lé compte d'une hyperplasie hypophysaire et surrénale (1908). Le succès de cette théorie surrénale de l'hypertension fût tel qu'on en vint à se demander, comme nous le verrons au chapitre pathogénique, si ce n'était pas par l'intermédiaire de la réaction dé ces glandes que s'établissait l'hypertension artérielle survenant au cours des néphrites confirmées.
c. Il serait oiseux de vouloir choisir actuellement entre toutes ces théories, dont aucune n'a du reste la prétention d'être exclusive. Le fait même de leur multiplicité montre la difficulté du problème. Mais, dans l'avenir, ce sont des preuves que l'on sera en droit d'exi-
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ger, au lieu de rémunération de préférences personnelles. Oui ou non, le rein est-il en cause dans tous les cas d'hypertension artérielle permanente ? Pour résoudre le problème, la clinique devra s'attacher à suivre L'évolution lointaine de certains états hypertensifs, d'abord intermittents, développés.manifestement en dehors de toute atteinte rénale, afin de voir s'ils; sont capables de créer à la longue des hypertensions permanentes solitaires ; à ce point de vue, l'étude à longue échéance de l'hypertension qui accompagne certaines tachycardies d'origine nerveuse ou thyroïdienne donnera sans doute des résultats intéressants. Peut-être, l'exploration fonctionnelle des reins, en variant et en multipliant ses épreuves, arrivera-t-elle à déceler de minimes degrés d'insuffisance rénale, qu'on soupçonne à peine à l'heure actuelle. L'anatomie pathologique devra fournir aussi son concours ; mais on prévoit les difficultés qu'elle aura à apporter des preuves irréfutables. Il faudrait que l'examen puisse porter sur les reins d'hypertendus solitaires, à la phase de tolérance parfaite, c'est-à-dire à une période où la survie est en général fort longue. Même en cas de mort accidentelle, chez un sujet assez longtemps suivi pour que l'on puisse affirmer la permanence de l'hypertension et l'absence constante de tout symptôme de néphrite, l'examen des reins devra être singulièrement minutieux. Dans la recherche de lésions encore minimes et sans doute à foyers disséminés, ce n'est pas un fragment d'un rein ou même des deux reins qu'il suffit d'examiner pour affirmer l'absence de toute altération, mais de très nombreuses parcelles ; et avec les techniques de fixation et de coloration les plus perfectionnées. Pour qui connaît la difficulté d'appréciation des fines lésions rénales, la tâche paraîtra assez périlleuse pour qu'un histologiste de profession puisse à peine l'assumer. C'est sans doute pour cette raison que les arguments anatomiques versés au débat sont encore contradictoires et que les observations d'hypertension permanente sans néphrite de WIDAL et BOIDIN, de PARISOT, n'ont pas suffi à entraîner la conviction générale. Au reste il serait facile de citer, en contre-partie, des statistiques assez imposantes montrant la presque constance de lésions rénales dans les cas d'hypertension permanente 1.
1 Dans la statistique de FISCHER, citée plus haut et portant sur ,plus de 500 hypertendus permanents, les constatations anatomiques purent être faites
L GALLAVARDIN. 27
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d. Que l'hypertension artérielle solitaire soit lé fait de lésions rénales latentes ou d'autres perturbations vasculaires, le problème étiologique reste entier ; et il est encore plus obscur que pour l' hypertension d'origine brightique. En présence de ces grands hypertendus, sans albuminurie, on a tout incriminé : l'alcool, le tabac, les auto-intoxications intestinales, la surcharge ou les écarts alimentaires, les diverses diathèses, les innombrables infections capables de passer inaperçues, et même les soucis moraux, « les excès de travail, la précipitation et la tension continuelle dues; aux difficultés de la vie ». Le plus souvent, on a beau fouiller les antécédents et multiplier les moyens d'investigation, on ne trouve rien. Ces malades restent pour le médecin des énigmes vivantes*,
2° Pathogénie de l'hypertension artérielle permanente.
Prenons le cas le plus simple. Laissons de côté les faits dans, lesquels on pourrait soupçonner des altérations parallèles des reins, du système artériel, du myocarde (GULL et SUTTON, PETER, LANCEdans
LANCEdans cas. Dans 28 d'entre eux, dans lesquels on avait établi cliniquement l'existence certaine d'une lésion rénale, cette lésion put être démontrée anatomiquement, sans que pourtant l'étendue et la gravité des altérations anatomiques fussent toujours telles que le faisait prévoir l'examen clinique.
Sur les 14 autres faits, où le diagnostic clinique d'une affection rénale avait paru douteux, on trouva 7 fois une lésion étendue" et 7 fois des foyers isolés seulement. En résumé, dans aucun des cas d'hypertension durable qui furent soumis à la nécropsie, on ne constata l'absence d'altérations anatomiques des reins. De telles statistiques, du fait même du nombre des matériaux cliniques ou anatomiques utilisés et de la difficulté d'une investigation aussi étendue, ne valent peut-être pas une série plus restreinte de faits bien choisis et minutieusement étudiés; l'impression qui s'en dégage ne peut cependant, être négligée.
1 Malgré l'incertitude où nous sommes sur les véritables causes de ce syndrome si frappant, nous devons cependant attirer l'attention sur deux facteurs possibles : la syphilis et les hypertrophies thyroïdiennes. La fréquence de ce syndrome chez les syphilitiques notoires, et en dehors de toute autre cause apparente, semble être plus qu'une simple coïncidence. D'autre part, la presque constance d'une légère hypertension artérielle chez les malades atteints de goitre exophtalmique ou de maladie de BASEDOW fruste, les relations intimes entre le coeur et l'apparell thyroïdien (coeur goitreux),permettent de se demander si les hypertensions thyroïdiennes rencontrées dans d'assez nombreux cas d'hypertension solitaire n'auraient pas un rôle important dans leur production. Evidemment, ces deux causes ne peuvent avoir la prétention que d'expliquer une minorité de cas d'hypertension permanente; elles méritent cependant d'être prises en considération.
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REAUX, DEBOVE et LETULLE), ceux dans lesquels l'origine rénale reste douteuse. Réduisons le problème aux cas où l'antériorité de la lésion rénale apparaît indéniable. Il s'agit d'une néphrite aiguë ancienne passée à l'état chronique, d'une néphrite ascendante lentement constituée, ou encore, si l'on veut, d'un rein polykystique. Après plusieurs années, la lésion rénale primitive s'est doublée d'une hypertension artérielle permanente, avec hypertrophie cardiaque. Quel est le fil invisible qui relie ces deux ordres de phénomènes, où est la force mystérieuse qui a modelé le ventricule gauche, renforcé les tuniques artérielles, pour engendrer et supporter ce nouvel équilibre de pression ?
RICHARD BRIGHT, en 1836, après avoir constaté la fréquence des hypertrophies cardiaques non valvulaires au cours des altérations rénales, se pose déjà cette interrogation. « Les deux hypothèses les plus vraisemblables, conclut-il, semblent être : ou l'altération de la qualité du sang, qui apporte au coeur une stimulation anormale; ou une modification des circulations artériolaire. et capillaire, qui nécessite une action plus énergique du coeur pour faire passer lé sang à travers les subdivisions éloignées du système vasculaire ». Théorie mécanique et théorie humorale, voici déjà tracé le cercle fatidique où vont se donner carrière tant de chercheurs obstinés et ingénieux. Pourquoi faut-il qu'après trois quarts de siècle l'énigme reste toujours inviolée, et que l'on ne connaisse pas encore de façon exacte la filiation reliant le gros coeur des hypertendus au petit rein des brightiques ? De nombreuses solutions ont été proposées, des faits importants mis en lumière ; mais il semble qu'au lieu de se simplifier le prblème soit devenu un rébus. Tant il est vrai que l'éclaircissement de la relation organique la plus grossière, dès qu'on veut la pousser un peu à fond, vient se buter contre l'inconnu où sont encore plongées la plupart des actions vitales. Aussi, est-ce moins pour faire montre des résultats obtenus que pour indiquer tout ce qu'il y a encore à chercher et à trouver, que nous ferons un exposé aussi impartial que possible de l'état actuel de la question 1.
Les théories mécanique et humorale n'ont pas été les seules invoquées. D'après une théorie nerveuse, les lésions glomérulaires pourraient provoquer, par action réflexe sur le sympathique, une vaso-constriction générale qui aurait pour but d'augmenter la tension (LOEB). De même; pour PAGANO, l'excitation des artères rénales serait capable de produire une élévation marquée
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A. THÉORIE MÉCANIQUE. — D'après cette théorie, imaginée par TRAUBE (1856) et défendue par de nombreux auteurs, c'est dans l'augmentation des résistances périphériques au niveau du rein qu'il faudrait chercher la cause première de l'hypertensipn des néphrites. On pourrait s'étonner dé voir le rétrécissement du champ vasculaire d'une masse viscérale aussi minime que celle de l'appareil rénal provoquer un tel retentissement sur la pression. Mais il faut tenir compté de ce fait que la circulation du rein, tout comme la circulation pulmonaire ou la circulation portale, est une circulation « fonctionnelle », dont l'importance dépasse beaucoup celle de la b masse du parenchyme irrigué. Pour donner une idée de la grandeur de cette circulation artérielle du rein, disons que BROWN-SÉQDARD (1858) l'estimait à 325 grammes de sang par minute et par organe, HEIDENHAIN (1883) à 90 centimètres cubes par rein et.par minute, BANCROFT et BRODIE (1995) à 40 centimètres cubes par minute et par rein de 65 grammes, LANDERGREEN et TIGERSTEDT à 100 centimètres cubes par minute et par 100 grammes de substance rénale. Plus récemment BURTON OPITZ et LUCAS (1908), en calculant chez le chien l'importance relative du débit sanguin dans différents organes, et en rapportant les chiffres à 100 grammes de substance, sont arrivés aux résultats suivants :
(Pour 100 grammes de substance)
Muscles squelettiques 12 centimètres cubes à la minute Tête ........ 20 — —
Intestin ...... 31 — - —.
Cerveau. ..... 136 — —
Rein 15o — —
L'influence d'un barrage rénal sur l'équilibre général de la circulation se laisse ainsi plus facilement concevoir1.
de la tension du sang. En l'absence de lésions rénales, l'irritation des filets nerveux d'artères diverses ou des parois aortiques sclérosées serait susceptible de donner naissance au même réflexe (BITTORF). — Selon une théorie inflammatoire, l'hypertension dans les néphrites ne serait pas primitive, mais consécutive à une hypertrophie myocardique d'origine inflammatoire, développée sous l'influence des produits de rétention rénale ou de la même cause que celle qui a provoqué la néphrite.
1 Seule la circulation du corps thyroïde serait plus importante que celle du rein, avec 560 centimètres cubes de sang par 100 grammes de substance et par minute.
-HYPERTENSION ARTERIELLE PERMANENTE 421
Comment vérifier la relation entre la gêne mécanique de la circulation du rein et l'hypertension ? L'augmentation de la pression qui accompagne les néphrites infectieuses expérimentales, celles consécutives à la ligature incomplète des uretères (STRAUSS) ou d'un seul uretère (RAUTENBERG), ne prouve rien; elle pose à nouveau le problème, plus qu'elle ne le résout. Il faut s'adresser à d'autres méthodes : circulations artificielles, constatations anatomiques, et surtout expériences sur l'animal vivant.
Les circulations, artificielles, réalisées comparativement par DICKINSON (1862), THOMA (1877), sur des reins sains et des reins atteints de néphrite, semblent bien mettre en évidence une certaine résistance opposée à la circulation par les vaisseaux scléreux du rein. Mais les conditions sont vraiment trop différentes, du rein cadavérique au rein vivant, pour que l'on en puisse tirer des conclusions certaines.
Les constatations anatomiques ou histologiques n'apportent pas davantage d'arguments péremptoires en faveur de cette théorie. Ce ne sont pas toujours les petits reins granuleux, au niveau desquels la gêne circulatoire semble devoir être au maximum, qui pendant la vie se sont accompagnés des plus fortes hypertensions. Gomme nous l'avons vu, on est bien souvent étonné de trouver à l'autopsie de grands hypertendus, au lieu du petit rein contracté, de gros reins rouges, à surface lisse, à capsule peu adhérente, ressemblant presque au rein cardiaque, et ne montrant parfois à l'examen histologique que des lésions diffuses assez minimes. Certains auteurs (LOEB, ENGEL, GÉRAUDEL) ont tenté de mettre la réaction hypertensive exclusivement sur le compte des lésions glomérulaires. Mais les constatations histologiques ne sont guère en faveur de cette manière de voir. Nombreux sont les cas où les bouquets glomérulaires apparaissent presque indemnes, alors que cependant l'hypertension était considérable. Et, réciproquement, il n'est pas rare de constater dans des reins séniles une fibrose glomérulaire accentuée, sans hypertension notable. Rappelons enfin que la dégénérescence amyloïde, dont on connaît la prédilection pour les capillaires malpigbiens, ne s'accompagne pas d'élévation de la tension artérielle. Si l'on fait intervenir la gêne de la circulation rénale, il est donc bien entendu qu'il ne faut pas la limiter aux oblitérations glomérulaires : doivent entrer pareillement en ligne de compte les lésions des fines artérioles,
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de même que la compression du réseau capillaire (dans les espaces intertubulaires) par les liquides transsudés, par les infiltrations cellulaires ou même par la simple dilatation des tubuli contorti.
En expérimentant sur les artères rénales, les résultats obtenus sont peu satisfaisants. — Il est établi que : la ligature des vaisseaux du rein n'amène pas d'élévation de la tension artérielle, au moins par elle-même. Le fait n'a rien qui puisse étonner, ni même qui soit en contradiction formelle avec la théorie mécanique de l'hypertension d'origine rénale. Il y a loin, en effet, de la simple exclusion d'un territoire vasculaire, comme la réaliserait encore la ligature d'une ou des deux fémorales, à la circulation forcée, pendant des mois et des années, d'une quantité de sang toujours là même (c'est-à-dire \ compatible avec une survie aussi prolongée) à travers un réseau vasculaire sclérosé. — KATZENSTEIN, en 1905, par une occlusion incomplète des artères rénales (ou encore par une occlusion complète temporaire, amenant la production de petits thrombus dans quelques fines artérioles), aurait constaté une élévation assez nette de la pression; mais SENATOR (1911), reprenant ces expériences chez le . chien et le chat, n'a obtenu que des variations tout à fait passagères de la pression qui revenait très rapidement à la normale. Ses élèves MÜLLER et MAAS, afin de reproduire d'aussi près que possible ce qui se passe dans la réalité, injectèrent dans les artères rénales du chat de la paraffine chauffée à 55 degrés, qui en se refroidissant allait, à la façon des embolies, oblitérer les fins vaisseaux du rein. Au cours d'observations minutieuses ayant duré des heures, ils n'ont jamais pu observer la moindre élévation de pression artérielle, pourvu que l'anesthésie fût maintenue assez profonde pour soustraire l'animal à toutes les irritations extérieures capables de retentir sur la circulation.
Les expériences les plus intéressantes semblent être celles.d'ALVENS( 1909), consistant dans la compression totale et uniforme des reins à l'aide d'un oncomètre. Cet auteur a pu constater, dans trente expériences pratiquées sur des chats ou des lapins, que la compression des reins détermine une augmentation de pression (de 20 à 26 millimètres Hg en moyenne), qui apparaît dès que commence la compression, se maintient pendant toute sa durée, cesse brusquement dès qu'on la suspend, et se trouve moitié moindre lorsque l'on ne comprime qu'un seul rein. Une telle élévation de pression n'est
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pas d'origine réflexe ; car elle persiste après destruction des ramifications nerveuses du hile, ou section des splanchniques et de la moelle allongée. Elle n'est pas davantage d'origine chimique (libération par la compression et passage dans la circulation d'une substance hypertensive, telle que la rénine); car l'apparition ou la disparition de l'hypertension s'effectuent parallèlement, à la compression et à la décompression, alors que l'hypertension par injection de rénine se maintient toujours un certain temps. Son origine circulatoire directe est mise en évidence par ce fait que l'augmentation de pression ne se produit pas, si on lie les artères rénales avant la compression des reins, et qu'elle se manifeste au contraire dès qu'on lève les ligatures. Autre fait intéressant, montrant bien qu'il y a là quelque chose de particulier au rein: la compression d'autres viscères (rate, intestin), ou même de territoires vasculaires plus importants (membres inférieurs), ne donne lieu qu'à dès variations inconstantes, ou même nulles, de la pression artérielle. De ces expériences, on peut rapprocher celles tentées ces derrières années à l'aide dé résections partielles du rein, bien que le mode d'action de cette intervention soit passible d'interprétations multiples. On sait, depuis les expériences de TUFFIER (1889), ROSE BRADFORD (1889), PEARCE (1908), qu'il est possible de réséquer progressivement les deux tiers de la substance rénale totale sans entraîner la mort de l'animal, et même sans occasionner de troubles très marqués, alors que la résection des trois quarts provoque la mort, en général en une à six semaines, avec des symptômes d'émaciation et d'asthénie. Plusieurs auteurs se sont demandé quelle pouvait être l'action de ces réductions progressives de la substance rénale sur l tension artérielle. PASSLER et HEINEKE (1906), après avoir ainsi obtenu des survies de plus d'un mois, purent mesurer la tension dans la fémorale, chez cinq chiens, avant l'intervention et une ou plusieurs semaines après. La tension artérielle fut trouvée augmentée, en moyenne de 21 millimètres Hg, en même temps que l'on constatait une hypertrophie ventriculaire gauche des plus nettes ; lé rapport du poids du ventricule gauche, comparé à celui du ventricule droit, s'étant accru de 30 pour 100. Des constatations analogues furent faites en 1916, par BACKMAN qui constata, après ablation des deux tiers, de la substance rénale, une élévation de pression de 45 millimètres Hg pendant deux semaines. JANEWAY
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(1908-09) essaya de réaliser ces résections,de substance rénale, chez le chien, par des ligatures des branches de l'artère rénale. Chez les animaux qui ne moururent pas, du fait de réductions trop considérables ou de causes accidentelles, il put, en mesurant la tension à la patte par la méthode de RIVA-ROCCI, constater également une aug -, mentation moyenne de 20 millimètres Hg ; chez l'un d'eux la pression passa de 135/90 à 175/130. Je signale cependant que BARRINGTON, en 1915, après ablation du pôle supérieur du rein, complétée trois semaines après par l'ablation du rein ou la ligature de l'uretère, ne constata pas d'augmentation du volume du coeur chez six animaux ayant survécu longtemps. Quelque suggestives que soient ces expériences, on ne saurait y voir, de l'aveu même de leurs auteurs, la preuve décisive de l'origine mécanique de l'hypertension d'origine rénale. A côté de la réduction du champ vasculaire dévolu à l'excrétion, intervient une multitude d'autre facteurs qu'il est impossible de négliger : irritations nerveuses diverses, rétention de produits toxiques par dépuration insuffisante, lésions de néphrite développées sur la tranche de section ou autour de zones infarctoïdes consécutives à la ligature des branches de l'artère rénale (JANEWAY fait en effet remarquer que tous ces animaux présentaient de l'albumine à la suite de l'intervention), etc., etc.
Faut-il, comme n'ont pas hésité à le faire de trop nombreux auteurs, rejeter la théorie mécanique de l'hypertension artérielle dans les néphrites, sous le prétexte qu'aucune des expériences citées plus haut n'est rigoureusement convaincante? Nous ne le pensons pas, pour deux raisons. — Toutes ces expériences sont extrêmement grossières. Les altérations provoquées sont brutales et localisées. Leurs résultats ne peuvent être suivis que pendant quelques semaines au plus. Qu'il y a loin de, là aux lésions spontanées de néphrite, atteignant le rein d'une façon diffuse, évoluant sournoisement pendant des mois et des années, s'infiltrant par une fine dissection dans les espaces intertubulaires, adultérant à la longue la grande majorité ou la totalité des appareils glomérulo-tubulaires! Il y a dans les processus pathologiques spontanés, quelque chose d'inimitable. Prétendre faire le procès définitif de la théorie mécanique de l'hypertension d'origine rénale, sur le simple vu des expériences que nous avons relatées, nous paraît aussi imprudent que de vouloir reviser, par exemple, la physiologie pathologique du
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tabes sous le prétexte que la lésion brutale des cordons postérieurs ne reproduit pas la riche symptomatologie de cette affection ! — Il y a enfin « une autre expérience ", que l'on ne. cite vraiment pas assez lorsque l'on discute la pathogénie de l'hypertension d'origine rénale ; sans doute parce que le médecin l'a constamment sous les yeux et que l'expérimentateur n'est que la nature. C'est celle qui a pour théâtre le champ de la petite circulation. Existe-t-il une trilogie mieux établie que celle-ci : obstacle mécanique au niveau de la circulation pulmonaire (qu'il s'agisse d'un rétrécissement mitral, de scléroses pulmonaires diverses, d'emphysème généralisé, de phtisie fibreuse, etc.), hypertension dans la petite circulation, et hypertrophie des cavités droites? Qui songe, dans de tels cas, à nier l'origine mécanique de l'hypertrophie ventriculaire droite ou à invoquer une théorie humorale ; bien qu'à la vérité les lésions anatoiniques constatées dans le parenchyme pulmonaire ou les résultats des circulations artificielles ne rendent pas toujours exactement compte de la gêne apportée à la circulation? Pourquoi raisonner autrement pour la grande circulation que pour la petite? Ce que font les pneumopathies, pourquoi les néphropathies ne seraient-elles pas capables de le réaliser?
On peut objecter que l'importance du rein, dans la grande circulation, est loin d'égaler celle du poumon dans la petite. Alors que la circulation pulmonaire résume et commande à elle seule tout l'effort du ventricule droit, la circulation rénale ne représente qu'un département très réduit de la circulation générale. Pourquoi, dès lors, si l'on admet que les modifications de la circulation rénale sont capables de provoquer un si grand retentissement sur l'équilibre tensionnel, ne constaterait-on pas des troubles analogues quand d'autres organes, la rate, l'intestin, le foie par exemple, sont lésés ? Raisonner ainsi, serait méconnaître l'importance et le rôle de la circulation rénale. Nous avons vu plus haut qu'à poids égal de substance irriguée son débit était fonctionnellement beaucoup plus important que celui des autres organes. Cette considération mise à part, il importe de ne pas oublier que, si le système des artères rénales ne figure pas un couloir vasculaire plus large que beaucoup d'autres, c'est du moins le seul de tout l'organisme qui présente à son extrémité une fissure d'un débit aussi considérable : l'uretère. Une telle particularité vaut que l'on y prenne garde et,
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sur elle, on peut bien faire crédit à une pathologie un peu spéciale. Si, serrant le problème de plus près, on voulait expliquer mécaniquement la genèse de l'hypertension artérielle dans les lésions rénales, voici, semble-t-il, comment on pourrait le faire. — L'obsstacle à la circulation pourrait être considéré comme double. Nous connaissons le barrage anatomique, représenté, par la somme des lésions produisant une réduction fixe du calibre des vaisseaux artériolaires ou capillaires. A ses côtés, il y a place sans douté pour un barrage fonctionnel, dû au spasme de certaines artérioles, et dont le but serait d'augmenter la stagnation ou la pression du sang dans quelques subdivisions de l'arbre glomérulo-tubulaire. C'est un fait établi que les divers actes de la sécrétion urinaire exigent une certaine pression sanguine, et que des lésions données sont susceptibles d'être masquées par une augmentation de cette pression; il serait donc assez naturel, et bien en conformité avec les actes de défense que l'organisme réalise communément, que, pour pallier aux lésions qui s'installent, le système artériel réagisse sur place afin de réaliser un milieu tensionnel plus favorable. - La première conséquence de ceci, précédant toute modification de la pression artérielle générale, est qu'une certaine partie du sang, qui devrait passer par l'artère rénale, n'y passe pas en réalité. De ce fait, la circulation générale se trouve encombrée à chaque révolution cardiaque d'une quantité de sang, fort minime à la vérité, mais qui devient appréciable par l'accumulation; d'autant qu'elle se trouve encore augmentée de la quantité d'urine qui eût été prélevée sur elle, si la traversée rénale se fût normalement effectuée. — Le résultat immédiat de cet encombrement ciculatoire est une tendance à l'élévation progressive de la tension diastolique, le système aortique, au niveau du carrefour des artères rénales, se vidant moins bien qu'il n'a coutume de le faire, et la pression minima ne pouvant s'abaisser tout à fait aussi bas que dans les conditions normales. Le coeur, continuant à expulser à chaque révolution une ondée sanguine de même volume, provoquera nécessairement une augmentation parallèle de la tension systolique, du fait qu'il dresse sa vague de pression coutumière sur un piédestal un peu surélevé. — Au fur et à mesure de ces modifications, on assistera à l'hypertrophie croissante du ventricule gauche, résultant de la transposition de son action dans une échelle de pression supérieure
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Cette hypertrophie est rendue nécessaire, autant par l'élévation de l'effort initial qu'il doit donner pour soulever le plancher sigmoïdien, que par l'accroissement de l'effort maximal qu'il doit fournir pour se vider complètement dans un système artériel déjà comble. — Tout ceci est évidemment très progressif, et s'effectue par gradations tellement insensibles que les premiers stades échappent forcément à l'examen et se recouvrent les uns lés autres. Il n'en est pas moins vrai que c'est par la répétition et l'addition, incessantes des mêmes actes initiaux, se greffant sans relâche les uns sur les autres, qu' arrivent à se constituer ces énormes hypertensions dont la clinique nous offre de si fréquents exemples.
Contre cette explication mécanique de l'hypertension d'origine rénale, on peut cependant dresser une objection de valeur. Appliquée à la petite circulation, elle semble inattaquable. Il n'y a pas pour le sang de voie latérale d'échappement ; et toute la masse, liquide, qui du coeur droit va au coeur gauche, doit forcément passer par le poumon. Il n'en est pas de même dans la grande circulation. Si le réseau vasculaire du rein est obstrué, les voies de dégagement ne manqueront pas pour permettre au sang de tourner l'obstacle, et de rejoindre le système cave, sans augmenter la tension artérielle. Ces suppléances collatérales, ces sortes de balancement entre les diverses circulations régionales, sont monnaie courante dans la physiologie de l'appareil vasculaire. Sans doute. Mais il faut compter avec cette nécessité dans laquelle se trouve le rein d'être traversé par une quantité de sang donnée, d'autant plus grande que son aptitude éliminatrice est plus réduite, et sous une tension dont le taux élevé favorise les différents actes de l'excrétion urinaire. Il y a intérêt à ce que le sang, qui pourrait tourner l'obstacle, suit ramené, maintenu devant lui, et le franchisse. Pour cela, il faut que l'ensemble du système vasculaire, au lieu de masquer le trouble circulatoire initial, s'en fasse en quelque sorte le complice et concoure à maintenir, par une exagération correspondante du tonus, une hypertension qu'il lui eût été si facile de faire disparaître par des réactions vaso-dilatatrices appropriées. C'est cette adaptation de tout le système artériel aux nouvelles conditions circulatoires, créées et exigées par le rein, qu'il est difficile d'expliquer mécaniquement. Il y a, dans le déroulement de l'association des défenses organiques, quelque chose d'aussi inexplicable que dans la
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trame de l'instinct chez les espèces animales; et ces deux ordres de phénomènes ne sont peut-être pas aussi éloignés que l'on serait tenté de le croire de prime abord. Quoi qu'il en soit, on ne, peut s'étonner que de nombreux auteurs aient cherché dans une autre voie, celle des viciations humorales et des réactions bio-chimiques, sans succès plus décisif d'ailleurs, le secret d'une auto-régulation qui semblait se dérober aux conceptions purement mécaniques.
B. THÉORIE HUMORALE. — On incrimina successivement à peu près toutes les substances dont les propriétés hypertensives avaient pu être mises en évidence : produits de rétention rénale, substances fabriquées directement par le rein ou par d'autres glandes à sécrétion interne, notamment par les surrénales dont le rôle est devenu très prépondérant.
a. Produits de rétention rénale. -— Ce sont surtout des substances d'origine alimentaire qui ont été accusées par HUCHARD de produire l'hypertension artérielle de la « présclérose » : produits de digestion incomplète ou de putréfaction intestinale, toxines animales et purines alimentaires, provenant d'un régime carné trop exclusif ou. d'une alimentation trop abondante. Tout eh admettant l'action dé ces substances hypertensives, AMBARD et BEAUJARD font jouer un certain rôle au chlorure de sodium et sont disposés à établir des relations assez étroites entre les rétentions chlorurées et les processus hypertensifs.
A l'appui de cette manière de voir, on a cherché si, dans les substances extraites de l'urine normale, il n'existerait pas un corps doué d'un pouvoir vaso-constricteur, dont la rétention dans les néphrites pût expliquer l'hypertension. ABELOUS et BARDIER (19081909) ont isolé, parmi les matières de l'urine solubles dans l'alcool, une substance qui, injectée par voie veineuse, détermine une élévation notable de la pression artérielle et à laquelle ils ont donné le nom d'urohypértensine. L'action de cette substance se rapprocherait de celle de la triméthylamine, mais serait beaucoup plus puissante ; elle porterait surtout sur les centres vaso-constricteurs des glanglions périphériques du grand sympathique et sur les fibres musculaires des vaisseaux. En très petite quantité chez les enfants normaux de trois à six ans, elle diminuerait sous l'influence du régime végéta-
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rien, augmenterait sous celle du régime carné, et prendrait naissance au niveau de l'intestin. Ces recherches semblent avoir été confirmées par celles de WILLIAM BAIN (1911) qui a mis en évidence, dans l'urine de sujets, âgés de plus de quinze ans, deux bases urinaires hypertensives: appartenant au groupe aminé, et en rapport, semble-t-il, avec l'alimentation carnée ; ces auteurs auraient même noté leur diminution dans l'urine des sujets présentant une forte hypertension artérielle, du fait, pensent-ils, de leur rétention dans le sang. Enfin, DESGREZ, DORLÉANS et DORLIME, étudiant l'influence du groupement aminé sur la pression artérielle, montrèrent que, alors que la guanine , fait baisser la tension, le groupe des oxypurines (hypoxanthine, xanthine, acide urique) est nettement hypertenseur l.
Ce qui empêche de considérer comme satisfaisante cette explication simpliste de l'hypertension artérielle des néphrites, par simple rétention de. substances non éliminées par le rein, c'est qu'il n'y a en général aucun rapport entre le degré de rétention rénale et le taux de l'hypertension. Il est commun de ne relever que des réactions hypertensives minimes, dans dés urémies caractérisées; alors qu'au contraire, des chiffres très élevés seront atteints chez des brightiques latents, sans signes décelables de rétention azotée ou chlorurée. Un hypertendu, comme le fait très justement remarquer AMBARD, n'est pas forcément un intoxiqué. Même en admettant que l'hypertension soit unmoyen de défense contre l'accumulation des produits toxiques dans le sang, il n'est pas défendu de chercher ailleurs la cause première de son installation.
b. Substances sécrétées par le rein : rénine. — On sait que TIGERSTEDT et BERGMAN (1898) ont montré que l'on pouvait extraire, de la couche corticale du rein, une substance non dialysable (distincte par conséquent des sels urinaires) et possédant des propriétés hypertensives. Ils l'ont nommée la « rénine » et assurent qu'on peut là déceler dans le sang des veines rénales.
Le rôle de la cholestérine, substance incriminée par LEMOINE dans la pathogénie de l'artério-sclérose et de l'hypertension artérielle, n'a pas été confirmé par les recherches de CANTIERI (1913). Cet auteur n'a trouvé aucun rapport constant entre l'hypercholestérinémie et l'hypertension artérielle, les variations du taux de cette substance dans le sang paraissant surtout dépendre du mode d'alimentation.
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S'autorisant de ces expériences, quelques auteurs se sont demandé s'il ne serait pas possible d'expliquer l'hypertension artérielle des néphrites par l'autolyse d'éléments cellulaires rénaux et la libération de néphro-toxines hypertensives.
Les expériences récentes de MILLER (1911) et surtout de PEARCE (1909-1913) ne semblent pas confirmer ces données. Ce dernier auteur n'a pu mettre en évidence la présence d'aucune substance hypertensive dans les extraits du rein de chien, même lorsque ce dernier avait été sévèrement lésé par l'uranium ou le chrome; de plus, les extraits de reins atteints de formes diverses de néphrite produisaient les mêmes effets que les extraits de reins sains. Enfin, l'augmentation de la pression sanguine constatée par certains, après l'extirpation bilatérale des reins (MOSLER), n'est pas en faveur de cette manière de voir.
c. Réaction surrénale et adrénalinémie. — La découverte par OLIVER et SCHAFER, en 1895, des effets vaso-constricteurs des extraits; de capsules surrénales avait assez peu retenu l'attention des médecins, lorsqu'au début de ce siècle, et presque coup sur coup, on demanda au produit de sécrétion de ces glandes la solution des deux problèmes les plus obscurs de la pathologie vasculaire.
C'est en 1903, que JOSUÉ inaugura la série de ses remarquables travaux sur l'athérome adrénalinique. C'est au Congrès de médecine de 1904, que VAQUEZ émit l'opinion que la cause de l'hypertension artérielle (qu'elle soit secondaire aux affections rénales ou primitive) pourrait bien-être cherchée dans un fonctionnement exagéré: des capsules surrénales — une hyperépinéphrie ; idée qui fut acceptée avec enthousiasme et devait provoquer l'éclosion d'innombrables travaux. Quelques années plus tard, LANGLEY et ELLIOTT (1910) attribuèrent le tonus normal des vaisseaux à la sécrétion constante d'adrénaline par le système chromaffine. Si bien que,peu à peu, prenait corps une véritable doctrine, dans laquelle l'adrénalinémie se trouvait placée au premier rang des interprétations pathogéniques se proposant d'expliquer la conservation de la tension artérielle normale ou le développement des états hypertensifs.
Comme presque toujours, le problème apparut de plus en plus compliqué à mesure qu'on le creusait davantage. De toutes les expériences ou constatations faites sur les surrénales ou sur le sang des
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brightiques, il n'en est presque pas une qui n'ait sa contre-partie. Aussi, dans l'état actuel de la question, nous semble-t-il préférable d'opposer brutalement les contradictions, lorsqu'elles existent, plutôt que de tenter de les dissimuler par quelque habile subterfuge d'exposition.
a. Constatations faites sur les surrénales,— Depuis les premières constatations de VAQUEZ, AUBERTIN et AMBARD, l'hyperplasie surrénale a été très fréquemment notée à l'autopsie de malades atteints de néphrite chronique ou d'hypertension artérielle. Il s'agit d'ordinaire d'une hyperplasie portant sur la substance corticale,, à forme nodulaire, plus rarement franchement adénomateuse ; le poids des capsules est augmenté, atteint souvent 12 à 13 grammes ou même davantage, au lieu de la moyenne de 7 à 8 grammes. Pour citer une statistique, sur 8 cas de néphrite interstitielle avec hypertension examinés par AUBERTIN et AMBARD, on nota 4 fois de l'hyperépinéphrie nodulaire, 3 fois des réactions adénomateuses, 1 fois l'absence de toute lésion ; l'hyperépinéphrie faisait défaut dans 7 cas de néphrite sans hypertension, de même que chez 12 malades divers sans hypertension. A l'appui de ces faits, de nombreuses observations furent publiées par JOSUÉ et PAILLARD, BERNARD et BIGART, PILLIET, LEMAIRE, FROIN et RIVET, DOPTER et GOURAUD, WIDAL et BOIDIN (hyperplasie surrénale avec hypertension artérielle, sans lésions de néphrite), par PARKES WEBER, GAILLARD, PHILPOT, etc. Dans la statistique de ce dernier auteur, le poids moyen des surrénales de 22 sujets, avec hypertension artérielle et néphrite chronique, était de 12 gr. 4, alors que, chez 5 sujets atteints d'affections cachectisantes sans hypertension, il n'atteignait que 7 gr. 7 1.
Malgré cet ensemble impressionnant d'observations, quelques auteurs conçurent quelque étonnement de ce que le siège de l'hyperplasie fût de préférence la substance corticale ; l'adrénaline, suivant l'opinion reçue, étant sécrétée par la substance médullaire. L'objection n'était cependant pas de celles auxquelles on ne peut répondre. Certains observateurs avaient noté des signes de réaction in déniables
1 L'hypothèse de MARCUSE d'après laquelle l'hyperplasie surrénale serait elle-même occasionnée par la propagation aux artères surrénales de là stase de l'artère rénale (d'où congestion et adrénalinémie) est absolument controuvée par ce fait que, des artères des capsules, une seule, l'inférieure, naîtrait de l'artère et encore très irrégulièrement (BEITZKE, 1910.)
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dans la substance médullaire elle-même (PHILPOT, WIESEL, BAINBRIDGE et PARKINS) ; et d'autres, étudiant de plus près le. chimisme de la substance corticale, se rendirent compte qu'elle contenait, elle aussi, des produits hypertenseurs (JOSUÉ et BLOCH), voire même de l'adrénaline (KARVASHIMO), bien qu'en quantité sept fois moindre que la substance médullaire (ABELOUS, SOULIÉ et TOUJAN). Une objection plus importante devait être tirée de l'inconstance des relations entre cette hyperplasie surrénale et l'hypertension artérielle. Des cas négatifs furent produits par AUBERTIN et AMBARD, LANDAU, PEARCE, THOMAS, PAL, MÉNÉTRIER, RIST et KRANTZ, etc. On signala, de même, des faits de réaction surrénale sans aucune hypertension.
Les dosages d'adrénaline, effectués comparativement dans les glandes surrénales de sujets divers, ne donnèrent pas de résultats plus constants. Chez l'individu normal, on admet que la dose d'adrénaline contenue dans les deux capsules est d'environ 4 à 5 milligrammes. INGIERS et SCHMORL, en 1911, en dosant l'adrénaline dans plus de 500 autopsies, notèrent bien les plus hautes valeurs moyennes chez les sujets qui avaient présenté une pression élevée et dont le coeur était hypertrophié ; mais les plus fortes doses d'adrénaline (presque trois fois la normale, dans 3 cas) furent rencontrées chez des individus sans lésions cardiaques ou artérielles; et le sujet qui avait la plus grosse hypertrophie cardiaque montra un taux d'adrénaline au-dessous de la normale. De même ELLIOT, dans aucun cas d'affection rénale hypertensive, ne put constater d'augmentation du taux d'adrénaline ; dans 4 cas de néphrite à gros rein blanc, chez des sujets morts d'hémorragie cérébrale, la teneur en adrénaline se trouvait au contraire diminuée.
Nous ne pouvons citer ici toutes les tentatives expérimentales destinées à mettre en évidence le lien existant entre les réactions surrénales et l'hypertension artérielle ou l'hypertrophie cardiaque. Disons cependant que, si l'hypertrophie du coeur, provoquée expérimentalement par certains toxiques, coïncide presque toujours avec-, de l'hyperplasie médullaire des surrénales (AUBERTIN et CLUNET, WIESEL), et que, si l'hypertrophie du coeur a pu être de même provoquée par des doses longtemps continuées d'adrénaline (JOSUÉ, AUBERTIN), les extirpations des capsules surrénales ou la ligature des veines surrénales ne semblent pas confirmer la théorie en vertu de
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laquelle un produit de sécrétion internef de ces organes contribuerait, d'une façon permanente, à maintenir la pression artérielle à sa valeur normale 1 (MOSKINS et MAC CLURE, HULTGREEN et ANDERSON, CROWE et WISLOCKI, TRENDELENBURG).
J3. Constatations faites sur le sang des brightiques. — On devait forcément être conduit à essayer de mettre en évidence, directement dans le sang des brightiques, le corps du délit ; d'autant que BATELLI (1902), en montrant les effets vaso-constricteurs dû sérum normal, les avait déjà attribués à l'adrénaline.
Ces recherches, elles aussi, conduisirent à des résultats contradictoires. SCHUR et WIESEL (1907.) concluent à la présence d'adrénaline dans le sang circulant des brightiques (épreuve de MELTZER positive, sur l'oeil énucléé de grenouille) et croient à une suractivité du système chromaffine. Par le même procédé, RAUTENBERG (1910) voit apparaître des substances hypertensives dans le sang, au cours de néphrites expérimentales provoquées parla ligature des uretères. En opposition avec ces résultats, SCHLAYER (1907), BROKING et TRENDELENBURG (1911), KRETSCHMER (1910), PORAK (1918) ne trouvent pas au sang de pouvoir vaso-contricteur plus élevé chez les sujets hypertendus, que chez les individus normaux ; et JANEWAY et PARK (1912) ne parviennent pas à mettre en évidence la présence d'adrénaline ou d'autres substances vaso-constrictives dans le sang, préalablement rendu incoagulable 2, de six malades avec hypertension artérielle.
1 On pourrait se demander si des injections sous-cutanées répétées d'adrénaline sont capables d'exercer quelque influence nocive sur le taux de la tension artérielle.
Dans un travail de MÜNZER (Zeniralbl. f. Herz. u. Gefässkr., 1913, p. 496), nous avons vu signalé le cas d'un médecin de soixante ans, souffrant de violents accès d'asthme et traitant, avec succès d'ailleurs, ses accès par des injections d'adrénaline. Là solution injectée contenait 2 à 3 dixièmes de milligramme de suprarénine synthétique par centimètre cube, et il en était injecté souvent 3 à, 5 centimètres cubes par jour. Au moment où la tension fut prise pour là première fois, il avait été fait environ un millier d'injections et la tension était de 165/90. Un an et demi après, et l'usage de l'adrénaline ayant été continué, la tension était restée à peu près stationnaire, 165/100.
2 Cette précaution est utile, car de nombreux auteurs ont montré que la coaguloation et la simple défibrination du sang étaient capables de libérer des substances hypertensives. Pour certains, notamment pour LE SOURD et PAGNIEZ
(1914), les plaquettes sanguines ne seraient pas étrangères à la production de ces substances hypertensives.
L. GALLAVARDIN. 28
434 CLINIQUE SPHYGMOMANOEÉTRiQUE
De telles constatations négatives se généralisèrent au fur et à mesure que les progrès de la technique vinrent rendre plus, précises les caractéristiques de l'adrénaline. Les réactions chimiques primitives, basées sur l'emploi des sels de fer ou du sublimé (COMMESSATTI), avaient depuis longtemps cédé la place aux réactifsphysiologiques plus sensibles. Ces réactifs se multiplièrent, afin de rendre plus certaine la distinction de cette substance d'avec les autres produits vaso-constricteurs. Aux épreuves de MELTZER (dilatation pupillaire d'un oeil énucléé de grenouille, ou d'un oeil de lapin après ablation du ganglion sympathique cervical), de MEYER (resserrement d'anneaux artériels conservés dans la solution de LOCKE), on adjoignit le relâchement d'anneaux de coronaires, l'inhibition de la contraction de fragments de muscles intestinaux 1; et l'on fut conduit à exiger que trois, au moins, de ces épreuves fussent positives, avant d'affirmer la présence d'adrénaline dans le milieu exploré (JANEWAY et PARK).
A l'aide de cette technique perfectionnée, CANNON (1911), O. CONNOR, HOSKINS et MAC CLURE, STEWART (1912) purent bien mettre en évidence de façon certaine l'adrénaline dans le sang des veines surrénales, bien que la dilution soit environ de 1/1.000.000e à 1/5.000.000e; mais ils furent toujours impuissants, ainsi que JANEWAY et PARK (1912-13), à la déceler dans la circulation générale, qu'il s'agisse de sujets normaux ou d'hypertendus. S'appuyant. sur ces faits, HOSKINS et MAC CLURE doutent qu'il faille chercher dans cette substance la raison de l'élévation permanente de la tension, ou même, comme le voulaient LANGLEY et ELLIOT, la cause du maintien du tonus normal des vaisseaux 2. Ils font remarquer que la quantité
1 Il fut, en effet, démontré que l'adrénaline, qui provoquait la contraction des fibres pupillaires dilatatrices, des fibres circulaires de la majorité des vaisseaux et notamment de la carotide du boeuf ordinairement employée, des fibres lisses utérines, manifestait une action de sens inverse sur la musculature des artères coronaires, sur celle du tube intestinal, des muscles bronchiques et des vaisseaux pulmonaires.
2 A l'appui de cette opinion, nous rappellerons que le taux de la pression peut ne pas être sensiblement modifié à la suite de l'ablation des deux capsuies surrénales. « Si l'expérience a été bien faite, écrit ROGER opérant chez des lapins, c'est-à-dire si le choc a été évité, la pression sanguine reste, normale ou s'abaisse légèrement, mais ne s'abaisse pas au-dessous de 80 ou 70 millimètres Hg. » (Presse médicale, 22 novembre 1917, p. 666.) Ce qui ne veut pas dire, bien entendu, que la sécrétion surrénale ne soit capable d'exercer
HYPERTENSION ARTERIELLE PERMANENTE 435
d'adrénaline, nécessaire pour produire une minime et fugace élévation de la tension, est celle sécrétée pendant dix à vingt minutes par les surrénales ; et, de plus, qu'une quantité d'adrénaline en circulation dans le sang, suffisante pour élever la pression artérielle, ne manquerait pas de produire une inhibilion complète du péristaltisme intestinal. Ce n'est pas seulement son extrême dilution qui rend l'adrénaline impossible à retrouver dans la circulation générale (1./200.000.000e pour O. CONNOR, HOSKINS, MAC CLURE), niais sa destruction sans doute très rapide après la traversée des divers organes, notamment de ceux richement innervés par le sympathique (FALTA, PRIESTLEY et FLEMING, JANEWAY et LIEB). Une dernière tentative, faite, pour arriver indirectement à la démonstration dé l'adrénalinémie, fut de rechercher si le sucre du sang n'était pas augmenté chez les hypertendus. Les injections d'adrénaline ayant pour , effet d'augmenter la glycémie, il était logique de conclure que ce symptôme devait être retrouvé dans les hypertensions d'origine surrénale. Là encore, les résultats sont contradictoires 1; et les auteurs qui, comme JANEWAY et GEYELIN, notent une certaine hyperglycémie chez les hypertendus et les brightiques, ont souvent plus de tendance à la mettre sur le compte dé la rétention rénale que de L'adrénalinémie, cette hyperglycémie continuant à s'accroître dans les derniers stades de l'affection, alors que là tension tend manifestement s'abaisser.
Que conclure de tout cela? A coup sûr que la théorie surrénale, n'a pas encore tenu toutes les promesses qu'elle annonçait, et que ne s'est pas encore produite cette déchirure du voile du temple qui devait nous permettre de contempler les faits anciens à la lueur de la loi-nouvelle. Si certains auteurs, à la suite de JOSUÉ, inclinent à voir une relation des plus étroites entre L'hyperplasie surrénale, l'hypertension artérielle et l'hypertrophie cardiaque, (syndrome surréno-vasculaire), d'autres, avec AMBARD, restent encore sur la réserve et semblent considérer l'adénose et l'hyperplasie surrénale, moins comme la cause de l'hypertension, que comme une simple manifestation réactionnelle contre les agents toxiques (produits de
sur le taux de la tension artérielle, d'importantes modifications, dont la démonstration a été faite maintes fois et par. cet auteur même.
1 On en trouvera le résumé et la bibliographie complète dans l'article de JANEWAY, Nephiric hypertension.
436 CLINIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
rétention rénale ou autres) qui ont, causé les modifications dé. la tension artérielle — interprétation assez en rapport avec le rôle antitoxique que l'on reconnaît depuis longtemps aux. organes surrénaux. De toute façon, il semble bien qu'il soit prématuré d'attribuer, systématiquement et indistinctement, une origine surrénale à l'ensemble des variations tensionnelles observées au cours des divers états morbides, et de faire, comme l'usage semble s'en être répandu dans la littérature médicale, des moindres réactions hyper ou hypotensives, le synonyme de modifications de même sens dans le fonctionnement des glandes surrénales. A l'appui de ces réserves, nous citerons la conclusion assez décevante, et peut-être un j?êu sévère, par laquelle JANEWAV — un des auteurs qui a le mieux étudié ce problème — a pu clore une longue étude critique consacrée à ce qu'il appelle « le merveilleux rêve de l'adrénalinémie » (beautiful dream of adrenalinemia). « Jusqu'à présent, dit-il, il n'a pas été prouvé que l'adrénaline jouait un rôle quelconque dans le maintien du tonus vasculaire normal. Il n'y a pas d'évidence convaincante, physiologique ou anatomique, en faveur d'une théorie reliant l'exagération des fonctions surrénales ou du taux de l'adrénaline circulante aux états d'hypertension artérielle, avec ou sans néphrite » 1.
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1 A côté des surrénales, on a incriminé aussi l'action des paraganglions ou glandes hypertensives constituées par des amas de tissus chromaffine parasympathiques, dont on aurait noté l'hypertrophie dans les néphrites chroniques avec hypertrophie cardiaque (MULON).
Quant aux autres glandes à sécrétion interne dont l'action hypertensive est certaine (tel surtout le lobe postérieur de l'hypophyse), peut-être entrent-elles en jeu pour expliquer certaines réactions hypertensives plus ou moins passagères ; mais on n'a guère invoqué leur action dans la pathogénie de l'hypertension d'origine rénale ou, d'une façon plus générale, de l'hypertension arterielle permanente.
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Il — HYPOTENSION ARTERIELLE PERMANENTE
Cette modification tensionnelle est la contre-partie de l'hypertension artérielle permanente. Tandis que cette dernière est le reflet des exigences croissantes de l'organisme, l'hypotension permanente traduit une adaptation de la circulation à des besoins moindres. Au lieu de s'hypertrophier comme précédemment, le coeur subit une régression en rapport avec la chute tensionnelle. Un certain degré d'atrophie cardiaque est donc à la base de l'hypertension permanente, à moins qu'elle ne soit l'aboutissant de l'ultime déchéance de cardiopathies hypertrophiqués anciennes.
Son importance clinique ne saurait être comparée à celle de l'hypertension permanente. La faute en est à l'étendue restreinte de la gamme des variations hypotensives, comparée aux fluctuations hypertensives de grande allure signalées plus haut. Des oscillaliens de 3 à 4 centimètres de Hg, comprises, pour s'en tenir aux cas ordinaires, entre une limite supérieure de 110 millimètres Hg et un niveau inférieur de 80 ou 70 millimètres Hg, n'est-ce pas là une échelle bien modeste, si on la dresse à côté de celle de plus de 15 centimètres Hg que gravit communément la série des processus hypertensifs !
Le premier résultat de la réduction de cette échelle tensionnelle est
446 CLINIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
qu'il sera moins facile de distinguer les hypotensions du début (qui seraient cependant les plus importantes à reconnaître, au point de vue clinique) des simples variations normales ou subnormales. Le grossissement n'est pas suffisant. Pour s'en rendre compte, on n'a qu'à imaginer les incertitudes auxquelles on se trouverait exposé, dans le diagnostic des hypertensions modérées, si la limite des variations hypertensives se trouvait confinée entre 120 et 160 millimètres Hg !
Une deuxième conséquence est qu'il sera moins aisé (toujours par défaut de grossissement) de détailler, dans une gamme hypotensive aussi réduite, les variations respectives des pressions systolique et diastolique. Nul doute que les types d'hypotension et d'hypertension diastoliques, que nous avons décrits plus haut, ne se poursuivent dans ce bas-fond tensionnel. Mais leur évaluation devient une affaire de quelques millimètres, au lieu de reposer sur des transpositions de centimètres ou tout au moins de demi-centimètres Hg. Il faudra donc se résigner à n'enregistrer que les degrés extrêmes de ces types circulatoires anormaux, en laissant dans l'ombre leurs nuances incertaines. On peut bien ajouter enfin que, plus la tension artérielle est basse, plus la fixation du chiffre de pression diastolique est
FIG. 158. — Echelle sphygmomanométrique montrant le peu d'étendue des variations hypotensives, comparée à celle, des variations hypertensives.
HYPOTENSION ARTERIELLE PERMANENTE 447
délicate ou litigieuse quelle que soit la méthode employée. C'est pour toutes ces raisons que l'on accorde d'ordinaire moins d'importance au taux de la pression minima dans les hypotensions artérielles, et que l'on se contente assez souvent de la simple estimation de la tension systolique.
Trouve-t-on du moins, dans la valeur séméiologique de l'hypotension artérielle, quelque compensation à ces difficultés d'appréciation ? Pas très nettement. Il est bien' rare que l'on soit conduit à tel ou tel diagnostic, du seul fait de la constatation d'un certain degré d'hypotension. Une telle modification, lorsqu'elle est assez nette pour être prise en considération, constitue d'ordinaire un appoint plus intéressant que vraiment indispensable. Le contraste est frappant avec les états hypertensifs. De plus, il est exceptionnel qu'un état d'hypotension artérielle permanente soif assez accentué pour dominer vraiment la scène clinique et pour grouper autour de lui d'autres manifestations secondaires, comme le cas est commun dans l'hypertension artérielle ou même dans les hypotensions transitoires que nous étudierons plus loin.
Malgré cela, et bien qu'il ne s'agisse là d'ordinaire que d'un symptôme satellite, il est intéressant de passer en revue les circonstances au cours desquelles il se manifeste. Nous verrons que les travaux de ces dernières années ont incontestablement doté son histoire de quelques données nouvelles ; et il n' est pas défendu d'espérer que, dans l'avenir, son importance puisse s'affirmer davantage.
1° Types étiologiques et cliniques. — Autrefois, on ne décrivait guère que l'hypotension des affections à tendance cachectisante, au premier rang desquelles se plaçait la tuberculose. Plus récemment, on a insisté sur certaines hypotensions semblant presque constitutionnelles, ainsi que sur l'abaissement paradoxal de la tension au cours de certaines affections cardiaques non valvulaires.
a. Hypotensions constitutionnelles. — On peut réunir sous cette dénomination les états hypotensifs qui semblent être davantage sous la dépendance de ce que l'on appelait autrefois « le tempérament M, que l'effet d'une cause pathologique bien déterminée. BISHOP (1906), EDGECOMBE (1911) avaient déjà attiré l'attention sur
448 CLINIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
ces sujets à circulation défectueuse, à pieds et mains froides, à pulsatilité réduite et pression anormalement basse. MARTINET a tenté, en 1912, d'individualiser ce syndrome clinique sous le nom d'hyposphyxie (vno, au-dessous, afj^iç, pulsation).
D'après cet auteur, il s'agirait là d'un syndrome extraordinairement fréquent. Si l'on fait abstraction des cas dans lesquels il se manifeste à la suite de lésions organiques diverses (rétrécissement mitral, tuberculose, pneumopathies chroniques), on le rencontrerait le plus souvent « chez des individus indemmes en apparence de toute affection organique, cardiaque ou pulmonaire. Ce typé est presque la règle chez les jeunes filles et un grand nombre de femmes sédentaires par tempérament ou par profession, à capacité respiratoire faible, à musculature débile. Il est d'ailleurs fréquemment héréditaire et sous la dépendance d'une véritable hypotrophie cardiaque congénitale familiale ». Outre la baisse de là pression artérielle, la petitesse du pouls radial, la réduction du volume du coeur à l'examen radioscopique (coeur en goutte), on constaterait chez ces sujets : une gêne manifeste de la circulation veineuse (face haute en couleur, joues et lèvres teintées, pouls jugulaire très visible, tendance variqueuse, tension douloureuse des mollets dans la station verticale); du refroidissement facile des extrémités, qui apparaissent froides, humides, parfois même livides, et réagissent, mal aux changements de température ; de l'oligurie ; sinon de l'obésité, du moins une disproportion manifeste entre les tissus adipeux et musculaire; de l'asthénie facile; une céphalalgie un peu spéciale, caractérisée par son siège franchement occipital et son exaspération du fait de la situation horizontale. A ce syndrome hyposphyxique, se superposerait encore un syndrome hypocrinique, par insuffisance pluriglandulaire (digestive, thyroïdienne, ovarienne, hypophysaire, surrénale) ; et, pour MARTINET, ce serait l'hyposphyxie qui dominerait et conditionnerait l'hypocrinie. Quoi qu'il en soit de cette filiation, la médication opothérapique viendrait utilement seconder, dans de tels cas, la médication angio-cardio-sthénique et l'entraînement physique progressif.
A côté de ces hypotensions constitutionnelles, dont la cause peut être recherchée dans une hypotrophié cardio-vasculaire congénitale, il en est d'autres qui semblent bien relever d'un trouble nerveux primitif. D'assez nombreux auteurs ont appelé l'attention sur la
HYPOTENSION ARTÉRIELLE PERMANENTE 449
fréquence de l'hypotension artérielle dans certaines formes de psycho-névroses, neurasthénie ou psychasthénie ( MARTINET, MAUPETIT, CROUZON, etc.) Quant à la microsphygmie, fréquemment notée dans l'idiotie, elle relèverait moins d'un abaissement véritable de la pression que de modifications hypertoniques de la musculature artérielle (LAROCHE et RICHARD).
Il existe, enfin, des cas assez singuliers d'hypotension artérielle que l'on ne sait à quelle cause rattacher, et qui paraissent compatibles avec une santé excellente et une activité de tout point normale. A quelques reprises, j'ai pu observer, chez des hommes adultes de trente à cinquante ans,, une tension artérielle franchement basse, oscillant autour de 100/70 ou 90/66 millimètres Hg. Il s'agissait de sujets normalement développés, de tempérament sec et nerveux, plutôt maigres, mais robustes et remarquablement actifs ; il est à noter que ceux mêmes qui avaient dépassé l'âge moyen n'éprouvaient, dans les efforts ou la marche en côte, aucun essoufflement. Il serait intéressant de savoir s'il ne s'agirait pas là d'une disposition circulatoire plutôt heureuse et mettant, dans une certaine mesure, à l'abri du développement des processus hypertensifs.
b. Hypotension des affections à tendance cachectisante.— C'est une loi, qui né souffre presque pas d'exception, de voir la tension s'abaisser progressivement au cours des maladies s'accompagnant de dénutrition et de cachexie.
Le fait est de constatation facile dans le cancer,. les anémies graves, de quelque cause qu'elles relèvent, les infections chroniques diverses. Dans la maladie d'Addison, la baisse tensionnelle peut être attribuée autant à la cachexie rapide qu'à la suppression des fonctions surrénales. On a cité aussi la cirrhose atrophique, parmi les affections entraînant une hypotension artérielle progressive. Cette modification de la tension doit sans doute être le privilège des formes survenant chez des sujets relativement jeunes, ou non compliquées ; car j'ai remarqué qu'au dessus de quarante à cinquante ans, on constatait presque toujours chez ces malades une hypertension légère (140 à 150 millimètres Hg), sans doute attribuable à des lésions rénales ou artérielles concomitantes.
De toutes ces maladies à tendance cachectisante, il n'en est pas dans lesquelles l'étude des variations de la tension offre plus d'intérêt que la tuberculose pulmonaire. La fréquence de cette
L. GALLAVARDIN. 29
450 CLINIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
affection, l'importance que peuvent acquérir les constatations sphygmomanométriques dans le diagnostic ou le pronostic de ses diverses formes évolutives, l'intérêt de toutes ces données au point de vue de la pathologie générale, sont autant de motifs qui nous
incitent à ne pas scinder l'étude des variations de la tension dans cette maladie et à en remettre l'exposé lorsque nous traiterons des modifications de la tension au cours des différentes affections pulmonaires.
c. Hypotension dans les cardiopathies. — Dans l'ensemble, une hypotension véritable est assez rarement constatée au cours des cardiopathies valvulaires. — C'est surtout dans le rétrécissement aortique pur qu'elle avait été signalée. MERKLEN a insisté longuement sur ce signe ; mais nous verrons plus loin que sa constance est loin d'être la règle. Ajoutons qu'il s'agit là d'une lésion exceptionnelle, que l'on aura assez rarement l'occasion de rencontrer en clinique. — Parmi les symptômes du rétrécissement mitral pur , on trouve souvent notée une hypotension artérielle qui cadrerait bien avec l'atrophie relative du ventricule gauche, au moins dans les formes juvéniles de ce vice valvulaire. Là encore, le graphique que nous reproduisons plus loin montre que l'on aurait tort de trop généraliser. — Quant aux autres cardiopathies valvulaires, lésions mitrales doubles, lésions aortiques ou mitro-aortiques, on peut dire que l'hypotension artérielle est nettement l'exception. Presque
FIG. 159. — Exemples d'hypotension artérielle légère, moyenne et très accentuée, représentés en sphygmogrammes absolus, chez des malades atteints de tuberculose pulmonaire. — Les chiffres de 80 à 70 millimètres Hg ne se rencontrent d'ordinaire que chez des tuberculeux cavitaires, arrivés à une période avancée de cachexie.
HYPOTENSION ARTÉRIELLE PERMANENTE 451
toujours, on voit la tension se maintenir aux environs de 130135 millimètres Hg, atteindre souvent 140 où 145 millimètres Hg, sans doute du fait d'un certain degré d'hypertension attribuable à la stase veineuse et sur lequel nous insisterons ultérieurement. Ce n'est d'ordinaire que dans les stades tout à fait ultimes que la pression artérielle peut s'abaisser nettement au-dessous de la normale.
Un type clinique des plus intéressants est constitué par l'association d'une hypotension artérielle notoire avec, certaines Cardiopathies non valvulaires. J'ai eu l'occasion d'observer plusieurs faits de ce genre. Dans mes observations (dont certaines ont été publiées, en 1914, dans la thèse de GRAVIER) il s'agissait constamment d'hommes, ordinairement âgés de quarante à soixante-cinq ans. Les traits les plus caractéristiques de ce syndrome m'ont paru être les suivants : volumineuse dilatation hypertrophique du coeur, sans signes de lésion valvulaire, comme sans brightisme évident ; galop presque constant (ce qui prouve bien que le galop n'a rien avoir avec l'hypertension artérielle), avec ou sans souffle d'insuffisance mitrale fonctionnelle ; pouls le plus souvent régulier, avec alternance très fréquente; symptômes manifestes d'insuffisance cardiaque, survenant après une période latente plus ou moins prolongée (dyspnée, poussées pulmonaires oedémateuses, atteintes subasystoliqués, parfois mort subite); évolution rapide, dépassant rarement une ou deux années; enfin, comme manifestation paradoxale et inattendue, hypotension artérielle très nette oscillant d'ordinaire entre 110 et 80 millimètres Hg, pour la tension systolique. Les graphiques et résumés ci-joints d'observation préciseront mieux le tableau clinique que toute description 1. JOSUÉ, qui a attiré l'attention sur ce type si
1 Ces faits de volumineuse dilatation hypertrophique du coeur sont communs. A part les cas mentionnés dans les deux tableaux ci-joints, je pourrais en citer quatre nouveaux que j'ai pu suivre récemment. J'ai observé il y a quelques mois, dans mon service, un homme de soixante-dix ans que j'avais soigné il y a sept ans pour un oedème aigu du poumon et dont la. pression systolique était seulement, à ce moment-là, de 150 millimètres Hg. Après avoir présenté durant ces dernières années de la dyspnée d'effort et quelques manifestations pulmonaires oedémateuses, il rentra à l'hôpital, asystolique, et l'examen révéla une grosse dilatation hypertrophique avec très beau galop. Le pouls était régulier à 112 avec alternance bimanuelle, et la tension de 110105/55. Cette tension diastolique basse, très facile à fixer dans le cas particulier, montre bien qu'il peut n'exister chez de tels malades aucune
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CLINIQUE SPHYGMOMANOMETRIQUE
tendance à l'hypertension diastolique. La mort survint quelques jours après l'entrée et l'on trouva à l'autopsie une grosse dilatation cardiaque hypertrophique avec dégénérescence graisseuse très accentuée de la musculature du ventricule gauche.
Il est curieux de constater que, au cours de ces grosses cardiopathies non valvulaires, la formule tensionnelle se trouve incapable, à elle seule, de rendre .
FIG. 160. — Cardiopathies non valvulaires, de nature indéterminée, auec volumineuse dilatation hypertrophique du coeur et hypotension artérielle.
Tracé I. — Homme de 53 ans. Hypertrophie cardiaque, avec choc de la pointe dans le VIe espace, galop très net, alternance du pouls (enregistrée) et hypotension artérielle. Dyspnée d'effort ; ni oedèmes, ni albuminurie. Pas de syphilis. Mort subite en janvier 1914.
Tracé II. — Homme de 35 ans. Hypertrophie et dilatation cardiaque, avec crises asystofiques à répétition. Galop, pouls alternant (enregistré), hypotension artérielle. Pas d'albuminurie, pas de syphilis. Mort en juillet 1912.
Tracé III. — Homme de 62 ans. Hypertrophie et dilatation cardiaque, avec insuffisance cardiaque et crises asystoliques à répétition. Galop, alternance du pouls (enregistrée). Albuminurie. Pas de syphilis. Mort en juillet 1912.
Tracé IV. — Homme de 40 ans. Hypertrophie cardiaque, avec pointe
dans le VIe espace. Galop léger, avec alternance du pouls (enregistrée). Pas d'albuminurie. Pas de syphilis. Dyspnée d'effort, datant de quelques mois. Malade non suivi.
Trace V. — Homme de 46 ans Hypertrophie cardiaque, avec pointe dans le VIe espace. Souffle mitral fonctionnel, pas. de galop. Pas d'albuminurie; pas de syphilis. Dyspnée d'effort depuis un an, suivie d'état asystolique progressif. Malade non suivi.
Trace VI. — Homme de 39 ans. Dilatation hypertrophique du coeur, avec pointe dans le VIe espace. Galop très net. Dyspnée d'effort, avec quelques sensations angineuses. Pas d'albuminurie, pas de syphilis. Malade non suivi.
Tracé VII. — Homme de 53 ans. Hypertrophie cardiaque, avec pointe dans le VIe espace. Dyspnée d'effort depuis trois mois. Beau galop, hypotension artérielle, alternance post-extrasystolique (enregistrée). Pas d'albuminurie, pas de syphilis. Mort en juin 1919.
HYPOTENSION ARTERIELLE PERMANENTE
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curieux de cardiopathie, signale comme phénomène très commun
l'arythmie complète et insiste sur la fréquence de la mort subite, ou du moins « brusque, sans agonie », qu'il a observée 4 fois sur 4.
compte des troubles circulatoires, qui sont cependant de la dernière gravité. Des formules tensionnelles analogues à celles citées plus haut, 100/70, 90/60, avec un pouls autour de 100 ou 110, peuvent en effet tout aussi bien être notées chez des bacillaires fébricitants et cachectiques, avec pulsatilité artérielle un peu exagérée et sans trouble appréciable de la circulation.
FIG. 161. — Volumineuses dilatations hypertrophiques du coeur avec alternance et hypotension artérielle.'
Tracé I. - Homme de 62 ans. Dyspnée d'effort depuis cinq à six ans. Grosse dilatation hypertrophique du coeur avec pointe dans le VIe. espace, tachycardie régulière entre 110 et 120, très beau galop, alternance du pouls, hypotension artérielle. Pas d'albuminurie, pas d'oedème. Nombreux accès d'oedème pulmonaire aigu dans la dernière année, et mort dans un accès en mars 1915.
Tracé II. — Homme de 43 ans. Dyspnée d'effort installée à la suite d'un accès d'oedème pulmonaire survenu subitement en mars 1918. Volumineuse hypertrophie cardiaque, avec pointe du coeur dans
le VIe espace ; ni souffle, ni galop. Hypotension artérielle et alternance du pouls. Pas d'albuminurie, pas de syphilis. Aucune modification tensionnelle par l'administration de 2 milligrammes d'adrénaline par jour, pendant plusieurs jours.
454 CLINIQUE SPHYGMOMANOMÉTRIQUE
Je ne puis dire à quelles lésions correspondent de tels faits, n'ayant eu l'occasion de pratiquer des vérifications que dans quelques cas seulement. Je n'ai pas l'impression cependant qu'il s'agisse de grands hypertendus anciens en mai d'insuffisance ventriculaire gauche et d'involution tensionnelle, et cela pour deux raisons. Tout d'abord je n'ai pas observé chez ces malades de tendance manifeste au type d'hypertension diastolique, qui est d'ordinaire la signature de ces chutes de tension; la tension minima (souvent difficile à prendre dans ces cas) semblait correspondre à peu près à ce que l'oïr était en droit d'attendre d'après le taux de la pression systolique. Enfin je n'ai guère eu l'occasion de noter, dans les grandes-hypertensions correspondant à d'aussi gros coeurs, d'abaissement de la pression pouvant atteindre ces limites extrêmes 1. Tout me porter à croire qu'il s'agit le plus souvent de cardiopathies primitivement hypotensives attribuables, comme j'ai pu le constater dans quelques faits, à des lésions myocardiques prédominant sur le ventricule gauche (infarctus myocardiques par oblitérations coronariennes, myocardites chroniques intenses, dégénérescence graisseuse étendue). Nous verrons dans un instant les rapports étroits admis par JosuÉ entre ces cardiopathies hypotensives et l'insuffisance surrénale.
2° Pathogénie de l'hypotension artérielle permanente.
Déficience contractile du myocarde, adaptation du coeur à des besoins moindres, hypoplasie congénitale dans des cas exceptionnels : telles apparaissent les causes grossières de l'hypotension artérielle permanente. Comme pour l'hypertension, on s'est demandé dans ces dernières années si l'on ne devait pas rendre certains troubles humoraux responsables de cette involution circulatoire.
La théorie surrénale de l'hypotension est facile à défendre dans la maladie d'Addison, à cause des lésions accusées des capsules. On pourrai